À trop rêver, on en oublie parfois la vérité [Feat. Maddie Ryan]

Lisandro commençait petit à petit à apprendre à vivre autrement. Certes il était toujours handicapé, mais beaucoup de choses changeaient, à moins que ce ne soit l'acceptation de son handicap qui commençait doucement à se faire ressentir. À tel point qu'il sortait de plus en plus souvent de son domicile, la plupart du temps pour être en compagnie de la charmante Maddie. Plus le temps passait, plus il appréciait de la voir, était-ce ça l'amour ? Avait-il été déjà été amoureux ? Sans doute, mais après la trahison qu'il avait subi, il avait dû mal à croire qu'il méritait un tel bonheur.

Dernièrement, sa vie n'était que remise en question, tout d'abord sa dispute avec Daemon, puis, la visite impromptue de Devan, son petit ami, tout cela se mélangeait dans son esprit et il essayait tant bien que mal d'agir avec la face qu'il cachait à tout le monde. Il commençait à redevenir à celui qu'il avait été avant son accident, sa guérison était peut-être en bonne voie.

Depuis leur sortie commune à la soirée organisée pour Halloween, l'ancien sportif avait revu Maddie à plusieurs reprises, un minimum d'une fois par semaine quand l'emploi du temps de la banquière le permettait. Il ne pouvait pas lui en vouloir d'avoir d'autres projets, c'était tout à fait normal, et lui aussi devrait s'en fixer pour essayer d'avancer un peu plus dans sa vie.

Aujourd'hui encore, il avait dû chemin à parcourir, mais c'était déjà mieux que rien, et la vérité c'est que lorsque Maddie était auprès de lui, il avait envie de se battre, lui qui d'ordinaire ne désirait pas se battre, c'était même tout le contraire, il avait envie d'abréger son existence. Même si ses pensées restaient relativement sombres, elles commençaient tout juste à s'illuminer,  comme s'il voyait une lumière dans cette sombre masse dans laquelle il évoluait depuis son accident.

Le jeune homme avait rendez-vous avec Maddie afin de pouvoir profiter de l'événement météorologique qui était la pluie d'étoiles. Certains s'y rendaient en couple, Lisandro lui, y allait simplement avec la jeune femme en tout bien tout honneur. Est-ce qu'il espérait qu'un jour elle serait plus qu'une simple amie ? C'est possible, mais il n'était pas assez positif, pas assez confiant pour penser à une telle chose. Comme il dépendait totalement d'elle, il ne manquait plus qu'elle vienne le chercher, et ils pourraient ensuite s'y rendre ensemble.

Lisandro avait toujours bien aimé tout ce qui se rapportait au ciel, les étoiles, les comètes, les phénomènes du style de celui de ce soir. Est-ce qu'il pourrait évoluer dans ce domaine ? Il n'avait quasiment pas de connaissances dans ce domaine, hormis ce qu'il avait lu dans certains ouvrages. C'est donc en attendant l'heure convenue que le jeune homme commençait à tourner en rond chez lui, stressé de cette nouvelle soirée qu'il s'apprêtait à passer en charmante compagnie, il ne cessait de redouter ce genre de moments. Jusqu'au moment où, la sonnette le tira de ses pensées. Lui qui avait mis plusieurs heures avant de choisir les vêtements qu'il allait enfiler pendant que son aide à domicile, attendait qu'il se décide, comme un gamin devant sa garde robe.

Le jeune homme avait décidé lentement mais sûrement de reprendre sa vie en main, ce n'était pas facile tous les jours, il y avait des jours où tout semblait lui sourire, puis d'autres, moins agréables où sa seule envie était de se coucher, de laisser les heures défiler et de se réveiller le lendemain en espérant que ce serait une meilleure journée. Et puis, il y avait ces jours où il était totalement perdu, sombrant dans ses pensées les plus morbides, tout en se mettant à déprimer, très souvent enfermé dans sa chambre, refusant tout contact avec l'extérieur.

Aujourd'hui n'était pas un de ces jours, c'était même un jour qu'il appréhendait particulièrement, mais dont il avait hâte d'y être. Il avait rendez-vous avec Maddie, en revanche, il ignorait s'il devait le qualifier de simple rendez-vous entre amis ou bien s'il devait appeler ça un premier rencard. En réalité, il avait envie, il espérait même que c'en était un, mais il avait tout simplement peur de prendre le risque de le qualifier ainsi. Que risquait-il ? Maddie ne risquait pas de fuir en apprenant qu'il est paralysé, puisque depuis qu'elle le côtoie, il est ainsi. Alors il n'a pas à craindre le comportement lâche de son ex-petite amie, et pourtant, il ne cesse de se rabaisser, de se persuader qu'il ne mérite pas d'être heureux, et encore moins de connaître l'amour, même si au plus profond de lui, il espère le connaître un jour. Peut-être qu'il serait qualifié de fleur bleue, mais plus il passait de temps avec la banquière, plus il s'attachait à elle. Était-ce bon ou mauvais signe ? Et si ce n'était pas réciproque et qu'il le lui avouait, il allait connaître un nouveau malheur et il n'était pas prêt à subir de nouvelles souffrances alors que ces dernières années ont été éprouvantes pour lui, et qu'il ne s'en est pas encore totalement remis. Peut-être même s'en remettra-t-il jamais.

Perdu dans ses pensées, il entendit au loin un bruit, il lui fallait plusieurs secondes avant de réaliser que quelqu'un venait de frapper à la porte. Un rapide coup d'oeil à la pendule du salon lui indiquait qu'il ne pouvait s'agir que d'une personne, et immédiatement, son visage s'illumina lorsqu'il la découvrit. Elle était tout simplement magnifique qu'il en perdit ses mots.

" - Je.. Oui ça va, et toi ?"

Wahou, elle avait un effet sur lui c'était incroyable, elle avait le don de rendre son monde joyeux, comme s'il oubliait soudain son fauteuil ainsi que tous les malheurs qui lui étaient tombés dessus. Cette femme est exceptionnelle et il n'en a jamais douté. Un sourire se dessina sur son visage tandis qu'il lui retournait la question.

" - Et toi, comment tu vas ? Est-ce que ton frère va mieux ?"

Il avait beau être con et égoïste, depuis qu'elle lui avait parlé de son frère, il ne pouvait cesser de se sentir concerné, même s'il n'avait aucune raison de l'être. Mais il voulait l'assister du mieux que possible, parce qu'il savait ce que ça faisait de traverser tout cela seul. Alors il voulait assurer à la jolie brune qu'il était là si elle désirait se confier sur le sujet.

" - Je suis prêt, j'ai pris quelques petites choses à grignoter ainsi que des couvertures si jamais tu as froid."

Oui, parce que lui n'était que rarement frileux, et il se sentirait doublement coupable si suite à leur soirée, Maddie tombait malade. Il s'avanca en prenant gare de ne pas lui rouler sur les pieds, tandis qu'il fermait sa porte à clé et qu'il se dirigeait vers la voiture de la demoiselle garée à proximité, il ne put s'empêcher de sentir le stress l'envahir. D'une part parce qu'il s'apprêtait à passer la soirée avec une femme qui ne le laissait pas indifférent, mais aussi, parce qu'ils allaient être sur la plage, un endroit où ils seraient plus libres que s'ils avaient été sur la falaise avec le reste de la ville. En réalité, c'était d'autant mieux pour l'intimité du moment, mais surtout parce que pousser un fauteuil roulant sur les falaises n'est pas chose aisée. Il espérait simplement qu'elle n'ai pas pris ça pour une avance. Et dans le pire des cas, est-ce que ça le gênerait ? Absolument pas. L'idée lui plaisait même beaucoup. À cette pensée, il se mit à sourire comme un imbécile avant d'arriver à la voiture où il attendait que Maddie soit là pour le soutenir un minimum et qu'il puisse prendre place dans l'habitacle.

Lisandro est un gars honnête qui n'hésite pas à dire les choses lorsqu'il le faut, c'est aussi quelqu'un d'assez timide et il l'est encore plus lorsqu'il s'agit de montrer à une fille qu'il a un béguin pour elle. Si déjà avant il n'était pas très confiant et n'osait pas aller vers les filles pour les draguer comme le faisait ses camarades de jeu, lui est toujours resté en retrait pour observer. Il n'a jamais vraiment eu confiance en lui, mais cet accident a définitivement anéanti le peu qu'il avait. La vérité ? Oui Maddie lui plaisait c'est incontestable, mais est-ce qu'il avait le droit de lui imposer une telle chose ? Qui voudrait se mettre en couple avec un gars comme lui, qui plus est, paralysé ? Son ex avait pris ses jambes à son coup quand elle l'avait appris. Alors même si Maddie passait du temps avec lui, il doutait fort qu'elle imagine tous les aspects de sa vie handicap, et qu'elle les supporte, voilà pourquoi il n'avait jamais cherché à aller plus loin, de peur de briser leur amitié et de lui faire peur et qu'elle s'enfuit, ce n'est pas ce qu'il voulait. Alors si pour la garder près de lui, il devait oublier son béguin, il le ferait...

Lisandro avait regardé la jolie brunette qui était devant sa porte d'entrée, et il ne pouvait s'empêcher de se dire qui ne la méritait pas. Elle était tellement jolie, tellement agréable, tellement gentille, il ne méritait pas une telle personne, d'une part parce qu'il était devenu un véritable salaud depuis son accident et d'autre part, parce qu'il ne serait jamais assez bien pour une fille comme elle, il en était persuadé. Décidant de ne pas aborder ce sujet pour éviter un combat contre lui-même, il répondit à son interlocutrice lorsqu'elle prit de ses nouvelles. Il est évident qu'il lui retourne la question, tout en demandant des nouvelles de Tom. Probablement qu'il lui avait dit que Lisandro s'était immiscé dans sa chambre, d'ailleurs, rien que d'y repenser, il sent son coeur se serrer et les paroles de Tom retentir dans ses oreilles. Il avait été plus que blessé, mais il l'avait mérité, même si le jeune homme s'était excusé par la suite, il savait que ses propos étaient véridiques et c'était ça le plus dur à accepter. Il avait eu mal pendant plusieurs jours, et il faut croire qu'il était encore mal en point rien que de se rappeler ce moment là. En tout cas, Maddie ne l'avait pas engueulé ni quoique ce soit, ils n'en avaient pas discuté ensemble, mais en aucun cas il n'avait fait ça pour lui mentir, pour lui cacher la vérité ou autre, il voulait juste aider une famille à rester unie malgré la situation.. Encore une fois, il aurait mieux fait de s'enfermer chez lui pour ne pas en sortir.

Après s'être installé sur le siège passager, le jeune homme regarda Maddie s'installer derrière le volant. Son regard de se détacha pas d'elle jusqu'à ce qu'elle prenne la parole. Il fallait vraiment qu'il arrête de la fixer ainsi, mais c'était plus fort que lui. Son coeur lui disait de lui prouver ce qu'il ressentait, tandis que sa raison lui faisait comprendre que jamais une femme ne supporterait son caractère et son handicap très longtemps. Et si c'était pour souffrir encore une fois de plus, mieux valait éviter de faire quoique ce soit. Et si ce n'était pas réciproque ? Il allait vraiment passer pour un con, mais pour une fois oui, il avait envie de laisser tomber ces barrières et de tenter le coup, la plage serait sans doute l'endroit idéal pour lui avouer à demi-mots ce que son coeur veut lui dire. C'est aussi pourquoi, il se mit à sourire en entendant les propos de la jeune femme.

" - Il y aura sans doute quelques personnes, mais au moins, on sera beaucoup plus tranquille que si on avaient été aux falaises. Et puis.. les falaises avec un fauteuil.. Je pense que tu aurais passé plus de temps à t'occuper du fauteuil qu'à regarder le spectacle et ce n'est pas le but escompté.."

Lisandro a toujours eu l'impression d'être un boulet pour ses amis qui étaient restés après son accident. Il avait cette sensation qu'ils le ménageaient pour la simple et bonne raison qu'il était handicapé, qu'ils n'osaient pas vraiment le traiter comme une personne normale, et au fond ça le blessait, parce que les gens s'arrêtaient bien souvent à son fauteuil sans chercher à aller plus loin. Mais le soucis n'était pas d'actualité puisqu'il s'apprêtait à passer la soirée avec Maddie, alors inutile de se torturer l'esprit, c'était plutôt le moment de réfléchir à comment lui avouer qu'il en pincait pour elle.

Durant le trajet, le silence régnait dans la voiture, en temps normal il aurait sans doute trouvé celui-ci pesant, mais ce n'était pas le cas. Il regardait le paysage qui défilait, tandis que la jeune femme avait les yeux rivés sur la route. Il en profita pour la regarder de profil, ses lèvres fines, ses yeux pétillants, elle avait tout pour plaire à un homme c'est un fait, maintenant est-ce qu'elle, était attirée pour l'italien ? Il n'y avait rien de moins sûr. Heureusement pour lui, le trajet ne dura pas si longtemps que ça, puisqu'ils arrivaient à la plage. Un rapide coup d'oeil sur le sable lui montra qu'il y avait quelques personnes, mais ils avaient largement le loisir de s'éloigner d'elles s'ils le voulaient.

" - Tu sais.. Je ne t'ai jamais remercié de tout ce que tu as fais, et fait encore pour moi, tu n'es vraiment pas obligé de te coltiner un boulet comme moi, et pourtant tu le fais et sans râler en plus.. Tu es vraiment une femme extraordinaire Maddie, j'espère que tu le sais et qu'on te l'a déjà dit.."

La vie de l'italien prend un tournant qu'il n'aurait jamais imaginé, ou plutôt qu'il espérait secrètement mais qu'il ne croyait pas mériter. Maddie lui plaisait et pourtant, elle n'arrivait pas à le voir sans qu'il ne le lui dise. Les efforts qu'il avait fait depuis plusieurs mois, depuis sa rencontre avec elle au final, étaient bien plus conséquents que tout ceux qu'il avait fait depuis son réveil du coma. Tout avait été bouleversé par ce petit bout de femme qui avait mis ses pensées en désordre en intervenant dans sa vie au moment où il s'y attendait le moins, et au moment où il avait le plus besoin d'une personne à ses côtés, bien qu'il ne l'aurait jamais avoué. Il avait besoin d'aide c'est un fait, mais l'avouer et surtout le reconnaître c'est autre chose.

Au bout du compte, Maddie lui assure qu'elle va bien, tout comme Tom. Il n'a pas été le revoir depuis la dernière fois, et il n'est pas sûr qu'il aura la force nécessaire pour l'affronter une seconde fois. Il lui faisait confiance, et pourtant quelque chose dans le ton de sa voix lui disait qu'il ne devait pas lui faire confiance, qui devait y avoir quelque chose. Mais qui était-il pour s'immiscer autant dans leur vie familiale ? Personne. Voilà pourquoi il ne renchérit pas quand elle lui assura que tout allait bien, il préférait se dire qu'elle avait raison et que c'était lui qui voyait le mal partout. Sujet clos.

Tandis qu'il disait à la jeune femme que la falaise n'était guère un endroit pratique avec son fauteuil, elle enchaîna en disant que le sable ne valait guère mieux, et il le savait, mais il avait prévu d'essayer de marcher un peu, peut-être qu'il en serait capable ? Mais il refusait de faire peur à Maddie s'il s'étalait sur le sable après avoir aligné deux pas. Bien qu'il ne risquait pas de se faire très mal, moins que lorsqu'il se prêtait à ce petit jeu chez lui. Il allait devoir rester dans son fauteuil toute la soirée, hormis lorsqu'ils seront sur les couvertures, et encore. Cependant les derniers mots de Maddie lui réchauffaient le coeur. Elle venait de lui qu'ils iraient un jour. Tous les deux ? Ainsi, espérait-elle aller plus loin avec lui ? Il l'ignorait mais c'est de cette façon qu'il interpréta ses propos, voilà pourquoi il lui livra ce qu'il avait sur le coeur, il savait qu'il pouvait s'ouvrir à elle.

Contre toute attente, lorsqu'elle s'approcha de lui, il ne lut ni de pitié, ni de colère dans son regard. Rien de tout cela. Elle posa même la main sur son bras, ce qui le fit frissonner. Il savoura ce contact avec la peau chaude de la jeune femme, il ferma même les yeux un court instant, comme pour s'assurer qu'il ne rêvait pas, et en ouvrant de nouveau les yeux, il constata qu'elle était toujours debout à ses côtés. Il ne put que s'en féliciter intérieurement. Et le discours de la belle brune ne fit qu'accroître ce sentiment qui grandissait au fond de lui. Ce soir semblait être le moment idéal pour le lui avouer quitte à souffrir, il en avait marre de vivre avec le poids de ses regrets, il refusait d'en avoir un de plus à porter.

" - Écoute.. Je ne pensais pas être capable de le dire un jour depuis qu'on m'a abandonné après mon accident, mais.. Je te trouve magnifique, dès que je t'ai vu, je me suis dis que j'aimerai tellement qu'une femme comme toi s'intéresse à moi.. J'ai jamais cru que quelqu'un puisse agir de manière détachée comme tu le fais depuis notre rencontre.. Je n'aurai jamais pensé un jour mériter d'être heureux à nouveau, mais quand je suis avec toi, j'ai l'impression que plus rien ne m'atteint. J'ai tout simplement pas envie que ce moment se finisse pour que tu repartes chez toi. J'ignore si c'est le bon pour te l'avouer mais tu me plais vraiment. Je comprendrai que tu ne veuilles pas t'encombrer de moi, tu mérites d'être heureuse, parce que j'aime voir ce sourire se dessiner sur ton visage, tu pourrais illuminer une pièce entière avec. Je ne te demande pas de répondre quoique ce soit, je voulais simplement que tu saches ce que mon coeur crit depuis que je t'ai rencontré."

En vérité, il se sentait terriblement nerveux, ne sachant pas comment la jeune femme allait réagir et même si le moment était bien choisi, mais il ne pouvait plus se taire, et tant pis si elle partait, il ne pourra regretter de ne pas l'avoir fait pendant qu'il en avait encore la possibilité. Mais il ne pouvait pas tout simplement pas se dire qu'elle accepterait, qui aurait accepté ? Personne, hormis quelqu'un déposséder de sa faculté à réfléchir convenablement, personne ne souhaitait avoir un homme comme lui à pousser partout, et il ne pourrait pas lui en vouloir, il en était pleinement conscient.

Cela faisait un bout de temps que Lisandro pensait à dire à Maddie ce qu'il avait sur le coeur, mais le jeune homme n'a jamais été impulsif lorsqu'il a du prendre des décisions. Elles sont toujours réfléchies, c'est la raison pour laquelle il ne l'a pas fait plus tôt, parce qu'il avait besoin de s'assurer qu'il agissait en connaissance de cause. Et puis, il avait également besoin de savoir si tout cela n'était qu'un minimum réciproque, pour éviter de passer pour un imbécile de première et de ridiculiser devant la magnifique jeune femme qui lui faisait face.

Alors forcément, pour lui, cette soirée sur la plage, le cadre un peu romantique mais surtout assez intimiste était le moment idéal. Durant le trajet, il avait essayé de répéter ce qu'il s'apprêtait à livrer à la jeune femme, mais malgré tout ses efforts, le discours qu'il avait préparé était tout simplement inutile puisqu'il n'arrivait pas à trouver les mots exacts. Il n'avait absolument pas réfléchi et les mots étaient sorti presque naturellement sans qu'il ne puisse les contrôler. Et il faut croire que parfois, même lorsqu'ils sortent de cette manière, ils n'ont sont pas moins sincères, pour l'ancien sportif en tout cas.

Contrairement aux apparences, et ce même lorsqu'il était validé, Lisandro n'a jamais été un don Juan, certes il y a eu plusieurs jeunes femmes qui lui couraient après à cause de sa célébrité, mais il n'en avait que faire, parce qu'il avait déjà trouvé celle qui lui correspondait, du moins il le pensait. Puis il secoua la tête pour oublier Cecilia, elle l'avait abandonné quand il avait besoin d'elle, aujourd'hui, peu importe où elle est, il refuse de penser à elle. Sa relation avec Maddie sera différente, parce qu'elle la toujours connu en fauteuil, elle sait à quoi s'en tenir, mais ce n'est pas pour autant qu'elle devra faite des sacrifices pour lui, il le refuse ! Voilà encore une chose qui est incompatible avec une relation, Lisandro ne peut pas lui imposer une telle chose, mais la laisser partir serait encore plus douloureux et il s'y refuse. On dirait bien qu'il va devoir faire des efforts sur son handicap, sur sa manière de se percevoir lui-même s'il veut pouvoir avancer à ses côtés.

Ce fut donc au tour de la jeune femme de lui ouvrir son coeur, de lui déclarer ce qu'elle ressent au plus profond d'elle-même. Lorsqu'elle prononce certains mots, Lisandro sent son coeur se serrer, il se sent coupable de lui avoir fait ressentir ça, au contraire, il voulait lui montrer qu'elle était plus qu'une amie, qu'il appréciait sa compagnie, mais bien plus que celle d'une amie, que s'il avait eu la possibilité, il ne l'aurait pas quitté après toutes ces soirées. Le moment le plus difficile, c'est celui où Maddie rentre chez elle, où il regarde sa voiture s'éloigner en se demandant si elle voudra le revoir un jour. Aujourd'hui, il sait que c'est le cas, qu'elle veut le revoir, qu'elle veut profiter de moments avec lui, et c'est tout aussi réciproque.

" - Je ne vois pas en quoi ouvrir ton coeur te ferait passer pour une fille idiote voire niaise, bien au contraire, tu as un coeur et c'est tout à ton honneur de me faire part de ce qu'il y a dedans, surtout si ça me concerne. Je suis désolé de t'avoir fait pensé que tu n'étais qu'une amie, j'ai.. J'ai eu une relation difficile avec une personne qui m'a soutenu des mois durant, qui est resté auprès de moi pendant mon année dans le coma, mais qui m'a abandonné en apprenant que je ne remarcherais jamais.. Je.. J'avais tout simplement peur de ne pas être à la hauteur de tout cela.. Tu voulais faire le tour du monde, comment est-ce possible avec quelqu'un comme moi ? Je refuse que tu puisses sacrifier des choses pour moi, à cause de moi, ça c'est une certitude, il faut juste que.. Que j'apprenne à vivre avec, mais c'est encore difficile parfois.. J'espère que tu seras assez patiente pour ça.."

Puis, à la fin de son discours il posa sa main sur celle de la jeune femme encore sur son bras, puis il enlaca leurs doigts ensemble. Un frisson parcourut tout son être quand il remarqua que leurs mains s'emboîtaient comme si elles avaient été faites l'une pour l'autre. Tout cela lui remettait du baume au coeur, et il était désormais prêt à se battre pour s'en sortir, pour remarcher un jour, parce que désormais il savait qu'il avait un soutien indéfectible auprès de lui. Il lui devait bien ça.

" - On va s'installer ? On sera sans doute mieux que sur le parking.." fit-il en émettant un petit rire.

Et puis au moins, il pourra la serrer contre lui une fois qu'il sera sorti de ce fichu fauteuil. Maddie avait beau dire ce qu'elle veut, c'est tout de même un obstacle.. Enfin il faut dire qu'il s'était obstiné à penser des choses avec ce dernier, et finalement, il se rendait compte que les barrières, c'est lui qui se les étaient imposé tout seul.

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, Lisandro est loin d'être un homme sur de lui et avec un excès de confiance en lui, c'est même tout le contraire. Il n'avait déjà que peu de confiance avant son accident, et ce dernier lui a retiré le peu qu'il avait. Désormais, il s'était renfermé sur lui-même, prisonnier de son propre corps dans lequel il ne croit plus. Et pourtant, cette fois-ci, il sait que c'est une barrière pour la relation qu'il s'apprête à débuter avec la jeune femme, du moins c'est ce dont il s'est persuadé. Et en même temps, ça a toujours été ça, ses amis, enfin ceux qui prétendaient l'être l'ont abandonné à cause de ce fauteuil, comment pouvait-il se considérer comme normal, comme si ce n'était pas une barrière dans tout ce qu'il entreprenait ? Il devait voir la vérité en face, c'est lui qui en avait fait aussi une barrière infranchissable. Maddie venait de lui en faire prendre conscience.

Le jeune homme jugeait important le fait de lui livrer tout ce qu'il portait en lui, tout comme ses réticences et son expérience passée qui l'avait fait hésité avant de se lancer dans le grand bain, non sans la crainte de se faire rembarrer. Parce que c'est toujours comme ça qu'il avait été perçu depuis son accident, alors il ne voulait pas risqué de foutre en l'air la seule chose à laquelle il tenait. Finalement, il était content que sa déclaration paye, qu'il n'ai pas tout gâché en lui avouant une telle chose, car elle aurait très bien pu fuir en courant et il n'aurait pas pu lui en vouloir, c'était certain. Lui-même, dans la situation inverse, il ignore comment il aurait réagit.

Les mots de Maddie le touchèrent au plus profond de son âme, jamais on ne lui avait dit une telle chose depuis que.. Depuis qu'il était réduit à ce stade handicapé. Est-ce qu'un jour il aurait conscience qu'il méritait d'être heureux, de rendre une personne heureuse ? Il n'en savait rien, seul le temps le lui dirait. Et pour le moment, il avait simplement envie d'aller sur le sable chaud, même s'il ne pourrait pas en sentir la chaleur, puisqu'il ne ressentait aucune sensation depuis son bassin jusqu'à la pointe de ses orteils, mais au moins, il serait là, avec Maddie, et dans l'immédiat c'est tout ce qu'il souhaitait. C'est la raison pour laquelle il lui proposa d'aller s'installer pour ne pas perdre de temps. Il en avait déjà assez perdu, il ne voulait pas en perdre encore plus.

" - Ne t'en fait pas, ça va aller." dit-il alors qu'il s'extirpait de son fauteuil.

Malgré la difficulté qu'il ressentait, il posa ses pieds dans le sable, fit un pas et demi avant de se laisser tomber sur ses bras pour s'installer sur les couvertures qu'elle avait préalablement installé. Puis une fois que ce fut fait, il adressa un large sourire à Maddie pour qu'elle vienne prendre place à ses côtés. Il avait une idée bien précise en tête et il n'avait pas envie d'attendre plus longtemps pour goûter à ses lèvres qui le tentait de plus en plus ces derniers temps. Passant un bras autour de ses épaules pour l'attirer à lui, il scella leurs lèvres dans un baiser intense, à tel point qu'il en était tout retourné. Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus ressenti ce sentiment qui vous prend les tripes. Décidemment, Maddie était vraiment pleine de surprise.

" - Si tu savais à quel point j'en avais envie depuis tout ce temps.." fit-il alors qu'il mit fin au baiser afin qu'ils puissent reprendre leur souffle respectif.

Ce que Lisandro était en train de vivre et s'apprêtait à vivre, jamais il ne l'aurait pensé possible avec son handicap. Il s'était enfermé dans sa bulle, refusant de croire qu'il avait le droit au bonheur comme tous les autres, et pourtant, ce qu'il s'apprêtait à vivre venait de briser toutes les barrières qu'il s'était mise jusqu'alors. Pourquoi ? Parce qu'on lui avait toujours fait sentir que son fauteuil serait un obstacle à tout ce qu'il entamerait, ses amis l'avaient abandonné parce qu'ils pensaient certainement qu'il ne serait plus jamais le même, et ce n'est pas faux, il ne sera plus jamais le même, est-ce une raison pour autant pour le rejeter de la sorte ? Il n'est pas plus coupable que ses amis, et pourtant c'est lui qui a payé les pots cassés de cet accident.

On dit toujours que si on avait su telle ou telle chose on aurait fait tout cela avant, et bien c'est exactement ce qu'il ressentait. Mais est-ce qu'un jour il sera imaginé que quelqu'un serait capable de surmonter son handicap alors que lui-même ne l'était pas ? Une chose dont il était persuadé, c'est que Maddie avait une force de caractère sans égal, et rien que pour ça, cette femme lui plaisait bien plus que toutes celles qu'il avait pu rencontré.

Finalement, après sa proposition d'aller s'installer sur la plage, ils en prirent le chemin et le jeune basané s'extirpa de son fauteuil pour prendre place sur le sable. Immédiatement, il sentit la jolie brune venait se blottir contre lui, ce geste qu'il n'avait plus connu depuis longtemps le fit sourire et il en profita comme s'il avait peur que tout s'arrête demain. Il décide alors de briser les quelques centimètres qui les sépare encore, non seulement parce que c'est son rôle, mais surtout parce qu'il en a envie. La vérité c'est qu'il en meurt d'envie depuis un bout de temps, mais jusqu'alors, il s'était retenu tout simplement parce que ce n'était pas dans ses manières de sauter sur les femmes, et puis, même si ça l'était, il serait bien emmerder vu son état !

En échangeant ce baiser, il sentit la main douce et chaude de la jeune femme parcourir son corps, tout d'abord sa joue, sa nuque puis son torse. Bien évidemment qu'il frisonna suite à ce contact. Il n'avait plus envie qu'elle retire sa main, la chaleur se répendait dans son corps et ça lui fit un bien fou. Depuis son accident, il avait tout simplement l'impression de se remettre à revivre, comme si durant ces quelques minutes, il en avait oublié qu'il était paralysé, qu'il était incapable de se mettre sur ses deux jambes et de réaliser tout ces petits gestes de la vie courante pour satisfaire la belle brune qu'il avait à ses côtés. Est-ce qu'elle en avait conscience de tout ce que ça représentait pour lui ? Du fait de se sentir diminué à ce point là ? Il aborderait sans doute le sujet, mais pas ce soir, il ne désirait pas gâcher cet instant qu'il s'apprêtait à passer ensemble, la tête dans les étoiles rien que tous les deux.

" - Je suis ravi qu'il soit à la hauteur de tes espérances.." avoua-t-il timidement.

Il ne cesserait de se demander si chacun de ses gestes serait à la hauteur, si elle serait satisfaite et comblée avec lui, et ce tant qu'il n'aura pas conscience qu'il peut combler une femme malgré son état, et lorsqu'il l'aura comprit, sa guérison sera quasiment terminée.

" - Je n'allais tout de même pas t'embrasser sur un parking non ! C'est beaucoup plus ... intime, romantique ou appelle ça comme tu veux, sur la plage que sur un parking au milieu des voitures. Tu ne trouves pas ?" fit-il en lui adressant un fin sourire tout en posant sa tête contre la sienne.

Pour la première fois depuis bien longtemps, plus rien de comptait, il n'avait d'yeux que pour elle, le reste passait au second plan et ça ne le gênait pas le moins du monde, cependant il devait rester sur ses gardes, prendre conscience que tout pouvait se terminer à tout moment, et si ce moment arrive, il risque de sombrer très rapidement. Mais pour le moment il ne veut pas y penser tant qu'il a Maddie dans ses bras.

Lisandro ne s'était considéré comme étant un don juan, bien loin de là d'ailleurs, même si certains venaient à penser le contraire, il n'a pas utilisé sa célébrité pour obtenir une tonne de conquêtes féminines. Comme tout le monde, il a eu celles lorsqu'il était adolescent, mais pour la plupart, pas très sérieuses, si ce n'était plus que quelques semaines. Et puis il y avait eu son ex petite amie. Mais s'il y avait bien quelque chose à laquelle il tenait dans une relation, c'était en premier lieu la confiance, ça allait de ça, mais également de la tendresse. Il en avait besoin, d'autant plus maintenant. Même s'il ne l'avouait pas, il était en manque d'affection pendant tout ce temps. Depuis combien de temps n'avait-il pas touché une femme ? Depuis combien de temps n'avait-il pas été aussi proche et intime avec une femme au point de l'embrasser ? Pas depuis deux ans au minimum, alors forcément, au moindre contact, son corps réagissait au quart de tour. Était-ce une bonne ou une mauvaise chose ? Il n'en savait trop rien, mais pour la première fois depuis longtemps, il avait tout simplement envie de lâcher prise, de ne plus se poser de questions et de laisser les choses arriver comme elles le doivent sans s'interroger dessus.

Même si l'italien n'avait aucune estime de lui-même, il n'en était pas moins lorsqu'il s'agissait de ses actes. Est-ce qu'il serait vraiment à la hauteur de ce qu'attendait la brune ? D'ailleurs, qu'attendait-elle de lui ? Encore un tas de questions qui venaient perturber ses pensées, et auxquelles il devait trouver des réponses rapidement s'il ne voulait pas laisser partir la seule merveille qu'il venait de trouver. Il n'était pas prêt à la laisser repartir maintenant qu'il avait goûté à ses lèvres, à sa compagnie si proche de son corps. Non, il en était hors de question. Il devait commencer à apprendre à vivre avec ... son fauteuil, et cette relation était le meilleur début qu'il pouvait connaître.

" - Crois-moi, tu m'as déjà rendu accro à tes lèvres, je ne pourrais pas attendre d'être sur une plage avant de t'embrasser, c'est une certitude. C'est même une promesse."

Et même si Maddie ne connaissait pas encore Lisandro pour savoir que lorsque ce dernier faisait une promesse, c'est qu'il s'engageait à la tenir. Il y mettait même un point d'honneur, c'est quelque chose qu'il avait toujours fait, et qui n'avait pas changé malgré son accident. Est-ce qu'il attendrait d'être sur une plage pour l'embrasser ? Il est évident qu'il ne tiendrait pas aussi longtemps, si cela ne tenait qu'à lui, il passerait son temps à sceller ses lèvres avec celles de sa partenaire.

Son sourire s'agrandit un peu plus quand il sentit la brunette se réfugier un peu plus dans ses bras, il ressera l'étreinte autour d'elle avant qu'elle ne décide de venir lui avouer quelque chose. Quelque chose d'important concernant son frère. Il plongea son regard sur la mer devant lui tout en l'écoutant avec attention. Et lorsque le morceau fut lâché, il ne put que s'éloigner un peu d'elle avant de plonger son regard dans le sien.

" - Tu n'as pas à t'excuser, c'est plutôt à moi de le faire.. Tu n'es sans doute pas sans savoir que j'ai été le voir.. Je.. Je voulais pas le faire dans ton dos, mais j'en avais besoin et je pense que lui aussi.. Notre première discussion n'a pas vraiment été des plus amicales mais.. Jamais je n'aurai souhaité quelque chose comme ça pour lui. Ou pour n'importe qui d'ailleurs.. Dit-moi si je peux faire quelque chose, maintenant que tu n'es plus toute seule, sache que tu peux te reposer sur moi si tu as besoin de soutien, ou juste pour te reposer."

Ce n'était pas sans doute pas aisé quand on a l'habitude de tout garder pour soit, de partager ce qu'on a sur le coeur avec un ... inconnu. Parce que oui, même s'ils avaient échangé un baiser et pas mal de choses de leur vie respective, il ne demeurait pas moins qu'ils ne se connaissaient pas réellement en profondeur. Lisandro voulait être un pilier pour Maddie, qu'elle puisse se reposer sur lui si elle en ressentait le besoin, c'était la moindre des choses qu'il pouvait faire, parce que clairement, il ne pouvait pas faire grand chose de plus dans la situation qu'elle venait d'exposer. Cependant, pour lui montrer que ses propos n'étaient pas seulement de belles paroles, il passa ses doigts vers son menton afin de le relever pour que leur regard se croisent et qu'il puisse lui faire de douces caresses sur la joue.