cook and be drunk ‹ free

Une promenade sur la plage ? Pourquoi pas. C'était toujours sympa de se laisser voguer au grès des vagues et de son vague à l'âme. Plus le temps passait ici, plus tu avais le sentiment de lutter plus encore contre ton attirance. Contre tes envies. Tu marchais d'ailleurs pour éviter ce sujet, pour éviter d'y penser. Un échec, si j'puis dire puisque tu n'avais que ça dans le crâne. Alors tu essayais de recomposer un morceau de jazz dans ta tête, tu essayais de penser à la prochaine bête que tu pourrais empailler. Ce serait un accomplissement pour toi si tu pouvais faire une grosse créature, comme un ours ou un éléphant. Même si les éléphants en Australie c'était pas vraiment monnaie courante. Tu aurais pu réfléchir plus longtemps encore si tu n'avais pas été interpellé alors que tu passais à côté d'une tente qui semblait avoir un gros matériel de cuisine. Étrange endroit pour faire à manger mais pourquoi pas après tout. Tu t'approchais de l'homme en question, qui avait un grand sourire sur le visage. Sans plus attendre il te vendait son projet. Cuisiner une recette tout en prenant des shoots d'alcools tout le long du repas. Après tout pourquoi pas oui. Il fallait juste attendre qu'une seconde personne accepte de cuisiner avec toi et de se prêter au jeu. Sûrement une émission américaine débile encore et bien que tu ne saches pas cuisiner, ça t'était bien égal. Boire à l'oeil c'était toujours sympa et si tu pouvais arrêter de penser pendant un court moment, ça ferait l'affaire. Tu t'installais donc sur une chaise dans la tente, attendant que l'animateur trouve un second volontaire.

J’étais revenu de France depuis quelques semaines maintenant, laissant Lilas – ou plutôt Amélia – là-bas alors que je n’avais pas l’impression d’avoir pu l’aider comme je l’aurais aimé. Malheureusement, ma vie et mon job se trouvaient ici et je n’avais pu rester plus longtemps auprès d’elle. De toute façon, sa tendance à me repousser mettait du temps à se dissiper alors elle n’avait pas tenté de me retenir. Je lui avais promis de l’appeler, mais pour ça, il fallait qu’elle daigne user de sa voix à nouveau. Peu à peu, ça lui reviendrait, son frère et moi avions espoir. À mon arrivée à Bowen, j’avais passé beaucoup de temps avec Zelda parce qu’elle partait bientôt pour une convention à l’autre bout de la planète et je ne pouvais venir avec elle, puisque j’avais déjà pris quelques vacances imprévues pour aller en France. J’avais aussi revu Jeff, Lily et Nelligan, Fleur, bref j’avais assez passé de temps avec eux pour ne pas oser les importuner ce soir alors que j’avais cette envie de sortir. Dès que j’eus passé les clés dans la serrure de mon centre, je m’étais dirigé vers la plage. Une petite promenade au lieu de rentrer directement à la maison. Elle ne dura toutefois pas plus que dix minutes puisqu’une fois arrivé à la hauteur d’une tente, quelqu’un m’interpella. Genre hey buddy do you have a minute ? alors qu’en réalité, sa minute allait s’étirer sur une bonne heure si j’acceptais son offre. Et … son offre me tentait absolument, oui ! Boire des shots tout en cuisinant, c’était un peu comme le meilleur des deux mondes, non ? Et risquer de passer à la télévision en plus, lololol, de quoi faire rire les gens lors des rassemblements de Noël. J’allai m’asseoir à côté de l’autre participant, nous ne serions que deux selon les explications de l’animateur. Je lui tendis ma main, par-dessus tous les instruments de cuisine. « Salut, j’suis Concho. » J’affichai un large sourire, tout excité par cette aventure inattendue. « Ready to get hammered ? » Demandais-je, amusé par la situation. Zelda allait être jalouse.  

Assis sous la tente, tu attendais que quelqu’un se fasse harponner par la production pour que puisse enfin commencer le tournage de l’émission. Tu ne savais pas vraiment à quoi t’attendre. Ça faisait déjà plus d’un quart d’heure et tu commençais à croire que personne Ne viendrait te rejoindre. Tu t’imaginais déjà faire l’émission tout seul et en faire une catastrophe. Par chance, tu n’avais pas à imaginer beaucoup plus longtemps ce que ça pourrait donner puisqu’un homme s’approchait de toi, se présentant. « Et moi c’est Lorenzo ! » ajoutais-tu doucement en lui tendant la main. Tu ne savais pas trop d'où il venait, ce n’etait pas un prénom commun qu’il te donnait là mais tu n’allais pas le bombarder de questions. Il te posait rapidement une nouvelle question à laquelle tu répondais avec autant d’enthousiasme que lui. « Oh hell yes ! » Tu avais un grand besoin de ça. C'était une bonne proposotion, l’occasion de passer un moment tranquille sans se prendre autant la tête et sans se soucier des conséquences. « Tu te débrouilles en cuisine ? » demandais-tu, curieux de savoir son niveau. Si on vivait dans les clichés, puisque tu es italien, on pourrait dire que tu te débrouilles pas mal et que tu sais parfaitement cuisiner des pâtes et des pizzas. Tu te débrouillais, tu savais lire une recette et la suivre, après s’il y avait des choses techniques à réaliser, tu ne serais pas forcément le meilleur comme pour pocher des œufs, par exemple. La production n’allait pas tarder à vous maquiller, à vous habiller et à vous donner les instructions à suivre

On se serra la main par-dessus cette table remplie d’instruments de cuisine que je connaissais plus ou moins. Je me demandais s’il nous laissait carte blanche avec une liste d’ingrédients qu’ils avaient en stock, ou si nous devions suivre une recette hyper compliquée qui testerait notre compréhension du monde culinaire. « Enchanté Lorenzo ! » Assez unique comme cadre de rencontre, mais c’était justement ce que j’aimais de ce genre d’activités. Honnêtement, ils n’auraient pu trouver meilleur candidat que moi, j’étais carrément prêt à me ridiculiser devant les caméras pour faire le spectacle, et j’espérais que mon partenaire de folie le serait tout autant. En tout cas, il semblait assez enthousiaste de se péter la face à coup de shooter, ce qui s’annonçait plutôt chouette. Ça ne laissait présager que le meilleur, au fond. « Euh, ça va, c’est assez souvent moi qui cuisine dans ma colocation alors j’imagine que je suis … pas si mal. Mais bon, je sais pas ce que Gordon Ramsay en dirait, je me suis encore jamais fait roast par lui. » Déclarais-je avec humour. Je passais toutefois pas mal de temps à regarder les commentaires qu’il pouvait laisser sur les images sur lesquelles on l’identifiait, en attendant justement sa critique. Sans doute qu’on serait pas mal critiqués, Lorenzo et moi, si ça passait vraiment à la télévision, ce truc. « Et toi ? » Demandais-je alors que des maquilleurs et maquilleuses s’affairaient autour de nous. On me mettait de la poudre dans le visage, on me coiffait, sous des lumières qui m’aveuglaient presque. « Woh, c’est du sérieux tout ça. » Dis-je en lançant un regard à l’homme à côté qui recevait le même traitement. « Je commence à être un peu nerveux, ça me prendrait un shooter dès maintenant je crois bien. » Lâchais-je dans un rire.