Game over → Vega Clark

En me levant ce matin, je m'étais dis que la journée allait être longue. Ma vidéo n'avait pas voulu se télécharger et j'avais finis par renoncer, le sommeil prenant le dessus sur tout le reste.  Je n'avais finalement dormi que 2 heures et à mon grand âge je ne le tolérais plus aussi bien qu'avant. Il m'avais fallut deux grands bols de Milo et une énorme tartine de Vegemite pour enfin émerger de cette brume matinale. Et pour être totalement honnête, je n'étais pas de très bonne humeur. Cela m'arrivait parfois et il n'y avait pas grand chose à faire pour me faire retrouver le sourire, j'étais épuisé et il allait juste falloir attendre que je redorme un peu.

« Non, non, non ce n'est pas possible ! Mon meilleur score... » Si j'étais grincheux avant, j'étais à présent très remonté. J'étais en train de regarder une jeune fille écraser mon meilleur score à l'un de mes jeux préféré. L'arcade game était un endroit qui était sensé être réconfortant - qui l'était d'habitude -. Le Dance Revolution était un jeu de coordination et de vitesse, j'avais mis des mois à battre le précédent meilleur score. La joueuse se déplaçait au dessus du plateau de dance avec une légèreté affolante, elle était douée, vraiment ! Je ne pouvais pas rivaliser malgré des mois "d'entrainement". Mais aujourd'hui, surement à cause de mon humeur massacrante, je me mis à côté d'elle à la partie suivante pour la mettre au défi. Je voulais essayer de retrouver mon statut de grand vainqueur sur cette machine. « Game on mademoiselle. »

Ces derniers temps j’ai l’impression que plus rien ne va dans ma vie et que ce n’est pas prêt de changer. Parfois je repense à mon entrée à l’université, à ce moment là je me sentais pleinement heureuse. Et puis j’avais appris que mon copain était en fait un connard fini qui me trompait très régulièrement et qui n’avait en réalité aucun sentiment pour moi. Il y a quelques mois je quittais l’université, ayant décidé que poursuivre des études qui ne me plaisaient pas ne rimait à rien. J’essaie de retrouver un semblant de stabilité dans ma vie. J’ai quitté mon boulot au Shake Shack pour prendre un emploi à mi-temps à la bibliothèque, quelque chose qui me plaît déjà plus même si je ne m’imagine pas passer ma vie là-bas. J’essaie de sortir régulièrement pour ne pas déprimer entre les murs de mon appartement. Je me suis retrouvée à la salle d’arcade un peu par hasard, je suis passée devant et je me suis dit que ça faisait un moment que je n’y avais pas fait un tour. Je n’avais pas mis longtemps avant de choisir Dance Revolution pour me défouler. J’y jouais souvent il y a quelques années et j’ai rapidement repris le coup de main. J’adore danser et aussi exploser les scores alors c’est le jeu parfait pour moi. Après quelques parties je suis à fond et je finis par faire une partie presque parfaite, battant le meilleur score enregistré. Je me reculais, essoufflée et fière de moi. Je pensais partir quand un type du genre grand et baraqué vint se placer à côté de moi pour me défier. Je souris avant de lui dire « Tu veux pas t’échauffer un peu avant ? » Mon esprit de compétition ressort un peu plus.

Du haut de mes 36 ans, je n'avais rien à faire en pleine journée à l'Arcade Game et pourtant j'étais planté derrière cette gamine qui était en train de détruire mon meilleur score sur Dance Revolution. Ça m'agaçait parce que j'avais mis des mois à détrôner l'ancien meilleur score et qu'elle semblait le faire avec une extrême facilité. Alors pousser par mon humeur massacrante, je vins m'installer à ses côtés pour la mettre au défi - ce qui était une très mauvaise idée -. « Je n'ai pas 110 ans, je peux encore danser sans m'échauffer pendant un quart d'heure. » Dis-je sur un ton assez sec. La pauvre n'était pas tombée sur moi le bon jour.
Je glissais quelques pièces dans la machine qui s'illumina immédiatement. Il n'y avait pas grand chose à faire, mis à part choisir le mode défi et danser. Au début le rythme était facile à suivre, puis celui ci s'accélérait jusqu'à devenir tellement rapide que réussir à le suivre relevait du miracle. Elle excellait et je faisais de mon mieux. Les scores étaient très serrés, même si sur la fin elle me mit quelques points dans le pif. Elle était une excellente joueuse, mais il était hors de question que je lui avoue cela, donc après qu'elle ai gagné une première fois, je la remis au défi en invoquant le fait que je ne me sois pas échauffé auparavant. Oui, exactement ce qu'elle m'avait proposé de faire, mais j'étais un poil têtu ce matin. Une seconde danse se mit en route et cette fois ce fut moi qui gagné, d'un petit point. Je l'avais un peu poussé pour arriver à mes fins, mais j'avais gagné et c'était ce qui comptait, non ? « Voila. Tu vois, c'est comme ça que l'on joue. » Si j'avais écouté la petite voie dans ma tête, jamais je ne me serais permis de lui parler comme cela, ma mauvaise humeur avait vraiment bon dos...

Il me dit qu’il n’est pas centenaire et qu’il peut bien danser un peu sans s’être échauffé. Moi je dis ça pour lui, il n’ira pas se plaindre ensuite. Bon, il a pas cent ans c’est sur mais il doit pas être loin d’avoir le double de mon âge même s’il est plutôt mignon et bien bâti. Il lance la partie et je me concentre. Je suis au taquet. Je n’ai pas envie de me faire écraser par un type qui vient de débarquer, pas échauffé alors que je détiens le meilleur score. J’oublie tout le reste autour et je me concentre. Je me donne à fond, je sens ma respiration s’accélérer mais je garde le rythme. Je ne suis pas une grande sportive, il n’y a bien que la danse pour me faire bouger. Et encore, je pratique dans aucun club, je ne suis aucun cours, j’en fais juste chez moi pour me défouler ou en soirée pour m’amuser. Je réussie à gagner la partie mais il invoque le fait qu’il n’a pas pu s’échauffer avant. C’est une blague ? Quel mauvais perdant ! Je n’ai pas le temps de contester qu’il relance une deuxième partie. Je vois, il a du mal avec le fait de se faire battre. Quel ego ! Avec les parties que j’ai fait avant et celle que je viens de faire, je sens que mon cœur arrive à son niveau maximal mais je tiens bon. On est au coude à coude mais sur la fin je sens sa main me pousser et je manque une note. Il se fout de moi là ? Il est tout fier d’avoir gagné et vient me donner des leçons sur comment jouer. « Sérieusement ? T’arrives pas à accepter qu’on soit meilleurs que toi ? Ta victoire vaut rien, tu m’as poussé ! » Je vais pas accepter sa victoire sans rien dire, c’est pas vraiment mon genre de la fermer. Il a choisi la mauvaise personne à qui donner des leçons.

Je ne jouais pas pour le plaisir, je voulais simplement reprendre ma place de leader. Mon humeur massacrante y était pour quelque chose... Mais la pauvre jeune fille ne méritait pas le traitement que je lui infligeais. Entre la triche et le mauvais jeu, elle ne pouvait pas briller alors qu'elle était nettement meilleure que moi. Il n'y avait pas à tergiverser, son corps volait gracieusement au dessus du jeu alors que le mieux retombait comme un sac de patate trop lourd.

« Tu as peut être raison, mais j'ai quand même gagné. » Dis-je sur un ton beaucoup trop arrogant. Ça ne me ressemblait pas du tout, mais malheureusement c'était la facette de ma personnalité qu'elle découvrait en premier. J'aurais du rester au lit plutôt de sortir avec ce genre de comportement. « Tu garde le meilleur score, tu devrais être contente, non ? »

Si ma mère avait été là, elle m'en aurait collé une derrière la tête. Il n'y avait rien de pire pour elle que ce genre de comportement et elle avait totalement raison. Surtout qu'au fond de moi je savais qu'il n'y avait pas que la fatigue qui m'amenait à être comme ça, il y avait aussi toutes les histoires avec Kara, la pression grandissante des réseaux sociaux, le peu d'accomplissement à mon âge... J'étais en train de réaliser que ma vie n'allait pas et tout cela me pesait.

« ... » C'était dure de revenir sur ses mots et de s'excuser, mais je savais que je devais le faire. C'était la chose à faire ! Mais non, je n'y arrivais pas, c'était plus fort que moi, j'avais besoin d'être un c** aujourd'hui.  « En tout cas tu ne joues pas si mal pour une gamine. T'as pas tes parents avec toi ? » Elle avait quoi... Quinze, seize ans, non ? Elle ne devait pas être seule ici, alors j'allais faire un effort pour ne pas m'attirer la foudre d'un père surprotecteur.

Je peux être mauvaise perdante des fois mais je déteste surtout quand on triche. Si je perds, c’est à la loyale, pas avec des coups dans le dos non réglementaires. Si ce gars pense qu’il a gagné, super pour son ego, il en a besoin visiblement. Je ne comprendrais jamais ces personnes. Pourquoi faut-il toujours qu’ils se sentent supérieurs et qu’ils n’admettent pas leur défaite ? Est-ce que si j’avais été un mec il aurait été moins con ? Je préfère pas y penser au risque de devenir vraiment méchante. Il me dit qu’il a quand même gagné et je lève les yeux au ciel. Je ferai mieux de me barrer mais c’est plus fort que moi. Je suis pas du genre à fuir devant les confrontations, je veux qu’il se rende compte de sa connerie. Il me dit que je devrais être contente car je garde quand même le meilleur score. « Ouais super, toi tu devrais être content d’arriver à faire un score correct au lieu de tricher pour faire croire aux gens que t’es plus fort que moi. Franchement c’est pathétique ! » Je ne sais pas s’il va se rendre compte de sa connerie. Mais il finit par me lâcher que je joue pas si mal pour une gamine, il me demande même où sont mes parents. J’écarquille les yeux. Il est sérieux là ? Il a cru que j’avais douze ans ou quoi ? Et encore à douze ans je pense que j’étais plus indépendante que lui à vingt. « Et toi t’as pas tes potes de la maison de retraite pour venir t’encourager ? Ils sont tous déjà morts ? » Il est pas si vieux mais s’il veut jouer au con, moi aussi je peux jouer. « Mais sérieusement faudrait peut-être que t’apprennes à te comporter moins comme un connard si tu veux que les gens t’apprécient pour autre chose que tes victoires volées à un jeu vidéo ! » Je sais pas comment il est réellement mais là en tout cas c’est un connard. Je suis pas du genre à mâcher mes mots donc je vais pas faire d’efforts pour lui.

J'avais dépassé les bornes vu comment réagissait la jeune fille, je m'en rendais compte, mais je n'avais aucunement envie de m'excuser. Elle n'était pas tendre dans ce qu'elle me disait et sa colère ne faisait que nourrir mon entêtement. La pauvre était face à un mur sur qui tout ce qu'elle pouvait dire ne faisait que couler sans atteindre le cœur.
J'avais du me tromper sur son âge, car en retour j'eus droit à une attaque sur mes amis en maison de retraite. Bien qu'un peu trop jeune pour être dans ce genre d'institution, j'en avais malheureusement perdu quelques uns... « Certains le sont en effet. » Lui répondis-je avec de l'émotion dans la voie pour la première fois depuis le début de notre conversation. « Connard n'est pas le nom que les gens utilisent pour me décrire en général. » Tentais-je pour me reprendre. Big hands. J'étais Big hands pour beaucoup de gens... La réalité me frappa assez soudainement. Je n'aurais jamais osé ça avant d'avoir cette toute nouvelle notoriété sur les réseaux. J'étais donc devenu un vrai trou du cul ? Non, c'était juste la fatigue, tout ce qu'il se passait dans ma vie... J'étais perdus et confus.

Je descendis doucement du jeu en la laissant seule sur la plateforme de danse. Elle avait raison pour certains choses et même si je n'étais pas prêt à tout lui accorder, je lui devais quand même une part de... De je ne sais quoi. « En vrai, j'aime pas vraiment les jeux vidéos. C'est juste celui là. J'y jouais avec une amie quand j'étais gamin. C'était notre truc de battre le meilleur score. Pas avec une gamine que je ne connais pas. »

Je n’es jamais vraiment été du genre tendre. On ne m’a pas vraiment fait de cadeau dans ma vie, même si j’ai vécu pendant des années dans les hautes sphères de la société japonaise et australienne. Dans ce genre de milieu on s’attend à ce qu’une femme la ferme et reste bien à sa place, à savoir celle de femme de et à ne surtout pas faire autre chose que des choses futiles ou des trucs de femme. Je n’ai jamais apprécié toutes les remarques, même si d’autres les prenaient comme des compliments. Je n’ai pas mis bien longtemps avant de faire tâche et que mon comportement ne soit pas trop apprécié, bien que mis sur le compte de la crise d’ado. Je n’ai pas vraiment été très sympa avec ce type mais avec son comportement je ne pouvais pas rester de marbre. Je suis peut-être allée un peu trop loin en lui disant que peut-être ses amis sont morts. Si ça se trouve c’est le cas donc ce n’est pas franchement délicat de ma part mais dans l’énervement je n’ai pas franchement pensée à ça. Il me répond que certains sont bien morts. Je pourrais m’excuser mais je ne suis vraiment pas d’humeur à m’excuser après ses remarques et son comportement. Il me dit que les gens n’ont pas l’habitude de le qualifier de connard et je me dis que si c’était le cas, pas sûre qu’il le sache dans tous les cas. Il descend de la plateforme de danse et je me dis qu’il va me laisser tranquille et repartir comme il est venu. Il me dit qu’il n’est pas trop fan de jeux-vidéos mais qu’il avait l’habitude de jouer à celui-là avec une amie, pas une gamine dans mon genre. « Bah ça tombe bien j’ai pas envie de jouer avec un type comme toi non plus. C’est toi qu’es venu à la base donc tu peux t’en prendre qu’à toi-même ! Reviens y jouer quand tu s’ras avec tes amis ! »

La brunette était remontée et je ne pouvait pas lui en vouloir parce que j'avais réagis comme un idiot lorsqu'elle avait battu mon meilleur score. Ce n'était qu'un jeu, mais bêtement ça m'avait touché bien plus que ça n'aurait du. Je n'étais pas dans un état normal, ma perception du monde était perturbée.

« Tu as surement raison. » Je lui accordais cela, car mon envie de l'affronter diminuais au fur et à mesure que je réalisais ma connerie. J'étais toujours remonté, mais moins qu'au début de nos affrontements. « Je vais te laisser. »

Je n'avais plus rien à faire là. Elle était meilleure que moi et nous battre comme ça en public était pathétique. Je n'étais pas fier de moi, mais je n'avais pas de regret, parfois je devais agir comme un idiot pour me rendre compte de ce que c'était que d'être un homme bien. Elle avait juste eu le malheur d'être la victime de ma connerie aujourd'hui.

« Aller, bye. »

Je n’avais pas envie de partager la moindre chose avec ce type. Je voulais juste qu’il me laisse tranquille. J’étais bien avant qu’il arrive et maintenant je suis juste énervée. Je passe mon temps à être énervée, à être en colère, à ce que le monde me saoule. Je sais que je me préoccupe trop du monde qui va mal et que ça me bouffe tout ça. Mais je suis comme ça, je peux pas faire autrement, je peux pas juste ignorer les connards, les merdes qu’ils se passent, je peux pas juste me taire et laisser couler. Il se décide à se barrer et je me dis que c’est mieux pour lui. Notre discussion ne nous mènera nulle part de toute façon. « Ouais salut. » Je lui balance. Il ira sûrement raconter qu’il est tombé sur une connasse aujourd’hui et balancer tout un tas de méchancetés sur moi. J’ai l’habitude, à force de gueuler je crois que les gens s’imaginent que je peux tout encaisser sans sourciller.

rp terminé ?