Move your body PV Rafaël

Le trac, cette petite chose qui parcoure tout mon corps et ce à chaque fois que je dois danser devant du monde. On pourrait croire qu’après toutes mes années de pratique je n'ai plus peur, mais c'est faux. Ce n'est pas un manque de confiance en moi qui me fait me sentir toujours un peu mal avant de monter sur scène, j'ai juste peur de décevoir mon public; De toute façon, demandez à n'importe qu'elle danseuse si elle aussi elle est dans le même cas et ce même avec 10, 20, 30 ans d'expérience, elle vous répondra certainement que oui, cette sensation bizarre l'envahit toujours. Ce soir, je ne donnais pas cours comme habituellement. Je n'aurais pas à remonter les bretelles de ces petites ados de 16 ans qui ne donnent pas tout ce qu'elles ont pour réussir un pas. Non ce soir c'est moi qui avait la pression, si je venais à louper ma performance, que j'avais répétait durant toute la semaine jours et nuits, et encore toute cette après-midi. Etant perfectionniste et détestant l'échec, je voulais que tout soit parfait et ce jusqu'au bout des orteils.

Lorsqu'enfin je franchis la porte de mon studio pour rejoindre le cabaret où j'effectuerais mon petit numéro, à l'occasion d'un spectacle où je m'étais inscrite, je flippais de plus en plus et ce pour plusieurs raisons: je ne connaissais ni le lieu ni la clientèle et donc mon public, et c'était également la première fois qu'on me verrait danser dans un lieu public dans cette ville que je découvrais encore. Heureusement pour moi, Rafaël avait accepté mon invitation de venir me voir, un visage familier me serait d'un grand soutien ce soir. Arrivée devant la porte, j'inspirais un grand coup comme si je me jetais dans la fosse aux lions, comme si je ne ressortirais pas vivante d'ici. Je devais me ressaisir quand même, j'avais connu pire dans ma vie quand même, et c'est pas une danse devant des centaines de personnes qui allait me tuer, enfin j'espérais que je ne meurs pas sur scène, même si ça fera une belle fin et une belle mort! En entrant à l'intérieur, une bouffée de chaleur m'envahit et j'inspectai l'endroit des yeux. Ne voyant aucun Rafaël à l'horizon, je me posta au coin bar demandant un verre d'eau à passage pour me détendre. Le barman a d'ailleurs fait une tête bizarre quand je lui avais commandé cela! Je pense que mon ami serait me retrouver là où je m'étais posé mais je lui envoyais quand même un message pour qu'il ne se perde pas dans la foule.

Jamais je n'avais été aussi crispée de ma vie si ce n'est durant mes examens. Pourtant je n'avais pas de quoi m'inquiéter, si je n'étais pas bonne danseuse, je n'aurais jamais eu mon diplôme. Enfin je crois... Ca ne m'arrivait guère de douter autant que ca, et plus le minutes passés plus j'avais chaud à vrai dire. Je posai mes mains sur mes joues en feu et avalai d'une traite mon verre d'eau fraîche. Mon verre vide devant moi, je commandais cette fois-ci un coca. J'avais tendance à beaucoup boire quand le stress m'envahissait, alors autant éviter l'alcool parce que la c'est certain que ma performance serait catastrophique. J'attendais impatiemment Rafaël, je savais qu'il me donnerait le courage nécessaire pour ne plus avoir le trac et me déstresser. Il était un peu mon doudou, il me faisait un bien fou et c'est l'une des personnes dont je suis le plus proche depuis mon arrivée. Comme quoi pas besoin de se connaitre depuis longtemps pour s'apprécier.

Finalement le jeune homme ne tarda pas à pointer le bout de son nez, rien que sa présence et son sourire me détendit quelque peu. Son petit calin pour me saluer me fit plaisir, je sais pas s'il savait que ca me fit du bien mais c'était bien le cas. J'étais vraiment contente qu'il est pu venu ce soir, il m'aiderait et puis en retour je lui montrai ma passion, ce pourquoi je vivais et que j'avais eu la force de me battre pour me tirer de ma misérable vie. « T'as vu qu'il y a déjà du monde dehors? Je suis un VIP c'est ça? » Du monde, il voulait me faire flipper encore plus ou quoi? Mais la dernière partie de sa phrase me fit bien rire. Je bus une gorgée de coca avant de lui adresser un petit clin d'oeil. " Ben bien sûr t'es un privilégié, regarde t'as le droit de parler à la star de la soirée grâce à ton pass VIP que j'ai bien voulu t'offrir. Je suis généreuse hein. " Non, non je ne me lance pas des fleurs, c'est juste le stress qui fait ressortir mon humour pourri. Je remis l'une de mes mèches rebelles derrière mon oreille. " En tout cas, ça me fait plaisir que tu es pu venir ce soir. Tu me seras d'une aide très utile, j'en suis certaine." Rafaël était la première personne à qui j'avais pensé pour me soutenir. Sa présence me rassurait, je me sentais en sécurité comme le temps où mon grand frère partageait encore ma vie. J'avais encore quelques minutes devant moi pour lui parler un peu avant de me préparer et monter sur scène, le temps de me décontracter quoi. Ce soir Rafaël serait ma boule anti stress, espérons qu'il survive à cette expérience quand même!

Ca faisait un sacré bon bout de temps que je m'étais pas produit en public. Ca remontait du temps où j'étais encore dans les sales quartiers d'Harlem à NYC, dans un des bars où j'officiais en temps normal comme serveuse mais j'offrais parfois un petit spectacle au public surtout masculin. Je chassai d'un coup de tête ces mauvaises images du temps où ma vie ressemblait plus à un enfer et où seul la danse me permettait de m'épanouir. Ce temps là était fini, j'étais en Australie, maintenant, sous le soleil, avec un job, un appartement à moi toute seule que je pouvais me payer et des amis sur qui je pouvais compter. En seulement un an je m'étais construit un cercle d'amis que j'appréciais beaucoup, ma sociabilité y était pour beaucoup. Changer d'air, d'environnement, m'avait permit de faire d'agréables rencontres, notamment cette personne qui avait bien voulu se déplacer pour moi ce soir. Rafaël était un garçon au grand coeur, passionné lui aussi par son boulot, toujours là, et sa présence ce soir le prouvait une fois de plus. Son sourire qui s'affichait sur son visage, me combla, j'aimais voir les gens heureux et notamment mes proches. Une petite bise sur la joue, et mon stress diminuait déjà. " Je t'en prie, ça me fait plaisir! Tu vas tous nous épater j'en suis sûr! " Il avait le don de me donner du courage, c'est pas croyable ça, toujours le bon mot, la bonne phrase pour me détendre, me donner le sourire. C'est l'effet Rafaël que voulez-vous! Ca marchait toujours sur moi." On verra bien à la fin, si ca a plu ou non. " Je priais pour pas qu'on me jette des tomates à la figure même si cette possibilité avait peu de chance d'avoir lieu, avouons le! L'heure approchait et aucun retour en arrière n'était envisageable et puis j'allais pas me dégonfler après tant d'heures de travail. Ce serait du gâchis. J'étais une tigresse, je pouvais tout dégommer ce soir, au plus profond de moi je le savais. " J'serais près de la scène pour te soutenir! " J'esquissais un léger sourire du bout des lèvres. Finissant mon coca d'une traite avant de décoiffer mon camarade, la chose était trop tentante. Finalement je me levais d'un bond de mon tabouret et avant de m'éloigner j'esquissais un signe de la main lui faisant comprendre que je gardais un oeil sur lui. " Dragues pas trop les minettes, je t'ai à l'oeil en plus j'ai une bonne vue de la scène. " Je me dirigeais vers la sono pour donner, au DJ de la soirée, mon CD indispensable pour mon numéro de ce soir. Et avant de monter les quelques marches amenant sur scène et que la pièce soit plongé dans le noir, j'enlevais ma veste. J'étais à présent seul sur scène, un faisceau lumineux rouge dirigeait sur mon corps raide comme une statue. L'heure de vérité avait sonné.

Ca vous ai déjà arrivé de vous sentir voler tellement votre bonheur est immense à ce moment; Vous vous sentez pousser des ailes juste parce que un sentiment de bien être à envahi votre corps tout entier? C'est exactement ce genre de sentiment qui me traverser quand je me retrouver sur le devant de la scène à danser juste pour le plaisir. Un sentiment que je n'avais pas vécu depuis longtemps, bien trop à mon goût et c'est cela qui m'avait poussé à faire ce petit numéro ce soir. Retrouver cette sensation, et croquer la vie à pleine dents. Après tout c'est pour ça que j'avais décidé de venir en Australie, il y a un an de cela, pour pouvoir enfin vivre pleinement la vie simple dont je rêvais depuis toute petite, depuis que j'avais dansé pour la première fois. Le faisceau lumineux mettant en avant la tenue spéciale que j'avais revêtu pour l'occasion. Un pantalon en cuir noir qui épousait parfaitement les courbes de mon corps et une brassière de couleur orange pétant dévoilant ainsi la moitié du haut de mon corps. Je n'avais aucun complexe à vêtir ce genre de tenue, et puis fallait bien attirer tous les publics. Les filles adorent regarder des numéros de danse mais les garçons eux préfèrent reluquer, y'a pas de doutes là dessus, donc autant faire plaisir à tout le monde.

Je sentais mon coeur s'accélérait dans ma poitrine, et fermant les yeux je me concentrai sur cette douce symphonie qui ne tarderait pas à être interrompue dans quelques secondes par une musique plus audible. Un instant je les rouvris, mon regard croisa directement celui de Rafaël, toujours là, toujours présent comme toujours. Qu'est ce que je ferais sans lui? Franchement, j'étais une jeune femme forte mais bon je restai une fille après tout avec ce besoin affectif dont je manquais cruellement ces dernières années. Rafaël avait réussi à combler peu à peu ce vide en m'apportant le soutien dont j'avais parfois besoin, comme aujourd'hui. Finalement après ce qui m'avait semblait une éternité, les premières notes de musique s’élevèrent dans la salle. L'adrénaline pris possession de mon corps dans ces moindres parcelles. Durant l'intro, je restai statique, ouvrant les paupières lentement avant de vraiment commencer la partie intéressante, à savoir la chorégraphie en elle même. Un mélange de mouvements de bras et jambes, le tout ponctué en rythme de cette musique hip hop et sans oublier un sourire immense qui recouvrait mon visage entier. Malgré la douleur qui était parfois présente, je ne pouvais m'empêcher de partager ma joie de danser. Dans ces moments j'oubliais tout mais j'imaginais ma mère qui me regardait de là haut, mon ange. J'espérais qu'elle soit fière de moi, comme Rafaël, je voulais pas le décevoir en ratant quoique ce soit dans ma chorégraphie. Je me concentrai, espérant que le faux pas ne viendrai jamais.

Mes pas suivaient le rythme de la musique qui s'intensifiait de plus plus. Une pleine charge d'adrénaline me poussait à me surpasser et je me sentais tout simplement vivante. La danse était le remède à tous mes maux, cela m'avait permis d'accepter la mort de ma mère, l'alcoolisme de mon père, la trahison de mon frère, la misère dans laquelle j'avais vécu de longues années. Toutes ces embûches auraient pu me changer dans le mauvais sens mais non j'avais traversé tout cela en dansant tout simplement, pour extérioriser la peine. Mais maintenant je dansais surtout pour le plaisir, pour moi et mon bonheur, rien d'autre. Mes mouvements partaient dans tous les sens, ma longue chevelure volaient sans arrêt dans les airs, d'un mouvement fluide, ça donnait un petit effet à vrai dire. Pendant de longues secondes, je n'avais pas osé regardé mon ami de peur qu'il soit déçu et que je lise cette émotion négative sur son visage mais rapidement j'osai un coup d'oeil vers lui, le dos contre le mur. Pas de grimaces, ni de froncements de sourcils, me voilà soulagée. Mais alors que j'effectuai une partie à terre, soudain ce fut le trou noir, perte de mémoire, je me souvenais plus des prochains enchaînements. J'allais devoir improviser et vite, donc nul question de paniquer. Tel un signe du destin, j'avais dans ma vue mon cher Rafaël, une idée saugrenue me traversa l'esprit. Je sais pas si le jeune homme allait apprécier mais tant pis qui ne tente rien n'a rien, et puis c'était mon dernier recours pour sauver ma dignité et ma réputation de danseuse. Me relevant du sol, j'allai à l'autre bout de la scène, m'accroupissant pour atteindre le bras de Rafaël et l'attraper, déposant sur mon visage un air de chien battu "S'il te plaît." N'attendant même pas sa réponse, je l'attirai jusqu'au rebord de la scène, priant pour qu'il accepte de grimper les quelques marches et ainsi me rejoindre. J'entendais déjà le public criait en regardant dans la direction de mon ami. Il ne pouvait clairement pas refuser, le public lui même demander à le voir sur le devant de la scène. Il pouvait pas me laisser toute seule, telle une enfant perdu, ça m'étonnerait tellement de sa part qui plus est.