Ed & Ollie ∞ Summer nights ∞ FINIT

Voilà, ça y est, j'y suis. Bowen en Australie. Tout s'est passé comme prévu, j'ai pu avoir un vol sans soucis. J'ai rendu mon appartement, fait mes valises et j'ai décollé. Il n'y a eu aucun problème durant le trajet, une fois arrivée, j'ai pris une taxi jusqu'à Bowen centre. Sauf que voilà, ça fait plus de sept fois que j'essais d'appeler Kendall et aucune fichue réponse ! Nada, niet, nothing, rien et je pourrais vous le dire en bien d'autre langues encore. C'est si compliqué de répondre au téléphone ? Je l'adore mais elle a vraiment le don de m'agacer quelques fois, vraiment. Résignée, je me trouve un chambre d'hôtel. Il est tard et je suis encombrée avec mes valises. Sauf que vous vous en doutez je n'ai strictement aucune envie de rester coincée dans une chambre d'hôtel alors que je suis dans une ville où tout est encore à découvrir. C'est en entrant dans la chambre qu'il me vient l'idée de sortir. L'intérieur est vraiment trop sordide, à dix milles lieux des palaces dans lesquels j'ai l'habitude d'aller. Je ne peux décemment rester dans ce trou toute la nuit. J'avais pris le parti de prendre le premier hôtel venu pour pouvoir poser mes affaires, mais j'ose à peine m'y doucher, la salle de bain est minuscule et poussiéreuse. Pourtant le vol a été long et j'ai besoin de me rafraichir. Me faisant violence, je marche à tâtons jusqu'à la cabine de douche. La pression d'eau est loin d'être optimale mais rien qui ne m'étonne. Le plus rapidement possible, je me prépare. Cette chambre commence sérieusement à me déprimer, on se croirait dans une chambre d'hôpital... Quand on a si peu de goût, on fait preuve de bon sens et on contacte un décorateur. Il semble pourtant que ce raisonnement est échappé au propriétaire.

Une fois fin prête, je me dirige le plus vite possible hors de ce trou à rat. Oui bon c'est vrai que c'est un peu intransigeant mais bon je dis ce que je pense. Bref, c'est bien beau d'être dehors, mais reste à savoir que faire de cette belle soirée. Un dernier coup d'oeil à mon téléphone me montre que Kendall est toujours aux abonnées absents. Bon, génial, il va me falloir un plan B. La plage semble l'idée la plus évidente et je n'ai pas envie de me prendre la tête à me renseigner sur les lieux en vogue alors je m'y rends. Marcher près de l'eau s'avère distrayant un moment bien qu'assez monotone. J'admet néanmoins que l'odeur ambiante et le son des vagues qui s'abattent sur la plage m'apaisent. Mon esprit divaguent sur les raisons de mon arrivée ici. Mon ennui, le goût amèrement banal qu'avait ma vie. Il manquait ce petit grain de folie qui m'était si chère. Cela dit question folie, je me suis rattrapée. Je pense que démissionner, déménager, prendre un vol pour un autre continent, tout ça en deux jours, montre que je n'ai pas la lumière à tous les étages. Je rigole encore de l'expression outrée qu'avait ma mère lorsque je lui ai annoncé en vidéo-conférence que je me barrais et tout ça parce que j'avais plus envie de me prendre la tête. J'ai cru qu'elle allait mourir, pile, là, devant mon écran. Elle a toujours voulue tout contrôler, me contrôler, c'est plutôt ironique sachant qu'elle ne peut s'empêcher de se retrouver une bite à la bouche. Ah ma mère cette nymphomane ! Elle a trompé chaque homme avec qui elle a été. Mais ça, c'est une autre histoire.

Décidant que j'avais bien assez laissé mes pensées divaguer pour la soirée, je me remets à marcher, trouvant sur ma route un petit bar tout ce qui a de plus charmant. En même temps tant qu'il y a de l'alcool moi ça me va. Toujours pas de réponse de Kendall au passage, celle-là je te jure, quand je la vois, je l'étrangle. Il ne reste que peu de place, je décide de m'assoir directement au bar. Au plus près de ce remède miraculeux contre l'ennui qui s'appelle le scotch. J'adore le whisky, je trouve que c'est le meilleur de tous les alcools. Oui bon j'apprécie une bonne bouteille de champagne, mais il faut être pragmatique. Pour atteindre un même degré d'alcoolémie, il faut boire plus de champagne, donc ça nous donne plus envie de pisser, CQFD. Oh vous pouvez rire, mais vu la queue interminable qu'il y a toujours aux toilettes des femmes, je préfère prendre mes précautions. C'est pour ça que je commence avec un whisky, double. Parce que la patience n'est pas une de mes grandes qualités. J'en suis à mon troisième verre et je me sens déjà un peu plus guillerette. Résignée à ne pas recevoir de coup de fil de Kendall, je cherche à me trouver une occupation. Le bar regroupe un tas de loser, des ados en rute, un groupe de femmes qui se croient bien plus belle que ce qu'elles sont et... un homme. Ma foi, il n'a pas l'air trop mal, brun, yeux bleu, l'air plutôt classe. Ça pourrait être pire. Pis ce n'est pas comme j'avais tellemeeeeent d'autres possibilités. Bordel j'allonge mes mots, je dois vraiment commencer à être bourrée. Tant mieux comme ça si demain je n'assume pas, j'aurais une excuse. Ça ne peut pas être pire que la fois où je me retrouvé avec ce... livreur de pizza à la peau grasse... Eww j'en frissonne encore. Décidée à m'amuser, je lance un sourire assez aguicheuse au gars pour qu'il me marque mais pas trop non plus, histoire de garder un minimum de décence quand même. Je détourne ensuite la tête, l'air indifférente. Ce n'est pas la première fois que je fais ce genre de chose, c'est comme une danse, et croyez-moi, j'en maîtrise chaque pas.  

À ma gauche j'entends le groupe de fillettes rigoler. Pour vous ce sont peut-être des femmes mais, pour moi des personnes qui ricanent de la sorte ne peuvent être que des enfants. J'en ai presque les oreilles qui saignent. Imaginez ma surprise quand je me rends compte qu'elles regardent dans ma direction. Je rêve où ces idiotes en fausses Prada se moqueraient de moi ? Pourtant entre elles et moi, tous le monde sait qui sont les plus pathétiques. Même les adolescents leur adressent des regards désolées. Je ne peux décemment pas rester sans rien faire. Pourtant je pense qu'aller à leur table serait une grand perte de temps, elles ne semblent pas avoir assez de caractère pour avoir du répondant et moi je me lasse vite des petites filles fragiles. Je me contente donc, avec mon grand sourire, de leur un magnifique doigt d'honneur. Sans surprise la bande de boutonneux éclate de rire et les fillettes s'offusquent. Et roulement de tambour... ne répliquent pas. Tiens me voilà choquée ! J'affiche désormais un sourire triomphant, j'avoue sortir de ce genre de situation une grande fierté. Savoir cerner les gens et leur réaction n'est pas donné à tous le monde. Je suis toujours dans mes pensées quand le serveur m'apporte un autre verre (youpi l'ancien était vide) en me montrant l'homme qui me l'a offert, vous savez celui-ci qui n'était pas trop mal ? Ce qui intéressant cela dit, c'est qu'il ne m'approche pas comme la plupart le ferait. Non... J'ai l'impression au sourire qu'il me lance, qu'il veut que je vienne à lui. Voilà qui est étrange, il ne quitte pas des yeux... Bien évidemment je ne dis pas être surprise par son regard, c'est normal qu'il m'admire, je suis fabuleuse. Je trouve simplement ça troublant qu'il soit si confiant. On dirait qu'il sait pertinemment comment la soirée va se finir, qu'il sait comment je vais réagir. Serait-il possible que je sois tombé sur joueur ? Ou bien simplement un homme extrêmement sûr de lui ? La soirée prend définitivement une tournure bien plus intéressante. Cet homme est un mystère. Et devinez quoi j'adore les mystères. Tiens, ça fait bien longtemps que je ne pas prise d'intérêt pour un homme. Bien qu'il soit passagé, il a le mérite d'être là.

Certaines personnes et par personne je veux surtout dire femmes auraient honte, ou seraient nerveuses à l'idée de rejoindre un homme à sa table. Pas moi. Encore moins maintenant qu'il m'a offert à boire, il faut bien que je le remercie comme il se doit. Le manque de confiance n'a jamais été un problème. De toute manière qu'est-ce qu'il pourrait se passer ? Soit on accroche, soit on accroche pas et on prend des chemins différents ? Je ne vois pas ce qu'il y a d'embarrassant à cela. J'attrape donc le verre qui m'a si gentiment été offert et le vide d'une traite avant de me lever. Je m'approche lentement, rien ne sert de montrer trop d'empressement. J'affiche une mine détachée une fois arrivé près de lui, comme si ce genre de situation m'arrivait constamment (ce qui n'est pas si éloigné de la vérité en fait je tiendrais à signaler). Doucement, je prends place à côté de lui. Il faut lui montrer que je prends les décisions, que je n'attends pas qu'il le fasse surtout. Ça a tendance à déstabilisé la plupart des hommes, j'espère qu'il ne se montrera pas si décevant.

-Si j'en crois le gentil barman là-bas, c'est vous que je dois remercier pour le verre.

Je lance la conversation. Le tout est de guetter ses réactions pour parvenir à le cerner. On peut déjà en apprendre beaucoup grâce à ses vêtements, son apparence en général. Il est soigné, ce qui signifie qu'il s'estime. Il est très bien habillé, vêtement de marque, classe, ce qui veut riche et distingué (enfin dans une certaine mesure du moins). Quand à sa façon de se tenir, cela m'apprend que c'est un homme de pouvoir ou qui du moins pèse dans la balance. Peut-être un chef d'entreprise ? J'ai toute les chances d'être tombé sur un joueur. Cependant, il y a plusieurs types de joueurs. Le lambda, souvent riche et confiant mais qui finit par se trahir. L'ambitieux, celui qui a quelque chose à y gagner. Et enfin, le pure joueur, celui qui fait ça pour le sport, qui le fait aussi naturellement que respirer et avec tous le monde, sans exception. Il me tarde de savoir quelle petite étiquette lui coller. Passons maintenant à la phase deux. Il faut lui montrer qu'on s'intéresse à lui, le laisser deviner du moins. Parler de moi ne servirait à rien, je passerais pour une égocentrique. S'il veut des informations sur moi, il les demandera. Ça peut paraître d'une logique implacable mais beaucoup se trompent ou commence la conversation par des banalités du genre "il fait beau ce soir". Autant vous dire que c'est barbant à en mourir. Reposant ma tête sur mes mains, l'air intéressée, je demande, désinvolte :

-Vous allez souvent dans les bars, offrir un verre à une femme seule ?

Sa réponse sera déterminante, il a bien des moyens d'éviter la question, de la retourner contre moi, de mentir ou bien simplement d'être honnête. Tant de possibilités qui m'en apprendront d'avantage sur sa manière de fonctionner. Pour ponctuer ma question, je hausse un sourcil, l'air légèrement provocatrice.     

Nous entrons dans la vif du sujet. Il était temps, c'est bien sympa les petits préliminaires (si on peut appeler ça comme ça) mais c'est tout de même plus intéressant lorsque la conversation est engagée. Il semble à l'aise quand il répond, pas une goutte de sueur ne perle sur son front, il ne se dandine pas sur sa chaise, sa voix est assuré et calme. Il contourne ma question, c'est sans doute la manière la plus logique de procéder. On ne risque rien et on peut voir comment la partie adversaire réagit. Oui je sais, j'aime les métaphores. Donc monsieur veut savoir si je le prends pour ce genre d'homme, hum, sans aucun doute. La question qui reste en suspens est : est-ce que j'ai intérêt à le lui dire ? Se montrer trop intransigeante ne servirait à rien. Autant dire, "t'es un connard mais je m'en fou, ça fait passer le temps". Ça coupe le glamour tout de suite. Et ça rend la conversation bien moins enivrante. Cela ne veut pas non plus dire que je dois rétorquer que non, jouer les naïves, ce n'est pas mon truc. Le tout est d'être à la fois assez éloigné de son vrai caractère mais assez proche également. C'est une notion contradictoire mais tellement vrai. Si l'on se montre trop sous son vrai visage, on s'expose, et si on le fait trop peu, on se trahira un jour ou l'autre. Ainsi donc quand il demande :

-Vous pensez que je suis ce genre de personne ?

Je lui réponds du tac au tac, avec un léger clin d'oeil :

-Je ne sais pas, n'est-ce pas tout l'intérêt de vous poser la question ?

Je prouve ainsi savoir pertinemment qu'il y l'a déjà fait et pas qu'une fois, et, montre que cela ne me dérange pas outre mesure. D'où le clin d'oeil. Le langage corporel est aussi important que les paroles dans ce genre de situation. Il montre votre état d'esprit, plus encore, il influence les réactions de votre partenaire de jeu. Je me redresse quelque peu, portant négligemment la main au dessus ma poitrine, là où se trouve mon petit médaillon pour le tripoter (vous avez compris le jeu de mot ?). Bien évidemment le but est d'attirer l'attention sur ma poitrine, je vous l'ai dit, les gestes sont important. Quand je reprends la parole, je me lève juste assez pour lui chuchoter près de l'oreille, d'une voix suave :

-Et puis si la femme est jolie, vous auriez tord de vous priver.

Je me replace sur ma chaise comme si ne rien était. J'ai officiellement marqué des points avec cette réplique. C'est moi qui mène la danse pour le moment. J'ai adopté la provocation, c'est directe et ça marche presque à tous les coups. Seuls les timides ont tendance à être mal à l'aise dans de ce genre de situation. Une chose est sûr, notre ami est loin d'être timide. Tout est donc pour le mieux. Notre petite conversation suit tranquillement son cours. Il se montre intéressé, me posant quelques questions et commençant par :

-Puis-je savoir le nom de la jeune femme à qui j'ai offert à boire ?

C'est vrai que nous ne connaissons pas nos noms. Ce n'est pas essentiel pour ce genre d'échange. Je ne compte plus le nombre de fois où je me suis retrouvé dans le lit d'un homme dont je ne connaissais ni le nom ni rien d'autre d'ailleurs. Hormis bien sûr que je les intéressais, mais ça, ça semble évident. J'hésite à répondre, non pas que ça me dérange de lui donner mon nom, mais c'est plus histoire de le titiller. Puis je trouve ça existant de ne pas connaître grand chose sur l'autre. Le nom n'est pas si important, mais quand on le connaît pas, ça apporte du mystère. Ainsi donc, je rétorque, un petit sourire au coin au bord des lèvres :

-Pour ce soir appelles-moi bébé, ça m'ira très bien.

Osé, je le concède, mais on est là pour s'amuser, non ? Et le moins qu'on le puisse dire, c'est que ça m'amuse beaucoup. Je suis obligé de me mordre la lèvre inférieur pour ne pas éclater de rire. Evidemment comme j'ai tus mon prénom, je ne peux décemment pas lui demander le sien, ce serait idiot et ça casserait tout. Pour autant je ne vais pas le rembarrer à chaque question, c'est pour ça que lorsqu'il me demande d'où je viens, je réponds honnêtement :

-J'ai beaucoup voyagé, mais disons que je suis New-Yorkaise dans l'âme, j'y suis née et y vécu un moment. C'est pour ça que je trouve Bowen et tout ce que renferme cette ville,je lui lance un regard appuyé, très intéressant.

Je lui lance un nouveau sourire. Tout est dans le sourire. Ce n'est pas tout ça, mais ce bar commence à m'ennuyer. L'ambiance a beau y être chill et causy, on s'en lasse vite. Enfin surtout moi, mon intérêt pour les choses (même pour les gens d'ailleurs) est souvent temporaire. C'est sans doute ce qui me donne envie de tenter tellement de nouvelles expériences. J'ai fait du saut en parachute il n'y a pas longtemps (vous ne vous attendiez pas à ça, hein?) et j'ai adoré. Prise d'une impulsion, je me lève et regardant les yeux le beau brun qui me fait face et demande :

-J'ai bien envie de faire un tour près de l'eau. Ça vous direz de m'accompagner ?

Ce n'est pas un mensonge, j'adore l'eau. C'est une des rares choses dont je ne me lasse pas. Et puis qui sait ? Peut-être irais-je faire un bain de minuit en charmante compagnie ce soir. Cela dit, je suis aussi capable d'y aller seule, j'en ai très envie d'un coup. Ça doit être l'alcool, je suis toujours prise d'envie soudaine quand je bois. Mais j'adore ! Je hausse un sourcil attendant la réponse de monsieur avec intérêt.

Tout semble sous contrôle pour le moment. Nous quittons le bar ensemble, lui allant jusqu'à mettre sa main dans mon dos pour me guider. Le groupe de petites pimbêches me lance en un regard noir quand nous passons près d'elle. Je ne peux retenir un sourire. Et toc, ce soir c'est moi qui m'amuse et vous qui rentrez chez vous pleurnicher sur votre solitude. Les femmes sont souvent mesquines entre elles et cela peut paraître insignifiant pour certains, mais remporter une bataille du quotidien comme celle-ci peut refaire la journée d'une femme. Entre ça et le fait que je sois en charmante compagnie, je dois avouer que je ne suis plus du tout exaspéré par le fait de ne pas pouvoir joindre Kendall. L'alcool à probablement aidé. Merde, j'aime l'alcool et j'aime le petit cul du gars avec qui je vais quitter ce bar. Comment je suis censé l'appeler déjà ? Louis, oui c'est ça. Il m'intrigue de plus en plus. Il entre dans mon jeu (qui ne le ferait pas ?) mais j'ai l'impression qu'il cache quelque chose. C'est sans doute sa maitrise de lui-même qui me donne cette sensation. La plupart des mecs seraient déjà entrain d'essayer de me prendre, juste là, devant le bar. Lui se montre intéressé de part ses paroles et ses gestes mais son regard reste froid. Comme les miens vous direz, mais moi c'est normal puisque je joue. Lui aussi est-il en train de jouer ? J'en ai bien l'impression. Le tout est de savoir ce qu'il fera quand il aura la main.

Nous arrivons rapidement à la plage, le sable fin n'atteint mes chaussures compensés. Contrairement au beau brun qui me fait face, je décide de les garder. Je n'aime pas marcher sur le sable à pied nu, souvent je me casse la figure, autant dire ça tue l'ambiance. De plus mes chaussures conviennent parfaitement, elles sont très esprit plage. Bref, finit de parler chaussures. Je suis en train d'admirer l'eau quand je l'entends s'adresser à moi :

-Que voulez faire ? Voulez-vous marcher le long de l'eau, l'écume de cette dernière venant s'écraser sur nos petons ou voulez-vous qu'on se pose tranquillement dans le sable ?

Très poétique, je lui concède. Pourtant il me laisse pas le temps de choisir. En effet, il s'allonge, reposant sa tête contre sa main surélevé par son coude, et m'intime de faire de même en tapotant le sable. Essaierait-il de prendre les rennes ? De plus en plus intéressant. Intriguée, je hausse les sourcils tout en lui souriant franchement.

-Je crois que vous avez décidé pour moi.

Je suis fixée, je reste sur le vouvoiement pour le moment. Je trouve ça plus mystérieux. Il est vraiment que je l'ai tutoyé quand je me suis surnommé bébé mais la provocation aurait perdu tout son piquant avec du vouvoiement. Je m'exécute donc, m'allongeant juste à côté de lui. Je décide de mettre une distance raisonnable entre nous (enfin raisonnable pour moi, je sais que beaucoup filles coincées que je connais trouverait ça indécent, mais elles sont barbantes). Tout ça pour dire que je ne suis pas collé à lui. Une bonne vingtaine de centimètre nous sépare. Contrairement à lui, je m'allonge complètement, regardant les étoiles. Je me fiche bien d'avoir du sable dans les cheveux, de toute manière, j'ai la ferme intention d'aller me baigner dans peu de temps. Admirative, je lance autant pour moi-même que pour lui :

-Le ciel étoilé, le bruit des vagues, l'odeur de l'eau iodée, je pourrais très vite m'y faire.

Je dois bien avouer que sur ce coup là, je suis totalement franche avec lui. Honnêtement, j'adore ce cadre, le fait qu'il fasse toujours bon le soir, l'eau, la plage. Tout en somme. Je pense réellement que j'ai fait le bon choix en démangeant ici. Je vais m'y plaire. Trêve de bavardage, je ne vais tout de même me mettre à avoir une vraie conversation avec lui. C'est ce pourquoi mon sourire enjôleur reprend le dessus bien vite et que je lui murmure à l'oreille pour la deuxième fois de la soirée.

-Je vais vous raconter un secret. Depuis toujours avec une amie, on se dit qu'on adorerait prendre un bain de minuit. Pourtant, on ne l'a jamais fait. Je compte bien remédier à ça. La question est : allez-vous me suivre ?

Ni une ni deux, comme je ne veux pas perdre mon effet dramatique, je me lève d'un bond et retire mes vêtements. Je me rends compte que ma lingerie est transparente. Oups ? Je dois avouer que je n'ai pas vraiment fait gaffe à ce que j'ai enfilé tout à l'heure. Tant pis, après tout, il aura quelque chose à regarder au moins. Et j'avoue que son regard sur moi n'est pas désagréable. J'aime qu'on me regarde. Mon troisième tatouage, celui près de la hanche gauche, juste au dessus de mes dessous, est visible. Une simple phrase, écrite en slave, la langue maternelle de ma mère. Je ne sais on ne me dirait pas de cette origine, mais les gênes de mon père ont primé sur ceux de la dragonne (oui c'est le surnom que je lui ai donné.)

Telle une petite ingénue, je vais jusqu'à l'eau en moon-walk, prenant bien soin à garder mon regard fixé à celui du ténébreux jeune homme en ma compagnie. Toujours le même sourire en coin aux lèvres, quand je sens l'eau gelée m'arrivait aux genoux, je me laisse tomber de tout mon poids. Ainsi je suis complètement trempée. La sensation de l'eau fraiche sur mon corps me rend hagarde quelques secondes mais je reprends vite mes esprits. Ça me fait toujours cet effet là quand je plonge d'un coup. L'impression que la fraicheur vous happe d'un coup, sans que vous ne puissiez rien faire. Ce n'est pas gênant pour autant, j'aime bien. Quelques secondes plus tard, je sors la tête de l'eau, telle une des actrices de cette vieille série sur des sauveteurs. Je suis une fille qui aime bien soignée ses effets. Un éclat de rire, joyeux au possible, traverse mes lèvres, juste avant de déclarer :

-Alors, Louis, je vous attends. Vous savez pourtant qu'on ne doit jamais faire patienter une dame.

N'est-ce pas Louis ? Je me demande bien comment va se passer la suite de la soirée... En tout cas moi, je l'ai fait, je suis à l'eau, en lingerie fine, en pleine nuit et j'adore ça. Putain c'est grisant. Ça fait bien longtemps qu'un de mes petits de jeu ne m'avait pas apporté autant de plaisir, sans doute peut-être parce que je ne me donnais plus à fond. Mais ce n'est pas le cas aujourd'hui, pour ce soir le beau brun à toute mon attention et j'espère réellement qu'il va faire monter les enchères. Parce que moi je n'attends que ça. Voir de quoi il est capable, le faire céder, gagner, c'est tout ce que je demande.

Je tournoie sur moi-même, l'eau fouettant ma poitrine, appréciant la fraicheur que ça me procure. J'ai toujours trop chaud quand je bois, les vagues qui m'éclaboussent à intervalles régulières s'avèrent être salvatrices. J'aurais vraiment du faire ça plus tôt, le ciel étoilé, la brise, l'eau, tout ça offre un cadre fantastique. On pourrait faire de très belles photos par ici à cet heure là. J'y retournerait sûrement avec Kendall et Nathan. Monsieur jouera le photographe et nous les mannequins comme toujours. À Durban on faisait ça de temps en temps, c'était sympa. Il me semble bien, même qu'une fois, on avait loué des éléphants pour se faire une séance shooting. À moins que ce soit des girafes, je ne me rappelle plus très bien, on était bourré et je n'ai jamais vu la couleur des photos. En tout cas on avait soudoyé le gars qui gérait le zoo. Tout le monde à un prix comme on dit. Ouuf je pars loin ce soir ! Nostalgie quand tu nous prends !

-Je le sais bien honey mais j'aime me faire désirer aussi. Ca ne fait pas de mal une fois de temps en temps.

Le son de sa voix me ramène à la réalité. Se faire désirer, hein ? Et bien il a intérêt à ne pas se faire désirer trop longtemps. Le jeu n'en voudrait pas la chandelle, il perdrait toute chance de jamais faire quelque chose avec moi ce soir. Oui, je ne suis pas des plus patientes, je dois bien l'avouer. Je suis soulagée de voir qu'il commence à se déshabiller néanmoins. En attendant qu'il rejoigne l'eau, je décide de nager un petit peu. En fait je ne nage pas vraiment, je me laisse plus emporter par le courant des vagues qu'autre chose. Mais j'aime bien, ça me réchauffe. Je plonge une dernière fois la tête sous l'eau. Quand je ressors et que ma vu n'est plus brouillé par le sel, je remarque que monsieur beau gosse n'a pas enlevé tous ses vêtements, il a gardé son bas. Je fronce les sourcils, j'ai connu plus aventureux tiens. Une pointe de déception me traverse. Alors comme ça on ne veut pas se mouiller ? Petite nature va. J'ouvre la bouche pour le taquiner mais il parle avant moi :

-Qu'attendez-vous de moi maintenant?

Qu'est-ce que j'attends de lui ? La question est étrange, je ne sais pas trop quoi répondre. Est-ce que j'attends quelque chose de lui ? Cela signifiait que c'est moi qui est le pouvoir. Est-ce que c'est qu'il veut ? Est-ce que c'est ce que lui attend ? Ou est-ce plutôt un moyen de me faire prendre les décisions ? De gagner la bataille ? Plus je dialogue avec lui, plus il me laisse perplexe, c'est très déstabilisant. Je pourrais rester là, dubitative, mais j'aime trop avoir le dernier mot pour ça. Il veut savoir ce que j'attends de lui. Et bien il ne veut pas être déçue. Je me rapproche de lui en nageant, je le rejoins en moins de trois brassés. Je n'étais pas si éloigné du bord. Je me relève, comme lui, l'eau m'arrive un peu près en haut des mollets. Je lui souris.

-Ce que j'attends hein ?

Oui, vous le reconnaissez ce sourire en coin caractéristique, signe que je vais faire une bêtise. Depuis que je suis enfant, ce petit rictus habille mes lèvres à chaque fois que je m'apprête à jouer à la plus maligne. Je me rappelle même qu'à chaque fois qu'elle le voyait, mon amie Kendall éclatait de rire, sachant pertinemment que quelqu'un allait en baver. Ainsi donc ma petite manigance ne tarde pas à arriver. Je l'éclabousse complètement, j'avais appris une technique avec un ex petit-ami (en quelque sorte). Elle consistait à se tenir à moitié allongé, prenant appuie sur ses mains et lançant d'énorme coups de pieds dans les vagues. Sans surprise monsieur-je-reste-classe-en-toute-circonstance se retrouve trempé, son bas de costume également. J'éclate de rire et conclus :

-J'attends simplement que vous vous mouilliez. Je crois que c'est chose faite.

Et bim, tu ne t'attendez pas à ça ! Je sais c'est plutôt puéril, mais il n'allait tout de même pas rester près de la plage tout le temps, comme ça, n'est-ce pas ? J'ai seulement d'accélérer un peu les choses. Et puis, il a tenté de me provoquer avec son "qu'est-ce j'attends", s'il croit pouvoir gagner, il se trompe. Je trouve toujours un moyen d'avoir le dernier mot, quoi qu'il en coûte. Même si ça a pour conséquence de tremper un jeune homme et son beau costume. Je me remets à nager en planche sur le dos cette fois, juste pour aller un peu plus loin, là où je n'ai plus pied.

-Maintenant que vous êtes trempé, vous pouvez venir me rejoindre.

Je nage sur place, tout en le fixant. Il est temps d'accélérer un peu le jeu. Il a voulu me faire dire que je le voulais lui, c'est bien de ça qu'il était question, je ne suis pas bête. Pourtant j'ai trouvé un moyen de contourner sa question. Et je le ferais toujours. Mais maintenant, il est temps de voir ce qu'il veut vraiment.

-J'avoue que vous avez poser une question intéressante. C'est pourquoi je vous la retourne, qu'est-ce que vous, vous attendez de moi ?

L'expression sur mon visage est grave. Je ne suis on ne peut plus sérieuse. Je veux savoir ce qu'il veut et je veux le savoir maintenant. C'est qu'il commence à me titiller avec ces provocations. Je commence doucement à comprendre qu'il est juste comme moi. Rien ne sert de jouer avec quelqu'un de même niveau que soit, on finirait toujours à égalité. Cette pensée me frappe soudain. Serait-il possible que j'ai trouvé mon égale ?

Je hausse un sourcil à sa réplique :

-Je veux juste apprendre à vous connaître.

Je me demande depuis quand apprendre à me connaître fait parti du planning de la soirée. C'est vrai quoi, c'est plutôt inhabituel comme remarque et je ne peux m'empêcher de penser que ça cache quelque chose. Il avait l'air sincère, c'est ça qui m'a fait douter quelques secondes, mais quand même, c'est étrange. Certains disent que je suis parano mais il s'avère que j'ai souvent raison. On est bien d'accord qu'on s'est engagé dans un plan du genre jeux de séduction avec option sexe en prime. Alors bon, je ne vois où il y aurait de la place pour faire connaissance. Entre deux gémissements peut-être ? Laissez-moi rire, il est comme n'importe quel mec, c'est sa bite qui parle à sa place, excusez-moi du terme mesdames et messieurs les prudes. Et dire que beaucoup de femme tomberait dans le panneau. Moi ? Ça a plus tendance à m'amuser en fait. Quand on connaît les rouages de la séductions, c'est plutôt drôle de s'apercevoir de chaque coups de son partenaire. Ou alors (oui je viens juste d'y penser) c'est un sous-entendu pour dire qu'il veut me connaître sur le plan intime, donc en gros fourrer son paquet là où je pense. Dans ce cas ce serait un peu moins salaud et un peu plus couillu. Voilà encore qu'il me fait réfléchir. Ouais je dois bien admettre qu'il doué, un minimum.

Avant que je n'aille plus profondément dans l'eau, il m'avait rejointe. M'éloigner est donc une certaine façon de lui dire, je ne suis pas si débile que ça, tu ne m'auras pas si facilement. Je ne peux être sûr qu'il ment c'est ce pourquoi je ne dis rien. Mais nager un peu plus loin, mettre de la distance entre nous, c'est lui montrer que je ne suis pas tombé sous son charme. Les belles paroles ça ne m'a jamais plut et ce n'est pas prêt de m'avoir. Le pire ce sont ceux qui sont sincère, qui sont sérieusement romantique. Un jour , à un premier "rendez-vous", on m'a offert des fleurs. Je me suis barrée en jetant les fleurs par terre. Ce n'était certes pas très polie, mais je n'avais rien à foutre avec un gars comme ça. Moi j'avais compris rendez-vous coquin et lui il avait compris apprenons à nous connaître, marrions nous, ayons des gosses et un break garé dans l'allée. L'enfer personnel d'Ollie Bishop putain ! Ce serait ce qui serait marqué sur le paillasson de notre maison de banlieue. Bref tout ça pour dire que je ne suis ni romantique ni naïve. Pour autant, je n'ai pas l'intention de laisser tomber. Si je suis venu ici, c'est parce que j'ai l'intention de prendre mon pied ce soir et ce n'est pas parce que monsieur se croit plus malin que je vais laisser tomber. Bon okay, j'admet qu'il est presque aussi malin que moi. J'ai dit presque. Pis de toute façon je suis juste trop titillée pour partir comme ça. J'ai honte de l'avouer mais ce petit jeu de manipulation a pour effet d'exacerber une excitation malsaine chez moi. Combinez à ça le fait que le gars soit, soyez honnête, carrément sexy, je ne peux que être émoustillée. Bien que je nierais si on me le demande, alors chuuuuut.

-Darling,come close to me. I need to fell you against me.

Ding, ding, là je sens de la sincérité. Je dirais mieux il porte ses couilles et j'aime ça. La franchise est l'une des choses que je respecte le plus au monde. Je prends ça comme une invitation. Et quand je suis invité, je ne me gêne pas. Certes je suis une femme mais je ne vois aucun problème à me montrer entreprenante. Cela dit, il faut que j'y suis invité. Et je l'ai été. Quel a été le mot magique ? Besoin, le j'ai besoin a été très révélateur et pour moi j'ai gagné. Il vient tout juste d'admettre qu'il me voulait. Je n'attendais que ça. Je trouve ça plutôt comique d'ailleurs. J'ai gagné pourtant ce n'est pas une victoire habituelle, on s'est manipulé l'un l'autre d'une certaine manière. Alors ce serait une sorte de victoire partagée. À 65% pour moi et 35% pour lui dira-t-on. Oui j'ai quand même obtenu qu'il avoue avoir besoin de me sentir près de lui, faut pas déconner ! J'ai eu ce que j'attendais maintenant je n'ai strictement plus rien qui me retient de coucher avec lui.

Je me rapproche alors comme il me l'a demandé. Je suis si près de lui maintenant que je sens son souffle me chatouiller le visage. Un regard amusé ancré sur mon visage, je constate l'effet que j'ai sur lui. Ça fait toujours plaisir de voir un homme intéressé. C'est avec un sourire lascif que je pose délicatement une main sur son torse et une autre sa nuque. La main qui résidait sur son le haut son torse, se balade maintenant de plus en plus bas avec une lenteur calculé. Sentir sa peau contre la mienne enflamme la moindre de mes terminaisons nerveuses. Grisée par les sensations que ce petit jeu me procure, je resserre ma prise sur sa nuque. Tout mon corps est maintenant pressé contre le sien. Je sens la moindre parcelle de son être et le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est agréable. Je tuerais pour le sentir en moi à cet instant. Ne brûlons pas les étapes, laissons la tension monter. Quand je rapproche mon visage du sien, me pressant plus encore contre son corps tendu, je pourrais jurer qu'il sent la pointe de mes mamelons durcis contre son torse. Seuls quelques centimètre séparent nos deux bouches, je ne peux m'empêcher de regarder la sienne, si charnue. Pourtant je me fais violence pour plonger son regard dans le mien, dans une ultime provocation, je lui murmure :

-Je pense avoir montré mes intentions clairement. Aurez-vous le courage de prendre vos postions... de prendre ce que vous voulez... ici et maintenant ?

Certes pour moi, j'ai déjà gagné, mais ça ne peut pas faire de mal de rajouter un peu panache à cette victoire. Rien n'est trop bien pour moi. Et malgré le désir presque douloureux qui m'envahit, je me force à continuer de le fixer, droit dans les yeux, ne pouvant tout de même m'empêcher d'augmenter encore la pression sur son corps musclé.

Ce fut si rapide que je ne peux vraiment le décrire. Nous sommes déjà éloignés l'un de l'autre. C'était intéressant, faire l'amour dans l'eau avait toujours été l'un de mes fantasmes. Mais je dois bien avouer que c'était plus attrayant dans mes rêves. J'ai même avalé la tasse, sans parler de l'eau qui m'éclaboussait et m'irritait les yeux. Bref, conclusion, quelquefois il vaut mieux rêver. Satisfaite néanmoins d'être arrivée à mes fins, d'avoir remporté ce challenge personnel, il me faut décider maintenant quoi faire. Je ne suis pas du genre à rester pour des câlins. Pourtant, partir d'une chambre sans un mot me semble plus facile que sortir de l'eau, pour ensuite me rhabiller, galéjer à marcher dans le sable jusqu'à la berge tout cela en gardant le silence... Il faut forcément que je dise quelque chose, mais quoi ? "C'était cool, à plus" ? Ça me paraît assez froid, même à moi. Je ne peux pas non plus lui sortir des conneries alors qu'il saura pertinemment que je n'en penserai pas un mot.

J'opte pour une solution intermédiaire. Je me rapproche de la plage, doucement, sans pression. Arrivée près de mes vêtements, je les enfile et déclare :

-C'était vraiment intéressant comme expérience. Je n'avais jamais fait ça dans l'eau. Ravie qu'on est pu se tenir compagnie pour la soirée en tout cas. J'espère qu'on se recroisera.

J'avais gagné, j'avais obtenu ce que je voulais, je n'ai plus aucune raison de rester là. Je n'ai jamais prétendu désirer plus que cette soirée. Il a dû s'en rendre compte. Jettent un coup d'oeil à mon téléphone, je vois qu'il affiche cinq heures du matin, le petit voyant bleu me montre aussi des appels en absence. Il faut vraiment que j'y aille. Ne serais-ce que pour me reposer un peu. Je n'ai pas dormi depuis que je suis arrivée à Bowen, ça commence à faire long. Je quitte alors la plage sans un mot de plus.