C'est pas le moment Will' ! (William Swain)

Je soupire en reposant mon téléphone portable. Put*in ! Il ne manquait que ça, que William vienne se mêler de tout ça. Au fond, j’avais rien contre lui, je l’aimais bien Willy… Il avait fait beaucoup pour moi et il était entre le second père qui m’avait fait et le grand frère que je n’avais pas eu, mais… J’étais clairement à fleur de peau. Je n’entendais que la voix du médecin dans ma tête, celle qui m’annonce que mon père est dans le coma, que son pronostic vital est engagé et qu’ils n'en savent pas plus. Je suis arrivé hier et la première chose que j’ai pu faire, vu l’heure à laquelle j’étais arrivé, c’était venir ici, dans la maison de mon enfance. Heureusement, mon père avait laissé son double caché toujours au même endroit. Aujourd’hui, dès les premières lueurs du soleil j’étais parti à l’hôpital et j’avais attendu les heures de visites. J’avais passé la journée avec lui, à le supplier de se réveiller après quoi j’étais rentré, lessivé, dépité. J’étais actuellement sur une chaise de la cuisine, à regarder le vide… J’avais rien mangé depuis plus de 24 heures à présent… Je sors de ma torpeur en entendant la porte être cogné comme si la personne voulait défoncer la porte. Je soupire… Je me lève machinalement et pars ouvrir à ce p’tit homme qui a fait de moi un grand homme. À ce p’tit homme qui a l’air vraiment en colère, mais qui pourtant ne m’effraie pas le moins du monde, je suis totalement déconnecté. Absent.

-William. Je te l’ai dis, c’est pas le moment.

Franchement je remettais pas mal de chose en question, surtout en voyant le temps à l’extérieur, il faisait  et on dirait bien que la  menace de tomber à tout instant. Heureusement j’ai pensé  à prendre des choses comme des  dans ma valise. Bien sûr qu’il reste des affaires à moi ici, mais soit honnête, je n’ai plus vraiment le même style et je n’ai plus vraiment la même carrure non plus, j’ai pris en muscle, clairement. Pas réellement en gras parce que je fais super attention à ce niveau-là. Soupirant en entendant la porte battue aussi forte, je finis par aller ouvrir et directement je mets les choses aux clairs avec William. Son poing se stoppant à quelques centimètres de mon visage, j’en fronce légèrement les sourcils et d’autant plus en l’entendant me parler ainsi. Il est en colère, ok je comprends… Mais je n’ai clairement pas envie de gérer sa crise de la cinquantaine. Me redressant comme pour me faire plus grand encore et menaçant, je lui fais comprendre que tout ça ne me fait pas rire, encore moins la remarque sur mon prétendu doudou.

-Mon père est dans le coma William, il a eu un accident. On ne sait pas s’il va s’en sortir, alors ton histoire de doudou ou même tes problèmes de concert, j'en ai franchement rien à foutre là !

Je le disais d’une froideur extrême, presque sans sentiment, parce que j’avais peur de craquer et de pleurer devant lui, mais je ne pourrais pas supporter sa colère plus longtemps alors j’avais tout dit d’un coup puisqu’il insistait.

Je n'avais pas la tête à être emmerdé présentement. Vraiment je voulais être au calme, seul… Me bourrer la gueule aussi ouai… Je voulais peut-être rentrer dans une sortie d’, quelque chose où je pouvais dormir et tout oublier. Et lorsque je me réveillerais ce serait l'été… Adieu cette horrible periode ! Mon père pourrait conduire sans risque et… Il serait là, mais c’est complètement con comme pensée je sais, parce que ce qui est fait est fait. Il est dans le coma que je le veuille ou non. Agacé par le ton de William et par ce qu’il me dit, je finis par tout lui balancer d’une traite. Il se stoppe immédiatement, il change instantanément de comportement… Je soupire et regarde un peu autour de nous avant de me pousser de l’entrée.

-Entre, il fera plus chaud…

Je referme la porte derrière lui avant de passer une main lourde sur mon visage en reprenant.

-Je sais pas William, peut-être parce que je ne voulais pas vraiment le réaliser ! Parce que le dire ça rend tout ce bordel réel… ! Il... Il a eu un accident de la route...

Je soupire et baisse de nouveau les yeux après m’être forcément un peu emporté. Je suis à fleur de peau et épuisé.

On peut dire que William c’est s’énerver aussi vite qu’il sait se calmer ; C’est presque impressionnant, après je ne suis pas sûr que tout ça soit réellement bon pour son coeur. Ok ce n'est clairement pas le moment de faire de l’humour et je dois dire que je me surprends presque à penser de façon si ironique, mais je crois que je suis tout simplement trop crevé et perdu présentement pour penser correctement. Je le laisse entrer dans la maison où le fantôme de mon père plane de partout, ce qui me rend les choses difficile, forcément. À ce qu’il me dit, je ne réponds rien de particulier, parce que je ne sais pas quoi dire… Cependant je m’emporte un peu lorsqu’on parle de l’accident de mon père. Je peux voir et entendre William marmonner quelque chose sans pour autant réellement comprendre ce qu’il dit.

-De quoi ?

Je soupire finalement. Peut-être est-ce le fait de m’être emporté contre lui ?

-Ecoute je suis désolé… Je… Je sais juste plus comment… Faire.

Je baisse les yeux, comme lorsque ça ne va vraiment pas. Comme lorsque je suit vraiment mal et là… Will’ vient poser une main sur mon épaule me faisant légèrement relever la tête. Je finis par mettre légèrement ma tête en arrière avant de souffler face à ce qu’il me dit, comme si je me déchargeais de tout ça justement puis je le regarde de nouveau.

-Merci William… Vraiment....

Je ne sais pas si William marmonne dans sa barbe à cause du fait que je lui ai crié dessus ou pour autre chose alors tout naturellement je lui demande de répéter. Je sais que je n’aurais peut-être pas dû lui crier dessus, mais au fond il venait bien de me crier dessus aussi sans aucune raison valable… Enfin… Ouai, peut-être, mais maintenant qu’il savait toute l’histoire, il n’y avait plus réellement de raison valable. Il me répète alors et… Ça n’a rien à voir avec moi. Il parle simplement des rues. Je ne fais aucune autre remarque parce que je pourrais de nouveau m’emporter. Pour moi il y a mille et un fautifs et je ne pense pas que m’énerver après la Terre entière arrangent les choses. Ma tête finit par se hocher doucement lorsqu’il me dit que tout ça, tout le reste n’est pas grave. Il émet même une hypothèse qui me fait sourire sur le coup. Ce genre de petit sourire désespéré, pas vraiment joyeux, mais présent quand même.

-Si tu pouvais avoir raison Will'… Si tu pouvais avoir raison…

Je soupire finalement de nouveau avant de me redresser totalement, hochant la tête de nouveau lorsqu’il me dit qu’il me connaît et qu’il va me faire à manger.

-Tu as raison, je n'ai rien bouffer depuis… 48 heures…

Je l’avoue sans vraiment de honte parce qu’il l’avait deviné de toute façon. Je pars alors me mettre dans le canapé, totalement mal… Fatigué, affamé… Cependant je l’entends parler sans réellement comprendre encore une fois.

-Quoi ?!

Maintenant que William connaissait la vérité, il était calme, très calme et très positif aussi. Ça c’est une qualité que je ne peux pas lui enlever, il l’a toujours été me concernant et ça fait, au fond, chaud au coeur qu’il le soit encore concernant mon père. Il a toujours cru en moins et cela à payer alors… Peut-être que s’il croit en mon père… Cela paiera aussi ? Je ressemble peut-être à un enfant de penser tout ça, mais… Cela me fait du bien et en ce genre de dure période, c’est ce qu’il faut n’est-ce pas ? Ma tête se hoche simplement lorsqu’il me demande de rester positif avant que je ne lui avoue depuis combien de temps je n’ai pas mangé. Là il semble tomber des nues et j’ai de nouveau l’impression d’être un enfant qu’on engueule de ne pas manger…

-Je n’avais littéralement pas la sensation de faim, j’ai beaucoup trop l’estomac noué depuis ce fameux appel…

Qu’il comprenne ou pas au fond ça reste que… C’est comme ça et pas autrement. Enfin ça va l’être dans une bonne grosse demi-heure, parce que le Willy… Il s'attelle aux fourneaux ! Je me relève alors lentement du canapé lorsqu’il me dit « à table » puis m’installe en souriant alors, légèrement amusé.

-Je pense qu’elle aurait fini sur le plancher vu l’estomac que j’ai depuis quelques jours.

Sous-entendant qu’il avait fait le bon choix, que j’aurais certainement tout vomi, oui, moi Dylan… Quoi qu’il en soit je lui souhaite un bon appétit tout en le remerciant et essaie de manger.