there is adam & eve and there was eve & eve (fauve)

mai 2019, adam & yves, bowen australia
Solitude qui t'enveloppe, qui te harcèle, t'as dans ta tête que le moment où t'as croisé Aelya, sans même t'être annoncée à l'avance. Chaos, ténèbres, rien ne va. Plus rien ne va. T'as merdé, t'aurais pu aviser, qu'est-ce que ça t'aurait coûté, Brooke, hein ? Rien. Un appel, un texto, juste un signal de vie. Hey, j'suis là, on ira s'prendre un café, je sais pas. N'importe quoi. Mais, la vérité, c'est que tu ne pensais pas rester. Non, ce n'est pas une excuse, t'en a marre de te cacher derrière de faussetés pour survivre. T'avais vraiment pas l'intention de rester. T'es valises n'étaient même pas défaites. T'avais juste besoin de venir te poser dans ta caravane, de souffler un peu avant que la route ne reprenne. Puis, ça t'es sauté aux yeux, le cabaret. Et lui, aussi. Le beau brun qui t'a engagé. Et ensuite, tu pourrais te morfondre sur les jours qui ont passés, le temps qui défile si vite que t'as pas pensé une seule seconde à les aviser, ni Aelya ni Theo. Le mal est fait. Et les foudres sont lâchées sur toi. Inévitablement, quand l'un est fâché contre toi, l'autre s'y joint, tellement fusionnel depuis ton départ, tellement inséparable, amitié qui s'est renforcée de ton absence, sept ans durant. Et toi, t'es retirée de l'équation. T'en feras plus partie, trahison en est la fautive. Alors tu vis ta solitude, entre les quatre murs de ta caravane, un joint qui se roule, une bouteille de Whisky entamée. Quand c'est pour du sexe, t'appelles le brun, un ou deux coups de reins et ton blues disparaît, mais, ce soir, çca n'a rien avoir avec l'envie de sexe. C'est bien plus profond. C'est le sentiment que tu ne peux compter sur personne d'autre que toi. Tu te lèves, éteins cet éternel pétard que t'as à la bouche, attrapes un pantalon avant de sortir et de laisser l'air frais de la nuit entrer dans tes poumons, traverser tout son corps avant de retrouver la sortir à l'expiration. Et tu marches, un peu sans savoir où tu iras, juste pour te sentir moins seule, entourée des gens et de leurs bruits, de leurs vies qui te font sentir moins désespérée. Quand tu lèves enfin les yeux, tes devant une boite de nuit. Un regard sur ton accoutrement, jamais on ne te laisseras y entrer, tu ries pour toi-même, hausse les épaules en regardant le bouncer à la porte qui te menace dur regard de te laisser à la rue. J'connais la proprio !, lui lances-tu, convaincante. Il te fait signe, tu le suis, et quand il arrive devant Fauve, tu peux lire dans ses yeux un jeu qui ne te plait pas. Il t'a laissé passer seulement pour se donner le plaisir de te rejeter à la rue dès qu'elle niera te connaitre. Mais quand elle pose les yeux sur toi, tu sais qu'au fond, elle ne t'a pas oublié. Alors, t'es devenue une femme d'affaires après tout ce temps ? Tu tends les bras, espères qu'elle vienne s'y réfugier, que sa chaleur t'enveloppe comme elle a sur le faire avant.

Les cheveux attachés négligemment par une simple pince, Fauve s'occupait de quelques papiers administratifs dans l'arrière-salle, composée principalement de stocks de boisson, de diverses choses qu'on ne savait pas trop où ranger, de toilettes pour le personnel, de matériel de nettoyage quand un malheureux vomi jaillissait inopinément, et d'un minuscule bureau où traînait la paperasse et toutes sortes d'autres choses. La soirée battait son plein, et la jeune femme comptait bien s'y joindre quand elle aurait fini, ou filer un coup de main au bar si besoin. Une fois la paperasse réglée, la slovène eut tout juste le temps de sortir de la pièce avant de se retrouver nez-à-nez avec son nouveau sorteur, accompagné d'un visage qui se rappela brusquement à sa mémoire. Fauve écarquilla les yeux, ceux-ci vrillés sur l'amie qu'elle n'avait plus vu depuis une éternité, alors que le sorteur lui expliquait la situation. « Brooke ? » souffla la brunette, sous le coup de la surprise, n'écoutant que d'une oreille ce que son employé lui disait. Cela finit par percuter et elle fronça les sourcils, se tournant vers l'homme. « Andrès, je t'ai déjà dit qu'il n'y avait pas de dress code au Adam & Yves. Je ne veux pas que tu refuses qui que ce soit pour des raisons de goût et d'esthétique, c'est compris ? » Sa voix était ferme et on y percevait un peu d'agacement, mais elle restait douce et calme, sans la moindre trace d'animosité. Un simple rappel à l'ordre, nécessaire visiblement, mais juste. Elle se tourna ensuite vers la rouquine, un immense sourire s'étalant sur ses lèvres, après que le sorteur ait hoché la tête et soit reparti aussi vite. Fauve plongea dans les bras de son amie, dans une étreinte plus que chaleureuse. « Brooke, mais qu'est-ce que tu fais ici ? Si je m'attendais à ça ! » s'écria-t-elle dans une montée de joie, serrant son amie dans ses bras avant de la laisser respirer. « Désolée pour Andrès, il est nouveau ici, et il n'a pas l'habitude de travailler dans une boîte qui n'exige aucune tenue particulière. Faut dire que les boîtes de nuit sont très sélect' généralement, mais ici c'est pas comme ça. Il va s'y faire. » ajouta-t-elle en riant, pour excuser le comportement de son sorteur. Le principe même du Adam & Yves était d'être ouverte à tous. C'était valable pour l'orientation sexuelle, mais pas seulement. Fauve tenait à ce que tout le monde se sente le bienvenu ici, qu'il soit gay, drag queen, totalement hétéro, qu'il soit riche ou pauvre, en costume trois-pièces ou à pieds nu.

Ça ne ressemble pas à Fauve les restrictions, les codes, les barrières entre les différences. Mais, tu comprends qu'elle ne l'a certainement pas décidé, qu'elle se conforme aux autres boites ou un truc du genre. En fait, t'en sais rien. T'as peut-être tout faux. Des années ont passés depuis vos dernières discussions, depuis que tu l'as serré la dernière fois entre tes bras. Et bien des choses se cachent derrière ce passé pas que chaste, pas que sans innocence. Et le videur qui te reluque drôlement, contribue à te laisser croire que tu cloches dans cette atmosphère qui, pourtant, sur papier semble si ouverte d'esprit. Avec le plus grand des hasards, parce que ton excuse bidon de connaitre la propiaitaire ne t'a même pas convaincu toi-même, il te laisse passer, te demande de le suivre, s'enfourchant dans la foule de gens pour retrouver celle que t'es venue voir, merci les internets pour avoir mis ce club sur ton chemin, sans quoi, t'aurais jamais su, au fond, que Fauve s'était finalement installée à Bowen définitivement, qu'elle avait réussi à devenir cette femme d'affaires que tu admires, là, alors que tu la regardes de loin quand Andrès te point du doigt. T'as un courant électrique qui te travers, entre l'envie et la nostalgie, entre elle et toi, y'avait eu bien plus que de l'amitié, à une époque, son corps que tu découvrais comme une vierge inculte, la première femme que tu as laissé te toucher de cette façon. Une amitié avec bénéfices, pas de sentiments, que du sexe. Tu souris quand elle prononce ton nom, presque plus quand elle remet à sa place son employé, les bras ouverts, impatiente qu'elle les retrouve. Et quand elle s'y loge, elle te demande ce que tu fais ici. Parce qu'aux yeux de tous, t'as disparu. T'as pris le cap. Long gone. Mais tu choisis de taire tes raisons, ça viendra bien assez vite de toute façon. T'en fais pas, j'ai l'habitude. Marginale comme tu es, tes tatouages et ton style particulier, t'as l'habitude de te faire refuser certaines entrées ou même de te faire regarder d'un drôle d'air. Tu hausses les épaules. C'est bon, de te revoir. Et de sentir qu'enfin quelqu'un dans cette ville est heureux de ta présence.

Revoir la rouquine ici, ce soir, dans un tout autre contexte que des années auparavant, c'était comme rencontrer cette partie de son passé sans trop savoir comment le saluer. Comme l'apercevoir au coin de la rue et échanger un regard nostalgique. Mais dans les bras de son amie de longue date, elle se sentait bien, et son cœur s'emballait sous cette adrénaline de joie qui l'envahissait. Elle finit par s'écarter légèrement, laissant Brooke respirer, mais son sourire ne pouvait pas disparaître de son visage aux traits fins, et son regard émeraude pétillait de mille petites flammes joyeuses. « Ça, tu l'as dit. Ça fait une éternité... » souffla la brune, son regard vrillé dans celui de la jolie rousse, un regard complice et enfoui dans un passé commun. Elle finit par baisser brièvement les yeux, rougissant presque, avant de revenir directement à ceux de la jeune femme, avec plus d'aplomb. La revoir comme ça, sans prévenir, ne faisait simplement que remonter des souvenirs charnels rangés dans un coin de sa mémoire depuis un bout de temps. Brooke, c'était une amie qu'elle avait vu régulièrement et qu'elle avait toujours été heureuse de retrouver, quelqu'un qu'elle avait pu qualifier de très proche, à une époque. Mais elle avait aussi été plus que ça, lorsqu'elles étaient plus jeunes. Et en s'installant à Bowen des années plus tard, jamais Fauve n'aurait imaginé retrouver la flamboyante rousse à ses côtés. « Ça te dit qu'on aille discuter dans un coin plus tranquille ? » proposa la slovène, désignant d'un signe de tête l'espace plus "lounge" au fond de la boîte, ou des tables basses et de longs canapés étaient disposés le long du mur, à l'écart des enceintes qui diffusaient la musique pour la piste de danse. Elle avait bien envie de rattraper le temps perdu avec Brooke et de savoir tout de sa vie depuis qu'elles avaient un peu perdu contact. « Et je t'offre un verre, bien sûr. » ajouta-t-elle avec un sourire. C'était bien le minimum, surtout qu'elle était la gérante, c'était élémentaire que de mettre quelques boissons sur le compte de la maison, de temps en temps, quand c'était pour des amis.