(Carlisle) Parce que quand on est accro, même si ça fait mal, parfois ça fait encore plus mal de décrocher.

Sandwich à la main, talon qui claque sur le sol, le pas pressant, je devais rapidement rejoindre mon salon, ma petite heure de pause allait bientôt se terminer. J'aurais voulu manger dans le restaurant de mon ami Carl, mais je n'avais pu me faire remplacer par Dylan que pour une heure, il avait un rendez-vous de je ne sait pas quoi. Il était déjà bien gentil de me remplacer pour que j'aille manger. Alors que je m’apprêtais à tourner dans la rue de mon salon, je croise le regard d'un jeune homme si semble me connaître, je vois qu'il me sourit et me fais un petit signe. Bon sang, c'est Carl, je fais quelques pas en arrière manque de me casser la figure en m'embrochant dans un pavé trop haut et me rattrape à l'épaule de mon ami. « Oh Carly ! Tu me sauves là la vie merci, tu vas bien ? » Je lui embrasse la joue et croque une nouvelle fois dans mon sandwich, je vois, il se moque de moi, je dois certainement avoir de la sauce sur ma joue alors, je m'essuie et hoche la tête « Ouais, je sais, ce n'est pas très Healthy, mais je n'ai pas vraiment le temps » dis-je en froissant le sachet de mon sandwich pour l'envoyer dans la poubelle voisine. YEAH. Pile dedans. « T'as le temps de venir boire un thé ? Je dois libérer Dylan qui a un rendez-vous » D'ailleurs, je regarde ma montre et soupire, je risque de me faire engueuler par Dylan. Tant pis, il attendra un peu.

Une fois par semaine Carlisle s’autorise un peu de repos. En vérité il traite une partie des choses qu’il n’arrive pas à faire durant la semaine, bien qu’il soit un homme relativement organisé. Il profite de ce jour également pour s’occuper de son bien-être et fait quelques exercices de développement personnel. Il sort également car il a toujours quelques courses à faire. En l’occurrence le jeune homme doit passer acheter quelques produits d’entretiens pour son appartement, rien de bien palpitant. En route il croise Dan, une de ses amies qui a l’air bien pressé. N’ayant pas forcément envie de la déranger il lui lâche un simple sourire et un signe de main. Il lui semble qu’elle ne l’a pas remarqué mais ensuite il sent qu’elle lui tombe à moitié dessus, il ne peut s’empêcher de lâcher un rire, d’autant plus qu’elle déclare qu’il lui sauve la vie. « Ça va bien et toi ? On dirait que t’es pas mal occupée ! » Il la voit avec son sandwich à la main, le genre d’alimentation qu’il a banni depuis longtemps. La jeune femme remarque qu’il est en train de reluquer son repas avec peu d’appétit et lui déclare qu’elle est au courant qu’il y a mieux mais que visiblement elle n’a pas beaucoup le temps, ça il a bien cru comprendre quand elle est presque tombée à la renverse sur lui. « Tu sais tu peux passer au resto et j’te ferai un sandwich vite fait mais un peu mieux que celui-là. » Genre pas un truc sans goût avec plus de mayonnaise et de pain qu’autre chose. Pour lui ce n’est pas qu’une question de santé mais aussi de goût. S’il ne mange pas dans des fast-food (sauf invitation qu’il ne peut décliner), ce n’est pas pour sa santé mais parce qu’il trouve ça immonde comme nourriture et préfère se cuisiner des pâtes toutes simples. Dan lui propose de venir boire un thé, Carlisle réfléchit un instant, à part ses courses il a prévu de passer le reste de l’après-midi à ranger, faire le ménage et se détendre, il a donc le temps. « Ok ! » dit-il en la suivant.

Une chose qui est bien avec Carlisle, c'est qu'on a les mêmes convictions, pas mal de point en commun et une énorme facilité à se parler. Enfin, pour le dernier point ce n'est peut-être que mon point de vu, mais je me laisse penser qu'il sait qu'il peut me parler de tout ce qu'il souhaite sans avoir peur de mon jugement. Ce sont peut-être ces autres points qui nous ont rapprochés quand on était au lycée. Ou alors le fait que je sois fabuleuse, mais ça, ça reste encore à prouver. Il a toujours été une personne à qui j'aimais me confier. C'est d'ailleurs ce qui m'a poussé à redevenir ami avec lui après qu'il ait brisé mon cœur. « Non, je ne savais pas, je ne voulais surtout pas t'embêter.. » J'ai jamais été de ceux qui pensaient que tout leur était dû. On a beau être des amis, sans qu'il ne m'en parle je me vois mal aller à son restaurant, m'asseoir sur le plan de travail en attendant qu'il fasse mon sandwich Fancy Healthy. Depuis mon séjour à Sydney et au vu de mon entourage, là-bas, je suis un peu devenue une bobo-écolo. Je suis devenue ceux dont je riais en arrivant à Sydney et pourtant, j'aime ce que je suis devenue. Même si je n'arrive pas totalement à me passer de viande, poissons et produits laitier j'ai au moins le courage d'essayer et de faire attention à notre belle planète qui ne risque pas de le rester longtemps si on continue comme ça. Il s'était finalement mis à me suivre et c'était tant mieux, je ne pensais pas avoir beaucoup de monde en ce début d'après-midi ensoleillé, mais, je devais tout de même être présente en magasin. À peine la porte poussée que Dylan m'attends avec de gros yeux en pointant la montre imaginaire qu'il a sur le bras « Dani bon sang... Tu sais que j'ai un rendez-vous ! » Lança-t-il avec tout l'agacement du monde. Je lui fais donc signe de filer au plus vite. Il m'envoie un baiser et je reprends rapidement mon poste. « Bonjour madame Rutelman, comment allez-vous aujourd'hui ? » Demandais-je à la petite mamie assise à sa place habituelle, à son heure habituelle avec sa tisane préféré. J'adore mes petits vieux, ils sont la seule constance de ma vie, et même si ça donne un petit côté routine à mon boulot, ils sont ceux pour qui je me lève le matin. « Installe-toi, Carl, dis moi ce qui te ferais plaisir ? » Lui demandais-je en enfilant mes gants tel un docteur prêt à faire un examen dont personne ne veux.

Carlisle trouva charmant le fait que son ami ne veuille pas la déranger alors qu’il travaille. C’est vrai que lorsqu’il est tout seul cela peut être bien compliqué de s’occuper de son restaurant et d’en plus accueillir ses amis pour leur confectionner un sandwich. Mais honnêtement cela ne lui prendrait pas plus de deux minutes de trouver une idée, les ingrédients et tout mettre ensemble. Il a tellement eu l’habitude quand il travaillait à Paris d’être sous pression, de devoir faire les choses vite et bien, que cela ne lui fait plus peur. Il trouve tout de même cela plus effrayant de se retrouver seul en cuisine à tout gérer plutôt que d’avoir vingt personnes qui courent autour de lui pour satisfaire les clients les plus exigeants.
Ils prirent tous les deux la route du tea’rese qui ne se trouvait pas très loin. Il faut dire qu’à Bowen, les commerces ne se trouvent pas bien loin les uns des autres et c’est ce qui plaît au jeune homme dans cette ville, la proximité. Durant son périple autour du monde, il en a vu des grandes villes et des campagnes. Ce qu’il préfère encore ce sont les villes de taille moyenne, assez petite pour ne pas s’y perdre à chaque coin de rue mais assez grande pour éviter que tout le monde connaisse par cœur la vie des autres et leurs ragots.
Lorsqu’ils entrèrent, Dylan assaillit immédiatement Dan, il semblerait qu’il soit pressé. Carlisle haussa un sourcil à cette scène avant que la demoiselle ne retourne à ses clients, des habitués lui sembla-t-il. Peut-être que lorsque son restaurant sera un peu plus vieux, lui aussi connaîtra le nom d’une partie des clients et pourra les conseiller au mieux en connaissant leurs goûts. A l’invitation de son ami il s’assit et réfléchit à ce qu’il pourrait bien prendre. S’il est sportif, Carl est aussi un gourmand, ce n’est pas pour rien qu’il aime cuisiner. Tout lui faisait envie et on peut bien le dire, il avait déjà quasiment goûté à tout. Après quelques instants de réflexion il se prononça. « Je vais prendre une part de tarte aux pommes avec le thé qui ira le mieux. » Il lui fait confiance pour ça. « Bon alors dis-moi, que se passe-t-il dans ta vie qui va si vite ? » demanda-t-il avec un petit sourire en se rappelant comment la demoiselle lui était rentrée dedans tant elle était pressée.