Des retrouvailles pas très conventionnelles (Jeremy)

Foulé de mes pas cet endroit me rendait toujours nerveux, sur la corde raide. Comme si je n’acceptais pas encore, comme si en ne venant pas ici, je gardais un espoir qui n’était plus. Je ne venais pas aussi souvent que j’aurais voulu ou du. C’était simplement trop pour moi-même après tout ce temps. Pourtant aujourd’hui j’avais eu la force de venir, de sillonné ses allées de vie bien rempli ou achevé trop tôt, comme celle d’Amélia. Elle aurait dû être avec moi, voir son fils grandir.

J’avance, pas après pas, le gravier craquant sous les talons de mes chaussures. Le chemin, je le connais par cœur. Lunette de soleil sur le nez, rien ne m’arrête. Même si c’est dur, je sais que c’est une bonne chose que je vienne malgré tout. Le chemin me semble interminable mais je continue. Quand mon éprouvante destination se porte à mes yeux, une chevelure rousse/auburn attire mon attention. Une chevelure, puis une silhouette que je reconnais, dont ma mémoire se souvient. Etrangement, elle ne semble pas m’entendre arrivée et son regard rougis quand il se pose sur moi en dit long. « Jeremy » Lâche-t-elle en me regardant, comme elle regarderait un fantôme, ce qui m'arrache un sourire en coin. « Zelda. » Lâchais-je en la regardant. Moi aussi j’ai l’impression de voir un fantôme du passé en chair et en os devant moi. Il me semblait que c’était dans une autre vie qu’elle et moi avions partager le même lit. Ce n’était pas vraiment loin de la vérité à bien y réfléchir.

Les secondes s’écoulent. Je prends une inspiration et m’avance un peu plus vers elle et lui tend ma main pour l’aider à se relever. La savoir l’a me déranger un peu. J’aurais aimé être seul. Je savais néanmoins que je ne pouvais simplement pas l’empêcher de venir ici. C’était son amie après tout. « Qu’est-ce que tu fais là ? » Lui demandais-je. Il était évident qu’elle n’allait pas bien. Son visage rougit parlait pour elle.

« Merci » Me dit-elle quand je l’aidais à se relever. Mon premier réflexe aurait été de la laisser là, de partir pour revenir plus tard, seul. Au lieu de ça, je lui demande ce qu’elle fait ici. C’est dans ses moment-là que je me rends compte des lacunes que j'ai encore dans tout ce qui est socialisation et relation humaine. A question bête, réponse bête. On aurait pu croire qu’avec l’expérience, je m’en serais souvenu. « Oh bah j'me suis dit que ça pouvait sympa de déterrer les ossements d'une amie pour parler chiffon. » Me répond-t-elle, réagissant normalement après ma question stupide. Je tique légèrement mais ne dit rien. Je l’ai bien cherché de toute façon. « Désolée je ... je dors très mal en ce moment, les relations humaines et moi ont toujours été mon point faible, sauf au lit. » Ajoute-t-elle et je ne peux que sourire en coin face à cette répartit. Je hoche la tête, un peu amusé. C'est moi qui fait n'importe quoi et c'est elle qui s'excuse. « Je vois … Cela nous fait un point commun. Et ne t’excuse pas … Ma question était stupide et déplacée. Je suis désolé. » M’excusais-je, sincère ce qui n'était pas dans mes habitudes. La plupart du temps, pour moi, s'excuser revient à se montrer faible, à reconnaitre ses tords. Et c'était pas mon fort. Je m’en étais pris a elle sans raison. Être ici était vraiment difficile pour moi, comme ça l’était surement pour elle.

« Je ... vais te laisser avec elle, elle m'a assez entendu chialer, ça ... fait du bien de te revoir, tu m'as manqué. » Lâcha-t-elle sur le moment. Je la regardais alors qu’elle s’apprêtait à partir, surpris par sa déclaration, peu habituer à manquer aux gens. Et peu habituer à ce que cela me fasse quelque chose. Je n’avais pas oublié ce que j’avais vécu avec elle, mais j’avais l’impression que c’était dans une autre vie, avant qu’un ouragan flamboyant ne ravage tout sur son passage, un ouragan prénommé Amélia. « Zelda, attend ! » Dis-je en faisant quelques pas vers elle, pour la rejoindre. Je la regardais, un léger sourire en coin. « Alors comme ça je t’ai manqué ? » La taquinais-je, amusé de son aveu, ne sachant pas quoi en faire pour être honnête.  « Intéressant. » Dis-je avec mon éternel sourire en coin, ne pouvant m’en empêcher. Je passais une main dans mes cheveux, me demandant si c’était vraiment le lieu pour ça, pour discuter.

Le problème que j’ai, en étant sanguin comme je l’étais depuis toujours, c’est que souvent, ma bouche marchait plus vite que mon cerveau. A cause de ça, il n’était pas rare que dès que les mots sortaient de ma bouche, je les regrettais sur l’instant. Comme là alors que je venais m’en prendre sans raisons à Zelda, alors qu’on était au cimetière. Pour ma défense, je n’aimais pas le moins du monde être ici. Comme beaucoup de monde j’imagine. Mais moi, c’était presque physique. Je m’en excusais et je fu soulagé quand elle accepta. « Ya pas de soucis ne t'inquiètes pas. » Me rassura-t-elle. Elle n’avait rien fait pour mériter ma colère et elle semblait déjà être assez mal.

Les secondes s’égrènent et je ne peux nier que c’est vraiment bizarre d’être en face d’elle. Alors je fais mon show, comme d’habitude, amusé de ses révélations. Je lui aurais manquée. « T'es pas croyable » Dit-elle en secouant la tête, ses lèvres s’étirant en un sourire.  Je souris aussi. « Il parait que ça ferait mon charme … » Lâchais-je, un sourire en coin sur mes lèvres. « Bah oui, tu m'as manqué » Ajoute-t-elle, ses mots tout à fait sincères sans que j’en doute une seule seconde. Je la regarde, perturbé, n’arrivant toujours pas à croire que je puisse manquer à quelqu’un, même après les différents exemples que j’ai eu au court de ma merdique vie. Ses gens étaient les doses de lumières m’empêchant de sombrer totalement malgré les épreuves. Je secoue la tête. « Ça ne devrait pas être le cas. Tu es de toute façon bien mieux sans moi dans ta vie. Mais c’est appréciable néanmoins … » Lâchais-je, peut-être un peu brusque mais honnête. « T'as pas changé » S’exclame-t-elle alors que je reprends le contrôle en continuer mes taquineries. « Pas dans les grandes lignes non. Pourquoi le devrais-je ? … Mais un peu quand même. » Admis-je face à elle. Ses changements étaient subtils et cela faisait longtemps qu’on ne s’était pas vu. Elle ne pouvait pas s’en rendre compte.

« Tu veux ... un verre ? » Me demande-t-elle ensuite, presque timidement, se mordant la lèvre. Je la regarde, en silence, pendant quelques secondes.  Je finis par hocher la tête avant de passer une main dans mes cheveux. « Tu me laisses quelques minutes ? » Lui demandais-je. « Je te rejoins ensuite. » Assurais-je en plongeant mes yeux dans les siens. Après tout, j’étais là pour une raison particulière, je ne me voyais pas partir sans lui avoir parler. Elle s’écarta et je fus seul devant la tombe d’Amélia, celle qui sera toujours une partie de moi, celle que j’avais perdue alors même que tant de chose nous attendait encore … Je ne venais pas aussi souvent que je le devrais. Mais être ici me rappeler ce que j’avais perdu. La meilleure chose qui m’était arriver de toute ma vie et le futur qu’on aurait dû avoir ensemble. Je n’en voulais plus a la terre entière aujourd’hui, seuls les regrets et le manque parfois persistaient. Je savais également qu’elle n’aurait pas voulu que je me laisse aller. Lui rester fidèle oui mais je devais avancer. Après quelques minutes, je revenais auprès de Zelda, le regard sombre, dans mes pensées tout aussi sombres, comme a chaque fois que je m’en allais. Plus d’une fois, je me disais que j’aurais préféré être celui enterrer. Elle avait trop de lumière en elle pour juste … Partir. Je levais les yeux vers la jeune femme. « Allons-y. » Soufflais-je avec un léger sourire.

« T'as toujours compté pour moi tu sais » Me dit-elle avec un léger sourire en coin. Je la regardais intensément, en silence. Je passe une main sur mon menton, rendu rêche par ma barbe de plusieurs jours. J’aurais voulu lui dire que ça ne devrait pas être le cas, qu’elle serait mieux sans me porter dans son cœur mais je reste silencieux. Je ne méritais aucunes des personnes qui m’assurait tenir à moi. Bien sûr, elles comptaient pour moi et les avoir dans ma vie m’empêcher de faire n’importe quoi à nouveau mais je persistais à croire certain jour que je n’étais pas digne de leur intérêt. Signe que j’avais encore du chemin à faire. « Je sais. Mais ça ne devrait pas être le cas. » Lui répondis-je simplement en haussant les épaules, mon regard toujours bloquer sur elle. Elle me propose un verre, j’accepte non sans lui demander quelque instant avec celle qui est la mère de mon fils, celle qui aurait dû être encore à mes côtés. Elle accepte et s’éloigne. Après quelques minutes, je rejoins la jeune femme qui prend mon bras et nous quittons le cimetière.

« Pour te la faire courte ... » Dit-elle en rompant le silence qui s’était doucement installé. « J'ai rompu avec Concho et j'ai une fille d'un mois qui s'appelle Lara » Je tourne légèrement la tête vers elle et esquisse un léger sourire. « Pour la faire courte hein ? » La taquinais-je, légèrement surpris. Son visage est maintenant bien moins expressif, comme si elle s’était refermée sur elle-même. « Alors comme ça tu as une fille ? Ce cher Concho est le père ? » Lui demandais-je. Concho et moi avions nous aussi nos différents. Il était le meilleur ami de celle que j’aimais. La situation semblait délicate mais il fallait bien que j’ai des précisions. On entra ensuite dans un café. Cherchant une table libre des yeux, j’en vis une et nous dirigeais vers elle. Je tirais la chaise pour la demoiselle et m’asseyais ensuite. « Tu ne veux peut-être pas en parler mais pourquoi tu l’as quitté ? Je dois aller sauver ton honneur ? Je le ferais. » Lui assurais-je avec un sourire pour alléger l’ambiance devenue trop pesante pour moi.