Une visite surprise... et un bébé.

Elle ne peut plus le cacher. Son ventre grossit, grandit. Bombé, il est difficile à dissimuler, même sous les robes amples et les longs pulls que la brune avait beaucoup trop usés depuis son arrivée à Bowen. Le cacher, elle n'aurait pas été obligée de le faire si Beth avait pris son courage à deux mains. Si seulement elle avait pu avoir confiance en ce que la vie leur réserverait. Peurs, elle en avait eu, elle en avait encore, préférant nettement élever un enfant seule dans le secret que de vivre avec le souvenir ressassant d'un père refusant la paternité. Mais, la vie, elle n'était pas ainsi. Du moins, pas depuis qu'elle avait pris la décision de s'installer à Bowen. Mais elle avait voulu le revoir. Le revoir et pouvoir le toucher à nouveau. Le toucher à nouveau et tombé encore, toujours, autant sous son charme. Et son coeur et sa tête lui envoyaient des signaux contraires. Des messages qui s'interféraient entre il a le droit de savoir et il ne te pardonnera jamais qui se bousculaient. Et, maintenant, c'est la catastrophe. Parce que les mois passent et la décision ne lui revient plus. Ce bébé, il va arriver, sept mois qu'il se construit sans même que son père ne soit au courant, sans même qu'il n'ait pu en accepter son sort. Beth souffle depuis un mois et demi, cours laps de temps depuis le départ de Rafael pour un voyage d'affaires de longue envergure, un mois et demi qu'elle pense à son retour, qu'elle appréhende janvier qui passera ou cassera, qui laissera une marque indélébile sur leur couple. Parce qu'elle lui a menti. S'il a été absent, s'il n'a pas tenu sa promesse, dès leur rencontre, de toujours garder contact avec elle, malgré son retour à la maison, elle a fait bien pire, Beth. Elle lui a caché une énorme vérité, l'a maintenue secrète, pour elle, pendant sept mois. Et bien plus encore, elle l'a partagé avec d'autres. D'autres que lui. Partager la nouvelle, partager les découvertes, partager les sensations. Pire que l'adultère amoureux, elle a commis l'adultère maternelle, coupant Rafael de ces plaisirs par peur, par futiles peurs. Janvier, elle le lui dirait, au risque de tout échouer, au risque de tout briser. Janvier, elle le lui avouerait. En attendant, ils s'étaient comportés comme de parfait tourtereaux à distance s'appelant chaque jour, trouvant un moment pour se raconter leur journée, s'envoyant des photos des choses banales de leur quotidien et des sourires destinés que pour l'être aimé. Des baisers, parfois. Et beaucoup d'amour en mots. Mais jamais en photo. Parce que pour le faire, il aurait fallu retirer ses vêtements, dévoiler ce qui s'y cachait. Et ça, elle ne pouvait pas le faire tant qu'il n'était pas rentré. Rafael était patient, avait cru à ses histoires d'attente, de divorce qui la rendait malaisée pour éviter la proximité intime amoureuse. Il s'était montré doux, compréhensif, mais un homme a ses limites. Et Beth sent bien qu'il finirait par se lasser.
24 décembre, soir de veille de Noël. Il fait chaud, le soleil ne s'est pas encore couché complètement. Le ciel est teinté d'orangé, demain il fera beau. Noël sous le soleil et le sable, étrange sensation dans le ventre de la brune qui, nostalgique, pense à ces quelques rares flocons qu'elle avait l'habitude de croiser vers le mois de décembre, dans son Londres natal. Ici, il n'y a pas de telles précipitations météorologiques. Et ça lui fait bizarre. Premier Noël seule, loin de sa famille. Loin de Rafael, aussi, qui aurait pu remplacer la chaleur de sa parenté s'il n'avait pas eu à s'enfuir pour le travail. Milo et Azriel sont sortis, festivités des Fêtes qui prend forme dans leur vie. Mais Beth, elle n'est invitée nulle part. Chez elle, livre à la main, tasse de thé qui lui rappelle Londres, elle laisse la télévision jouer en fond sonore pour substituer une présence dans l'appartement. Et puis on sonne à la porte. Milo, qu'elle pense. Milo qui a, encore une fois, oublié ses clés. Elle laisse son livre à l'envers sur le canapé, baisse le son de la télévision. Sourire sur les lèvres, gamine dans l'âme, elle ouvre la porte, pas la peine de jeter un regard à l'oeil magique. Tu as encore ou... Et plus rien. Plus rien ne sort. Son sourire se fane. Et son coeur s'accélère. En bien. En mal. En peur. En flagrant délit. Son ventre lui fait alors mal, comme s'il était de trop. Il l'est, de trop. Au travers des roses, c'est Rafael qui se dessine. Un Rafael sous le choque, muet, interdit. Un Rafael qui plante ses yeux sur le ventre arrondi de sa petite amie. Je.. Elle a autant de mal que lui à parler. Interdite, muette, elle le fixe. Elle lui doit des explications. Entre, ne reste pas dans le couloir, tu veux ?, lui demande-t-elle avec une douceur qui la caractérise. On va en discuter.. Ce n'est certainement pas ce qu'il veut entendre. Mais, elle ne peut tout de même pas lui dire, dans le couloir de l'appartement, là où les voisins pourraient les surprendre, qu'elle est enceinte de lui. Non?