#33 - Un peu de normalité ? - Aaron

Un road-trip... C'est franchement la meilleure idée coup de tête que j'ai pu avoir de ma vie. C'est un peu comme si j'avais une nouvelle bouffé d'air qui me faisais vivre de nouveau. J'étais du genre complètement négligé avec tout ce qui me tombait dessus. Et pour la première fois de toute ma putain de vie, la bière, mon métier, ma fille, la moto et mes potes ne suffisait pas pour me faire aller mieux. Trop de lieus qui me rappelait Tiff, trop de chose rattacher à elle dans cette foutue ville. Et dans un moment de ras-le-bol, j'ai décidé de me casser qu'avec un strict nécessaire et ma moto. La seule personne a qui j'avais pris la peine de prévenir, c'est bien entendu Maliyan. C'est après tout à lui que je me confiais le plus et avec qui je passais le plus de temps. Et je me voyais mal lui faire le coup de disparaître du jour au lendemain, en plus chuis sûr que si on me cherche, on ira direct vers lui et on pourra lui répondre à l'aise. 

Y'a qu'une seule conséquence de ce voyage qui m'a, je l'espère, remis les idées définitivement en place : mon garage, le fric. C'est le hic d'être à son compte, si tu ne bosses pas, tu ne gagnes rien, que dalle même. Et fallait donc bosser trois fois plus pour rattraper tout ça. La vie d'adulte parfois, c'est vraiment de la merde... MAIS BON ! Ça ira, je vais m'en sortir... Alors que j'avais les mains au moteur pour faire la révision de la voiture d'un de mes clients un toquement de porte me fait tourner la tête, je ne sais pas si toquement ça se dit, mais peu importe. Ça change des appel téléphonique des clients ou assurance. 

« J'arrive. »

Je me tourne vers la porte et attrape à la volée un chiffon pour m'essuyer rapidement les mains déjà noircies par le travail. Je tire mon regard derrière le potentiel client et remarque une belle moto sur une remorque.

« Un souci avec ta bécane, je suppose ? »

Un souci de démarrage  à tout les coups, vu qu'il la mise sur une remorque. Mais c'est qu'une fois que j'ai posé la question que je remarque rapidement sa prothèse. Oh... Merde. Je tire de nouveau mon regard sur la moto puis sur lui. Je vais gentiment me taire et lui laisser dire ce qu'il attend de moi... Mais quelque chose me dit que se sera une situation de... Déjà vue avec Tiff. Et malgré mon voyage et malgré mon vidage de tête par la moto et le surplus de boulot, ma gorge ainsi qu'une pointe à la poitrine se font sentir. Je commence doucement à deviner ce qu'il veut de moi. La même chose que Tiffany m'avait demandée quand elle s'est retrouvée en siège à roulant... Et si j'ai vu juste, j'compte bien lui faire comprendre qu'une alternative est possible. Je l'ai déjà fait pour une personne qui a perdue l'usage de ses jambes après tout. 

Je regarde derrière lui la moto sur la remorque. C'est tellement une vision... Triste d'une moto. Alors oui bon je vois ça régulièrement quand je dois dépanner. Mais quand c'est le client qui l'emmène comme ça, c'est qu'en général ça pue. Je regarde ensuite le client, je voyais qu'il y avait l'air d'avoir un truc qui cloche physiquement, mais je ne saurai pas dire quoi. Il marche... Parle... Et devrait plutôt bien voir pour conduire une voiture, si c'est bien lui qui l'a conduite... Non ? Essuyant machinalement mes mains dans le torchon salle que tout garagiste possède, je hausse à les têtes à ses paroles un peu BEAUCOUP pensif. Vendre sa moto par incapacité physique d'en faire... Ça me tombe d'un coup la comme ça. Le road-trip ne m'a clairement pas suffit pour oublier cette femme enfin de compte. Cette femme qui m'avait autrefois fait une demande similaire lorsqu'elle s'est trouvée en siège à roulant. J'inspire un grand coup et fixe la moto au fond pensif, je lui réponds quand même.

« Vous n'êtes pas obligé de la vendre. »

Je tourne mon regard sur lui et par politesse, j'essaye de ne pas repérer ou se trouvais le problème... Mais faut bien que je le sache si je veux l'aider.

« J'ai déjà modifié une moto... Pour une... »

Cliente ? Amie disparue ? 

« Amie. »

Il n'est pas obligé de connaître les détails de toute façon. Et je ne préfère pas les donner, rien n'est pire que de raconter un truc qu'on veut oublier à un client.

« Elle avait perdu l'usage de ses jambes et j'ai réussi à modifier sa moto de sorte qu'elle n'ait besoin que de ses mains pour la conduire. »

Je pose le torchon sur un meuble où j'ai l'habitude de poser et me redirige vers lui. 

« Je ne connais pas vraiment votre souci physique qui vous pousse à vendre votre moto, mais avant de faire quoi que se soit concernant votre demande. Je préfère vous dire qu'il est tout à fait possible que je réadapte votre moto de sorte que vous puissiez la conduire avec votre condition physique. Dites moi ce que vous ne pouvez plus atteindre dessus et je m'en charge. »

Vendre une moto... C'est tellement, triste, je trouve. Même-moi si un jour, je ne pourrais plus en faire, je ne la vendrai pas. Je la confirai à Maliyan qui la fera rouler ou Jeff, voir peu être Rowan. Mais la vendre non. Chuis peu être le seul à penser de cette manière. Et je ne critiquerai jamais les choix de chacun. Mais je préfère franchement être sûr que la vente soit une vraie volonté plutôt qu'une contrainte pour impossibilité physique.