you have the right to remain silent (manwë)

Tu savais que ce n’était peut-être pas la meilleure des idée de faire une interview de ton cousin. Mais il le fallait, sinon on te sucrait ton job pour ça. Des tyranniques vous avez dit ? Totalement. En soi, tu pourrai arrêter le journalisme pour te consacrer à ta vie sur les réseaux sociaux qui fonctionne plutôt bien ! Mais tu n’avais pas envie, tu aimais trop ce métier pour le laisser tomber à l’aube de tes trente ans. Manwë n’avait pas tué ton oncle, tu en étais persuadé. Mais peut-être que c’est parce que tu es assez proche de ton cousin et que tu doutes qu’il ait commis l’irréparable ? Tu ne préfères même pas y penser.


Tu étais parti dans sa boutique, c’est là où tu pouvais le retrouver plus facilement. Enfin, c’est ce que tu te disais. Tu avais emmener ton calepin ainsi que ton enregistreur avec toi, pour pouvoir lui poser des questions mais seulement s’il avait envie de le faire, t’allais pas lui forcer. Tu savais qu’il répondrait à quelques trucs, ne voulant pas que tu te fasses virer de ton job parce que tu es le cousin d’un homme accusé de meurtre, et parce qu’il refusait de faire l’interview. Tu arrivais à la boutique qui était ouverte, ne voyant personne dans l’entrée. « Man’, t’es là ? » demandas-tu en parlant un peu fort. La boutique avait été un peu saccagée pendant son absence, tu le voyais sur la vitrine taguée et légèrement brisée. Mais ça, il fallait s’en douter que ça allait se passer comme ça…

@Manwë Druid

Manwë n’avait aucun enthousiasme pour cette entrevue avec son cousin, pourtant les deux hommes ont toujours été complices. Tous deux connaissent un parcours médical compliqué, ont des pères lamentables et ont des modes de vies que les autres ne comprennent pas toujours. Jules s’en sortait beaucoup mieux que le luthier sur le dernier point. Niveau incompréhension, il atteignait des sommets depuis la mort de son père. Il avait été accusé, puis on l’avait recherché à titre de victime potentiel. Ayant complètement disparu de la circulation pendant plusieurs mois, on avait même conseillé à ses proches de se préparer au pire…

Il s’en voulait de leur avoir fait subir ça, il n’a donné pour explication que le sentiment d’être lui-même en danger en tant qu’héritier de son père ainsi que la certitude de finir en prison, à tort, s’il ne disparaissait pas malgré son alibi béton. Un autre homme a été accusé à sa place, ça n’avait pas du tout été calculé par le luthier, mais ça l’arrangeait doublement. Comme quoi, il n’avait pas été le seul à avoir projet de tuer cet homme, peut-être que sa situation serait moins problématique s’il avait su, il n’aurait pas mystérieusement pris la fuite. Sa fuite, c’est ce qui le rend coupable aux yeux des habitants de la ville, ils peinent à croire le luthier innocent et il ne peut leur en vouloir. Ce qu’il n’imaginait pas, c’était être confronté à son contraire. Il n’avait encore croisé personne persuadé de son innocence, il s’attendait même à ce que Jules lui pose la question, il ne se pense innocent aux yeux d’absolument personne.

Dans son magasin, c’était le souk. Vandalisé, tagué, pillé. Des instruments onéreux avaient ainsi disparu et il ne pouvait pour l’instant faire peu de travaux en attendant l’expertise de l’assurance. Il tentait de récupérer ce qu’il y avait à récupérer, il venait en ce lieu autrefois reposant pour lui, pour tenter de trouver le calme et réfléchir à la suite. L’œil de la tornade était passé… Et maintenant ?

“ Ouais… J’arrive. “ Il s’extirpe de la partie atelier où il avait amassé les outils restant pour essayer de faire le point. Man’ rejoignit Jules, c’est étrange cette sensation dans sa poitrine. Il n’est pas sûr d’être fan parce que c’était impossible à décrire. Le brun ne pensait pas revoir son cousin un jour, il pensait mourir la nuit où il a affronté son père, il pensait tomber sur un os, que les choses tourneraient au vinaigre pour lui. Mais il était bel et bien là, vivant face à lui, loin de la mort. Malgré l’air naturellement jovial de Jules, il sait au fond de lui qu’il lui a causé du souci. “ Désolé, pour ce merdier... “ C’est pas son genre de s’excuser, mais il sait qu’au-delà de ce problème avec son travail à cause de lui, ça n’avait pas dû être une période sympas pour lui. Et bien qu’il avait bien cette étrange envie de le prendre dans ses bras, il gardait ses distances. Il s’éloignait de tous ceux qu’il aimait bien avant sa disparition, mais ce phénomène avait empiré à son retour. Il avait prit soin de répondre au moins de personne possible, à ne sortir que la nuit, son déménagement était en cours pour qu’on ne le trouve pas. Il n’était qu’un fantôme.

Il esquisse un faible sourire, parce que ça lui fait plaisir de le revoir, de voir quelqu’un tout simplement, mais il doit le dire, Jules et sa sœur font partis des rares personnes qui qui comptent vraiment pour lui. D’habitude, ses magouilles et problèmes ne les touchent pas, mais cette fois… Il avait tué leur oncle, il avait flanqué la trouille et froid dans le dos à tous… Et il n’avait aucune idée de l’avenir parce qu’il n’y avait jamais pensé. “ Comment tu vas ? “ Ça aussi, il le demande rarement… Il y pense souvent, mais il ne s’immisce pas dans sa vie, le moins possible, pour le protéger. Mais son patron au journal prouve que ces efforts n’ont pas été suffisant pour que Jules soit épargné par la situation.

Tu étais entré dans le magasin et tu voyais enfin l’ampleur des dégâts. Pendant son absence, tu n’avais même pas pris le temps de passer pour nettoyer un peu. Après tout, c’est la famille, t’aurai pu faire ça pour lui quand même. D’autant plus que tu te tue à clamer son innocence à qui veut bien t’entendre ! Mais non, tu t’étais renfermé sur toi-même et tu avais fait l’autruche. Lorsque tu entrais, tu hélais le nom de ton cousin qui te répondait rapidement. Il venait vers toi, et tu avais cette mine désemparée et désolée. « Ne t’excuses pas, mec » dis-tu avec un mince sourire. Toi tu aurai du t’excuser pour ne pas avoir été là pour lui, pour ne pas l’avoir aidé alors qu’il était entrain de se faire accuser par l’entièreté de Bowen. Il te sourit malgré tout, pour te saluer. Manwë c’était bien une des seules personnes de cette famille Keynes a être acceptable. Sans compter ta soeur jumelle, bien sûr, et ta mère décédé il y a peu. Mais tu savais que tu pouvais quoi qu’il arrive compter sur lui, et inversement bien évidemment. C’est pour ça que tu n’avais rien écris sur lui, que tu évitais les conversations quand on parlait du meurtre de ton oncle ou bien que tu avais refuser le travail que t’avais donné ton boss pour parler de lui dans le journal où tu travaillais. « C’est pas important de savoir comment je vais » soufflas-tu avec un mince sourire sur les lèvres. Tu regardais un peu autour de toi, le magasin vandalisé et tu reprenais ton regard vers lui. « C’est plutôt toi, comment tu vas ? » demandas-tu à ton tour, le regard un peu déprimé pour lui.

Ça fait drôle, de se revoir dans ces circonstances, jamais Man’ ne s’était senti aussi vulnérable, du moins dans les apparences. Il s’est toujours arrangé pour que les gens n’y voient que du feu, cette fois, il ne peut pas nier l’évidence même.

Il lève un sourcil, un regard interrogatif à l’intention de son cousin. “ Ah ouais ? Moi ça m’semble important. “ Jules connait par cœur ses tactiques consistant à faire parler les autres pendant que lui ne dit rien. Il sait qu’il n’y échappera pas cette fois, qu’ils sont là également pour ce stupide interview. Le luthier en avait un peu ras la casquette des interrogatoires, mais il sait que se faire oublier prendra du temps, il n’est néanmoins pas certain que jouer l’agneau innocent dans les journaux le rendra plus crédible auprès de tous ceux qui le trouvent de toutes manières, suspect, et qui ne changeront pas d’opinion sur lui. Il n’en a pas grand-chose à faire de leurs avis. “ Ça va, il était temps de mettre un coup de neuf ici, non ? “ Il hausse les épaules, un sourire railleur. Bien sûr qu’il s’en fichait que sa boutique soit peu attrayante, sinon il aurait effectué les changements bien avant. “ Hé... Me fait pas ce regard de p’tit chiot malheureux ! “ Qu’il lui dit en lui donnant un petit coup d’épaule avant de tirer une chaise pliante qu’il secoue pour qu’elle s’ouvre et propose le siège au plus jeune “ J’voulais pas que les gens, enfin toi et ceux qui valent la peine dans cette ville, me pensent mort, c’est pour ça que j’suis revenu. “ On ne pouvait jamais lui reprocher de manquer d’honnêteté, il serait sans doute resté loin de Bowen pour toujours. Il n’avait jamais envisagé faire sa vie ailleurs avant ça… “ Mais j’vais bien. “ Aussi bien que peut aller un assassin, mais il n’a pas le droit de se plaindre.

« J’suis guéri, c’est ce qui est important. Le reste, c’est rien » dis-tu à ton cousin avec un maigre sourire. Il n’avait pas été là pendant que tu avais eu ta greffe de poumons. Et c’était pas plus mal, une personne de moins à inquiéter pendant l’opération et surtout pendant la période où le rejet aurait été possible. Même s’il est encore possible, le risque 0 n’existe pas. « Oui mais bon, pas de cette façon » dis-tu en regardant les murs tagués du magasin du luthier. C’est sûr qu’elle était un peu vieillotte cette boutique, mais tu ne voyais pas rénover le magasin après un scandale comme celui-là. C’était mauvais, nul. Et ça se voyait sur ton visage. « J’fais pas ma tête de chiot malheureux » dis-tu en riant de bon coeur avec ton cousin. « C’est juste que ça me fait chier pour toi, c’est tout » ajoutas-tu en reprenant un peu de sérieux. Il venait de te faire une petite déclaration. Tu ne pensais pas qu’il était mort, juste qu’il avait pris la fuite après le scandale et tu ne lui en voulais pas. Par contre, tu étais content qu’il soit revenu et que vous puissiez en parler tous les deux. Même si à la base, c’était pour une interview que tu étais revenu, c’est aussi pour prendre de ses nouvelles et lui apporter ton aide quoi qu’il arrive. La famille c’est sacré, surtout chez les Keynes. « Content de savoir que t’es pas mort, sinon, qui est-ce que j’aurai pu emmerder ? » demandas-tu avec un léger rire pour détendre l’atmosphère.

Manwë peinait encore à comprendre comment son cousin pouvait véritablement être guéri, même si c’était un soulagement de l’imaginer seulement. Jules n’était pas initialement destiné à vivre vieux, Man’ avait fait le deuil à sa manière, même s’il aurait été naturellement dévasté par sa mort. Le brun n’avait pas été là pour Ju’ le temps de son hospitalisation, le jeune homme était suffisamment entouré, de personnes bien plus optimistes que lui. Man’ se mettait spontanément au second plan de la vie de son cousin, il serait toujours là pour lui en cas de galère, mais dans les moments plus heureux il s’effaçait. Il était ce genre d’ami, peut-être parce qu’il ne sait pas vraiment être heureux.

“ Te fait pas de bile pour moi. “ dit-il aprés avoir ris avec son cousin. “ Au moins ça va m’occuper, je ne vais pas avoir de client avant un bail. “ Il est prêt à parier le peu qui lui reste là-dessus. Enfin le peu… Il fallait justement qu’il en parle à Jules, habituellement il prend ses décisions seul, mais cette fois est un peu particulière. “ Hm… Je suis certain qu’un de tes potes aurait fait l’affaire… “ Plaisante-t-il. Son regard s’attarde sur ses clopes posées sur ce qui reste de son bureau, mais pas question de fumer en présence de Jules. “ Par contre… Mon père est bel et bien mort. “ Il le sait mieux que personne. Il avait dis ces mots avec détachement, inutile de feindre une quelconque peine. Il allait déjà devoir mentir à son cousin… “ Tu devinera jamais ce qu’il m’a laissé. “ Il ne laisse pas planer le suspens, c’était pas le genre de Man’ d’être théâtral. “ Du pognon. Vraiment beaucoup… Très certainement de l’argent sale de ses magouilles reprises à peine sorti de taule. J’ai jamais eu d’argent, j’veux dire… J’devrais refuser, j'devrais même pas y réfléchir. “

Il s’en était passé des choses depuis le départ de ton cousin. Ta rémission, ta greffe, tout ça qui avait fait que tu étais encore parmi eux aujourd’hui. Tu en étais le premier surpris. Mais le plus important, c’était lui. Lui et son accusation pour mon meurtre. Tu étais convaincu qu’il n’avait rien fait, qu’il n’y était pour rien. Il n’aurait pas pu faire ça. Enfin, tu ne le voyais pas faire ça. « J’me ferais toujours du soucis, tu sais » soufflas-tu simplement. Tu ne le montrais pas forcément, mais tu aimais beaucoup ton cousin. Et il était très important pour toi. Ton père n’avait pas forcément été très présent dans ta vie, et ton cousin avait eu ce rôle de grand frère quand tu en avais eu besoin. Une figure masculine que tu avais gardé près de toi. « Ouaaaaaais mais c’est pas pareil ! » dis-tu avec un léger rire. Mais tu reprenais ton sérieux quand il te disait que ton oncle était vraiment décédé. Ça te foutait des frissons dans le dos. Tu ne savais pas ce qu’il s’était passé, et d’un côté t’avait pas envie de savoir. Mais de l’autre, ta fibre journalistique était curieuse. Tu ne savais pas quoi dire et tu l’écoutais parler. « Tu déconnes ou quoi ? » dis-tu un peu surpris avant de reprendre. « Gardes le cet argent, utilises le pour refaire ton magasin, pour tout ce bordel que ça a foutu dans ta vie ! » dis-tu en fronçant les sourcils, cherchant d’autres idées pour cet argent que Man’ venait de recevoir.

“ Je me doute que c’est pas pareil… “ Man’ sait qu’il n’est pas le cousin idéal, ni même l’ami parfait en règle général, il fait de son mieux parce qu’il galère déjà de son côté, même s’il est trop fier pour demander de l’aide à qui que ce soit, même s’ils se font du souci pour lui. Il a toujours eu du mal avec ça, avec les gens qui veulent prendre soin de lui, il trouve ça louche, il se dit que ce n’est pas normal, ça cache forcément quelque chose. Parano ou réaliste ? Peut-être un peu les deux.

Il arque un sourcil, toisant son cousin dont la réaction l’étonnait concernant l’argent. “ T’as entendu ce que je viens de te dire ? Y’a pas de mystère sur la provenance de cet argent, et j’te parle pas de quelques milliers de dollars. “ S’il prend cet héritage, il n’aurait même plus besoin de cette boutique. Il y a peut-être même des chances pour qu’un mafieux se pointe ici pour réclamer son fric, il l’attendait, tiens… Ouais…

“ J’ai jamais eu d’argent, j’pourrais me débrouiller sans, comme d’hab. “ Il ne précise pas qu’il a perdu son appartement et qu’il vit dans une caravane, de toutes manières il n’invite jamais personne chez lui, peu de chances que Jules le découvre un jour. Seule sa sœur est déjà venue à son domicile pour l’aider à mettre de l’ordre à l’époque ou Saoirse vivait chez lui, en dépannage. “ T’as pas l’air de cet avis… “ Il soupire, il sait aussi qu’il ne veut pas de cet argent parce que ça vient de son père, qu’il ne veut rien de lui… S’il devenait le cousin pété de thunes, qu’est-ce que ça donnera par la suite ? Il n’en sait rien… Ceci dit, s’il devait quitter la ville, le pays, cet argent pourrait toujours servir. Il n’avait aucune idée de ce que l’on peut faire avec autant d’argent, il n’y a qu’à voir ces fringues pour le savoir. Avec de l’argent qui sait, il pourrait peut-être même se payer des soins qui l’empêcheraient de finir aveugle… Mais il ne veut pas y penser. “ J’ai besoin d’y réfléchir. “ Il pensait qu’en parler avec Jules l’aiderait, le conforterait dans son rejet de ce fric malgré ses conditions de vie plus misérables et déplorables que jamais, mais c’était tout le contraire.

C’est différent d’emmerder son cousin plutôt que son pote. Et si Manwë venait à disparaître encore une fois, tu t’ennuierai beaucoup, on va pas se le cacher. C’était peut-être pas l’homme le plus agréable de la terre mais il était toujours là pour toi, à te soutenir et t’aider quand tu étais dans la panade. Et le voir disparaître, ou même être derrière les barreaux, ça ne t’aiderai pas à aller mieux, loin de là. 


L’argent venait de son père, donc ton oncle, et tu savais que ce n’était pas proprement qu’il avait acquit cet argent. Mais ça pouvait l’aider, à Man’ et tu voulais l’aider à relativiser. « Je sais… » soufflas-tu avant de reprendre. « Mais j’essaye de relativiser, mec. Tu pourrai faire plein de truc avec cet argent. Même si c’est l’argent sale de ton père, il te doit bien ça pour tout ce qu’il t’a fait vivre » ajoutas-tu en haussant les épaules. Tu voulais qu’il se remette sur pieds, tu voulais pas que sa réputation soit entachée. Tout ce que tu voulais c’est qu’il se relève de tout ça. Et tu voulais l’aider pour ça. « Je sais que tu prendra la bonne décision pour toi » finis-tu par dire avec un léger sourire. Tu ne voulais pas lui forcer la main, juste lui exposer tes idées.

Manwë avait fait venir Jules ici pour faire ce maudit interview, mais il voulait également son point de vue concernant cet héritage en suspens. Bien sûr qu’il pourrait refaire cet endroit à neuf avec cet argent, mais il ne se voyait pas vivre avec des biens acquis avec cet argent. C’était difficile pour lui d’accepter de l’aide, mais un tel coup de pouce financier de l’homme qu’il détestait le plus au monde, l’homme qu’il avait tué, c’était… Impensable. Il pourrait se servir de ce fric pour se remettre sur pied, puis donner le reste à quelque chose qui en vaut la peine. Une chose certaine, Jules ne semblait pas trouver que l’idée d’abandonner cet argent à l’état soit une bonne idée… C’était toujours bien d’avoir un autre point de vue, même si la vie de Jules n’avait rien à voir avec la sienne.

“ Ouais… Hé, t’évite de parler de cet argent dans ton article, ok ? “ Ce serait pourtant tellement croustillant, vendeur, ça mettrait de l’huile sur le feu… Un tel pactole, un mobile de plus. Le brun soupire avant de se lancer. “ T’as besoin de savoir quoi ? Pour ton article… “ Il marque une courte pause, ses yeux verts planté dans le regard de son jeune cousin, sans faiblir. Ouais, s’il est capable de mentir à Jules, il pourra mentir à n’importe qui. Alors il devait y arriver, absolument, question de vie ou de mort. De prison ou de liberté… “ Tu m’as pas encore demandé si je suis vraiment innocent, hm ? “ Si ça ne s’appelle pas entrer dans le vif du sujet, jamais avec des pincettes, à la Manwë. Il devait le faire, il devait se prouver qu’il pourrait vivre avec ce secret, à jamais.

Ton cousin avait accepté de faire cette interview alors que tu n’y croyais pas. Mais pourtant, tu étais bien là, dans sa boutique ravagée pour parler de son accusation de meurtre. Toi, tu étais convaincu de son innocence parce que c’était ta famille, Manwë. C’était le cousin dont tu étais le plus proche et que tu appréciais le plus. Tu savais qu’il avait reçu de l’argent par la mort de son père et qu’il n’en voulait pas mais tu essayais de le convaincre de le garder, ne serait-ce que pour mettre la boutique de nouveau sur pieds. « Evidemment que je vais pas parler de cet argent dans l’article, j’suis débile mais pas à ce point quand même » dis-tu en haussant les épaules. Tu sortais ton dictaphone pour prendre le semblant d’interview que vous alliez faire tous les deux ainsi que ton calepin pour noter deux trois trucs. « J’ai besoin de savoir la relation que t’avais avec ton père, même si moi je la connais déjà, et surtout où tu étais quand il est mort » demandas-tu simplement au luthier. Tu connaissais déjà des réponses mais tu devais être impartial pour le journal. Personne ne devait savoir que vous aviez un lien familial alors que tu écrivais cet article. Tu levais les yeux vers lui quand il te disait que tu ne lui avais pas encore posé la question de savoir s’il était innocent ou non. « Parce que j’suis convaincu que tu l’es, Man’ » dis-tu simplement en hochant la tête, postant ton regard dans le sien. Personne ne pourrait te sortir de cette idée, mis à part si ton cousin te disait l’inverse.

hj:

Man sourit légèrement lorsque Jules s’insulte de débile, il n’aurait pas dit ça, juste maladroit à ses yeux, naïf, beaucoup trop. Il le prouve, en s’avouant convaincu de l’innocence de son cousin. Bien sûr qu’il était coupable, mais il avait toujours protégé Jules de ça, de cette partie violente de lui. Cette haine qui circulait dans son système, cette envie de vengeance, jamais il ne l’avait clairement évoquée face à Jules. Regarder Jules droit dans les yeux et lui mentir s’avérait finalement plus facile, parce que Jules ne doutait pas et il n’avait pas envie de le décevoir. Il y avait bien assez de criminels, dans la famille Keynes. “ Ok… Je n’avais aucune relation avec mon père, je ne suis jamais allé le voir en taule, jamais écrit une lettre, jamais un coup de fil. Rien. Il était déjà mort, pour moi. “ Juste… Pas assez mort. “ Quand il est sorti, ça n’a rien changé à ça. Je n’ai eu aucun contact avec lui. Certains prétendent que je le recherchais. “ Et ils avaient tellement raison, mais tellement pas de preuves, dommage. “ Je n’ai jamais eu de père, je n’étais pas en pleine crise affective de la quarantaine à vouloir renouer avec lui. “ Ironiser, c’était encore la meilleure des options au final, rendre ridicule ceux qui pensaient qu’il avait repris contact avec lui depuis bien longtemps. Absurde, le père Keynes fuyait son fils comme la peste, il savait bien ce qui l’attendait de toutes manières. “ J’étais hors de la ville, quand il a été tué. J’avais été invité à une soirée avec un client du magasin et j’avais peut-être pris un peu trop de drogue ce soir-là, mais j’avais décidé de quitter Bowen. Ce que je n’avais finalement jamais fait de toute ma vie. Et personne ne s’est rendu compte que j’étais parti avant que l’on se mette à me chercher à cause de ça. L’ironie, c’est que j’voulais seulement m’effacer et que l’on a jamais autant parler de moi avant ça ! Je n’avais jamais eu ce genre de pensées avant, mais ça va mieux, t’en fais pas. C'était juste, passager. “ Il était obligé de feindre la version qu’il avait dépeinte à la police. Une dépression, rien de plus. Bien que dans le fond, ce n’était finalement pas tant que ça mensonger. “ C’est bon, t’as ce qu’il te faut ? “ Qu’il demande avec calme, adressant un clin d’oeil à son cousin. Bon sang de journée…