happy birthday love (leanche)

A trop penser que tout était naturel, que les choses se déroulaient avec une simplicité déconcertante. A se laisser glisser petit à petit dans la certitude qu’elle lui était acquise, de cette façon et pas d’une autre et qu’il ne fallait donc pas chercher plus loin que ça. A croire que tout était facile, Léo en oubliait que c’était trop facile. Il s’était fait une fausse idée en s’imaginant que Blanche n’en demanderait pas plus. Pourtant il aurait dû se méfier, aurait dû savoir qu’elle allait se laisser tenter par l’idée d’accélérer les choses. Tout était de sa faute à lui, à force de jouer l’homme parfait, à force de se montrer si accessible en envoyant de signaux énormes comme s’il était enfin prêt à s’ouvrir à elle pour que leur relation évolue en une véritable histoire d’amour, elle s’était engouffrée dans la brèche. Il ne pouvait pas lui en vouloir, il était le seul à blâmer. Mais il n’avait pas imaginé une seconde qu’elle puisse finir par se lasser de ce petit jeu à force de l’attendre sans rien obtenir de plus qu’une tendresse finalement superficielle, comme la seule qu’il ait jamais été capable de réellement lui offrir. Il n’était pourtant pas contre l’idée d’en donner plus, mais il lui fallait pour ça se départir de ses doutes. Un voyage c’était facile, à vrai dire Blanche n’était pas la première fille qu’il embarquait avec lui, il l’avait déjà fait plusieurs fois, pour en mettre plein la vue ou simplement pour être sûr de partir en bonne compagnie et elle le savait très bien, elle n’était pas idiote, c’était d’ailleurs peut-être l’une des raisons  de ses réticences à le suivre, parce qu’elle ne voulait pas être simplement une fille de plus. Pour Léo ça ne signifiait généralement pas grand chose, ne nous voilons pas la face. Mais ce séjour là, avec elle, un simple tête à tête dans un lieu paradisiaque sans but humanitaire, aucune visite de ville ou randonné en montagne, juste elle et lui, c’était bien autre chose qu’embarquer n’importe quelle fille dans ses escapades sur un coup de tête. C’était la preuve qu’inconsciemment, au delà de son habitude à organiser des voyages à l’autre bout du monde, il voulait que les choses évoluent enfin entre eux. Comme l’occasion de se créer des souvenirs loin de Bowen, dans un endroit neutre là où aucun fantôme du passé ne pourrait venir les hanter. Comme la chance de vivre des levés de soleil emplis de tendresse dont Blanche rêvait tant et des couchers de soleil sur le sable à garder précieusement en mémoire. Mais une nouvelle fois il avait fait les choses de travers, sans se douter un instant qu’en plus de l’humiliation de se faire offrir un voyage tous frais payés, la tatoueuse n’apprécierait pas le fait qu’il semble avoir tout organisé dans son dos, prenant totalement le contrôle de ce qui était au départ son idée. Se sentant soudainement fautif, il baissa les yeux sur la main de Blanche qui caressait la sienne. Puis il releva la tête et la fixa avec tendresse. Tu sais que l’argent je m’en fous. C’est pas ce qui compte. Et j’crois que tu n’as pas conscience de tout ce que tu m’offres, que tout ça vaut bien plus que quelques billets. C’est simple pour moi de distribuer mon argent en cadeaux coûteux ou de te dépanner, ça me fait passer pour quelqu’un de bien, de généreux. Mais finalement j’ai rien à offrir moi. J’ai pas la moitié de ta sensibilité. Il embrassa toute la pièce d’un regard brillant d’émotion, prenant enfin pleinement conscience de l’attention de Cambridge. Jamais je n’aurai l’idée de faire quelque chose de si beau. Et même si ça me fout la trouille, ça me touche, bien plus que tu ne le penses, parce que personne n’a jamais fait ça pour moi. On m’offre des choses futiles dont je me moque, on me flatte sur des sujets faciles. Mais cette soirée... et toi… ça signifie tellement plus. Alors, crois-moi, c’est moi qui me sens petit, ridicule face à toi ce soir. Blanche avait tout autant peur que lui et cette idée, loin de le rassurer, lui fit réaliser qu’ils étaient tous les deux aussi effrayés l’un que l’autre quant à cet avenir qui se dessinait face à eux et ces décisions qu’ils allaient prendre qui pourraient tout changer en bien comme en mal. Et même si on disait qu’il ne fallait pas se poser de questions il ne pouvait s’empêcher de se dire que si ça pouvait être un véritable gâchis, ça pourrait aussi être beau. Il la laissa déposer ses lèvres sur les siennes et il ferma les yeux pour apprécier la caresse de cette bouche, avant qu’un sourire en coin de se dessine alors qu’elle le remerciait. Finalement Léo s’allongea sur le sol recouvert de coussins et de couvertures qui invitaient à le faire pour mieux apprécier le spectacle des lumières au plafond. Je n’ai rien prévu tu sais, tu peux encore m’aider à tout organiser, il n’y a que les billets et l’hôtel de réservés. Je ne suis jamais allé là-bas alors on peut regarder ensemble pour les activités et le programme du séjour. Tu peux même tout planifier toute seule si tu veux, pour rétablir l'équilibre.

La Blanche remplit de cette légèreté de début d'année, de simplicité, de sourires charmeurs et d'envie de se laisser bercer sur les rails de leur amour inavoué, elle était toujours là. C'était la même. Cette fille qui l'avait charmé le soir des Bowards, celle qui avait retiré sa robe à l'arrière d'un stand de bière, au travers des barils de houblons, et qui avait posé ses lèvres enflammées contre celles de Léo, elle était toujours là. Cette blonde qui l'avait suivi dans ses folies, de retour chez lui, qui lui avait préparé un doux repas, juste après lui avoir fait l'amour, parce qu'il l'avait soigné avec douceur et que ça avait eu le don de la charmer, c'était la même. Elle était toujours là, cette Blanche, c'était elle qui avait tout organisé ce soir. C'était la même, elle n'était jamais disparue. Cependant, il fallait s'y attendre, un jour ou l'autre, qu'elle refuserait de se sentir acquise pour le reste de sa vie. Un jour, il faudrait qu'ils prennent une décision, qu'elle soit bonne ou mauvaise. Pas aujourd'hui, pas ce soir, Blanche était encore armée de patience, mais il s'agissait d'un avertissement qu'un jour, pour leur bien mutuel, il faudra être clair et précis dans ses envies. Et ce voyage, c'était peut-être le premier pas vers leur décision. Seuls, sur les plages romantiques, les levés et les couchés du soleil, tous les deux, sans les yeux voyeurs de Bowen, sans les soucis du quotidien, seulement deux âmes en quête de leur libre amour, c'était un plan qui lui semblait alléchant et auquel Blanche avait envie de croire. Malgré l'argent, malgré les surprises gâchées. Parce que l'argent, au fond, elle savait que Léo s'en fichait. Il en était plein, merci à sa famille pour l'héritage. Il parla avec son coeur, lui confia que ce qu'elle lui avait offert, ce qu'elle avait créé ce soir, c'était bien plus touchant que n'importe quels cadeaux dispendieux et alors que ses yeux brillaient de son émotion, Cambridge s'empressant de resserrer ses doigts contre la peau de l'homme, le rassurant de ses gestes silencieux. Léo, il était beaucoup plus sensible qu'il le pensait. C'est qu'il ne le laissait pas paraître, du moins seulement lorsqu'il l'avait choisi délibérément. Et elle le savait romantique, prêt à tout pour les filles qui avaient gagné son coeur. Blanche n'en était peut-être pas encore l'une d'entre elles, mais elle le savait capable de grandes actions pour les autres qui avaient partagé sa vie. Elle le força la le regarder, relevant sa tête pour qu'il plonge ses yeux assombris dans les siens, prêts à l'écouter. Je recommencerais, n'importe quand, pour toi, Léo. Comprends-le, lui assura-t-elle en soutenant son regard. Je... , elle prit une pause, remettant ses idées en place. Elle ne pouvait pas lui dire ce qu'elle s'apprêtait à faire. Après une grande respiration, elle se ressaisit. Des soirées comme celle-là, tu en mérites des centaines. Je t'interdis de dire que tu n'as rien à offrir, Emerson, sinon... penses-tu sincèrement qu'après toutes ses années je me serais entêtée à rester ? Elle lui sourit tendrement, malgré la lueur d'émotion dans ses yeux. Ils parlaient avec leur coeur, ce soir, et même s'ils avaient l'air d'épaves, c'était beau à entendre. Tu n'es pas ridicule, finit-elle par lui dire, juste avant de le remercier pour le voyage qu'elle se résignait à accepter, comme il était, sans avoir à le lui rembourser. Elle se jurait, cependant, de lui rendre la pareille d'une façon ou d'une autre. Puis, elle posa ses lèvres contre les siennes dans un doux baiser de remerciement qu'ils prirent chacun le temps d'apprécier à sa juste valeur, juste avant que Léo prenne ses aises dans les couvertures et les oreillers qui avaient été disposés pour cette raison, s'y allonger. Il fixait les fausses étoiles au plafond, alors qu'il enchaînait avec la suite de son discours. C'est avec toi que j'ai envie de le faire, pas toute seule, s'empressa-t-elle de lui dire en secouant la tête, refusant de prendre toutes les décisions. Tu me donnes la permission de venir me loger contre toi, mon coeur ? Proposa-t-elle, timidement. Elle ne le surnommait jamais, c'était venu tout seul et peut-être que c'était trop, un peu comme cette soirée. Mais elle en avait eu envie. Il lui avait donné des signaux contradictoires toute la soirée qu'il avait terminé sur un voyage surprise, une escapade à deux, cela valait bien un petit surnom volé à la dérive. Elle s'allongea à ses côtés, la tête contre son torse. Je ne connais rien de Bali, ni des voyages en fait... se confia-t-elle. Tu devras m'apprendre, parce que je suis bien plus que novice en la matière. Je crois que je n'ai même pas de passeport, gloussa-t-elle en caressa le torse de son amant. Merci encore, Léo. J'ai très hâte de partir avec toi.

La patience de Blanche avait des limites et on commençait doucement à en voir les contours. Pour tout un tas de raisons elle allait bien finir un jour par se lasser de l’attitude ambivalente de Léo. Parce qu’il serait capable de la décevoir une fois de trop, parce qu’elle finirait par s’éprendre d’un homme qui lui offrirait enfin ce à quoi elle avait droit, parce qu’elle voudrait fonder une famille, parce qu’elle en aurait marre d’attendre après d’un éternel indécis, ou pour de toutes autres raisons qui seraient totalement légitimes en vue de l’attitude de son amant. Au fond Léo en était conscient et ça lui foutait la trouille, parce que depuis quelques mois il réalisait qu’il tenait à cette fille, il était juste incapable de prendre les bonnes décisions, de faire les choses correctement sans paraître maladroit. Ca semblait si facile pourtant, quand on regardait Blanche quand on l’écoutait ouvrir son coeur à celui qu’elle aimait sans qu’elle semble avoir peur qu’il le repousse. Comme si elle n’avait rien à perdre puisque tout avait déjà été tenté, dit, ils se connaissaient par coeur, il fallait simplement mettre ses doutes de côté. Un frisson parcouru le photographe, elle était capable de lui donner tellement, même après toutes ces années de déceptions et ça le touchait de réaliser combien on pouvait l’aimer et en même temps ça lui collait la frousse de ne pas être capable d’en donner tant. Elle soutenait son regard alors que lui cherchait à le fuir une nouvelle fois. Tu es peut-être folle, d’être resté si longtemps, voilà tout. Il le pensait, pourtant le mince sourire sur ses lèvres prouvait largement qu’il était content qu’elle ait persévéré toutes ces années et que peut-être, enfin, ses efforts se voyaient récompensés. Joie ! Le si convoité Emerson offrait enfin un peu de place à sa plus ancienne groupie, enfin il lui ouvrait la porte et par cette porte la perspective d’un avenir qui se dessinait doucement. Après un baiser empli de douceur, la seule chose sur laquelle ils avaient toujours été capable de s’entendre, cette alchimie physique qui ne leur avait jamais fait défaut, Léo s’étendit sur le sol pour proposer une alternative à Blanche concernant le voyage, il reconnaissait en avoir trop fait en préparant ce séjour tout seul et il lui proposait alors de s’occuper de l’organisation des activités. Mais c’était peut-être un peu trop. D’accord, on fera ça ensemble. Il avait répondu, rêveur, la tête dans les étoiles, en observant ce plafond scintillant, c’est le surnom que Blanche lui donna qui le ramena sur Terre, il la regarda, interdit, puis sourit doucement en attrapant son bras. Viens. Décidément, elle s’imaginait totalement faire sa vie avec lui. Alors que la blonde se calait dans le creux de son cou, Léo se demanda quel pouvait bien être leur avenir et si elle n’en attendait pas trop de lui. Mais il chassa ses peurs en l’écoutant parler de ce voyage, elle était novice et il le savait, ça n’était pas important, au contraire, auprès de lui elle apprendrait vite. T’en fais pas pour ton passeport, j’ai quelques contacts qui te permettront d’en obtenir un rapidement. Il avait réponse à tout, elle le savait bien. Il sourit en caressant ses boucles blondes. Merci à toi d’accepter enfin de partir avec moi. C'est un beau cadeau. Finalement cette soirée d’anniversaire était belle, à l’image de leur relation, pleine de sentiments contraires mais la douceur se frayait toujours un passage dans le chaos et l’à peu près.