#678 "I'm not a second class citizen, but, I'm not a second choice either." (Concho)

Quand elle repensait à sa relation avec Conchobáhr, il y avait des regrets à avoir. Ils avaient cette alchimie particulière, cette façon de rendre tout plus intense comme leur dispute ou leur baiser. Il y avait ce petit truc qui empêchait Alba de ne pas penser à lui. Conchobáhr ça restait un regret, une histoire belle à laquelle on avait jamais donné de chance. Mais, ce soir, dans le plus grand secret, cachés dans la maison d’Alba, ils n’étaient que tous les deux. Peut-être que c’était leur moment, un dernier coup de grâce, un adieu ou des retrouvailles. Mais ils ne seraient jamais sur le même tempo comme si la vie s’amusait à les torturer. Pourtant, il n’y avait presque plus d’ombre sur le tableau ce soir. Certes, ils avaient promis à Freja, mais Léo refaisait sa vie avec Blanche et Alba était libre de construire quelque chose de beau avec une autre personne. Elle ne se débarrasserait pas de lui, elle ne pouvait pas parce que c’était trop intense entre eux. S’il y avait un nous entre eux, ça serait aussi beau que complexe. Alba en prendrait compte le lendemain matin quand Léo croiserait Conchobáhr. Elle riait à sa réflexion ! « Si jamais ils se moquent de moi c’est direction la benne. » Elle gloussait de rire, surtout qu’elle était loin d’être ainsi Alba. Avant d’oublier et de jeter une relation à la benne, il lui faudrait du temps. Peut-être même qu’elle n’avait jamais réussi trop proche des gens qu’elle aimait pour les virer ainsi de sa vie. Ces rires s’échappaient laissant place à une tension bien plus importante. Il était beau le danseur, dans son plus simple appareil. Ses yeux sombres faisaient craquer la photographe qui attendait sûrement un baiser ardent de son amant. L’un contre l’autre dans ce bain chaud en pleine canicule, elle profitait de cet instant. C’était une petite victoire sur la vie blagueuse qui les empêchait d’être dans le même timing. Ce soir ils avaient réussi. « Ce n’est pas toi … Je ne suis pas douée pour être stable. » Elle riait légèrement mais y’avait une part de vérité. Alba ne l’avait jamais été stable dans ces relations, mais en vieillissant, elle revoyait ses envies. Ç’avait l’air chouette d’avoir une famille, un mari à embrasser le soir et des enfants à câliner le matin. Face à l’autre, ils s’ouvraient, blessés par les derniers événements de leur moment commun. « Je sais … » C’était elle et son esprit qui avait devait toujours interpréter les choses. « Tu regrettes parfois ? » Oui c’était fou, mais cette soirée avait apporté son lot de problème même s’ils avaient passé un moment si merveilleux. Alba savait que sans ce moment, il n’y aura pas eu cette jalousie et ses promesses impossible à tenir.

D’un air outré, je répliquai : « Tu oserais jeter un bon vin et des chocolats ! » Je secouai la tête de gauche à droite. « J’espère que t’as honte de toi. » Ce côté léger et bon enfant ne dura pas bien longtemps. Lorsqu’Alba pivota dans le bain afin qu’on soit l’un en face de l’autre, nos jambes arrivant quand même à trouver leur place entre nous, sous la mousse, le ton redevint plus sérieux. Plus nostalgique, aussi. Nous évoquions des souvenirs qui n’avaient plus leur place dans le présent. Nous ressassions des désirs qui referaient inévitablement surface, avec un peu moins le droit d’exister. « Alba … J’ai deux enfants avec deux mères différentes, en plus de plein d’autres relations qui n’ont abouti à rien. S’il y a quelqu’un d’instable ici … c’est moi. » Dis-je avant de soupirer discrètement, jouant avec la mousse sur la cuisse de la blonde. J’avais un cœur d’artichaut qui ne s’accrochait pourtant pas assez, ou alors était-ce les autres qui partaient ensuite tout aussi vite que la chute. Sans doute un peu des deux. Pourtant, le destin semblait s’obstiner à mettre des opportunités sur mon chemin, en attendant la bonne combinaison sans doute. Comme ce jour-là dans le train, lorsqu’une pure coïncidence nous avait réunis, Alba, Freja et moi. « Non, jamais. » Répondis-je à propos des regrets. « Ce que je regrette, j’pense … c’est que ça n’ait pas duré plus longtemps. » Admis-je. Et je ne parlais pas que de la relation sexuelle en elle-même. Je parlais de la relation, émotionnelle aussi, point. J’aurais tant voulu qu’on allonge et qu’on étire cette trêve, que tous les trois on s’autorise à s’aimer sans songer aux conséquences, aux apparences, aux implications. Je n’y voyais aucun mal, que de la douceur. Sans doute parce que c’était la solution facile, pour moi. D’avoir tout, tout ce que je désirais. « Et toi ? » Demandais-je à Alba. Il était vrai qu’il n’y avait pas que du beau qui en était ressorti. La jalousie, les interdits, tout cela découlait de cette journée des plus particulières. Je me disais que d’une manière ou d’une autre, ça aurait fini par nous péter en pleine face. Aussi bien en avoir profité, de cette tension intense avant l’explosion.

« Jamais, ils n’ont pas à dire de mal sur moi. » Disait-elle en riant faisant des vaguelettes dans l’eau. Alba n’était pas vraiment comme ça avec ses proches, mais ça lui arrivait parfois de virer une personne dans sa vie quand celle-ci ne méritait plus, à ses yeux. Ça n’était pas beaucoup arrivé et même Alba avait du mal à s’éloigner des gens qu’elle aimait. La preuve avec Léo ou encore Conchobáhr. Même si elle savait que dans le fond cette soirée n’était pas bien pour l’équilibre entre lui, Freja et elle, Alba s’en moquait. Elle voulait être égoïste parce que Concho elle l’aimait beaucoup. Dans ses bras, elle se sentait bien, elle se sentait vivante et aimée. Sauf que leur histoire c’était du gâchis, des opportunités pas saisies. Elle se retournait, mettant ses jambes autour de celle de Concho. « C’est vrai que dit comme ça, tu l’es vachement instable. » Disait-elle en riant l’éclaboussant un peu. Ça apaisait un peu l’ambiance suite à cette conversation lourde. Il l’était peut-être instable, mais il lui semblait plus loyal que la blonde. Alba aimait les gens trop facilement et en même temps. C’était sa nature, il y avait tant de belles âmes, même si certains la marquait plus. Cette soirée dans le train était hors du temps. Souvent Alba s’était refait cette soirée, regrettant à chaque fois un peu plus. Depuis, plus rien n’allait et ça peinait la blonde. Ils avaient chacun tout perdu. Concho lui aurait aimé que le temps dure, Alba aussi sur le moment. Mais avec du recule, elle ne recommencerait pas. « Un peu. » Avouait-elle. Freja le savait qu’elle regrettait. Peut-être qu’Alba s’était sentie en trop, pas à sa place dans ce couple qui se retrouvait. La soirée avait été magique, mais la suite avec été catastrophique. « Je me dis que si je ne vous avais pas vu peut-être que tu serais avec Freja. » Ou inversement. Il y avait tant de si qui avait peiné Alba. C’était aussi la raison pour laquelle elle s’était éloignée du danseur et de la norvégienne après qu’elle ait remarqué que trop de choses les liaient. Ce soir, ça lui faisait un peu de peine à Alba de parler de ça. Mais elle savait aussi qu’elle avait envie du danseur et qu’il lui avait manqué.

Je me contentai d’esquisser un sourire à propos du commentaire d’Alba sur ce que diraient le vin et les chocolats. C’est fou comme elle et moi, nous pouvions passer par un tas d’émotions en si peu de temps. J’avais l’impression que notre relation, déjà en quelques mois, était une montagne russe – mais dont les vues en haut valaient toutes les descentes du monde. Encore une fois, ce ton léger céda sa place à une conversation bourrée de nostalgie, d’une époque pas si lointaine que ça. On ne pouvait même pas parler d’époque, en fait. Ce moment entre Freja, Alba et moi, ça avait été une étoile filante. Je parlai d’abord de mon instabilité relationnelle. On ne pouvait pas prétendre le contraire. J’enfilais les relations – et les mères d’enfants – comme on change de sous-vêtements. Je n’en étais pas fier. Ce n’était pas ce que je voulais. « Hey ! » Dis-je en riant en l’éclaboussant à son tour. Une poignée de mousse resta coincée dans sa chevelure, glissant paresseusement vers le bas de sa mèche. Après avoir répondu à propos de mes regrets liés à notre aventure dans le train, regrets qui n’existaient pas quant à l’acte mais bien quant à la durée de l’émotion, je relançai la question à Alba. « Ah ? » Fis-je simplement en apprenant que la blonde, elle, en avait eu des regrets. Cette pensée m’attrista, encore plus lorsqu’elle en précisa la raison. Je baissai les yeux, réfléchissant brièvement à cette affirmation, fronçant tout légèrement les sourcils. « Je ne pense pas. Entre Freja et moi, les raisons de notre rupture, ça allait bien au-delà d’une simple querelle ou d’un éloignement. On s’aimait encore, c’est juste qu’elle en aimera toujours un autre aussi et ça … j’ai jamais pu m’y faire. J’n’ai plus envie d’être le second choix. » Thème répétitif, dans ma vie. « Je pense que si ça ne s’était pas passé, c’est peut-être toi et moi qui aurions pu aller plus loin … » Freja n’aurait probablement pas pris connaissance de notre relation avant plusieurs mois et dès lors, il aurait été trop tard, sans doute que ni Alba ni moi n’aurions voulu reculer face à sa jalousie.

En rencontrant Conchobáhr, jamais Alba aurait imaginé s’attacher aussi vite. Il était différent des autres personnes qu’elle avait pu rencontrer, cette gentillesse et maladresse avait fait craquer la photographe. Entre eux, c’était un mélange de légèreté et de montagne russe. A Noël dernier, elle avait craqué pour cet homme qui était si affectueux avec ses enfants et Jon. A cet instant, elle s’était imaginé une relation avec lui, mais malheureusement les événements s’étaient enchaînés. Peut-être qu’il l’était moins stable qu’elle, mais ça n’enlevait pas la loyauté dont il faisait preuve envers les personnes qu’il appréciait. Elle riait Alba après que Conchobáhr l’ai éclaboussé. Dans ce bain chaud ils étaient bien, même si la conversation devenait trop sérieuse et trop dur. Il ne regrettait pas Conchobáhr, ni Freja vu qu’elle avait déjà eu la conversation avec elle. Peut-être qu’Alba se posait trop de question, parce qu’elle le regrettait ce moment. Sans cela, les choses auraient pu être totalement différente, une multitude de vie parallèle auraient pu se créer. Elle l’écoutait parler, démontrant que sa théorie ne tenait pas la route. Les propos de Conchobáhr faisait mal à Alba. Il avait l’air de pas bien vivre cette position de second choix. Est-ce que sans cet incident du train ils auraient pu vivre une histoire tout les deux ? Peut-être. Mais est-ce que finalement elle n’aurait pas reproduit la même chose mais qu’à la place de Woody c’était Léo ? Alba aimait vite, ce n’était pas un secret et les sentiments qu’elle avait pour le danseur n’était pas faux. Il y avait beaucoup de peut-être dans sa tête à cet instant. Peut-être que Conchobáhr était celui qui aurait pu faire oublier Léo à Alba. Peut-être qu’elle l’aurait quitté si son ex revenait. Et Alba ne voulait pas lui faire vivre ça. Ce n’était pas un second choix Concho, mais si Léo revenait dans sa vie, elle lui laisserait sûrement une dernière chance pour tout ce qu’ils avaient déjà vécu et pour Jon. « Tu n’es pas un second choix … » Disait-elle en le regardant dans les yeux. « Mais je ne suis pas sûr que j’aurai été mieux pour ne pas te faire penser ça. » Elle lui avouait avec ces mots maladroits qu’il n’y avait pas que lui dans sa vie. Mais il y était, il avait sa place et que si un jour Alba devait faire un choix, Conchobáhr pèserait lourd dans la balance. Elle en avait marre de cette distance entre eux, alors elle fit couler de l’eau hors de la baignoire pour s’approcher de son amant. « Et si on partait à l’autre bout du monde sans personne ? » Disait-elle à son oreille. C’était beau de rêver parce qu’ils ne partiraient jamais sans leurs enfants et donc sans l’autre parent. Elle déposait un baiser dans le cou de Conchobáhr pour conclure cette conversation.

Spoiler:

C’est certain, lorsque je m’engageais dans une relation, la loyauté était une valeur primordiale pour moi. Je me donnais corps et âme pour l’autre, pour lui faire plaisir, pour qu’elle se sente aimée, pour qu’elle comprenne à quel point elle comptait pour moi. Souvent je m’étais demandé si ce n’était pas ça, le problème. J’étais trop gentil. J’étais trop affectueux. J’étais trop mou. Mais soyons honnêtes, j’aurais beau enfiler une veste de cuir et des lunettes fumées, jamais je ne deviendrais un rebelle, un bad boy. Je n’étais pas modulé dans ce moule, je n’avais pas l’étoffe d’un mauvais garçon. Alors les femmes qui recherchaient la passion brûlante et dangereuse, elles finissaient par aller voir ailleurs, lassée. J’avais sincèrement eu l’impression qu’Alba ne recherchait pas ça, qu’Alba voulait, comme moi, une relation douce et paisible et belle et respectueuse. Qu’elle voulait une vie tranquille et rangée sans trop de chaos à chaque détour. En la voyant retourner vers Léo, cependant, je me doutais que je m’étais trompé. À mes yeux, Léo Emerson était et serait toujours un vilain dans l’histoire. Depuis mon adolescence jusqu’à aujourd’hui, il n’avait jamais réussi à me prouver le contraire de par ses actes. Je ne savais pas exactement comment il se comportait avec Alba, je n’avais aucune envie de m’imaginer leur quotidien, mais je l’imaginais mal être le grand romantique posé et à l’écoute. Je n’avais pas cette image de lui, tout simplement. Cette conversation et ces réflexions que j’avais me firent réaliser que tout comme Woody pour Freja, Léo était celui vers qui Alba reviendrait, incessamment. Elle me le confirma. L’histoire se serait juste répétée, si la blonde et moi nous étions laissé une chance. Il était sans doute plus sage pour ma santé mentale, pour protéger mon cœur, que ça se soit arrêté avant ça. Un rire désolé s’échappa d’entre mes lèvres alors que je baissai les yeux vers la mousse du bain. « J’arrive toujours trop tard dans toutes les histoires, je pense. Y’a toujours quelqu’un qui a réussi à prendre la place avant moi. » Et je n’étais the one pour personne. Probablement parce que j’avais passé les premières années de ma vie d’adolescent puis d’adulte à essayer de me bâtir une confiance en moi, à essayer de me conformer aux standards de la société, à vouloir maigrir, à vouloir avoir de l’assurance dans ce que je faisais. J’avais été une personne awkward pendant la majeure partie de ma vie. Rien qui donne envie de tomber follement et purement amoureuse de moi. Je relevai les yeux vers Alba quand elle se rapprocha de moi et me proposa de partir à l’autre bout du monde sans personne. Je ris, confus. On ne pourrait malheureusement jamais tout laisser derrière et partir. On venait avec bien trop de bagages, Alba et moi, ça ne rentrerait pas dans cette idée folle. « J’aimerais qu’on puisse. Même si c’était juste pour un temps. » Admis-je. Je reculai mon visage. « Mais ça ne sert à rien de fuir. » Conclus-je. Je sentais que la porte se fermait, finalement, entre Alba et moi. Drôle à dire alors qu’on se trouvait ensemble, nus dans un bain romantique, le jour de la Saint-Valentin.

Elle se demandait pourquoi elle se fermait des portes ? En face d’elle se trouvait un des hommes les plus merveilleux qu’elle ai pu rencontrer. Il était doux, posé, bienveillant et respectueux. C’était tout de dont elle espérait. Conchobáhr était tout ce qu’elle voulait pour construire une relation. Et attention, elle n’aurait jamais dis non. Si aujourd’hui il lui proposait, Alba aurait été capable de dire oui. Mais n’était-ce pas trop cruel ? Au fond, elle savait qu’elle aimait encore éperdument Léo. Même si pour elle, on pouvait aimer plusieurs personnes, Léo prenait trop de place. Alors oui, elle aurait pu construire tout ça avec Concho, mais pendant combien de temps ? Ce n’était pas honnête et respectueux de se lancer dans ce bonheur si quelques mois après, Alba lui aurait arraché. Ce qui était stupide puisque Léo coulait le parfait amour avec Blanche. Elle vit le regard triste et désolée de Concho. C’était comme un coup de poignard dans son âme qu’Alba ressentait, regrettant de donner autant de peine à cet homme si parfait. Il manquait de confiance en lui et ce qu’il disait ne faisait que confirmer ce dont elle pensait. « Non ne pense pas ça ! » Il n’arrivait pas trop tard, c’était elle qui avait ouvert son cœur trop tôt. Elle ne savait pas comment lui expliquer que la fille qui l’aimera comme lui savait aimer, sera la plus chanceuse et surtout la plus intelligente de tous. Avec ses mains pleines de mousse, elle relevait le visage de son amant. « Tu es merveilleux, crois moi ! Je risque de regretter ce choix, mais je ne peux pas te promettre quelque chose si je n’en suis pas sûr. » Elle ne voulait pas qu’il souffre. Aujourd’hui il était sûrement peiné, mais qu’est-ce que ç’aurait été dans quelques mois ou quelques années. Elle avait l’impression que c’était une des dernières fois qu’elle partagerait un moment aussi intime avec le danseur et elle ne voulait pas que ça s’arrête. Quitter tout pour se retrouver était une bonne idée. Enfin non. « Je sais … Mais on serait tranquille à vivre d’amour et de voyage. » Disait-elle en souriant. Il semblait triste. Alba elle ne semblait pas hésiter quand elle se relavait à moitié dans le bain continuant à renverser de l’eau. A califourchon sur Conchobáhr, elle sentit son sexe près du sien. « Et si on faisait l’amour, une fois rien que tout les deux ! » Elle l’aimait le danseur, énormément. Ça l’attristait cette conversation et elle sentait que c’était presque la fin. Mais pour Alba, ça ne pouvait se terminer ainsi.

Comment ne pas penser ça ? L’histoire se répétait sans cesse, over and over again, la vie me prouvait que j’étais le second choix, que j’étais le meilleur ami, que j’étais le dernier arrivé. On me faisait miroiter de beaux espoirs d’amour pour ensuite me tourner le dos, retournant dans les bras des autres. C’était encore plus cruel et injuste quand je constatais que ces autres, ils étaient les bourreaux de mon adolescence. Woody et Léo m’avaient toujours traité comme un moins que rien, avec le reste de leur bande, avec le reste de ces populaires personnes qui se pensaient meilleures que tout le monde, meilleures que moi surtout. Rapidement j’avais intégré cette vision-là de ma personne, et encore aujourd’hui j’en subissais les conséquences d’une mauvaise estime de moi. « M’dis pas que tu vas regretter, c’est pas juste, de t’entendre dire ça. » Soufflais-je, blessé bien malgré moi. « Mais c’est tout à ton honneur, honnêtement, Alba, de ne pas le promettre si t’en es pas sûre. J’aurais aimé que d’autres aient cette honnêteté, ce respect. » Évidemment, je pensais à Freja, qui au fond avait toujours été amoureuse de Rutkowski et qui n’avait jamais prévu tourner complètement la page. J’avais mis tant d’espoirs dans cette relation qui au fond était vouée à l’échec depuis le tout début. Je n’aurais pas voulu perdre mon temps avec Alba si la conclusion était la même, mais auprès d’Emerson à la place. Certes, être avec elle ne serait jamais tout à fait une perte de temps, mais si pendant ce temps-là je perdais ma chance de rencontrer la bonne, si elle existait à quelque part, alors ce n’était pas juste pour moi. Pour une toute dernière fois cependant, j’avais envie de profiter de la présence de la blonde. De toute façon, nous étions déjà pas mal lancés, nus dans ce bain romantique. Je nous voyais mal ressortir de cette soirée sans être allés un peu plus loin, un peu trop loin. Justement, Alba se leva dans le bain, renversant un peu d’eau sur le carrelage dans son mouvement, venant s’asseoir à califourchon sur moi. Mon sexe rencontra le sien. Je déglutis, relevant mes yeux mitigés sur elle. J’avais le cœur qui battait un peu plus vite, tout d’un coup. « Juste pour qu’on puisse graver l’instant dans notre mémoire. Juste parce que ce ne serait pas juste que la dernière fois ait été la dernière et qu’on n’ait pas été au courant. » Dis-je, voulant profiter de son corps en m’imprégnant avec douleur de chaque seconde, de chaque parcelle de sa peau, pour ne jamais oublier.

Conchobáhr était le gendre et l’amant idéal. Il communiquait et savait parler de ses émotions et ses sentiments. Avec lui, Alba avait toujours eu le sentiment d’être écoutée. Elle s’en était voulue que finalement elle fasse taire son intérêt envers lui pour protéger Freja. Mais elle avait eu peur. Ils s’aiment et elle avait peur d’être celle qu’on laissait sur le côté de la route. Il ne le savait pas mais Alba ressentait la même chose que Conchobáhr. Il y avait toujours cette impression d’être le second choix. Lui de Freja, de Pippa et elle. Pour Alba c’était être le second choix de Léo, de Freja ou de lui. C’était assez stupide finalement, mais la peur faisait faire des choses irrationnelles. « Pardon. » Disait-elle simplement, triste de l’avoir blessée. Il était la dernière personne à qui elle voulait faire du mal. Sauf qu’elle ne pouvait pas lui promettre. Léo avait été le premier à la guider vers une relation exclusive, le premier qui lui avait fait connaître cet amour passionnel aussi tendre que destructeur. Au fond d’elle, si Léo revenait, elle savait qu’elle y retournait, même si ce soir il passait la soirée avec Blanche. Peut-être se mettait-elle des barrières toutes seule. Léo ne reviendrait sûrement jamais et en attendant elle passait peut-être à côté de ce merveilleux homme. Si seulement elle pouvait aimer et construire des relations avec tout le monde. Si seulement le monde accepterait qu’il était possible plusieurs personnes, certes pas de la même façon. Mais ça ne voudrait pas dire que la sincérité de cet amour n’existerait pas. Cette conversation dans le bain sonnait comme une fin. Une douce discussion pour terminer cette relation si prometteuse. Ça lui faisait mal à Alba et en même temps elle ne pouvait pas prometteur à Conchobáhr une histoire d’amour parfaite si elle n’en était pas sûre. Par contre, ce soir elle ne voulait pas qu’il y ait une autre personne que lui avec elle. Ce soir, ils profiteraient de cette dernière étreinte. Tout cela avait existé. Alors elle bougeait pour se retrouver sur son amant et plongeant son regard dans le sien. Il en avait tout autant envie d’elle. Ça serait leur dernière danse, ce dernier moment figé dans leur mémoire. Elle comptait en profiter, ils avaient toute la nuit pour ça. « Juste parce que je veux me souvenir de la dernière fois. » Elle s’approchait de son cou pour l’embrasser. « Juste parce que j’ai envie de me souvenirs de toi. » Soufflait-elle à son oreille, avant de prendre en possession ses lèvres. Ils avaient toute la nuit pour profiter de ce dernier moment ensemble.