that's when something wild calls you home (tiffany)

Première journée de repos de sa semaine de son boulot qu'il n'appréciait pas particulièrement, ça ne bougeait pas assez, ça ne ressemblait pas assez à ce qu'il faisait. Mais il ne referait plus jamais quelque chose de similaire de toute manière, sauf s'il s'engageait dans l'ordre comme flic ou peut-être garde du corps. Mais ce n'est pas à Bowen qu'il pourrait exercer ce dernier et c'était ça qui dérangeait, il comptait s'enraciner dans cette ville lui qui avait toujours changé de pays et de ville. Maintenant le seul paysage qu'il verrait pendant des années était celui d'une ville plutôt calme, de sable, soleil et d'une grosse mangue cachée entre les feuillages, mais qui semblait faire la fierté de cette ville. La seule chose qu'il trouvait positif dans cette ville était que sa famille était installée depuis des années, ce n'est pas comme si il débarquait seul. Et il avait même un gros doute sur le fait qu'il serait revenu ici s'ils n'étaient pas là d'ailleurs. Des villes, il en avait vu pleins qui faisaient plus rêver. Il était assit dans une pièce, attendant patiemment son tour en restant fixer une personne qui lui avait arraché des mains son bouquin. Il voulait bien se montrer comme une personne gênante de temps à autre, mais de toute façon, il n'était pas là pour ça. Lui ce qu'il l'intéressait c'était voir sa sœur, pas aller se faire blanchir les dents ou s'en faire soigner. Ce lieu, c'était le seul endroit où il était certain de la trouver et même s'il l'embêtait, il s'en fichait pas mal. Quand venait son tour, il se levait grand sourire au visage entrant dans la pièce où se trouvait Tiffany. « Salut l’arracheuse de dent ! » Il partait s’installer rapidement sur le siège. « Oh, t’approche pas de ma bouche, ma dentition est parfaite. Considère ça comme … une petite pause forcée. » Une perte de temps, des clients qu’elle aurait pu avoir en plus mais Jaeden faisait chier.

Plus qu’une journée et tu serais en week-end. Un super week-end en perpective puisque tu avais prévue d’aller faire de la voile, il fallait juste que ta journée se termine et tu pourrais filer loin de Bowen l’espace de trois jours. La moitié de la matinée était passée en un clin d’oeil, dans pas longtemps tu aurais le temps d’aller luncher et après ça tu aurais encore une demie-journée de boulot. Mais pour l’instant, pas le moment de tergiverser. Un nouveau patient t’attendait. Un prénom inconnu, faut croire que le bouche à oreille fonctionnait bien, ou alors tu devais être la seule dentiste présente aujourd’hui. Tu avais une patientèle assez fidèle et tu avais rarement de nouveau patient alors à chaque fois que c’était le cas, ça te rendait joyeuse. Tu poussais la porte de ton cabinet pour le rejoindre mais ce n’était pas du tout ce que tu attendais. Ce n’était pas un nouveau patient, bien au contraire. Enfin techniquement si, mais pas pour cette fois. C’était ton frère – demi-frère si tu voulais être exacte mais tu l’avais toujours vu comme ton frère. « Jaeden ! » Tu laissais un sourire s’afficher sur ton visage en le voyant installé sur la chaise. Avant même que tu ne refermes la porte, il te prévient de le laisser tranquille, n’étant pas là pour se faire une beauté, au contraire, il te proposait même te prendre ce temps comme une petite pause. Ce n’était pas de refus, tu n’avais pas arrêté une seule seconde depuis que tu avais commencé ta journée, même si juste après lui, tu aurais encore un patient avant le déjeuner. C’était une perte de temps et dans tout ça, tu ne le ferais même pas payer la consultation. « Tu aurais pu apporter une collation ! » râlais-tu doucement avant de t’asseoir sur le siège juste à côté de lui. Au fond, ça t’était bien égal mais tu avais toujours quelque chose à redire. Éternelle insatisfaite que tu étais. « Comment tu vas ? » demandais-tu doucement, s’il était là, c’était pas juste pour dire bonjour, pour ça, il pouvait passer chez toi.

Parfois les surprises rendaient les choses plus plaisantes que si tout était tracé. Si celle-ci n’était pas grandiose, il n’espérait pas vraiment surprendre Tiffany, peut-être la faire plaisir l’instant de quelques secondes, mais ça passerait. Il ne pouvait pas prévoir la réaction que celle-ci allait avoir. Il patientait à sa place depuis quelques minutes, puis quand venu son tour, il ne perdait pas de temps pour rejoindre son cabinet, l’endroit où elle soignait la dentition de ses patients. Il la salua, étirant un large sourire sur son visage, il aimait bien la voir, sa famille était ce qu’il avait de plus important et même si pendant quelques années, leurs dialogues se résumaient qu’à ses messages, maintenant qu’il pouvait la voir en personne, il n’allait pas rester la tête rivée sur un écran, bien qu’il ne passerait pas ses journées à ses côtés, parce qu’ils avaient tous les deux unes vies. Se calant au fond de sa chaise, il se mit à regarder tous les détails autour de lui, tout ce qui faisait le métier de sa sœur dont il ne comprenait pas une traite chose. Il finissait par s’attarder sur sa sœur, parce qu’il n’était pas là pour se faire triturer les dents, il s’en fichait bien de ce qu’il y avait autour. « Ah … Il va falloir se contenter de moi pour cette fois ! » Jaeden passait une main dans sa poche, sortant un paquet de chewing-gum mentholé, il détestait ça, mais il en avait sur lui au cas où il fumait avant de retrouver ses enfants, il ne voudrait pas empester la clope, bien que ça restait plus sur les vêtements que dans l’haleine. « J’ai ça si tu veux, mais ça doit être banni dans les codes alimentaires des dentistes. » C’est vrai que quitte à passer son temps à traîner dans la ville avant de venir ici, il aurait pu aller lui prendre un truc, mais ça lui sortait de la tête, il n’avait plus vraiment l’habitude d’être galant. « La prochaine fois, princesse Tiffany sera servie. » Il lui lançait un clin d’œil avant d’écouter sa question. « Pas mal, j’ai un peu mal au dos, dommage que tu ne sois pas kiné, mais de toute façon, ça passera tout seul. Et toi !? »

Il était venu les mains vides et tu avais simplement haussé les épaules. Ce n’était pas comme si tu étais à l’agonie et ta pause déjeuner n’allait pas tarder. Au contraire, tu étais bien, surtout assise dans ta chaise à ne rien faire si ce n’est attendre que sa petite demie-heure passe avant d’aller chercher le prochain patient. Il y avait sûrement pire comme moment. « Je suis ravie de te voir dans ce cas ! » Tu affichais un grand sourire sur le visage. De toute façon tu étais assez lisible, un vrai livre ouvert, quand tu étais fâchée tu le montrais, quand tu étais triste aussi et pareil quand tu étais heureuse. Tu ne cherchais jamais à cacher tes émotions, de toute façon tu étais plus souvent contente ou en colère que triste. Le seul contre qui tu luttais pour cacher tout ça, c’était bien Woody, de réelles efforts pour lui démontrer ta haine profonde. Même si tes sentiments à son égard commençaient à prendre une autre tournure. Un saut dans l’inconnu qui te faisait parfois peur, heureusement que tu étais rarement confrontée à lui. « Le « cache » mauvaise haleine par excellence mais bourrés de sucres qui bousillent les dents, hors de ma vue, objet de Satan. » Tu secourais rapidement la main pour qu’il enlève ça de ta vue, il avait raison, c’était quelque chose que tu proscrivais. Hors de question pour toi d’en manger un, un jour. Tu avais déjà goûté quand même mais pas depuis plus d’une décennie. Tu tenais trop à tes dents pour laisser une jolie carie prendre racine. « Cela me fait plaisir à entendre. » Un nouveau sourire sur le visage, ravie de cette information même si tu savais que ce ne serait pas pour demain, il n’était pas du genre à venir te voir toutes les semaines. « Je pourrais essayer mais je pense qu’après tu vas devoir aller aux urgences pour une fracture ! » ajoutais-tu en riant doucement, tu imaginais déjà la scène. Ton cabinet n’était pas adapté pour ça et puis de toute façon, tu ne te voyais vraiment pas lui faire un massage. « Beaucoup de boulot avec la reprise scolaire, un peu de fatigue qui s’accumule mais rien que je ne peux supporter. » Tu t’en rajoutais un peu plus avec le sport chaque jour, puisque tu étais incapable de t’en passer. Une vraie droguée, pire qu’un alcoolique.

Et lui ne pouvait qu'être heureux de la voir, de passer quelques petites minutes en sa compagnie. S'il n'avait pu être là physiquement pendant des années, qu'il essayait de passer au maximum même si ça se limitait, il comptait rattraper le coup, il ne s'était jamais détaché d'eux mentalement. Il pourrait très bien ne pas parler à Tiffany, puisqu'elle n'était que la fille de son père, qu'il n'avait pas vraiment habité avec lui, sauf pendant les vacances et quelques semaines de plus dans sa jeunesse. Mais il la considérait comme sa sœur et il était particulièrement fier de l'avoir à ses côtés. Ses yeux se baissèrent sur ce qu'il tenait entre ses mains, un paquet de chewing-gum, s'il n'aimait pas particulièrement ça à chaque fois qu'il récupérait ses enfants et qu'il fumait un peu trop, c'est-à-dire tout le temps, il en mâchait un pendant quelques minutes. Jaeden savait bien que sa demi-sœur n'allait pas accepter d'en prendre un, des sucreries pour des dentistes c'était un peu comme l'ail pour les vampires, ça les repoussent. Et sa réaction l'amusait que d'autant plus. « Je vais peut-être finir avec des dents pourries, mais au moins mes enfants ne chialeront pas quand j'ouvrirais la bouche. Quoi que. » Il s'imaginait avec des dents en moins et il grimaçait directement en replaçant son paquet dans sa poche, l'image était ignoble. Ses enfants plus vieux pleureront à cause de l'image de leur père, pas à cause de son haleine. La prochaine fois qu'il viendrait lui rendre visite, que ce soit par surprise ou programmer, il prendrait le temps de lui apporter une chose qu'elle aimait. « C'est le fait que je t'apporte quelque chose ou d'avoir un beau surnom qui te fait plaisir ? » Il la taquinait un peu, sous-entendant qu'elle n'avait eu personne dans sa vie pour lui donner des petits surnoms, alors qu'au fond il n'en savait rien, le jeune homme n'était pas au courant des relations qu'elle pouvait avoir même si ça l'intéressait. Enfin, ce qui l'intriguait était plus de savoir avec qui. « C'est vrai, à tous les coups je vais finir ma vie en fauteuil. » Il n'avait même pas mal au dos, c'était une manière indirecte de se plaindre qu'il en avait marre de porter des affaires à longueur de journée et il ne voulait pas se faire masser par sa sœur, l'idée était bien trop dérangeante. « Prends du temps pour toi, mais je te connais, t'es une guerrière, tu ne vas pas tomber sous la fatigue. » Il ne fallait pas non plus qu'elle finisse malade de son mode de vie, mais elle était grande, elle savait ce qu'elle faisait. « Je venais là pour des anecdotes, t'as rien en stock ? » Jaeden montrait un large sourire curieux de connaître des nouvelles sur la vie de sa sœur, même s'il ne savait pas si ça allait être facile de lui tirer des mots de la bouche.

La réponse de ton frère te fit rire. Un vrai rire, qui venait tout droit du coeur. Il n'aurait pas mauvaise haleine, ça c'était sûr. Et encore, ce n'était pas toujours le cas, le chewing gum était souvent efficace dans les premières minutes mais une fois qu'il avait perdu sa saveur, il devenait inutile. « Si tu leur montre des caries, sûrement quand même parce que c'est pas joli. » Et puis quand il leur expliquerait qu'on va devoir lui arracher les dents, ça sera encore pire. Tu riais de cette image parce que tu ne voyais pas vraiment Jaeden martyriser ses enfants de cette façon là. Eux avaient encore la chance d'avoir des dents de lait et de pouvoir avoir de nouvelles dents toutes propres par la suite. Mais tu ne doutais pas de leur hygiène dentaire. Tu avais déjà assez à faire avec la tienne. « Plutôt l'idée de quelque chose à manger la prochaine fois parce que je ne suis pas une princesse. » Tu était loin de l'être. Tu te comportais plus comme la méchante reine que comme la princesse. Peut-être une raison pour laquelle tu ne voulais pas d'enfants, tu ne serais pas capable de t'en occuper correctement. Et tu préférais ne pas être une mère, plutôt que d'en être une mauvaise.  Tu secouais doucement la tête en l'entendait dire qu'il pourrait finir en fauteuil. Tu aimais assez ton frère pour ne pas le rendre non plus handicapé. Ce serait vraiment mal venu pour lui. « Et tu as raison ! » Tu savais contrôler ton corps et te reposer lorsque tu en avais vraiment besoin. Plus jeune, tu en avais fait qu'à ta tête et tu t'étais retrouvée hospitalisée pour un épuisement physique, refusant d'écouter ton corps lorsqu'il se manifestait, qu'il avait fini par te lâcher. Depuis cette fois, tu avais appris à être attentive aux signes, ne voulant pas revivre une telle expérience. « Oh ce matin, un patient sous anesthésie a réussi à faire bouger l'écarteur et il a manqué de fermer sa mâchoire sur ma main ! » racontais-tu avec une grande frayeur. Si la mâchoire s'était refermée sur ta main, tu ne serais pas assise là à lui raconter, parce que le patient n'aurait pas pu contrôler sa force et que dans la descente, il aurait pu te broyer les os, en plus de te laisser une belle marque de morsure qui serait sûrement restée quelques semaines. « Et toi alors, avec les déménagements, il ne se passe jamais rien d'amusant ? » demandais-tu, à ton tour curieuse d'avoir des histoires croustillantes.

Il grimaçait, s'imaginant une bouche remplie de morceau gris. Comment Tiffany pouvait ressentir du plaisir à placer ça dans la bouche des gens ? Peut-être que sa motivation première avait été le fait qu'elle aime voir des beaux sourires, il n'en savait rien. « T'as pas tort. » Généralement a choisir entre manger une sucrerie de temps à autre pour faire passer l'haleine ou avoir une dentition des plus déplorables, son choix était vite fait. Il tenait encore à son image, puisqu'il était un homme qui riait beaucoup et un bavard, il ne voulait pas se priver de ces deux-choses à cause d'une honte d'avoir des dents dégueulasses. Toutes les images qui lui sautaient à l'esprit le dégoûtait petit à petit, sans doute même qu'en sortant du cabinet de sa sœur, il ne ferait qu'une fixette sur la dentition des personnes à qu'il parlerait dans la journée. « J'essayerais de me souvenir de ce que tu aimes, puis si tu n'aimes pas je mangerais tout, tout seul. » Un lui offrait un sourire narquois. « Peut-être même que si c'est un truc que tu adores, je mangerai seul, histoire de te donner encore plus fin. Et cette fois je ne viendrais pas avant ta pause de midi. » Quand elle disait que ça lui faisait plaisir, elle finissait par préciser que c'était pour la nourriture plus que pour le surnom. Tiffany n'avait pas le comportement d'une princesse, c'était clair ou alors pendant l'absence de Jaeden, elle s'était faite un nouveau comportement, tout l'inverse de ce qu'elle était dans le passé. Le genre de pouf insupportable, fille de papa, qui prêtait plus attention à leur physique qu'aux restes et sincèrement, il était bien heureux de ne pas avoir ce genre de personne dans sa famille. « On devrait sans doute t'apprendre la délicatesse, alors. » Même lui finirait par casser le dos d'une personne en essayant de le remettre en place, il n'avait pas le diplôme de la délicatesse, ça se saurait, lui était plutôt du genre brusque. Et il ne voulait pas non plus savoir comment se démerdait sa sœur quand elle massait le dos des gens et même savoir si elle le faisait ne l'intéressait pas. Chacun sa vie privée, ils étaient sans doute demi-frère et demi-sœur, mais ça ne voulait pas dire qu'ils devaient tout se dire pour vivre en parfaite harmonie, c'était plutôt l'inverse. Le jeune homme finissait par lui demander quelques anecdotes de sa journée ou au moins le temps qu'ils ne s'étaient pas vu. C'était plus pour avoir des informations croustillantes que savoir qu'elle avait renversée son café le matin-même en regardant la télévision. « Aoutch … » Il secouait sa main par reflex. « Je parlais plus de savoir si tu voyais quelqu'un, si t'avais des embrouilles, des trucs … intéressants ! Enfin, pas que ce que tu dis ne l'est pas, ne panique pas, hein ! » Il esquissait un sourire quémandeur, captant son regard. Puis il se mit à réfléchir sur des choses qui se seraient passés lorsqu'il déménageait les affaires des gens. Généralement ces gens donnaient les clés et s'absentait. « Rien d'intéressant, une femme m'a ouvert en peignoir, une autre à essayer de m'envoyer dans les cartons et sinon un d'eux s'est ouvert avec des choses … comment te dire ... ‘personnels' à l'intérieur. » Ouais, ce genre d'objet intime pour le plaisir personnel plutôt. Il ne voulait pas lâcher des mots pareils pour sa sœur bien qu'elle était adulte maintenant, qu'il n'avait pas à gérer ses mots. « Oh, sinon un mec a essayé de me tabasser parce qu'un collègue avait abîmer un de ses meubles. » Il y avait bien moins d’actions que lorsqu’il était agent, mais ça devait être ce qu’il se passait à Bowen.

Tu secouais doucement la tête en l'entendant te dire qu'il viendrait la prochaine fois avec quelque chose que tu n'aimes pas, mais si tu n'aimais pas, ça ne te dérangerait pas. Ce que très vite, il modifiait, proposant d'apporter ce que tu aimerais le plus juste pour pouvoir te narguer. Tu tirais la langue, retombant en enfance. « Y a pas a dire, t'es le meilleur des grands frères ! » disais-tu avec la plus grande des ironies et une belle grimace sur le visage. S'il se comportait de cette façon avec ses enfants, il allait sûrement créer des monstres à force de développer la frustration. Mais tu savais qu'il faisait de son mieux pour être un bon père. « Tu aurais vraiment beaucoup de boulot mais cela dit, d'un côté ça t'occuperais pendant les dix prochaines années à venir, facile. » Tu rigolais, au point d'en avoir mal au ventre. Tu l'imaginais bien te donner des cours et des leçons, te suivre dans la vie de tous les jours pour te mettre dans des situations et te voir échouer. Tu savais manier tes outils lorsque tu étais dans le cabinet, tu savais faire preuve de dextérité mais une fois que tu étais sortie de ce cadre là, c'était comme si tu te transformais en gros bulldozer. « Fallait être plus précis. » Tu secouais doucement la tête, tu pensais qu'il voulait des histoires croustillantes sur ton boulot et tu lui en avais donné une mais ça ne semblait pas l'avoir réjouit. En même temps, il ne se passait pas non plus grand chose, tu étais déjà contente d'en avoir trouvé une à raconter. « Des embrouilles, pas depuis que l'autre rousse a débarqué chez les parents comme une furie et que j'ai giflé le connard de mec qui pensait avoir le moindre droit sur moi. Et pour les relations amoureuses, j'en suis très loin donc je ne fréquente personne. » Il n'y avait personne en vue dans ta vie, tu sortais parfois pour faire des rencontres mais c'était en général pour que ça se termine dans un lit. Une relation sans lendemain, sans attache, tu tenais bien trop à ta liberté pour penser à avoir une relation amoureuse. « Mais si tu veux un gros scoop me concernant, je fais ami-ami avec Woody, je sais pas si tu te souviens de lui. » demandais-tu avec un léger sourire. Tu lui avais pas mal rabâché les oreilles avec Woody et Sara lorsque tu étais plus jeune, voulant à tout prix lui casser la gueule, tu n'avais pas peur d'être une femme et de paraître frêle à côté de lui, tu voulais lui faire manger sa fierté et sa gueule d'ange surtout lorsque Sara en pâtissait. Tu l'écoutais alors te raconter ses différentes histoires, imaginant bien chacune des petites scènes, rigolant encore à en avoir mal au ventre pour celle du carton qui s'ouvre. Tu imaginais bien la gêne qui pouvait s'installer dans ce genre de moment. « On dirait que toi, tu ne t'ennuies pas dans ton boulot en tout cas ! » Contrairement à lui, ta clientèle était bien souvent endormis ou avec la mâchoire paralysée, donc ce n'était pas l'idéal pour développer une conversation, pour raconter des ragots, ou même avoir des histoires croustillantes. C'était relativement calme et plat, ce qui t'allait très bien parce que tu ne supporterais pas entendre quelqu'un te parler pendant que tu bosses.

« Han Tiff, tu vas me flatter. » Disait-il en faisant un geste de la même et levant les yeux au ciel avant s'esclaffer de rire. Il n'était sûrement pas le meilleur, mais au fond, il avait toujours essayé d'être un bon quand il était en ville, quand ils pouvaient se voir. Quand elle disait qu'il en aurait pour dix ans à lui apprendre la délicatesse, il grimaçait. « Je n'ai pas tout ce temps à te consacrer ou alors j'ai moyen de t'éduquer en même temps que mes enfants. » Et il n'était même pas certain qu'il le fasse correctement, c'était bien quelque chose qui l'effrayait sérieusement de ne pas être à la hauteur pour eux, qu'ils finissent par se dire plus tard qu'ils auraient préférés vivre avec leur mère, mais aujourd'hui tant qu'ils n'étaient que des bambins innocents, il en riait. Ce n'était pas comme si la délicatesse était sa plus grosse qualité, il savait en faire usage, il devait toujours le faire aujourd'hui que ce soit pour sa vie personnelle ou sa vie professionnelle, mais il pouvait se montrer bien trop brusque parfois. « Pardon, c'est vrai qu'il fallait le chercher celui-ci … ou alors ta compréhension du sous-entendu est à refaire ! » Il la taquinait encore une fois, il n'était pas là pour la rabaisser ou la blesser, il savait qu'elle n'était pas sensible au point de se vexer à chaque phrase maladroite et c'est pour ça qu'il en profitait. Libre à elle de dévoiler une partie de sa vie privée à son demi-frère ou faire la muette pour ne donner aucune information, aucun nom, rien. Ce n'était pas comme s'il était un inconnu, elle pouvait bien se confier un peu, mais il savait qu'elle n'allait pas le faire sans lui demander ou alors il pensait ça parce qu'à chaque fois, il demandait trop vite de ses nouvelles.  « Si tu gifles les gars qui s'intéressent à toi en même temps. » Il riait doucement. « Je rigole, tu as bien fait de le gifler ce con. » Depuis Zéphyr, Jaeden n'avait pas entendu une histoire d'amour venant de sa sœur, comme si cette partie-la était vide, peut-être qu'elle ne cherchait pas forcément à se recaser, à trouver la personne qui l'accompagnerait tout au long de sa vie. Lui doutait que ça puisse arriver un jour à quelqu'un, l'amour éternel. Parce que même ses parents, ceux qui devaient le servir avaient divorcés et qu'il s'était retrouvé avec un connard de beau-père. « Mh, Woody … Ce prénom me dit quelque chose, ouais ! » Il essayait de le recaser dans une conversation. « Tu me rappelles ce qu'il t'a fait déjà ? » Il avait déjà quelques histoires en tête, mais il préférait être certain de ne pas se tromper de personne, parce qu'il ne l'avait jamais vu personnellement. Il se souvenait simplement d'une femme nommée Sara en plus, rien de fou. Le jeune homme finissait par raconter les péripéties qui lui étaient arrivés lors de ses heures de travail, des situations toutes des plus étranges. « J'ai pas profité de la femme qui m'a … hein. » Il aurait pu parce que c'était clairement l'intention de la jeune femme, mais il n'était pas ce genre de personne à sauter sur tout ce qui bouge, surtout pas pendant son boulot. « Si tu savais imaginer à quel point j'm'emmerde. » Il jetait son regard dans le vide, le regret d'avoir démissionné de son ancien boulot revenant, comme une vieille relation dont il n'aurait pas fait le deuil, un métier qui savait le faire vibrer, que même si parfois il voulait tout plaquer, l'adrénaline était toujours présente. Alors que là, il s'ennuyait avec ces meubles. « Enfin, rien ne m'en empêche d'en changer de toute façon ! »

Comme tu t'en doutais, il n'avait pas autant de temps à te consacrer et il n'avait sûrement pas l'envie de te supporter dix années. T'étais peut-être mignonne mais tu pouvais te montrer parfois chiante. Bien qu'il semblait avoir une solution. Fallait juste qu'il se méfie parce que des trois, tu serais sûrement la pire et un beau modèle d'ingratitude, au point qu'il regretterait t'avoir apporté son aide. « Si tu m'épargnes comment manger et comment devenir propre, ça devrait pouvoir le faire, non ? » demandais-tu avec un léger sourire sur le visage. Pour ça, tu pensais être au point et ne pas avoir besoin d'une mise à jour. D'ailleurs tu mangerais sûrement mieux que ses jumeaux parce que ton alimentation, tu la surveillais comme jamais. « J'ai jamais été bonne pour les sous-entendus et encore moins pour le subliminal. » Les phrases à double sens, ce n'était pas pour toi. Non, toi tu étais quelqu'un de très terre à terre. Heureusement ça aurait pu être pire, tu aurais pu aussi ne pas comprendre le second degré et là t'aurais eu pas mal de défaut. Mais au moins lorsqu'on te disait une chose, si ce n'était pas une blague, tu le prendrais au pied de la lettre. « C'est que t'es drôle aujourd'hui ! T'as mangé du lion ? » demandais-tu en prenant un air innocent sur le visage. « A moi, rien à part me lancer des piques, mais à Sara, il lui a détruit le cœur et Sara c'est un peu la sœur que j'ai jamais eu. » Parce que malgré tout, Jaeden n'était pas une fille. Même si vous étiez proches, vous n'étiez pas comme deux soeurs. Tu avais vu la relation de Sara et de sa sœur évoluer, que tu avais parfois été envieuse. « T'aurais dû, je crois qu'elle t'envoyait un message ! » Tu essayais de garder un air très sérieux sur le visage avant de te mettre à rire en imaginant la scène. Mais ce n'était pas l'avis de Jae, lui semblait ne pas apprécier son métier et il ne tardait pas à t'en faire part. « T'es sûr que t'as rien qui t'en empêche ? Si ce n'est que t'as une famille à élever et nourrir ? » Tu ne voulais pas le culpabiliser, tu te doutais bien qu'il ne prenait pas ce genre de décision à la légère et que s'il y songeait c'est qu'il devait avoir un back up plan. Il avait quand même la tête sur les épaules.

Il arquait un sourcil, hésitant sur cette phrase qui pouvait avoir plusieurs significations à ses oreilles. Peut-être qu'il la comprenait mal, ce ne serait pas la première fois après tout, il entendait des choses de travers, déformé parce qu'il se concentrait sur autre chose, pas forcément visuel. Mais dans son crâne il y avait de quoi se perdre, pleins de sujets sur quoi il pouvait se concentrer. « Tu ne veux pas être propre ? Est-ce que tu es en train de m'avouer que tu es une personne sale et que tu pisses au lit ? » Ou plus en train de lui dire qu'elle savait déjà le faire, être propre et manger. Lui non plus ne savait pas manger comme les rois, il avait simplement appris à manger correctement pour un dîner important, à l'époque, il avait appris pour quelle fourchette était l'aliment et le reste, mais il l'avait oublié dès le lendemain, parce que ça n'allait pas lui resservir, que lui, il était simple. « Alors, c'est pour ça que je n'ai jamais pu faire des jeux avec du langage codé avec toi, tout s'éclaire. » Disait-il en riant pour la taquiner. De toute manière, à partir du moment où il y avait un langage codé, le partenaire était au courant, avec Tiffany, il ne s'amusait pas à ça quand il était petit ou alors ça remontait trop loin dans ses souvenirs. Parce qu'il ne venait que très rarement à Bowen, pendant les vacances, parfois il faisait un passage à l'improviste pour quelques jours avant de retourner dans sa maison aux États-Unis, celle qu'il préférait fuir pour faire le casse-cou en ville, des sortes de choses que son groupe et lui pensait rebelle alors que ça ne l'était pas du tout, mais que tout le monde trouvait cool. Un gros loser en somme. « La sœur que tu n'as jamais eu ? Vous faisiez genre des tresses dans vos chambres en vous maquillant et en parlant d'hommes, c'est ça le délire ? Parce que pour le reste, t'as un frère, t'sais. Moi. » Il se pointait du doigt avec un large sourire, il avait peut-être été absent, mais il était toujours présent. Mais au fond, il s'en fichait bien, il ne pouvait pas parler de tout avec sa sœur, il ne pouvait pas se confier sur tout et il ne savait pas de quoi deux femmes pouvaient parler entre-elles, si c'était comme dans les clichés des films ou pas. « De un ; je ne suis drôle qu'aujourd'hui ? Tu me vexes presque, j'ai l'impression d'être un gars triste là. De deux … S'ils se sont justes séparés, j'crois pas que tu as trop à t'intégrer dans l'histoire, mais je peux comprendre, en plus je ne suis totalement pas dans le délire. » Son coeur aussi avait été piétiné par sa femme, il s'était senti comme un pantin, celui à qui on faisait croire des choses, celui qui voulait jouer le parfait mari dans une pièce que sa bien aimée écrivait doucement dans son dos. Peut-être qu'elle ne l'avait pas prévue, peut-être qu'elle n'avait pas été si sournoise, mais ça lui avait quand même brisé le cœur. « Clairement ouais, mais tu l'aurais vu, t'aurais direct refuser le message. » Il fronçait les sourcils, ce n'était pas son genre de juger aux physiques, en fait, peut-être qu'il aurait cédé s'il n'était pas en plein boulot. Puis cette femme en question ressemblait juste à une femme désespérée qu'un homme passe du temps avec elle, ça ne le tentait pas ce genre de personne. « Bon en vrai, je ne sais pas ce que j'pourrais faire, mais ça s'y réfléchit. » Si porter des meubles ranimait parfois ses douleurs, si ça l'ennuyait au plus au point, il trouverait autre chose, un jour. Il allait faire ce boulot pendant un temps avant de s'en lasser complètement. « Ton prochain rendez-vous est dans combien de temps ? » Puisqu'il y avait un homme dans la salle d'attente, il ne devait pas être là uniquement pour voler les magasines et les lires, il avait sans doute rendez-vous.

Forcément l’annonce que tu venais de faire pouvait être interprêter de différentes façons et Jaeden n’avait pas pu s’empêcher de prendre la pire de toutes. Tu en riais tellement que tu en avais mal au ventre. De l’autre côté, on devait se demander comment se passer ton rendez-vous. « Arrêtes de découvrir tous mes secrets ! » Tu reprenais ton sérieux, essayant de lui lancer un méchant regard avec tes gros yeux mais ce n’était pas vraiment efficace. A chaque fois, tu avais envie de rire. C’était le genre de moment que vous ne passiez pas assez ensemble dans vos vies, vous ne profitiez pas assez l’un de l’autre, de ces petits instants tout simple. « T’es sûr de ça, que t’es mon frère ? » demandais-tu avant de lui tirer la langue. Il semblait presque vexé par ce que tu venais de dire mais tu savais que rien de tout ça n’était réel. Il ne se vexait pas aussi facilement, dans toute votre vie, tu avais dû y arriver une fois ou deux peut-être mais pas tellement plus. « C’est pas la même chose, avec toi on parlait pas de films d’amour, de ragots et de garçons. » En effet, tu avais eu plus de mal à parler de certaines choses à Jaeden qu’à Sara. Et puis à Sara, tu pouvais lui parler de lui aussi, lui dire quand ça allait, quand ça n’allait pas parce que votre famille ça avait été un sacré dédale dans l’enfance et que ça n’avait pas toujours été évident de s’en sortir. « Oui mais je suis une femme impulsive et qui plus est, quand on a quinze ans, on réfléchit pas forcément aux actions, on agit et puis basta. Ça a été le début d’une guerre à laquelle on a mis fin y a pas si longtemps. T’imagines pas à quel point c’est un immense pas pour moi, de mettre ma rancune de côté et de passer à autre chose. » Tu étais vraiment impressionnée par toi-même. Dans un sens, tu savais que tu l’avais fait parce que tu n’avais pas eu d’autre choix que de devoir collaborer avec Woody parce qu’il avait dû s’occuper de tes soins de rééducations et tu ne voulais pas qu’il prenne le risque de se venger sur toi pour toutes tes mauvaises paroles dites des années plus tôt. Tu avais voulu crever l’abcès, chose que tu ne faisais jamais parce que ta fierté t’en empêcher, mais pour une fois, tu avais su la mettre de côté et ça c’était incroyable. « Et deuxièmement t’es assez drôle en général mais là encore plus. » Un sourire franc venait se poser sur ton visage. Tu n’oserais pas lui mentir. Tu ne savais pas vraiment ce qui se passait dans la vie de Jaeden pour le moment, mais s’il voulait t’en parler, tu étais assez ouverte et prête à l’écouter. « J’ai un poste vacant de secrétaire médical si tu veux t’amuser à tenter un tout nouveau genre de boulot. » C’était une proposition assez sérieuse, depuis le départ de l’ancienne, tu avais eu quelques remplaçants mais jamais rien de vraiment concret, peut-être que ça pourrait l’aider et qu’il pourrait s’y complaire. Qui sait ? « Dans un peu moins de cinq minutes. Tic tac, ton temps est compté ! » ajoutais-tu après avoir jeté un coup d’oeil à la pendule. Si ta mémoire était bonne, ce serait ton avant-dernier client avant la pause repas.

Il riait en dégradant l'image qu'il avait de sa sœur, la dégradant d'une blague. Il espérait qu'elle ne le prenne pas mal, mais ils avaient le même sang, quasiment le même humour, quand lui ne faisait pas de sous-entendus. « Tu donnes trop d'indices, j'espère que tu fais pas pareil avec tout le monde, toute la ville finirait par connaître tes petits défauts. » Il n'y avait pas mieux qu'une parole de travers, que des oreilles curieuses pour finir par ruiner une réputation, les paroles allaient vite et il était parfois difficile de se décrocher d'une information, qu'elle soit vraie ou fausse. Il fallait seulement laisser le temps faire son affaire, avec de la chance, des semaines feraient l'affaire, parfois ça pouvait durer des années voir une vie entière. De sa bouche, à Jaeden, rien ne sortirait le fait qu'elle pissait toujours au lit, même pour la blague, dont il continuait de rire avant de reprendre un minimum de calme. « Ah … c'est vrai, il n'y a pas de témoin pour approuver la grossesse de ma mère. » Il baissait les yeux, s'avouant vaincu par cette phrase, il finissait par craquer, riant doucement, c'était certain qu'ils avaient le même sang, que même s'ils n'avaient pas la même mère, ils faisaient partie de la même fratrie. « Je crois qu'on a les mêmes yeux, alors remet pas ça en question ! » Il s'arrêtait là, avec un large sourire aux lèvres, tous deux partageaient la même couleur de yeux que des millions d'autres personnes, un bleu transperçant. Mais c'était presque la seule preuve physique qu'ils avaient pour se dire de la même famille, en comptant aussi qu'ils faisaient presque la même taille. Après tout, il n'y connaissait pas beaucoup de choses en génétique, mais ça le réconfortait dans cette idée. « Je crois bien aimer les ragots, pour le reste, ouais, trouve-toi une fausse sœur. » Sara, il ne la connaissait pas tant, de prénom seulement, mais il était content qu’elle puisse offrir ce qu’il manquait d’ouverture d’esprit chez-lui à sa demi-sœur. « C’est vrai que c’est plutôt … impressionnant. Et finalement, il n’est pas si méchant dans le fond, ce Woody ? » Parfois, les personnes agissaient sur des coups de têtes, faisaient les cons, c’était dans la nature humaine, lui avait pour preuve sa femme qui l’avait trompée et qui maintenant clamait qu’elle le regrettait. « Je t’inviterais presque à dîner un soir pour fêter cet exploit ! » Il se mettait à rire en l’applaudissait et en lui lâchant un assez long wooow pour que la personne dans la salle d’attente puisse de demander ce que la dentiste faisait au jeune homme. Quand elle disait qu’il était encore plus drôle qu’à la normale, il plaçait une main sur son cœur, penchant la tête en clignant des yeux. « Je suis si touché. » Il reprenait son sérieux pour ne pas passer de drôle à gros lourd. Puis il l’écoutait proposer un rôle de secrétaire, le jeune homme haussait les épaules en levant les yeux au plafond. « À voir, ça peut être drôle de bosser à tes côtés comme ça peut être un calvaire. » C’était une blague, de toute évidence. « Je crois que ça manque d’action dans ton job, mais ça ne peut pas être pire que mon boulot actuel ! » Un jour, il se ramènerait dans ce cabinet en criant qu’il voulait ce qu’elle lui proposait. Il lui demandait le temps restant avant son prochain rendez-vous, qu’il ne prenne pas sur son heure qu’elle puisse travailler sans se presser, il avait du respect sur ça. « Cinq minutes ! Ça me laisse peu de temps. »  Peu de temps pour dire n’importe quoi, parce qu’il n’était pas venu pour du sérieux, il voulait juste voir le visage de sa sœur. « Je vais peut-être manger avec le père, il garde les enfants depuis que j’suis revenu, j’lui dois bien ça, un peu de ma présence ! » Passer sa journée à faire le tour de sa famille. « Je ne sais pas combien de temps tu as devant toi dans ta pause repas, mais au pire, tu viendras faire un tour à l’appart quand tu veux ! Enfin, même si ce n’est pas aujourd’hui, ce n’est pas graaave. » Son sourire était sincère, il pourrait l’accueillir à bras ouvert quand elle voudrait.

« C’est juste pour toi. » Tu lui fis un petit clin d’oeil avant de te mettre à rire encore une fois. Tu n’étais pas sûre d’avoir autant ri en un rendez-vous depuis des années. Tu n’étais pas aussi facile à rire d’habitude mais là c’était Jaeden et ça changeait tout. « Rien n’est plus fiable que la génétique. » Vous aviez les même yeux, le même regard et parfois les mêmes mimiques mais ça, c’était plus lié à l’éducation qu’à la génétique. « T’es sûr que tu veux pas boire des mimosas, me vernir les ongles, me tresser les cheveux et qu’on pleure ensemble devant Mamma Mia ? » Tu ouvrais grand les yeux pour te donner un regard de biche, joignant tes mains près de ta joue gauche, un large sourire sur le visage. Tu essayais vraiment d’être la plus mignonne possible pour le faire réfléchir plus d’une seconde mais tu savais très bien que la réponse serait négative. Même toi tu n’arrivais pas à envisager cette idée de façon très sérieuse. « Je ne crois pas. Il est assez comme moi dans le fond. » Du genre à avoir une carapace, à cacher qui il pouvait vraiment être pour ne pas qu’on puisse exploiter ses faiblesses contre lui. Quasiment personne n’avait réussi à te faire mal avec des mots parce que tu ne te livrais pas aussi facilement que certains. Tu avais besoin de temps, d’établir une vraie relation de confiance et de voir où ça pourrait mener. « Pourquoi juste presque ? » demandais-tu presque offusquée. Que fallait-il en plus pour qu’il t’invite à dîner ? Tu n’allais sûrement pas tarder à le découvrir, peut-être qu’il avait juste la flemme ou pas le temps et que c’était juste pour faire bon genre. « Je suis sûre que là aussi tu auras des petites vieilles prête à te mettre le grappin dessus !  » Tu rigolais une nouvelle fois. Peu importe le métier, il y aurait toujours des personnes prêtes à draguer. Tu avais déjà eu un petit garçon de dix ans qui voulait être ton amoureux et c’était à mourir de rire parce que c’était un gosse mais c’était aussi adorable parce qu’à 10 ans, il croyait être amoureux de toi. Tu pouvais te sentir flattée bien que cette fois là, tu étais un peu gênée. « Pas vraiment, il t’en reste même pas deux à force de dire n’importe quoi ! » ajoutais-tu après avoir jeté un nouveau coup d’œil à ta montre, tu n’avais pas eu l’impression que le temps avait filé et pourtant c’était le cas. Déjà l’heure pour lui de te quitter et pour toi de retourner à ton vrai travail. Discuter n’en faisait pas parti. « Il ne m’en a même pas parlé. Mais c’est cool. » Sûrement parce que tu ne vivais plus trop chez tes parents. Maintenant que tu avais pris ton logement, tu avais une impression d’indépendance et tu voyais beaucoup moins tes parents. De ce fait, tu leur parlais beaucoup moins aussi. « Faut le dire si t’as envie de me voir, je me pointe quand tu veux, où tu veux ! » Tu ne devais peut-être pas lui dire ça comme ça parce qu’à tout les coups, la prochaine fois qu’il allait te proposer quelque chose, il ne te dirait pas quoi et tu pourrais avoir de mauvaises surprises. Malgré tout c’était l’idée que tu voulais qu’il saisisse. C’était ton frère après tout, rien de plus important que les liens du sang. « En tout cas c’était vraiment chouette de te voir et de discuter un peu. Et comptes sur moi, je débarquerais peut-être pas aujourd’hui mais tu vas me voir dans les jours à venir, ça tu peux m’croire ! » Un nouveau sourire se dessinait sur ton visage tandis que tu te levais pour l’accompagner à la porte de ton cabinet comme tu le faisais avec chacun de tes clients. Une fois partie, tu appelais le prochain patient, reprenant ton travail avec beaucoup de sérieux.

Le programme qu’elle lui annonçait le faisait grimacer. Tiffany en compagnie d’une autre femme, d’une de ses amies proches, ça ressemblait trop fortement aux clichés que les hommes pouvaient se faire des femmes. En même temps, lui n’était pas certain de faire mieux de son côté, il sortait souvent pour boire, sans raison apparente parce qu’il disait aller bien. Quand il voyait ses amis, généralement ce n’était pas autour d’un jus de fruit et ils se parlaient d’un tas de choses, tout en n’oubliant pas de rire. Eux ne se mettaient rien sur les ongles, ne buvait pas de boisson qui donnait envie de s’endormir après trente minutes et jamais il ne pleurerait devant un de ses amis. « Ton programme est parfait ! Puis j’ai toujours secrètement rêvé de faire tout ça d’un coup. » Disait-il avec une voix féminine, avant de rire. Comme elle, il penchait sa tête, posant une main sur sa joue avant de cligner des yeux plusieurs fois d’affilés. Comme elle, ça ne rendait rien, mais il restait s’esclaffer de leur bêtise. Le sujet principal était Woody, il en revenait rapidement, lui demandant si au fond il n’était pas si méchant, ce qu’elle confirmait. Après tout, Jaeden n’avait jamais été trop du genre à juger les personnes avec les avis des autres, ça lui arrivait, parce que comme tout le monde, il était humain, mais généralement et il le savait, il fallait mieux découvrir de soit-même. Il acquiesçait c’était assez rare qu’elle revienne sur ses jugements quand il s’agissait d’une personne qu’elle n’aimait pas, c’était assez rare pour en parler, le remarquer. « Parce que pour te faire plaisir, je devrai cuisiner toute l’après-midi et j’ai clairement pas ce temps-là aujourd’hui, dommage ! » Il haussait les épaules, une prochaine fois, elle viendrait chez-lui pour manger quelque chose, passer du temps en famille et rire plus longtemps qu’ils ne le faisaient maintenant. Parce que le temps était compté, qu'il ne pouvait pas se faire passer pour un client aux yeux des autres qui attendaient dans la salle d'attente aussi longtemps. À la fin, ils finiraient par croire autre-chose, quelque chose que des frères et sœurs ne voudraient pas ensemble, même s'ils n'avaient qu'un parent en commun. « Horrible. Tu devrais vraiment me défoncer les dents pour que ça s'arrête. » Il souriait, comme pour montrer que c'était grâce à ça que les femmes tombaient à ses genoux, bien qu'il ne se prenne pas pour un fuckboy du tout, il avait un minimum de respect pour les femmes, il se montrait simplement trop gentil et ça portait confusion. Quel abruti. Il lui parlait d'un repas prévu avec son père et sa belle-mère, pour le remercier de s'occuper de ses enfants chaque jour, parce qu'il ne faisait pas réellement confiance aux baby-sitter, qu'il avait du mal avec l'idée que c'était correct. « Ouh, je garde ça bien dans le crâne. » Il lui lançait un clin d'œil, il avait bien envie de faire des efforts pour la voir plus souvent, arrêter de toujours lui parler à travers un écran. Plus de temps, il parlait de n'importe quoi, perdant ses minutes. Le jeune brun se levait en regardant sa tête. « J'vais me préparer à ton arrivée, alors ! » S'avançant vers la sortie du cabinet, il sortait de la pièce en zieutant la salle d'attente au passage avant de reprendre sa route.