(#523) changer de cap. - Spike

tu freines, tu piles. je m'en cognerais presque la face sur le tableau de bord et toi sur le volant. OH que je m'en voudrais si tu finissais la tête en sang parce que j'ai gueulé. oh, OUI, comme je me sentirais naze. tu jures. c'est bien de jurer. c'est bien quand TU jures. et que tu fais des bêtises avec la bagnole. ça me rappelle que t'es pas parfait, c'est cool. et dans la radio, la voix de roger hudson. DON'T LEAVE ME NOW, gueule-t-il. ta gueule toi. "Qu'est-ce que t'as oublié ?" t'as ta tronche des grandes conversations, ta face de papa qui va engueuler. (ha, ha, ESSAYE.) ou alors juste de papa inquiet. un peu blasé par son gosse qu'oublie toujours un truc et qui fait la choses TOUJOURS à l'envers, que ce soit pour faire le lit ou mettre un t-shirt. "Ton porte-fric ? Ton paquet de camel ? Ton oeil de verre ?" connard. tu me fais sourire, tu me fais marrer comme un con. ça me donne un air de chinois, comme tu dis. avec mes yeux pliés de rire. mais MON CON, tu le sais pas, au bout de dix ans, que moi, pour le fric et les clopes, je compte sur toi ? et aussi sur les clés, les factures, le repassage, la cuisine, le plein de la bagnole, GRANDS DIEUX, qu'est-ce que je serais, sans toi, PUTAIN. je serais rien, moins que rien même. j'ai jamais été grand chose mais au moins avec toi j'ai l'air mieux que ça, MIEUX QUE RIEN. je te regarde, tu me regardes. t'as une de ces gueules paniquées. mais t'es beau ça va. t'es beau dans la nuit. "j't'aime." ÇA M'A ÉCHAPPÉ. LODJFÄC? A¨ZEP ÄPEJ ça m'a échappé ! arrête d'être beau ! arrête d'être toi et moi j'arrêterais ça ! sourire forcé, difficile. "ha, ha, tu verrais ta gueule. pire qu'si t'avais vu un fantôme. ça va j'déconne. allez on descend. j'ai juste trouvé l'paradis." EFFECTIVEMENT. c'est le noir au dessus de nous et le vide en dessous. mesdames et messieurs, nous sommes en haut de flagstaff hill. le jour ici on voit les hôtels et les gens. là y a que toi, moi, et la lune qui brille dans l'eau. je t'ai bien dit que j'avais trouvé le paradis. ça sent bon la nuit PUTAIN. j'ai juste envie d'aller voler dans les nuages de la nuit, tu crois pas que ce serait le top ? MERDE. je sais bien que je viens de te faire une fausse-déclaration mais je me gêne pas pour poser ma tête sur ton épaule. t'es à peine plus grand que moi alors c'est parfait tu vois, et puis je suis crevé, le ménage m'a tué. ALLEZ, QUOI. on peut bien faire ça de temps en temps. tout le temps. voilà quoi. et pour une fois que je suis calme comme l'eau en bas, c'est le ciel qui s'excite, là bas. UN ÉCLAIR. je compte comme un gamin. UN, DEUX, TROIS, QUATRE, CINQ. cinq kilomètres, raisonnable. autre éclair. UN, DEUX, TROIS, QUATRE. tu vas te mettre à pleurer je crois. les orages ça te féminise. ça te rend dingue de peur. "on s'casse ?" mais c'est bien pour toi. moi les orages ça me tue. c'est beau et agressif, comme toi. tu vois. pour toi, je fuis la beauté putain, je fuis les orages. "tu veux qu'je conduise ?" ALLEZ, en voiture simone.