Over the horizon is another bright sky + Nate

Un jeudi soir peu après vingt heure, dans l'une des salles les plus austères que Bowen pouvait compter, Charlize venait de pousser la porte pour une nouvelle réunion. Elle avait déposé sa fille chez ses parents, se rappelant encore de la première fois qu'elle l'avait fait, prétextant une soirée entre copines plutôt que d'avouer qu'elle allait dans un groupe de parole. Pourtant la famille Wojcik c'était de ces familles où on pouvait tout se dire, ou la parole était reine et ou il n'y avait pas de jugement. Mais pour la pâtissière, avouer qu'elle n'arrivait pas à surmonter la mort d'Axten après pourtant presque deux ans c'était signe de faiblesse et encore plus d'avouer que ces réunions elle avait accepté d'y aller pour pouvoir avoir une ordonnance pour des somnifères. Parce que Cha c'était la femme forte, celle qui réussissait tout, celle à qui tout souriait et qui allait toujours de l'avant. Sauf que la maladie, la lutte et cette issue inéluctable, tout ça l'avait brisée, elle avait perdu l'amour de sa vie et avec lui quelque chose s'était éteint et elle n'arrivait pas à montrer cette faille à ses proches, à personne. Ce groupe de parole elle s'était dit qu'elle n'y resterait pas longtemps, que ce n'était pas pour elle, ça faisait néanmoins plusieurs mois qu'elle s'y rendait et qu'elle y trouvait même une certaine forme de réconfort. Dans la salle tout le monde était déjà installé, ne restaient que deux sièges vides, toujours les mêmes. Parce que tous les jeudis c'était la même chose, la course, Charlize fermait sa boutique rapidement, déposait Romy chez ses parents et courait pour essayer de ne pas être trop en retard à la réunion, mais quand on tenait un commerce et qu'on gérait seul un enfant c'était difficile d'être à l'heure. Et le dernier membre qui arrivait toujours un peu en même temps qu'elle c'était Nate, lui aussi il devait fermer son bar pour venir compléter le cercle. D'ailleurs en parlant de lui, la blonde rangeait ses clés de voiture dans son sac tout en poussant la porte quand elle se rendit compte qu'elle venait de bousculer quelqu'un. Le grand brun fit volte face et leurs regards se croisèrent, deux paires d'yeux clairs qui se toisèrent quelques secondes. Nate, c'est toi ? Qui d'autre ... Pardon je ne faisais pas attention. Riverdale elle le connaissait de nom et de réputation, il était plutôt connu à Bowen, il tenait ce bar un peu sombre où elle n'avait jamais mis les pieds mais cette ville n'était pas grande et les nouvelles allaient vite alors l'accident, la mort de sa famille, tout ça avait un peu fait le tour des habitants à l'époque. Jamais elle n'aurait cru se retrouver un jour avec cet homme dans ce genre de soirée. Et en même temps, ça ne changeait rien, c'était sûrement quelqu'un de bien, malgré son air peu aimable. On est encore tous les deux en retard, on va finir par se faire remarquer. Charlize c'était le genre de fille qui trouvait toujours quelque chose à dire, qui ne restait jamais gênée face à quelqu'un ou qui laissait un blanc dérangeant s'installer, même si la personne face à elle ne la mettait pas très à l'aise et il fallait avouer que c'était le cas de cet homme là.

Encore l’une de ses soirées de rencontre pour essayer de passer au travers de mon deuil qui dure depuis trop longtemps. Je déteste ça, mais je sais que c’est sans doute la seule façon de régler mon problème et de passer à autre chose enfin dans ma vie.J’ai perdu ma femme et mon enfant, mes deux amours de ma vie. Je suis seul au monde maintenant, je refuse d’être seul au monde, alors tout ce que j’ai à faire, c’est de passer à autre chose pour enfin trouver une raison de vivre, comme une éventuelle future copine à ma vie. Je serais peut être enfin heureux si ça m’arrive à nouveau. J’ai aps envie de mourir malheureux et seul. Je laisse donc mon bar à un employé qui me remplace pendant l’heure ou je dois aller à ma réunion de deuil. Je reviendrai bosser après, comme je l’ai toujours fait. Je prends ma voiture et je m’y rends, je me gare près de la bâtisse et je marche, le nez dans mon portable jusqu’à la porte, alors que quelqu’un me fonce littéralement dessus. Comme d’habitude, je sors mon air bête parce qu’on ma foncé dessus, sans me rendre compte qu’il s’agissait de la belle Charlize. Je change mon air en la voyant.

Oh ce n’est rien…

Je n’étais pas très bavard, il était difficile de m’aborder depuis l’accident de ma famille. JE la regarde, essayant de trouver les mots pour poursuivre cette conversation qui m’agresse un peu. Elle me parle du fait que nous sommes encore en retard et qu’on allait se faire remarquer. Ouais c’est ça, c’est exactement ce que je cherche oui… Mais non, c’est la dernière chose que je veux.

Ouais… le pire, je le fais pas exprès pour me faire remarquer en arrivant en retard… je déteste me faire remarquer, mais je n’ai pas le choix, je dois quitter mon bar pour y retourner après la réunion…

Je sais très bien que tout le monde sait que je suis. Mon bar lugubre est bien connu ici des gens dépressifs et alcooliques.

Tu es Charlize c’est ça? Oui, c’est moi Nate… Nathanaël. Ça fait longtemps, qu’on ma pas appelé Nate…

Je la regarde. La dernière personne se trouve à être ma femme… Peu de gens m’appelaient comme ça. Mais Charlize, venait de le faire et je ne vais pas l’en empêcher. Ça me faisait du bien de réentendre mon surnom via la voix d’une femme.

Mais ça ne me dérange pas que tu m’appelles comme ça.

Je lui souris enfin, pour la première fois, depuis que je viens au réunion. Je n’aurais jamais osé l'aborder si elle ne m’avait pas foncé dessus, pourtant, il y a un moment que j’avais envie de lui parler. Le pire, c’est qu’on est toujours assis l’un à côté de l’autre lors des réunions.

Il n’était pas très bavard, Nate, tant lors des réunions, où il laissait volontiers la parole aux autres, qu’en dehors, ce n’était pas bien compliqué, il arrivait généralement en retard et repartait aussi sec à la fin sans demander son reste. De ce que Charlize avait vu, il n’avait sympathisé avec personne, là où les autres restaient discuter à la fin, lui il filait. Comme elle finalement. Charlize n’aimait pas tellement s’étaler, depuis quelques temps elle faisait un effort, parce qu’il fallait avouer que le groupe était agréable et elle avait fait une ou deux rencontres qu’elle pourrait qualifier d’amicales, mais elle ne cherchait pas à se faire des copains ici. Ils étaient comme deux papillons de nuit qui aimaient se réchauffer à la lumière mais jamais bien longtemps. Sauf que les papillons venaient de se rentrer dedans, finissant par se regarder en chien de faillance avant que la pâtissière ne brise la glace. Il n’était pas facile à dérider, le barman, il semblait sauvage, presque effrayé de se faire aborder de la sorte, c’était pourtant le contraire de ce que Charlize voulait. Il lui expliqua rapidement qu’il se passerait bien de se faire remarquer, elle sourit en baissant les yeux sur ses chaussures. Oui, je te comprends. J’ai fermé ma boutique en courant d’air, à tel point que quand j’arrive ici j’ai toujours cette sensation désagréable, ce doute d’avoir vraiment fermé la porte à clé… Elle ne savait pas bien pourquoi elle lui disait ça, il s’en moquait totalement. Oh pardon… je ne voulais pas, Nathanaël c’est très bien. Un peu long mais bon, s’il n’aimait pas les surnoms. Wojcik avait cette mauvaise manie d’être souvent un peu trop avenante avec les gens, mais elle ne voulait pas créer de malaise. Il finit par souffler que ça ne le dérangeait pas, drôle de personnage. Comme tu veux ! Elle lui lança un regard espiègle, de ceux qui rappelaient la Charlize d’avant, celle qui était toujours pleine de vie et de bonne humeur, avant de pousser la lourde porte et d’entrer dans l’arène. Ce soir elle était un peu ailleurs, elle passa son tour au moment de prendre la parole et écouta les autres, sans vraiment les écouter, elle tenta un ou deux regards furtifs vers Nate, à chaque fois leurs regards se croisèrent et elle baissa les yeux, comme une gamine prise en faute. A la fin de la réunion elle l’observa quitter la pièce sans un mot, à peine un salut à leurs compagnons d’infortune. Et à ce moment-là, sans savoir ce qui lu prenait, elle se leva et marcha d’un pas pressé vers le brun. Nate ! Attends ! Elle arriva à sa hauteur et se demanda bien ce qu’elle allait lui dire maintenant. Je sais que tu retournes bosser… J’ai pas tellement envie de rentrer chez moi tout de suite, ni de discuter avec les autres. Tu m’offres un verre ? C’était culotté, elle ne faisait quasiment jamais ça. Bien qu’en ce moment elle les multipliait les je ne fais jamais ça. Bien loin de la petite bourgeoise sage qu’elle était réellement.