the one that got away › calliôpe

Quand on n’a envie de rien… on n’a envie de rien. Et c’est de ça qu’Emrys avait le plus envie en ce moment : rien. Ne rien faire. Passer ses journées dans son appartement comme s’il s’agissait d’une grotte. Plusieurs jours pouvaient s’écouler comme ça, sans qu’il ne mette un pied dehors. Si les gens savait qu’il y a des années, il passait sa vie à l’extérieur, à arpenter les routes sans vraiment savoir où aller, ni même savoir s’il aurait un toit où dormir la nuit. Il s’en souvient encore de ses nuits à la belle étoile, et c’est ce qu’il préférait. Il avait aimé sa vie, son mode de vie. Tout lui convenait. Qu’il aille dire ça aujourd’hui, voir si on ne se foutrait pas un peu de sa tronche.
Encore heureux qu’il ait parfois des poussées de bonnes volontés qui lui parvienne… ou simplement de la paperasse importantes et inévitables à remplir. Une fois passé par la case de la mairie, il n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Quand on a pas le moral, souvent les gens passent dans les bars. C’est ce qu’ils font dans les films non ? Lui était plus proche du bar de la plage, ca lui changera un peu d’air. Il s’y rendait en trainant un peu des pieds. Arrivé sur les lieux, il scrutait le bar du regard à la recherche de la place idéale. Pas trop bruyante, et assez bien placé pour avoir un œil sur tout le monde. Cette place il l’a connait bien. C’est souvent au comptoir qu’il l’a trouvait, mais manque de pot, la meilleure place était prise. Pas de soucis, il s’installerait à côté. Une brunette avait déjà passé commande apparemment, et il n’allait pas non plus lui demander de changer de place juste pour sa petite personne. Il s’assoit à côté, effleure les traits du visage de l’inconnu d’un bref coup d’œil … Mince. Ce visage lui était familier. Du moins il lui disait quelque chose, mais il n’aurait su dire de qui il s’agissait là tout de suite. Il fronçait des sourcils puis feint de passer commande pour observer de nouveau sa voisine, discrètement si possible…

Calliôpe était sur la plage. Il faisait nuit noire. on pouvait à peine distinguer la silhouette de la jeune femme dans la pénombre. Elle était assise, une bouteille de Jack à moitié vide à ses pieds. Oui, elle était saoule. Elle ne savait plus trop où elle en était. Elle avait du mal à avancer, elle voulait retourner en arrière, mais elle n'avait pas vraiment envie de faire demi-tour, détruire une autre vie qu'elle avait durement construite. Et puis elle avait peur. Peur de ce qu'elle pourrait trouver en rentrant à Melbourne, ou plutôt de ce qu'elle ne trouverait pas. Elle avait aussi peur qu'on la retrouve. Car non, la belle brune n'avait pas oublié pourquoi elle était à Bowen. Elle n'avait pas oublié qu'elle était en cavale. Et peu importe tout ce qu'elle avait si bâtir en trois ans ici, elle savait que du jour au lendemain, elle pourrait être amenée à tout quitter et fuir. Et ça l'effrayait encore. Cette idée lui lui serrai le cœur chaque fois qu'elle s'endormait, chaque fois qu'elle se réveillait. Et donc pour oublier, Calliôpe buvait. Elle buvait encore et encore, jusqu'à oublier comment elle était arrivée sur cette plage, ce qu'elle foutait là, et pourquoi elle était là.

Au loin, il y avait une lumière. Plusieurs même. C'était le bar de la plage. Attiré par la lumière tel un papillon de nuit, la brunette se leva tant bien que mal et tituba jusqu'au bar. Le bruit emplissait ses oreilles, la musique emplissait ses autres sens. Le bruit lui redonnait vie, et elle  s'évadait loin, loin de ses problèmes, loin de ses sombres pensées, et elle se mît à danser, comme si elle était seule au monde, comme si personne ne la regardait, ce qui n'était pas le cas. Elle était seule, présente mais absente à la fois. Elle dansait comme elle le faisait dans la salle de musique quand elle était au lycée, elle dansait comme elle le faisait chez elle, elle dansait comme lorsqu'elle était sur scène au club. Et elle attirait les regards des curieux qu'elle avait troublés. Évidemment, tout le monde pouvait voir que la belle était ivre et l'assumait plutôt bien. Elle était à présent heureuse et le passé était derrière elle. Elle se sentait en paix avec elle-même.

Après ce qui lui avait paru une bonne vingtaine de minutes à danser , la belle rejoignit le bar. L'effet de l'alcool devait commencer à se dissiper, elle n'aimait pas ça. «Un verre de vodka s'il vous plait. » Devant le refus du serveur qui avait constaté son état d'ébriété avancée, Calliôpe se contenta d'un verre de soda. Un jeune homme venait de prendre place à côté d'elle. Il l'avait regardée, discrètement certes, mais elle l'avait quand même remarqué. Elle, par contre, ne pût s'empêcher de le fixer. Elle le connaissait ce grand brun, elle en était sûre. Elle avait beau être ivre, elle n'oubliait pas les visages, et c'était ce qui lui avait sauvé la vie, un soir dans un motel miteux de Sydney alors qu'elle était en cavale avec... «Em... Emrys, c'est toi? » La belle écarquilla les yeux comme si elle avait vu un revenant. Elle avait du mal à y croire. Elle avait un doute,  et pourtant elle était sûre que c'était son grand compagnon de voyage, celui avec qui fait le tour de la belle Australie. Un grand sourire se dessina sur ses lèvres, tandis qu'elle ne pût réprimer cette envie de serrer chaleureusement ce morceau de son passé dans ses bras. «Tu m'as manqué Em... » Calliôpe était heureuse d'avoir retrouvé ce pan de son histoire, si heureuse qu'elle n'osait pas questionner sa mémoire sur la raison de leur séparation, de peur de retrouver à nouveau ces moments qu'elle voulait tant oublier.

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