Le méchant de l'histoire (NEVAEH)

Entendre ton père te gueuler dessus cela était une habitude depuis ta plus tendre enfance. Ils sont rares les moments où il a été poli et courtois avec toi. Peut-être durant les soirées mondaine et encore à ses moments là, il fait tout pour t'éviter. Si tu es de retour dans cette ville, c'est pour ton père. Plus de vivres, plus d'imaginations pour écrire un script. Rien de bien positif pour continuer ta vie tranquille dans la merveilleuse ville de New-York. Tu devais le rejoindre à ces bureaus ce matin. Tu avais longtemps hésité à t'y rendre et comme un adolescent en manque d'attention, tu avais traîné et tu t'étais pointé là-haut avec juste soixante quinze minutes de retard. Autrement dit ton père était furieux. Lui qui souhaité te faire rencontrer des partenaires importants pour la société. L'ironie dans tout ça c'est que malgré ton imbécilité, ton incapacité à faire de bon choi, Monsieur Brown rêverait que tu puisses reprendre les clés de l'entreprise. Ce dont tu ne souhaites pas, tu préférais même une coloscopie as-tu dis un jour. Quand tu as ouvert la porte de son bureau, enfin, passais le seuil, car d'après Monsieur une porte empêche la bonne entente entre les employés, tu avais vu ce regard noir. Il t'avait choppé par le bras et t'avait emmené loin des oreilles indiscrète. La petite rue derrière que très peu d'employés connaissent. Arrivé à destination, tu sais que tu vas prendre cher. Comme à son habitude, il enlève sa veste de costard et la pause délicatement sur un vieux meuble qui traîne. Tu le regardes sans rien dire pendant qu'il relève les manches de sa chemise blanche de luxe. Au début, il te traite de tous les noms. Tu es un lâche, un imbécile, un indécis, immature, qui vit au crochet de ses parents, un fainéant, un rêveur, un con et tous autres mots d'affection que t'offre ton père depuis ta naissance. Tu ne dis rien, tu ne baisses pas les yeux, non plus. Tu n'oses pas souvent répondre à ton père, mais tu ricanes, car tu refuses de lui montrer ta faiblesse. C'est à ce moment précis qu'il te frappe, une fois, deux fois, trois fois. Tu tombes à cause de la perte d'équilibre. Il te met à te frapper avec son pied sur ton abdomen, ton corps se retourne à cause de la force du coup. Mais tu ne dis rien. Quand il a fini, il te dit simplement qu'il espère que cette fois-ci tu comprendras et que tu devrais agir comme un homme. Il se rhabille et reprend sa veste avant de te laisser là comme une merde. Tu te mets assis, tu as les nerfs à vif et c'est là que tu la vois. Témoin de la scène, te regardant avec de gros yeux, Nev celle que tu aimes depuis toujours et qui restera l'amour de ta vie, malgré toi.

Le mariage de Pippa était dans à peine quelques jours. Un peu plus qu'une semaine, pour faire exact. Et en tant que demoiselle d'honneur officielle, Nevaeh s'était impliquée dans toutes les étapes de la préparation des noces. À quelques jours du jour J, il ne restait plus grand-chose à faire. Ce matin, les deux amies s'étaient rencontrées pour parler tables, places et invités qui avaient confirmé leurs présences. Et après un casse-tête de plusieurs heures à tenter d'arranger les tablées pour qu'elles soient le plus homogènes, elles étaient arrivées à un plan final. Ou du moins, c'est ce qu'elles s'étaient dit pour la journée, se laissant la nuit pour y penser. C'était difficile, tout ça, d'accorder les invités pour que leur soirée soit agréable. De placer ensemble des convives qui auraient des choses à se dire, d'éviter ceux qui auraient des problèmes de se retrouver assis ensemble. Ce casse-tête-là, Nevaeh aurait pu l'avoir à son tour, dans quelques mois, si son mariage n'avait pas volé en éclat. Oh, elle n'était pas déçue de ne pas avoir eu à planifier ce genre de détails, ni même de ne pas épouser Felix, au final, il lui avait prouvé avant qu'elle ne dise officiellement oui et qu'elle soit prise à sauver son mariage, qu'il n'était pas près de changer pour elle, et peut-être même pour personne. De toute l'organisation du mariage de sa meilleure amie, elle n'avait pas songé une seule seconde au sien qui avait pris l'eau, le jour où elle avait balancé son alliance au visage de son ex. Alors, pourquoi aujourd'hui? Sans doute parce qu'elle venait de rompre avec Juliann, sans doute parce que son coeur saignait et qu'en peine, elle pensait à tout ce qu'elle avait échoué dans sa vie sentimentale.

Pour rendre service à sa meilleure amie, Nevaeh s'était proposée pour récupérer les tests pour les arrangements floraux chez le fleuriste avant la fin de la journée. En milieu d'après-midi, elle s'était donc rendue en plein centre de Bowen pour récupérer les essais et ensuite venir les laisser à Pippa. Boite de fleurs dans les mains, prête à retrouver sa voiture, la brune avait coupé dans une petite rue peu passante souhaitant dans un premier temps éviter les foules qui risqueraient d'abimer les arrangements, mais aussi éviter de croiser Juliann à la sortie du travail. Seulement, ce qu'elle pensait être une rue déserte s'avéra à être un coin parfait pour un règlement de compte entre père et fils auquel la brune avait assisté en partie, entendant les insultes et entrevoyant les coups que l'homme avait infligés à nul autre que Félix...

Elle s'approcha de lui, allongé sur le sol. Et même s'il lui avait fait du mal, son visage montrait de la compassion à l'égard de son ex. « Qu'est-ce que tu as encore fait, Félix? », demandait-elle, convaincue que cette fois, il s'était mis les pieds dans les plats. Ça ne serait pas surprenant, devant de lui. D'une main, elle tenait la boite de fleurs, de l'autre elle lui tendait de l'aide à se relever.

Tu ne pensais pas que la situation aurait pu être pire. Tu avais accepté les coups de ton père sans broncher, sans même osé lui répondre. Car, si ton père avait bien réussis quelques choses dans ton éducation c'est bien ça. Tu savais fermer ta gueule devant lui, tu savais que tu n'étais qu'un minable, un bon à rien comme il aime te qualifier depuis ta plus tendre enfance. Mais tu ne pensais pas que dans cette petite ruelle, tu allais tomber sur quelqu'un et encore moins sur elle. Sur celle qui a toujours voulu te rendre heureux, devant celle qui a su faire battre ton coeur, comme personne auparavant. Elle arrive vers toi et malgré le mal que tu lui a fait, tu vois dans son regard, ce que les gens appellent de la compassion. Qu'est ce qu'elle avait vu? Avait-elle était témoins de toute la scène ? Vallait-il la peine de lui mentir ? Tu l'ignores, tu es à bout de force. Tu arrives tout de même à ricaner quand elle te demande ce que tu as fait. Évidemment, tu es forcément le fautif et non la victime. "Il me trouve beaucoup trop beau, il est jaloux." Dis-tu en faisant passer ta langue sur cette plaie ouverte que tu as sur la langue. Quand enfin tu te remets debout, la porte s'ouvre, ton père t'engueule à nouveau avant de remarquer Nev, il lui sourit et puis rentre à nouveau. Ton père est une belle saloperie qui sait comment montrer les bonnes facettes aux gens. Cette fois, il était pris la main dans le sac. Debout, les jambes tremblante encore par le choc, tu te tiens au couvercle d'une poubelle. Tu essaies de faire de l'humour et en regardant la jolie brune, tu lui demandes. "Tu aimes traîner dans ce genre de rue, à présent ?" Tu sais pourquoi, elle a tout de suite su que tu avais fait une connerie. Tu sais pourquoi elle avait pensé de cette façon. Et en même temps cela veut simplement dire que tu as réussis ta mission. Tu as réussi à faire croire au reste du monde que tu n'étais qu'un connard sans coeur. Tu as réussi à ce qu'elle s'éloigne de toi, celle qui malgré tout reste l'amour de ta vie, celle qui mérite un amour bien plus fort que celui que tu pourrais lui offrir. Enfin si cela est possible. Tu sais qu'elle mérite d'être heureuse et qu'avec toi cela est impossible. Tu sais pourquoi, tu es le méchant. La tromper, cela était si facile et si horrible à la fois. Tu sais que tu la perdu, tu sais que tu es fautifs, mais tu sais aussi que cela est pour la bonne cause. Tu sais qu'elle n'aurait pas été heureuse avec un homme qui ne s'aime pas. Comment réussir à se faire aimer, alors qu'on ne peut pas se voir en peinture ?

Le problème chez Félix, c'était son trop fort orgueil qui l'empêchait de s'ouvrir à la discussion. Et si, aujourd'hui, alors qu'elle tombait sur lui plus bas que terre et qu'il ne devait absolument pas avoir envie de son ex pour vider son sac, même lorsqu'ils avaient été un couple il ne s'était pas montré ouvert aux discussions sincères. Avec le temps, ça avait eu le don d'énerver la brune qui, elle, s'était juré qu'un jour il finirait par se confier, par parler avec son coeur, réellement. Mais elle s'était trompée, visiblement. Et encore aujourd'hui, il préférait faire parler son orgueil, ne pas entrer dans les détails et les conversations profondes. Après, Nevaeh pouvait comprendre, qu'il n'ait pas envie de confier tout ça à celle qui avait annulé leur mariage. Mais, en même temps, maintenant qu'elle avait été témoin de la scène, n'était-elle pas la meilleure personne à qui en parler?

Sans même penser au mal qu'il lui avait fait, elle s'était avancée vers lui, lui tendant une main pour se relever, l'autre tenait encore la boite de fleurs pour le mariage de Pippa. « Oui, c'est ça. » Et quand on était jaloux de son fils, on le frappait comme monsieur Brown venait de le faire. Nevaeh n'était pas dupe. Elle connaissait Félix par coeur, à présent, elle savait bien trop qu'il se cachait derrière cette attitude détachée parce qu'il n'avait pas envie ou même ne savait pas comment entrer dans les détails de cette histoire tumultueuse entre lui et son père. Et alors qu'elle s'apprêtait à lui tirer sa révérence, puisqu'il n'avait pas vraiment envie qu'elle soit là, au centre de ses soucis, monsieur Brown refit apparition pour une deuxième tournée d'insultes sanglantes. Son intervention fut rapide, le temps d'apercevoir la brune, de sourire et de s'extirper hors du problème, laissant les deux exs dans cette petite rue non passante, devant un problème dont elle était maintenant spectatrice. « Et ça aussi, c'était parce qu'il te jalousait », fit-elle en hochant la tête, l'air totalement sarcastique. « T'es pas obligé de m'en parler. On ne se doit rien. » Ils n'étaient plus ensemble. Et elle ne le portait pas non plus dans son coeur. Seulement, Nevaeh n'était pas une personne horrible. Et personne de censé ne se réjouissait du malheur des autres. « Non. Je voulais éviter la foule avec ma grosse boite », confessa-t-elle, « je ne pensais pas assister à un règlement de compte aujourd'hui. Tu sais, Bowen c'est plutôt tranquille habituellement. Mis à part les writers qui font de la merde une fois de temps à autre, ça n'a rien de spectaculaire.. » Ce n'était pas le brouhaha de New York.

Montrer aux gens que tu puisses avoir la moindre faiblesse, cela ne te va pas. On ne t'as pas appris à agir ainsi. Ton père refuserait qu'on puisse te voir ainsi. Il en profiterait pour dire que tu es une tapette, que tu n'as qu'une grande gueule et encore. Tu aurais voulu éviter cette situation. Tu as réussi à l'éviter pendant de nombreuses années. Jamais Nev avait eu la chance de voir ton père dans une telle situation de rage. Elle ne méritait pas d'assister à ce genre de show. Mais malheureusement, elle avait assisté à celui-ci, tu avais à tenté de faire de l'humour. Elle n'apprécie pas cela, tu sens le froid dans le son de sa voix. "Tu as longtemps pensé que j'étais très beau, je te signale. Cela serait surprenant que mon père en soit jaloux." Cela aurait pu se finir ainsi, mais non, il fallait qu'il intervienne de nouveau. Il fallait que ton père vienne te terminé. Peut-être que tu cela aurait pu être pire si Nev n'aurait pas était là. Tu aurais peut-être fini au urgence, par chance tu pourras être chez toi pour manger. "Tu le connais, toujours dans l'excés." Et ce n'était pas totalement faux. "Tout à fait et ce n'est comme-ci tu pourrais me prendre pour la victime." Tu as passé toute ta vie à être le méchant, il ne faut pas venir se plaindre, Félix. Tu joues les connards depuis que tu as l'âge de répondre. C'est à ton âge que tu commences à le regretter. Quand tu imagines et personne venant pleurer sur ta tombe. Elle te parle de la grosse boite qu'elle tient dans ses mains. "Pour Pippa ?" Simple question, on pourrait croire que tu t'en fiches et pourtant, ce n'est pas le cas. Cette jeune femme, la meilleure amie de Nev, elle ne t'a jamais apprécié, mais tu sais pourquoi. Elle a toujours vu juste, tu n'étais pas assez bien pour la jeune brune. Il t'arrive de penser que tu lui apporter plus de mal que de bien. "Oui j'en ai entendu vite fait parler. Et en effet c'est bien différent, mais ne te fais pas trop soucie, je ne compte pas rester longtemps ici. Je ne suis pas à ma place."