Take me out of here please ! | Bastian

C'que l'frangin est con franch'ment. S'il s'sent comme ça c'est parc'qu'son cœur est merdique et qu'il croit en qu'chose d'merdique. L'amour ça pue, l'amour ça tue. Ça f'rait un bon slogan comme sur les paquets d'clope. Faudrait en faire des tee-shirts.    

- Ça t'pass'ra crois moi. C'est trop récent, faut qu't'endurcisse ton cœur et qu'tu l'ferme un peu à l'amour... J'te jure qu'c'est pas bon c'sentiment. T'as pas b'soin d'aimer... Sauf si t'es maso...

Et j'pense qu'il l'est puisqu'il vient m'voir sans cesse pensant qu'j'vais l'consoler... J'peux pas faire ça, j'sais pas l'faire. Il a pas compris encore qu'j'détruis tout c'que j'touche ? Qu'j'ai b'soin d'faire du mal à mes proches ? J'ai b'soin d'faire ça... J'le dois. J'serre les poings et les mâchoires. J'fais craquer mon cou et j'inspire profondément par l'nez.   

- Parce que tu crois qu'ça m'amuse d'parler d'une gonzesse qu'j'ai tué ? Parce que ça m'amuse d'penser à ma fille et à elle ? C'est différent d'tes ruptures ! Ça n'a rien à voir, c'est pas comparable et j'joue pas les durs, j'le suis ok ? J'ai plus d'coeur, et c'est mieux comme ça. M'lance pas sur c'sujet.

M'faut ma drogue pour m'calmer. Deux cachets. Mais p't'être bien qu'j'devrais en prendre un troisième... J'suis trop sur les nerfs. J'les gobe mais m'sieur décide qu'il en veut. Non mais qu'il fume ses joints et qu'il m'fasse pas chier. J'veux pas qu'il consomme cette merde ! On parle de drogue dure là ! C'est pas n'importe quoi !   

- J'préfère qu't'y touche pas pauvre con. J'te protège d'cette merde c'est tout. T'es pas accro et j'veux pas qu'tu l'devienne, j'veux pas qu'tu prennes des doses comme moi ok ? Putain t'es mon frère ! J'vais pas t'droguer ! J'peux pas cautionner ça !

Non mais j'rêve ! C'est pas parce que j'le fais qu'j'accepte qu'il le fasse ! J'suis pourri jusqu'à la moelle mais ça j'veux pas ! J'support'rai pas qu'il fasse comme elle.... Qu'par ma faute il prenne la dose d'trop, la dose qu'il le tuera !

@Beckham Kavinsky

Si je me sens comme ça, c'est p'têtre parce que je viens tout juste de vivre le truc. Il faut quand même me laisser l'temps non ? J'suis pas quelqu'un qui a souvent eu des peines d'amour parce qu'avant j'refusais même de parler d'amour. J'refusais même qu'on s'attache à moi, j'faisais tout pour repousser tout le monde, puis y'a ça qui est entrer dans ma vie sans même que j'comprenne comment c'était arrivé. Il faut quand même me laisser la chance de faire mon deuil non ? Ça s'fait pas en criant ciseau bordel. "Pour devenir comme toi et repousser tout le monde ? Pour qu'on m'fuis et que j'finisse seul ? Si c'est c'que tu souhaite pour ton avenir tant mieux pour toi. Moi j'veux juste vivre pis prendre le temps de redescendre bordel c'pas si compliquer non ? Faut j'm'endurcisse... ouais ouais." J'lève les yeux au ciel, secouant la tête, j'veux pas d'sa vie, j'veux pas finir comme lui à détester tout et tout le monde.

Je viens de toucher une corde sensible, je le sens juste à voir ce qu'il fait. Je pense même qu'il va finir par me taper. J'pousse ma luck un peu. J'espère toujours finir par avoir un lien autre avec lui, qu'on finira un jour par grandir et arrêter de se taper dessus. Je lui lance un regard sombre, lourd quand il dit tout haut qu'il l'a tué. "P'tête que ça pas rapport avec c'que j'vis. Mais tout ce que je voulais dire c'est qu'elle avait compté pour toi. Qu'elles ont compté. Ces filles là sont pas comme toutes les autres que j'ai connu, c'est ça que je voulais dire. C'est bon Bast, reste avec tes idées noire, continue de dire que t'as pas d'coeur alors qu'au fond j'sais que c'pas vrai." Sinon, il serait pas v'nu, il serait pas là à me parler et il m'aurait laissé poireauter sur le parvis d'hôpital.

Quand il prend ses cachets j'lui en demande, mais il refuse, il veut pas m'en donner. C'est ok pour lui, mais pas pour moi ? Fais ce que je dis et pas ce que je fais ? Comment il veut que je devienne sans coeur s'il veut même pas que j'arrête de penser en prenant une dose ? J'demande pas grand chose, j'demande pas à en prendre autant qu'lui non plus. Je veux juste planer autrement que sur le weed qui n'a presque aucun effet sur moi sauf de me calmer un peu. "J'serais pas accroc avec une dose, j'deviendrais pas comme toi, j'en ai juste besoin là pour essayer de tout effacer pour là. Putain. T'as pas a surveiller tout ce que j'fais. Parfait, j'vais aller en acheter d'un autre si c'est pas toi qui m'en donne. " Mon verre est vide depuis longtemps, j'prends la bouteille et j'bois au goulot une grande gorgée avant d'la poser sur le comptoir et de fouiller dans mon téléphone pour des contacts. "Si c'pas toi ce sera quelqu'un d'autre j'men fou." J'ai juste une main, ça fait chier, je cherche mais j'sais pas vraiment qui pourra m'aider. À bout de nerfs je jette mon téléphone et j'prends la bouteille. En ville il y aura probablement quelqu'un qui pourra m'en vendre. J'sors de chez moi, buvant encore au goulot prêt à partir.

Y a quoi d'mal à r'pousser les gens ? J'les protège de qui j'suis. Il est au courant qu'on finit toujours seul à la fin ? Moi j'veux pas vivre... C'est ça notre différence. J'veux crever et vivre en enfer, j'veux fuir c'qu'on r'ssent quand on est humain.     

- P't'être qu'j'repousse les gens pour les protéger ? On crève tous seul ! J'souhaite rien pour mon av'nir, juste qu'on m'foute la paix et qu'on m'laisse survivre comme j'veux. Et j'suis pas seul quand j'veux pas l'être. J'ai des tas d'gens avec qui passer la nuit...

Pas b'soin d'quelqu'un en permanence qui m'tap'ra sur l'système. Pas b'soin d'quelqu'un qui m'collera comme une moule à son rocher. Ou qui m'f'ra la morale sur ma consommation d'drogue. Ou sur mes bastons et tout l'reste. Non merci. Pas d'boulet à ma ch'ville. J'suis comme ça à cause d'l'amour mais ça il l'comprend toujours pas. C'est l'amour qui m'a rendu aussi sombre qu'un trou noir. Qui a fait éteindre la lueur dans mon r'gard. Cet amour dont j'veux pas parler mais il force l'sujet... Et ça m'agace ! Ça m'donne envie d'le cogner, d'tout péter chez lui. C'est si dur d'lutter contre cette rage qu'j'ai en moi. La seule chose qu'il retient c'est qu'j'ai pas d'coeur. Il confirme qu'j'ai tué la seule gonzesse qu'j'ai jamais aimé et qu'j'ai tué sans l'savoir ma fille.   

- Mais fous la paix à mes idées noires ! Elles t'emmerdent ! Et j'ai pas d'coeur et j'peux t'le prouver !! Y a pas d'souci pauvre con !

J'ai plus d'coeur ! Si j'ui là c'est pour l'faire souffrir, quoi d'autre ? Faut qu'j'fasse quoi pour lui prouver qu'j'en ai plus ? Il veut qu'j'le laisse sur l'carreau ? Qu'j'le cogne et l'laisse pour mort ? Et en plus il ose m'demander ma drogue ? Mais ça va pas dans sa tête ? Il veut qu'j'ui montre que j'suis sans cœur ? Pas d'souci...   

- Parce que j'veux qu'tu souffres. Qu't'assume c'que t'as fait. Mais t'en veux tellement ?? J'vais t'en filer.... J'viendrais pas t'ramasser par contre...

J'sors trois cachets, j'me lève et j'l'attrape pour l'plaquer contre l'mur. J'en cache deux discrètement dans l'creux d'ma main et j'force sa bouche à s'ouvrir et j'en glisse juste une avant d'refermer sa bouche et j'pince son nez d'l'autre.

- Avale les cachets ! T'en voulais ben t'en as ! Et j'm'en tape d'c'qui peut t'arriver. AVALE !

J'retire ma main d'son nez et j'continue d'le bloquer contre l'mur. Dans ma main qui tient sa bouche, j'ai toujours les deux cachets. J'veux pas qu'il crève d'la même façon qu'elle... Il reste mon putain d'frangin. J'le r'lâche, me tourne et j'les fourre dans ma bouche. J'les avale vite et j'reviens à la charge en lui donnant une gifle.

@Beckham Kavinsky

Le problème c’est qu'on ne se comprends pas, c’est comme si on essayait de communiquer sur différentes ondes. Il sait bien ce que je veux dire et au fond je comprends ce qu’il veut dire. Un vrai dialogue de sourd entre nous, on est pas compatible on dirait. « Les protéger de toi ? Tant mieux pour toi si tu souhaites rien, tu s’ras pas déçu ! Tu veux que jte dise quoi de plus ? Continue de baiser et de faire ce que tu veux, laisse moi faire ce que je veux ! » J’ai envie de vivre mes émotions comme je le souhaite ! J’ai pas envie de me sentir minable parce que je suis tomber amoureux ! On ne perd pas notre virilité parce qu’on est amoureux non ?

Bon c’est ça, je l’ai poussé il éclate, il est en colère et il a besoin de se prouver ! J’ai rien demander de tout ça, j’veux juste qu’il agisse normalement, qu’il arrête de se prendre pour un monstre, l’image qu’il se fait de lui est juste horrible.

« C'est pas un cachet qui va faire changer tout ! Je vais continuer de souffrir.  Juste la ! Là en ce moment j’ai besoin de changer d’idée ! C’est pas compliqué à comprendre ! » Je suis prêt à partir s’il le faut, c’est ce que je m’apprête à faire avec la bouteille ! Prêt à partir pour aller en acheter.

Il me rattrape pour me plaquer au mur. Puis me forcer à prendre le fameux cachet qu'il ne voulait pas me donner y’a même pas deux minutes. Je finis par l’avaler. Pas le choix de toute façon vu comment il me tient. « Ramasse moi pas, j’en ai rien à foutre, lâche moi ! Pourquoi tu m'en donne autant ? J'en voulais juste un merde ! » Que je dis entre mes dents alors qu’il finit par me lâcher, il se retourne avant de me foutre une gifle. « Vas-y continue de te défouler sur moi ! Putain jte demande jamais rien, jtai jamais forcer à rien ! La seule fois dans ma vie que j’t’appelle tu me frappe encore ! » J’éclate de rire, j’sais plus comment je me sens. Je reprends la bouteille et boit encore, ça va finir par passer !

C'est fou quand même d'être aussi con qu'lui ! Il comprend rien d'chez rien. Il est têtu et borné.      

- Fais c'que tu veux t'as raison ! T'as rien à m'dire sur moi et t'as raison, j'ai rien à t'dire non plus ! J'dois pas m'mêler d'ta vie ! Et te guider à travers mon vécu. Mais tout c'que j'te dis c'est en fonction d'c'que j'connais putain !

Pour moi les émotions c'est du bullshit, ça fait trop d'mal. L'amour ça craint et les gonzesses faut pas les garder dans sa vie. C'est c'que j'connais donc c'est c'que j'dis ! J'vais pas lui dire qu'l'amour c'est beau et qu'il devrait aller parler à la gonzesse qu'il a brisé car j'sais qu'ça ramèn'ra rien d'bien pour lui.pourquoi j'parl'rais d'c'que j'connais pas ?? Il s'attendait à quoi ? Il veut p't'être qu'j'trouve un bouquin pour trouver c'qu'il faut dire ? Ben c'est mort, j'f'rais pas ça, c'est pas moi.   

- Ben ouais fait comme l'frangin alors qu'tu dis qu'tu veux pas faire comme moi ! Si t'en crève ce s'ra aussi d'ma faute !

Il veut pas faire comme moi mais il prend l'chemin en voulant s'droguer. Il sait qu'le mélange drogue et alcool est dangereux ? Moi j'm'en tape du danger mais lui... Mais il en veut ? Pas d'souci. Du LSD... Juste un cachet mais j'fais croire qu'j'ui en donne trois... Pour ça j'le plaque contre l'mur et j'le force. Et j'fini par le lâcher et j'prend ceux qu'j'avais caché dans ma main. J'suis inconscient mais pas au point de droguer autant mon connard d'frère. J'fini même par l'gifler.   

- Tu veux oublier ? Tu veux rien r'ssentir ? Ben faut pas un seul. J'te touch'rai plus t'en fais pas. L'message est passé. On va plus s'croiser toi et moi. Pas quand t'es dans cet état. J'fais c'que j'peux ok ? J'essaie tu vois pas les efforts qu'j'fais avec toi ?

J'retourne m'installer sur la banquette et j'm'avachis. J'devrais partir... J'vois pas pourquoi j'reste. Ça sert à rien c'qu'on fait... On n'y arrivera jamais.

Me guider ? Me guider sur quoi merde ? Il le dit toujours qu’on est pas pareil et j’ai bien du mal à imaginer Bastian prendre le chemin que j’ai pris, mais après tout j’en sais quoi ? Il ne m'a jamais laissé entrer dans sa vie, avant Carla est-ce qu’il était comme moi ? Prenant rien au sérieux, à faire des conneries sans jamais avoir peur du lendemain ?

“Tu comprends pas ! Putain t’es aussi bouché qu’un constipé quand tu t’y mets, c’est pas possible de parler avec toi merde. On est clairement pas du même monde, ça reste surprenant qu’on sorte du même utérus toi pis moi. ”

Putain, c’est dans des moments comme ça que j’aimerais que notre grande soeur soit là. C’est avec elle que j’aurais préféré parler. C’était quoi l’idée d’se marier, de faire des gosses et de déménager aussi loin. J’suis certain qu’elle aurait été de meilleur conseil que Bast, même si au fond, j’ai beau me plaindre, j’suis content qu’il soit là. De pas être tout seul alors que tout semble s’écrouler autour de moi. “C’est pas comme si j’avais jamais pris de drogue ou comme si j’avais jamais bu. J’n’ai plus quinze ans, puis même à quinze ans j’avais déjà essayé pas mal de trucs. Fait pas comme si tu l’savais pas. C’est pas parce que j’en prends que j’vais finir pareil comme toi. Pis j’crèverais pas là.” Il faut qu’il arrête de toujours imaginer l’pire aussi.

Je suis surpris par sa poigne quand il m’enfonce les cachets dans la bouche et me force à avaler le tout. C’est quoi ce revirement de situation, cette gifle qu’il me refourgue en pleine gueule. Qu’il me frappe encore, il semble bien aimé se défouler sur moi encore et encore, comme si j’étais un moins que rien tout le temps. “Tu m’dis même pas qu’est-ce que tu m’as donné ?” Je pose durement la bouteille sur le comptoir, le dévisageant alors qu’il s’installe de nouveau sur la banquette.

“Oh ouais chaque fois qu’tu me frappe j’vois que tu fais des gros efforts. Incroyable Bast, j’pensais qu’on pourrait un jour finir par être capable de se tolérer, être des frères quoi, pas juste ton souffre douleur. D’toute façon, j’frais ptête moins chier l’peuple si j’tai pu là. Autant crever avec la dose que tu viens d’me donner. ”

J'ai toujours été un p'tit con d'puis la naissance d'Beck, mais plus les années sont passées plus j'suis d'venu mauvais... J'sais faire qu'ça pour qu'on m'remarque. J'voulais montrer qu'j'existais... Et puis c'est d'venu moi... C'est d'venu tellement naturel... Surtout après la mort d'celle que j'aimais. J'ai vrillé, j'ai perdu mon âme et mon cœur à cause d'la culpabilité. J'sais qu'j'détruis tout c'que j'touche. Qu'j'blesse les gens qu'j'aime, enfin qu'j'tolère...      

- Pourtant j'essaie non ? J'suis entrain d'parler, j'tente ! Mais ouais on est pas du même monde t'as raison. T'as p't'être été trouvé dans une poubelle !

J'le comprend pas, c'est lui qui m'parle, j'répond, j'tente. J'le conseille par rapport à moi mais ça lui suffit pas... J'peux pas lui dire qu'ça va s'arranger, qu'tout ira bien avec l'autre gonzesse parce que c'est pas c'que j'pense. Et j'veux pas lui dire c'qu'il veut entendre juste pour l'rassurer... J'mens pas. J'dis les choses même si ça fait mal, c'est tout. Et s'il est pas assez grand pour l'comprendre ben tant pis. Même quand j'ui dit qu'j'veux pas lui filer d'la drogue il comprend pas. Pourtant c'est simple non? J'ai tué ma meuf et ma fille avec d'la drogue, pourquoi j'en fil'rai à mon frère ? Même là il n'ouvre pas les yeux. Mais dans l'fond il a raison. C'est bon, j'arrête là. Il en veut il en aura.   

- Tu fais c'que tu veux putain ! J'veux juste pas l'cautionner et t'y aidant ! Qu't'en prenne tout seul comme un grand c'est ton problème, mais qu'j'ten file comme à elle ! Putain j'sais qu'j'suis mauvais et qu'j'suis pas un frère mais pourquoi tu comprends pas ? Mais ok !

J'fais mine d'lui en filer trois, mais j'en donne juste un. Et j'gobe les deux autres. J'force pour qu'il avale et j'le frappe. Dans l'fond y a qu'ça qu'les gens connaissent d'moi alors j'vais l'rester. Ça sert à rien d'faire des efforts, d'tenter d'me rapprocher d'lui. C'était juste un moment d'faiblesse. Est-ce qu'j'vais lui dire c'qu'il a pris ? J'pourrais lui laisser la surprise...   

- LSD.

J'dis rien d'plus. J'm'installe mais j'veux m'barrer. C'est lui qui m'pousse à l'cogner ! J'me r'lève et j'l'attrape par l'col pour l'jeter sur la banquette après c'qu'il dit.

- Écoute moi bien Beckham, tu veux crever ? Tu l'fais tout seul ! Sans mon aide c'est clair ? Deux cadavres ça m'suffit amplement, j'veux pas l'tien en plus à mon compteur. Et j't'en ai filé qu'un.

Il m'prouve encore une fois qu'l'amour c'est d'la merde. Qu'il pourrait en crever ! Et après il s'étonne qu'j'tente d'lui ouvrir les yeux sur c'te truc et lui faire comprendre qu'ça sert à rien. Mais j'suis l'vilain d'l'histoire, égoïste, colérique et ça m'va. Pas d'souci. Un pas en avant dix en arrière on dirait bien.

On est frère que sur papier, c’est pas possible d’être aussi différent l’un de l’autre. De pas arriver à se comprendre comme ça. Même l’autre frangin, je le comprends un peu mieux et c’est pas comme si j’avais vraiment une quelconque relation avec lui. C’est de Bast dont j’ai toujours été plus proche, ne serait-ce que par l’âge, mais lui a jamais voulu d’moi.

“Tu tente en voulant m’imposer juste ta manière de voir. En m’disant qu’c’est la mort et rien d’autre que je devrais devenir aussi sombre que toi, mais que j’dois pas suivre tes traces. J’arrive pas à m’retrouver dans c’que tu dis.”

J’ai l’impression que son discours passe son temps à changer du tout au tout et ça m’aide pas du tout à y voir clair. Mon cerveau capte plus rien, il est saturé, il y a trop de stimuli et j’arrive pas à voir qu’est-ce que j’dois enregistrer en premier comme info. Comme là, il dit qu’il veut pas cautionner le fait que j’prenne de la drogue, mais il finit par me donner trois foutus cachets. J’sais même pas qu’elle merde il me fout dans la gueule pour que j’avale. “T’es un frère que tu l’veuilles ou non.”

J’essaie maintenant de me rappeler si j’ai déjà pris du LSD, ça me dit rien, je pense pas que j’ai déjà pu prendre ça dans ma vie. Putain et il m’en a donner autant ? Merde, genre mon coeur va pas péter après ça ? Et lui qui s’installe pénard sur la banquette comme si de rien était ? Alors je sens la panique monter un peu au creux de mon estomac et je me met à balancer n’importe quoi, je sais que je vais trop loin, que j’en dit trop, mais j’arrive plus à voir clair. “J’t’ai pas d’mander d’me tuer. ” Il m’a balancé violemment sur la banquette et j’essaye de le repousser, mais j’ai pas de force et mon bras me fait encore mal. “J’ai juste dit qu’on s’rait mieux sans moi parce que je ne fais que d’la merde. ” Putain pourquoi les émotions remontent là. J’veux pas avoir des larmes devant lui.

J'fais plus d'effort avec ma famille. Plus d'puis la naissance d'Beck. J'sais pas faire d'trucs entr'frangins, mais j'essaie là... Sauf qu'il le voit pas. Et qu'j'me dis qu'ça sert à rien d'faire des efforts si personne l'voit... Il marque un point, j'suis pas clair dans c'que j'dis parce que j'sais pas c'que j'ressens... Parce que j'veux lui faire du mal mais l'protéger aussi. C'est trop compliqué... J'peux parler que d'c'que j'connais...      

- T'as raison j'suis pas clair, j'vais juste fermer ma gueule.

Ça sert à rien d'parler, d'faire des efforts. J'vois même pas pourquoi j'en fais. J'vois pas pourquoi j'voudrais qu'les choses changent... C'est Abi qui m'fait ça... C'est pas un ange c'est une vipère, du poison qui s'est glissé en moi. J'me perds, j'ai sais plus c'que j'veux, j'me ramolli. Et faut pas. J'perds la raison j'crois. Pour l'coup, j'reviens à qui j'suis. Il veut s'droguer ? Pas d'souci. Mais encore une fois, j'fais pas comme j'devrais. J'ui en donne qu'un seul au lieu des trois.   

- J'le sais qu'j'ai pas l'choix.

J'suis fier d'moi. Il croit qu'il a pris trois cachets alors qu'j'ui en ai donné qu'un. J'me d'mande s'il va péter les plombs... J'vais pouvoir m'foutre d'sa gueule. Et vl'à qu'il raconte d'la merde. M'sieur veut crever. J's'rais pas c'lui qui l'y aid'ra. Et forcément j'm'énerve et j'le balance sur l'canapé.    

- Tu l'fais en m'demandant d'la drogue !

Il m'en a d'mandé sans même savoir c'que j'prenais ! J'aurais sorti l'héro il en aurait voulu ? Il m'gave... J'le maintiens.

- Mais tu fais pas qu'd'la merde pauvre con ! T'fais des trucs bien aussi ! Mais p'tain c'que t'es con de dire des trucs d'ce genre. Après tu t'étonnes qu'j'ai envie d'te cogner !

Non mais j'vous jure ! Il est pas possible ! Pire qu'moi. C'est une vraie gonzesse ma parole ! Ouin ouin j'fais qu'd'la merde ! Mais qu'il assume et qu'il s'apitoie pas sur lui comme ça !

J’veux pas qu’il fasse juste fermer sa gueule, je sais même plus d’où on est parti et comment on s’est rendu là. Il y a comme quelque chose de pas clair dans ma tête, dans la sienne aussi clairement. Tout ce que je veux en vrai c’est d’avoir un frère normal, avec qui j’peux parler. Mais avec lui, ça sert à rien d’parler de sentiments, ça sert à rien de faire des efforts en fait, j’essaye de le comprendre, mais j’y arrive pas. On est trop différents il faut croire, il faut quand même finir par se rendre compte de l’évidence.

En ce moment de toute façon y’a rien qui va, j’vais pas bien, j’ai mal, j’suis triste. J’ai fait du mal à Emi et j’aimerais effacer l’image de sa souffrance de ma tête, ne plus la revoir en boucle, ne plus penser du tout pour ce soir. J’ai vécu trop en peu de temps et je n’arrive plus à rien gérer, ni à rien faire. J’lui demande de la drogue, il semble ne pas vouloir m’en donner. Mais, merde quoi, c’est pas comme si ça allait me tuer un cachet, c’est rien, lui il en prend j’sais pas combien d’un coup et il tient toujours debout. Faut pas s’moquer de moi. Finalement, il se décide et me force à en avaler plusieurs d’un coup. Y’a pas de juste milieu, de bonne dose ou quoi que ce soit, avec lui c’est tout ou rien. Mon coeur bat plus vite, par cette peur qui monte un peu, ce stress. Putain, c’est pas ça que je voulais, stresser encore plus.

“Y’a une différence entre une dose et m’empoisonner quand même putain ! ”

Encore dans l’extrême, mais j’suis pas mieux, j’me mets à dire n’importe quoi, à dire haut et fort que j’ai envie de crever parce que j’fais rien de bien. Je suis qu’un pauvre p’tit con, un raté, un mec qui mérite pas d’être heureux. J’mérite pas d’être heureux en blessant les gens comme je l’ai fait. J’me retrouve coincé sur la banquette, maintenu par lui qui me retient de force dessus.

“Justement j’suis un con, t’as pas arrêter d’me le répéter depuis que j’suis gamin. Que j’suis un moins que rien et que j’mérite pas d’vivre. Tu devrais être content que j’veuille disparaître ! Tu reprendrais ta place de p’tit dernier, c’est ça qu’tu veux ? ” J’suis injuste, mais j’ai plus toute ma tête, l’alcool commence à se faire sentir et je sais pas dans combien de temps le lsd va embarquer. Putain, ça bouge. “Lâche moi !”

Il m'épuise, j'sais plus comment l'prendre, quoi lui dire. J'sais pas c'qu'il veut réellement entendre d'ma part. Il s'attendait à quoi en vrai v'nant d'moi ? Pas à grand chose j'espère. J'sais pas être l'frère compatissant, l'frère qui comprend. Enfin... J'comprend un peu c'qu'il r'ssent mais j'gère pas comme lui... J'vois qu'le négatif et lui... Il a d'l'espoir... Et puisqu'il pense qu'j'veux pas l'aider, qu'j'm'en fout d'c'qui peut lui arriver, j'fais croire qu'j'ui donne une triple dose alors qu'non. Parce que j'veux pas qu'il crève... Encore moins par ma faute. Et surtout pas à cause d'la drogue.      

- C'que j't'ai filé c'est une dose pour moi. Et t'avais qu'à pas trop insister.

Et j'm'ens pas... C'est bien qu'une dose. Et v'là qu'il s'rabaisse et qu'il sort des conneries. J'le tiens pour pas qu'il bouge. J'vais finir par l'frapper s'il continue d'parler ainsi.    

- J't'ai filé qu'une dose ! L'reste j'l'ai pris parce que j'veux pas qu'tu crèves pauvre con ! J'pourrais jamais r'prendre ma place, qu'tu crèves ou non. J'suis plus un gamin ! J'veux pas d'ta place ! Tu penses qu'ça d'moi ? Qu'j'veux que tu meurs ? T'es sérieux mec ? J'aurais voulu qu'tu crèves ça f'rait longtemps qu'tu s'rais plus d'ce monde.

J'le lâche en l'poussant et j'me r'lève. Ça fait mal d'l'entendre dire ça. Même si j'l'ai mérité.    

- J'me casse. Sinon j'vais t'fracasser à cause de c'que tu dis... Non mais sérieux ? Tu crois qu'j'veux ta mort ? Pour vrai ?

J'attrape la bouteille d'alcool et j'la balance dans l'évier pour qu'le liquide s'vide dedans et j'me dirige vers la sortie. Pourquoi j'rest'rais avec lui s'il pense ça d'moi ?

Une dose pour lui, il se tue à petit feu, mais refuse qu’on puisse avoir envie de mourir, de crever ou de disparaître. J’arrive pas à lui faire comprendre ce que je veux, parce qu’en ce moment, tout est confus dans ma tête, j’arrive pas à réfléchir. Je suis perdu, perdu complètement. J’aimerais pouvoir disparaître et cesser de ressentir quoi que ce soit jusqu’à ce que tout se place, mais on ne peut pas faire ça. On ne peut pas cesser de vivre comme ça en un claquement de doigt. « J’aurais acheté de quelqu’un d’autre sinon. J’aurais pas pris la même dose que tu viens de me donner comme un con, après tu veux que mon cœur tienne le coup ? »  Je sens mon cœur qui pompe à toute allure, il va finir par me lâcher si je continue de le torturer de la sorte. Je raconte tout ce qui me passe par la tête pour le faire réagir et ça marche parce que je me retrouve plaqué contre la banquette. « Lâche moi ! Arrête ! Putain j’en ai marre. Je sais pas c’que tu veux, j’sais rien parce que tu m’as toujours repoussé. P’tain, moi tout ce qu’j’voulais c’tait un frère. Tout ce que j’ai eu d’toi ces des coups. Comment penser qu’tu veux que j’reste en vie… »

Mes paroles deviennent confuses, tout commence à tourner. Quand il me lâche, je me laisse tomber par terre. Je regarde ses gestes d’un regard noir, puis je marche à quatre pattes jusqu’à l’évier pour reprendre la bouteille pour pas qu’elle se vide complètement. « Ça changerait quoi, t’as toujours aimé me fracasser la gueule. C’est tout ce que je sais vraiment de toi. » Il est pas encore sorti, mais moi j’le regarde plus. Serrant la bouteille d’alcool contre moi.

J'suis un camé, j'prend plus qu'la normale vu qu'mon corps est habitué. C'est aussi simple qu'ça. Ouais j'me tue sur'ment comme ça mais j'm'en tape c'est voulu. Par contre qu'mon frangin veuille crever, c'est mort. J'veux pas qu'il d'vienne comme moi malgré tout c'que j'peux dire. J'sais bien qu'il aurait ach'té à n'importe qui. C'est pour ça qu'j'ui ai filé final'ment. Y a plein d'merde qui train, des trucs trop coupés. Son cœur... Il l'a d'jà bien niqué sans moi. J'prend même pas la peine d'répondre. Ça n'sert strictement à rien. D'toute façon il enchaine et m'agace d'plus en plus ! Pour l'coup, j'le plaque et j'lutte... Sinon j'vais l'détruire. J'tente d'lui faire comprendre à ma façon qu'j'tiens à lui mais ça fonctionne pas. C'qu'il dit fait mal. Mais il a raison... C'est p't'être pour ça qu'ça fait si mal.      

- Ben désolé mais j'suis ton frère qu'tu l'veuilles ou non. T'as l'pire c'est clair mais on choisi pas sa famille.

J'l'abandonne. J'préfère vider sa bouteille d'merde avant d'partir. Mais ce p'tit con r'vient à la charge à quatre pattes comme une merde et m'reprend la bouteille.    

- Parce que dans l'fond t'as jamais cherché à creuser plus loin Beckham. Tu restes sur la première couche, tu creuses pas.

C'est fini j'laisse tomber. Il veut aller mal, il veut déprimer seul en f'sant des mélanges dangereux ? Grand bien lui fasse. J'vais aller espionner Abi pour m'changer les idées. Grimper jusqu'à sa f'nêtre et voir si elle écrit.