#07 ~ Why me? [Elijah & Victor]

Je n'ai aucune idée de l'heure qu'il est. Tout ce que je sais, c'est qu'il est tard, parce qu'il fait nuit depuis un bon paquet de temps. J'ai passé la soirée au bar, avec Elmo et Beck. On a picolé, beaucoup. On s'est repassé un joint aussi, sur le bord du trottoir, à l'abris des regards des agents de sécurité. Généralement, ce genre de mélange, ça me flingue. Mais j'aime sentir cette ivresse. Après, on a prit un uber, histoire de rentrer en sécurité. Il m'a déposé devant mon immeuble. J'ai gravis toutes les marches, une par une, j'ai trébuché dix fois et j'me suis cogné l'épaule sur les murs peut-être une trentaine de fois. J'suis bien bien arraché. Et après, j'suis resté comme un con devant la porte de l'appartement #23. Bah ouais, j'avais pas mes clefs. En fait, je m'étais gouré et j'avais embarqué le double des clefs de chez Victor. "Putain le con!" Ma voix avait claqué dans le silence de la cage d'escalier. Et j'ai eu beau tambouriner à la porte, Alexis n'a pas ouvert. Elle devait pas être là ce soir. Alors j'me suis retrouvé à la rue. Enfin, pas tellement puisque j'avais les clefs de chez Victor. J'suis un malin moi. Il habitait pas très loin et par le plus grand des miracles, j'arrivais jusqu'à chez lui. J'trifouille la clef dans la serrure et j'ouvre la porte. J'ai un sourire de niais accroché au visage et j'ai les yeux dans le vague. J'vous dis, j'suis complètement déchiré. Victor me réceptionne, à l'instant où j'manque de trébucher. Et là, il s'met à parler à la vitesse de l'éclair. Wow, ça va vite, très vite, beaucoup trop vite pour mon esprit embrumé par l'ivresse. J'finis par m'affaler dans le canapé et j'regarde mon pote. J'me marre. "J'ai grave faim ça tombe bien. T'as une petite bière pour accompagner le tout?" Moi j'en veux toujours plus. Et j'dirais pas non pour poursuivre ce sentiment d'ivresse qui me traverse à cet instant. J'passe mes bras derrière la tête et je soupire tout en continuant de rire un peu. "Putain, t'imagine pas la galèèèèère que j'vis depuis au moins mille ans." Ouais, j'exagérais, mais ça m'avait paru long d'arriver jusqu'ici.

J'suis dégommé. J'ai beaucoup trop bu et j'suis bien trop loin pour me rendre compte que Victor, ça l'agace. Et puis de toute façon, il a passé sa vie a être agacé par mon comportement, mon côté incontrôlable. Il est habitué Victor à me récupérer à moitié torché. C'est pas la première fois. J'suis affalé sur le canapé, sûrement là où j'vais finir par m'endormir. C'est une safe place chez Victor. Je le connais depuis toujours. Je soupire quand il me dit qu'il a pas de bières. J'pose ma tête en arrière, j'vois Victor qui s'agite dans la cuisine. "Je sais bien, c'était juste pour voir si t'avais retenu les leçons que j'te fais depuis des années. J'te l'ai déjà dis Victor : le bac à légumes c'est pas fait pour les courgettes et les tomates, ÇA A ÉTÉ INVENTÉ POUR LES BIÈRES." J'rigole, comme un con, parce que j'ai crié mais sans être énervé. Juste parce que ça me paraissait tellement évident. Et là, Victor, il me toise avec son regard de jugeur. J'pose mes yeux vitreux dans les siens. "Il s'passe rien, j'ai passé la soirée avec Beck et Elmo, c'est tout." J'souris et je rajoute "C'est pas la peine d'me juger, monsieur Parfait là!" J'suis incapable de rester sérieux. Déjà que lorsque je suis sobre c'est pas évident pour moi d'être concentré alors saoul, c'est mission impossible. J'attends, presque sagement sur le canapé que Victor m'apporte une assiette. Il me traite bien Victor, alors que j'le mérite clairement pas là. Il dépose l'assiette sur la table basse, alors j'me rapproche. Et j'me mets à dégommer l'assiette. La défonce, ça ouvre l'appétit. "C'est délice Vic." On mange, presque en silence, j'm'enfourne des pelletés de riz cantonais. Puis une fois terminé, j'me mets à l'aise dans le canapé. J'sens que la pièce valse autour de moi. J'me frotte le visage avec mes mains, histoire d'me dynamiser un peu. "Il est quel heure Vic ? Genre, est-ce que j't'ai dérangé ou c'est ok?" J'm'étais même pas soucier de savoir comment il allait. Il est assis à son bureau. J'le toise d'un regard amusé. J'ai envie de sortir une connerie. Comme toujours certes, mais là, avec l'ivresse, j'ai plus aucun filtre. "Vic, tu sais de quoi j'rêve là?" J'laisse planer un petit silence et j'reprends, toujours le sourire d'la connerie accroché aux lèvres "Qu'tu te lèves et que tu me dises : allé Jaja, on retourne faire la fête jusqu'au bout d'la nuit. Sur un échelle de 1 à 10, mon rêve il est réalisable à combien?" Vraiment, j'avais encore envie de sortir, de boire et je perdais pas de vue mon objectif de vie : faire sortir Victor.

Victor, c'est le genre de type que j'ai toujours pas réussi à mettre dans ma poche. Malgré toutes les années durant lesquelles ont s'est côtoyé, je n'ai jamais réussi à l'emmener en soirée ou lui faire boire une bière. Mais ça reste mon goal ultime. Un jour, j'y arriverais. En attendant, je débarque chez lui, complètement bourré et lui, il prend soin de moi. J'ai beau lui rappeler que les bières, c'est un indispensable du frigo, il prend pas la peine de répondre. Moi, j'm'en rends pas compte. J'suis saoul.

J'dévore le plat qu'il vient de me servir et le silence s'installe. Victor, il travaille, ou je sais pas trop ce qu'il fait. Mais il est occupé. Mais j'finis par l'interpeler, parce que le silence, c'est pas trop mon truc. Mais Victor, il est froid. Il est très clairement saoulé de mon comportement. Je soupire et lève les yeux au ciel. "Te coucher ? Mais, c'est que le début de la nuit." En vrai, je ne sais pas quelle heure il est, Victor il a pas voulu me répondre. Alors après, parce que j'suis incapable de m'arrêter, j'lui déballe des conneries. Et lui, il répond, sèchement. Moi, ça me fait rire d'le voir coller son front à son bureau. "Moins vingt.." que je répète comme si j'essayais de compter. "Ca fait vraiment pas beaucoup, Victor." Lui, il me suggère d'aller dormir pour qu'il puisse finir de travailler. Mais j'suis pas tout à fait de cet avis. Alors j'me lève, un peu trop brutalement, alors j'prends trois secondes pour rétablir mon équilibre. "Wo, ton sol il est pas stable." Je rigole, encore comme un con et j'me déplace vers la salle de bain. "Avant de dormir, faut que j'prenne une douche. Ca te dérange pas hein?" Encore une fois, j'lui demande pas trop son avis et j'pars dans la salle de bain. J'aime bien prendre une douche quand j'suis encore saoul et que j'm'apprête à dormir. Alors, j'entre dans la salle de bain et j'commence à retirer mon pantalon, mon hoodie et mon t-shirt. Puis j'me rend compte que j'ai pas d'affaire de rechange. Alors j'retourne dans le salon, en boxer. "Dis Vic, t'aurais une serviette à me prêter ? Et un caleçon aussi, accessoirement." J'lui souris, avec toujours cet air absent dans les yeux. J'crois qu'une fois l'ivresse envolée, j'aurais de sacrées excuses à adresser à mon pote.

Victor, il est pas content. Je le vois bien que je l'excède. Mais j'suis bien trop saoul pour réfréner quoi que ce soit. Alors je parle, je m'agite, je raconte des conneries et lui il répond en mono-syllabe. Il est focus devant son ordinateur. J'sais même pas comment il fait pour rester concentrer aussi longtemps, qui plus est avec moi dans les parages. Difficile de lui arracher un sourire ou de lui faire lever les yeux. Alors après qu'il m'est répondu froidement, j'décide de bouger. J'me lève péniblement, manquant de tomber à la renverse, mais je stabilise. Et puis j'lui annonce que j'vais prendre une douche. C'est à peine s'il relève. Et puis, une fois en boxer dans la salle de bain, je me rends compte que je n'ai pas de serviette ni de caleçon de rechange. Alors j'retrouve dans le salon et Victor, il semble excédé. Il voudrait que j'me taise. Alors moi ça me fait rire encore plus. "Mais, dis, t'arrête de me crier dessus hein!" Je souris et je rajoute "PARCE QUE MOI AUSSI JE PEUX CRIER!" Mais finalement, j'suis satisfait de sa réponse et je repars en direction de sa chambre pour lui piquer un caleçon dans son tiroir. J'sens que sa tangue dans tous les sens et j'finis par rejoindre la douche. J'me glisse sous l'eau chaude et j'ferme les yeux. Histoire de redescendre un peu. J'dois me rendre à l'évidence, Victor, il avait pas envie de faire la fête. Il allait falloir que j'aille me coucher alors que j'avais l'impression de n'être qu'à l'aube de la soirée. J'reste pas longtemps sous l'eau, c'était juste histoire de tenter de me remettre les idées au clair. Finalement, je sors et j'me sèche avant d'enfiler le caleçon de Victor et de remettre mon t-shirt. J'me sèche les cheveux aussi. Avoir les cheveux mi-long, c'est tout un bordel mais pour rien au monde j'me les couperais. Alors je retourne dans le salon, mes cheveux ramassés en chignon. Victor, il est sur le canapé, il me regarde même pas. "T'es fâché à ce point contre moi?!" Bah c'est vrai après tout, j'avais rien fait de mal.. si ? J'me posais dans le canapé, à côté de Victor, et comme à mon habitude, je continue mes conneries. "Et dis moi, Vic, c'est quoi la probabilité que tu m'laisses ton lit et qu'tu dormes dans le canapé ? Tu sais, j'ai un peu mal dans l'bas du dos et ton canapé, il est pas confo du tout." J'le regarde amusé, il va finir par m'en coller une si je continue. Je soupire et j'pose ma tête en arrière, sur le rebord du canapé. "Putain, j'ai vraiment trop bu. Tu crois que j'suis alcoolique?" J'marquais une pause. "Mais j'veux bien un plaid oui." Mes pensées se mélangeaient, l'ivresse continuait de faire son chemin, même si je sentais que j'étais un peu moins attaqué qu'en arrivant. "Promis, demain matin, j'vais chercher des croissants pour le petit déjeuner, pour te dédommager de ... tout ça." J'souris, il y avait de forte chance pour que j'oublie cette promesse une fois que le sommeil m'aura fauché et que le gueule de bois se sera installée.

HRP:

J'suis sorti de la douche et j'ai rejoins Victor au salon. Il me répond à peine, j'crois qu'il est vraiment saoulé de mon comportement, probablement tout autant que moi je suis saoul d'alcool. J'parle, beaucoup, et lui répond pas mono-syllabe. Il évite mon regard. Mais j'suis bien trop ailleurs pour me rendre compte de tout ça. Alors je rigole quand il émet mon possible alcoolisme. "Merci du soutien, Vic." Puis j'fixe mes yeux au plafond, ça tangue, ça valdingue dans tous les sens. Victor se lève, j'le suis du regard tandis que j'lui promets des croissants pour le lendemain. Il me balance le plaid en pleine face, j'suis pas assez vif pour le récupérer en plein vol. J'm'en débarrasse avec des gestes incertains. "J'apprécie ton sens de l'hospitalité!" Tandis que Victor se réinstalle à son bureau, moi j'm'allonge sur le canapé. J'cale ma tête contre le coussin et j'essaye d'me mettre confortablement au chaud sous le plaid. Mais bordel, j'ai pas du tout envie de dormir moi. Alors j'étais là, allongé sur le dos et j'fixais toujours le plafond. J'avais bien compris que Victor n'avait pas envie de parler. Mais ça, c'était pas mon problème. J'étais trop bourré pour me rendre compte qu'il était réellement dans l'inconfort. Mes deux bras posés sous ma tête, j'posais mes yeux sur Victor. Il tentait d'se concentrer, mais j'avais pas envie d'le laisser tranquille. "J'peux te poser une question?" J'ai déjà le sourire du mec qui va dire une connerie accroché sur mon visage. J'le laissais pas le temps d'me répondre, parce que de toute façon, il m'aurait répondu que non. "J't'ai jamais vu avec personne, genre, de façon rapprochée tu vois." J'marquais une pause, puis je reprenais. "Faudrait qu'tu trouves quelqu'un, ça t'ferait du bien." J'm'attendais à ce qu'il m'envoie encore sur les roses mais tant pis, j'étais clairement plus à ça près.

J'suis toujours bien bien plongé dans mon ivresse. J'me rends pas compte d'la tempête que j'provoque chez Victor, aussi bien dans son appartement que dans son fort intérieur. J'suis allongé, les mains sous la tête, sur son canapé, Victor est à son bureau et j'peux pas m'empêcher de parler. D'lui poser des questions. J'veux toujours qu'il y ait du bruit, du mouvements autour de moi et encore plus lorsque je suis saoul. Victor, il est froid. Il est distant. Il est agacé. J'lui demande quelque chose et il me demande de répéter. Moi j'ai pas forcément compris et j'ai juste l'impression qu'il a pas entendu. Alors j'reformule, en criant un peu, comme s'il était sourd et attardé. "JE TE DEMANDE SI T'AS DÉJÀ DATÉ QUELQU'UN ! ET JE T'AI DIS QUE CA TE FERAIS DU BIEN." Mais en fait, Victor, il a très bien compris ce que je lui demandais. Et sa réponse, elle est sans appel. J'me redresse. Faussement choqué. "Tu me mettrais à la porte ? Moi Elijah ? Ton pote de toujours?" J'lui fais mes p'tits yeux de chien battu, parce que je sais au fond, qu'il serait capable de me virer d'chez lui. Après tout, c'est moi qui vient mettre le bordel dans la quiétude de sa soirée. J'me rallonge, et je désamorce. "Bon bon, ok, j'reste tranquille. J'te demanderais plus rien." J'fixe le plafond, ça tourne toujours beaucoup. J'laisse le silence s'installer un peu. Mon esprit, il continue d'formuler plein de trucs, des questions, des remarques. Et j'peux pas me contenir plus longtemps. Deux minutes de silences, pour moi, c'est déjà trop. Mes yeux se portent sur Victor. "J'trouve ça bizarre de m'endormir à côté de toi comme ça là. Alors j'vais attendre, ok?" Mes mots font plus tellement de sens. J'crois que j'sais même plus ce que je dis. J'suis juste un gars bourré sans filtre. Alors j'reste encore un peu tranquille, et j'sens que dans pas longtemps, le sommeil va finir par me faucher. Ce genre de calme là, ça m'endort.

J'avais fini par me calmer. Parce que de toute façon, c'était pas avec Victor que j'allais poursuivre la fête. Finalement, le fait d'arriver chez lui, d'manger et d'prendre une douche, ça m'avait fait décuver un peu, du moins suffisamment pour que j'finisse par m'endormir. J'avais garder les yeux ouverts, un petit moment, en écoutant Victor marmonner derrière moi et j'avais sombré dans un sommeil, lourd, plombé par l'alcool.

Le réveil, il est douloureux. J'trouve un semble de conscience lorsque j'entends du bruit autour de moi. La première chose que j'fais, c'est d'ouvrir péniblement les yeux. Il fait clair autour de moi et j'peine à comprendre où j'me trouve. Finalement, mon regard se pose sur Victor. Ah. Donc je suis chez lui. Comment s'est arrivé ? J'en ai aucune idée, aucun souvenir. L'alcool que j'avais ingurgité en masse la veille me donne un mal de tête incroyable. J'grogne. J'suis pas du matin et encore moins quand j'suis en gueule de bois. "Aah, bordel, j'suis dans le mal là." Même dans cet état j'en fais des caisses. J'me redresse dans le canapé, m'assayant. J'regarde mon pote en train de préparer le petit déjeuner. "Est-ce que j'ai été insupportable hier?" Je connais déjà la réponse. Alors j'anticipe. "Nan, attends, je reformule. Tu m'en veux à combien de pour cent pour hier?" C'est mieux comme ça. J'suis en caleçon, j'ai pas envie de chopper froid alors j'me penche péniblement vers mon sac qui s'trouve au pied du canapé et j'en sors mon t-shirt que j'enfile dans l'instant. Je m'extrais du canapé, non sans mal et je m'étire, histoire de retrouver un peu de dynamisme. "Faut que tu me rafraichisse la mémoire là, j'me souviens de .. rien en fait." Je hausse les épaules. Le seul truc qui me vient en tête, c'est Elmo et Beck, au bar, avec moi, bien attaqués par les bières et la weed. J'm'approche de la cuisine, là où Victor est en train de s'affairer. "T'as bien dormi toi?" Bah quoi ? J'essaye d'être sympa, ça lui fera peut-être me pardonner pour le asshole que j'ai été hier soir.