[emilia] We still are made of greed

malgré le bruit de la circulation, au loin, tu ne parvenais pas à t'arracher à tes pensées, assis là, sur un banc, une clope à la main. ce petit objet d'apparence si anodine pouvait faire tant de dégâts sur la santé. des années en arrière, t'en avais avaler des quantités de cette satané fumée. et puis, t'avais laissé tomber, bien trop conscient que cela ne t'apportait rien. que cela ne t'apporterait jamais rien. t'avais préféré te concentrer sur la pâtisserie, sur ce rêve avec lequel tu avais dansé durant quelques belles années.

la nuit tombait sur la ville. mais, à ça non plus, tu n'y prêtais pas la moindre attention, concentré sur ces pensées que tu cherchais à chasser. ce petit objet entre tes doigts que t'hésitais à porter à tes lèvres. à dire vrai, t'avais même pas de briquet. t'étais même pas sur de savoir pourquoi t'avais quémander ce sale machin à un brancardier. pour évacuer la colère. la culpabilité. pour tout chasser. comme si la fumée avait ce pouvoir, celui de tout nettoyer, de tout aspirer. mais tu te contentais de rester assis là, les lumières des ambulances dansant sur tes traits fatigués.

la voix de ta sœur te revenait en mémoire. lointaine. brisée de larmes. la porte des urgences qui s'ouvrait et se refermait, inlassablement. t'aurais pas su dire depuis combien de temps t'étais assis là, songeur, tes pensées s'évadant vers un ailleurs. mais bientôt, les lumières cessèrent de danser sur ton visage, une silhouette s'étant immobilisée devant toi...

Tu avais passé une journée de plus dans l'hôpital, une journée de plus qui te rapprochait de tes vacances, petit voyage en Italie. Un besoin de te ressourcer dans ton pays natal, auprès de tes parents, mais tu ne cachais plus la crainte également que tu pouvais ressentir à l'idée d'y aller. Tu avais quitté ton pays natal il y a plus d'un an, d'une manière un peu trop précipitée et aujourd'hui tu avais peur de retomber sur la raison qui t'avais poussé à quitter l'Italie. Ton entourage tentait de te rassurer du mieux qu'ils le pouvaient, mais tu avais peur de le confronter, tu avais peur de comment tu pourrais réagir face à ton ex. Tu essayais alors de ne pas trop y penser, te disant et te rassurant toi même en te disant que tu n'aurais pas à lui faire face. Ton esprit était tout de même assez envahi par toute cette histoire ces derniers jours et t'essayais vraiment de te changer les idées par tous les moyens. Alors ce soir, après ta journée de travaille, t'avais espoir de pouvoir aller boire un verre avec un collègue mais personne n'était disponible. Tu soupires légèrement alors que tu pars vers les vestiaires te changer, enfiler une tenue civile pour quitter ton lieu de travail et rentrer à contre cœur chez toi. Tu traines un peu des pieds, sachant que tes pensées ne seraient pas des plus positives en rentrant chez toi ce soir. Tu aperçois juste un visage qui te parait familier non loin de l'entrée des urgences et tu plisses donc les yeux, cherchant comment tu pouvais bien le connaître et ça vient alors te cogner tel un éclair dans le cerveau. Tu t'approches alors de lui, te demandant bien ce qu'il faisait ici et surtout te demandant aussi comment tu allais l'aborder, après tout, vous ne vous êtes parler que par écran interposé jusqu'à maintenant. "Tu viens donc m'espionner au travail?" Dis-tu d'un air amusée, alors que tu aperçois plutôt son air grave sur le visage. Alors tu reprends ton sérieux, venant t'installer à côté de lui "Désolée si j'ai pas été délicate dans mon approche!"

Tu viens donc m'espionner au travail? arraché à tes pensées, tu relèves lentement les yeux vers cette silhouette qui se dessine devant les lumières de l'entrée des urgences. une voix que tu ne connais pas. un visage qui t'est bizarrement familier, bien que tu ne mettes pas de nom dessus d'instinct. tes pensées qui semblent emmêlées, empêtrées dans un ailleurs, comme toujours enfermées dans ce maudit hôpital. et puis, soudain, tout se démêle et tu reviens à la réalité de l'instant. ce profil qui avait attiré ton attention sur l'application. ce visage empli de bienveillance. tu réalises qu'en réalité, t'avais pas la moindre idée qu'elle travaillait à l’hôpital malgré le fait que son profil indiquait clairement qu'elle avait un rapport avec le milieu médical. mais, tu ne relèves pas vraiment, te contentant de lui offrir un sourire sincère, bien que teinté de mélancolie. J'en aurai été capable, si je n'étais pas ici pour d'autres raisons... Et puis, j'attendais vraiment mon rancard dans ta cuisine! cette fois, c'est un léger rire qui s'extirpe de ta bouche. Désolée si j'ai pas été délicate dans mon approche! la jeune femme vient s’asseoir à coté de toi, sans chercher à savoir ce qui te tracasse, comme si elle voulait simplement être là, présente pour toi, peu important que tu ne sois, au fond, rien de plus qu'un étranger pour elle. En réalité, je ne suis pas contre cette petite entrée en matière faite avec humour...