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Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.

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 Le plus beau jour de ma vie

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Anonymous
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Le plus beau jour de ma vie Empty
MessageSujet: Le plus beau jour de ma vie   Le plus beau jour de ma vie EmptyVen 9 Juin 2023 - 6:48

19 avril 2023,

Quelle merveilleuse idée j’ai eu d’aller escalader un Mount aujourd’hui alors que j’en suis rendue à mon dernier mois de grossesse et même aux deux dernières semaines ? Cette question restera en suspens encore de longues minutes dans ma tête alors que les pompiers sont actuellement en train de m’amener vers l’hôpital de Bowen. J’ai perdu les eaux au beau milieu de nul part et en compagnie d’un inconnu. Franchement, je n’aurais pas pu pire situation. Quoique, j’aurai bien pu trouver pire me connaissant. J’aurais pu accoucher dans un taxi ou encore dans des toilettes publiques, il y a tant d’autres possibilités. Seulement, j’avais imaginé mon accouchement différemment. Je pensais perdre tranquillement les eaux chez moi au beau milieu de mon salon. Je pensais appeler un taxi et prendre ma valise sur mes petits pieds. Ma valise trône depuis des jours à l’entrée de mon appartement, attendant sagement que je perde les eaux. Évidemment, je ne l’avais pas prise pour me balader sur un sommet aujourd’hui. Toujours est-il que je suis actuellement en train de ressentir les pires douleurs de ma vie. Comme tout le monde, je sais que les contractions lors d’un accouchement sont des douleurs insupportables et parmi les plus douloureuses ressenties par l’humain. Nombreuses sont les femmes que j’ai accompagné dans ce processus douloureux en leur disant que je les comprenais, que je les soutenais et que j’étais de tout cour avec elles. Que nenni, je ne les comprenais absolument pas. J’étais à des années lumières de comprendre cette douleur insupportable. A l’heure actuelle, je n’avais qu’une envie : arriver le plus vite possible à l’hôpital et qu’un anesthésiste me pose la péridurale. J’espérais du plus profond de mon cœur qu’il ne serait pas trop tard pour cela. Le pompier à mes côtés essayait de me rassurer, de me faire respirer convenablement. Je ne pensais pas cela si dur.


Une fois passée les doubles portes des urgences gynécologiques, on m’amena rapidement dans une salle de travail. Le ballet des professionnels de santé allait pouvoir commencer. Je ne le connaissais que trop bien ; médecin, sage-femme, anesthésiste, infirmière et aide soignante allait bientôt débouler dans la chambre pour s’assurer que mon bébé et moi étions en bonne santé. Je n’attendis pas cinq minutes avant de les voir arriver. Il y avait beaucoup d’agitation mais je n’attendais qu’une chose, savoir où j’en étais dans le travail. Le monitoring du bébé était bon, l’infirmière me perfusa et on m’examina plus longuement dans cette position grenouille si peu confortable. La sage-femme me donna un coup de massue, deux centimètres seulement. J’allais devoir patienter mais, bonne nouvelle, j’allais pouvoir bénéficier de la péridurale dans un petit moment. Elle m’installa de manière plus confortable et me demanda si le papa allait venir. Je secouais la tête, incapable de sortir actuellement une réponse à cette question si banale. Elle me demanda ensuite si une autre personne pouvait m’accompagner et je secouais négativement de nouveau la tête. Elle hocha la tête et m’indiqua repasser plus tard.


La porte se referma et le calme s’engouffra dans la pièce. Cela me parut presque bizarre. Je n’étais pas habituée à ce silence dans un hôpital. Évidemment, je savais que les salles de travail étaient les mieux insonorisée d’un hôpital. Il ne fallait pas alerter avec des cris de femmes en plein travail. Pourtant, ce silence m’angoissa. Je relâchai ma tête sur l’oreiller et je sentis une larme coulait le long de ma joue. Voilà quelques années que je souhaitais être mère mais je n’avais pas imaginé que cela se ferait dans cette situation précise. Dans une ville que je ne connais pas franchement, sans le papa à mes côtés ni même ma mère, seule en somme. Ce constat était bien triste et je n’arrivais plus à retenir les larmes que je retenais depuis bien trop longtemps maintenant. Je les avais inhibée tout en pensant qu’accepter mon chagrin n’était pas une bonne solution.


Depuis septembre, tant de choses avaient changées dans ma vie. Pour la première fois de ma vie de femme, je m’étais retrouvée célibataire. Je m’étais séparée de mon amour de jeunesse, Oliver, pour m’épanouir. A la suite de cela, j’avais décidé de totalement changer de vie. J’avais quitté Melbourne pour Bowen et par la même occasion changer de lieu de travail. Infirmière de profession, je ne me voyais rien faire d’autres. Le soin était ancrée en moi depuis bien trop longtemps. J’avais donc rejoint le service des urgences de l’hôpital de Bowen avant de me rendre compte de ma grossesse. Je n’y avais pas beaucoup travaillé finalement. Je m’étais rapidement retrouvée dans un bureau à faire de l’administratif, mes chefs jugeant ma condition trop précaire pour un service tel que les urgences. Je m’étais résiliée à accepter ce choix non sans avoir essayé de négocier au préalable.


Être mère, je m’étais résiliée à l’idée de ne pas l’être. Oliver ne souhaitait pas être père et j’avais accepté ce choix. Du moins, le pensai-je. Depuis le début de notre relation, il m’avait prévenu qu’il ne voulait pas imposer son choix de carrière et de vie à un enfant. Il ne voulait pas le faire souffrir par son absence. Son choix était noble et je le comprenais. Quand je suis tombée amoureuse d’Oliver, il venait tout juste de s’engager, je commençais mes études d’infirmière et nous avons fait notre petit bout de vie ensemble. J’étais heureuse mais Oliver brillait par ses absences à répétition. Je le savais bien sûr. La vie d’un militaire est marqué par ses missions et ses déplacements dans le cadre de ses formations. Seulement, je vivais seule la majorité du temps et nous n’étions plus franchement un couple. Nous n’avions plus de sentiments, nous étions plus des colocataires avec avantages. Je me rappellerais toujours une phrase qu’il avait dit : tu le savais, tu devais assumer mais tu as décidé de m’abandonner. Cela m’a marqué par sa force. Il avait raison en un sens, j’étais au courant de sa vie, de ses contraintes mais je n’y arrivais plus. Je n’étais pas aussi forte que je le pensais. J’étais triste mais il n’était pas là pour le voir, pour me rassurer et surtout pour avancer avec moi.


Lorsque je lui ai annoncé que je souhaitais qu’on se sépare, nous avions succombé aux plaisirs charnels une dernière fois, en souvenirs du bon temps que nous avions passés ensemble. Cette nuit restera à présent marquée dans ma vie. C’est celle où nous avons conçu cet enfant que je porte depuis maintenant neuf mois dans mon ventre. Au moment où j’ai découvert ma grossesse, je ne pensais vraiment pas le garder. Je ne pouvais pas faire ça à Oliver et en même temps, je ressentais ce besoin d’être mère au plus profond de mes organes. J’ai donc fait le choix le plus égoïste de ma vie à mes yeux, j’ai gardé cet enfant tout en le cachant à Oliver. Je ne voulais pas le mettre sur le fait accompli, lui imposé un choix qu’il ne souhaitait pas. Il avait toujours été clair sur cela. J’ai donc mené cette grossesse à son terme seule, accompagnée à distance par mes parents qui ont eu eux aussi du mal à comprendre et accepter mon choix. Par moment, je me demande si j’ai pris la bonne décision évidemment. Est-ce que je saurais éduquer cet enfant seule ? Est-ce que ça ne saura pas trop dur ? Seul l’avenir me le dira bien sûr mais une chose était claire : je ferais tout pour cet enfant.


Le constat de ma vie n’était pas fameux mais je n’avais plus le choix aujourd’hui. J’allais accoucher d’ici quelques heures et je devrais l’assumer. Voilà une heure que je pleurais à présent et je sentais que je n’avais plus de larmes à laisser couleur. Je devais me ressaisir et je décidais de me lever et faire quelques pas. Il semblerait que cela soit bénéfique lors du travail. Je me saisis donc de mon pied à perfusion et fit quelques pas dans ma chambre. Je devais m’arrêter lors des contractions mais j’arrivais encore à avancer malgré la lourdeur de ce ventre. Après quelques tours dans la chambre tel un poisson dans son bocal, je décidai de sortir dans le couloir pour allonger ma marche. Je fis quelques pas et sourit à l’infirmière qui était dans le couloir. Elle me rendit ce sourire ce qui me mit un peu de baume au cœur. J’avançai et je croisais cette fois-ci une autre femme dans le même état. Contrairement à moi, elle était accompagnée d’un homme que je pensais être le père. Les larmes me montèrent immédiatement aux yeux et je décidais de retrouver ma chambre. L’infirmière que je venais de croiser eut un petit sourire désolée cette fois-ci, elle avait compris ma situation évidemment. Elle proposa de me tenir un peu compagnie et j’acceptais avec plaisir. Elle papota avec moi durant quelques minutes qui me changèrent les idées et cela fut bienvenue.


Une fois la péridurale posée, je pus me reposer un petit peu. J’en avais également profité pour envoyer un message à ma mère et lui dire que j’étais actuellement à la maternité. Elle s’affola immédiatement et mes parents prirent la route pour Bowen dans la minute. Elle voulait être là pour me soutenir et pour voir son petit-enfant. Etrangement, je n’avais pas encore ressenti le besoin de sa présence. Ce moment seule avec moi-même m’avait fait du bien, j’avais relâché toute la pression accumulée depuis le début de ma grossesse avant de la ressentir à nouveau et ce pour le reste de ma vie. Maintenant, je ressentais le besoin d’avoir ma mère avec moi, d’avoir cet aura rassurant qu’elle dégageait. Elle arriva environ une heure avant que la sage-femme ne vienne m’examiner pour la dernière fois. Elle me sembla plus angoissée que moi presque, ce qui ne me fit un lâcher un petit rire.


Huit heures et de nombreuses contractions plus tard, la sage femme termina son examen avec un grand sourire. J’étais complètement dilaté et j’allais devoir pousser. J’hurlais ma douleur au moment des poussées et je pleurais toute mes larmes aux moments de relâchement. Tout se passa très vite. Beaucoup d’animation, d’encouragement et de soutien furent nécessaire à extraire cet enfant de mon corps. Il semblait bien accrocher. Après quelques poussées, j’entendis le plus beau bruit de ma vie, des pleurs de bébé. La sage-femme mit quelques minutes avant de venir vers moi et elle me tendit mon bébé, ma fille plus précisément. Elle me félicita et me la posa sur ma poitrine nue. Elle était si petite, si fine et pourtant si belle à mes yeux. Je pleurais mais de bonheur à présent.  


Ma mère m’avait laissé le temps de finir les soins et je rejoignis une autre chambre, parentale cette fois-ci. Ma fille m’avait été brièvement enlevée le temps de s’assurer qu’elle allait bien. Elle me fut restituée bien vite et je profitais de ces quelques instants seule avec elle. Je ne pouvais ignorer la ressemblance avec son père. Elle avait les mêmes yeux, elle était magnifique. Oliver était l’homme le plus beau que je connaissais même encore aujourd’hui. J’eus un petit sourire en pensant à lui. Le temps du chagrin était définitivement passé. Il ne le savait pas mais il venait de m’offrir ma chose la plus précieuse de ma vie et mon plus beau rôle ; celui d’être mère. D’ailleurs, mes parents entrèrent à ce moment là et je leur offris un grand sourire.

« - Venez, que je vous présente votre petite-fille. Voilà Elizabeth Backer. »

Ma mère ne put évidemment pas retenir ses larmes et je vis les yeux de mon père humides. Il ne me fallut pas plus pour fondre une nouvelle fois en larmes à mon tour. Décidément, les hormones intensifiaient vraiment mes émotions, c’était incroyable. Ma mère s’approcha doucement et je lui tendis ma fille. Ma fille, c’était tellement improbable de dire cela mais c’était la vérité,  c’était ma vérité à présent. J’étais mère.


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