Homecoming baby • ROBIN

Homecoming, baby

Les douze coups de minuit avaient sonné depuis une demi-heure, peut-être plus, peut-être moins, je n'en aucune idée. J'avais fini mon service, mais je n'avais aucune envie de rentrer chez moi. Métro, boulot, dodo, comme un employé lambda soumis à la boucle infernale de la société de consommation. Je ne voulais pas retrouver l'appartement où je vivais, et où mes colocataires ne seraient surement pas, trop occupés à avoir une vie, ce qui n'est pas mon cas. Je voulais pas aller m'affaler sur mon lit repenser à la journée fadasse que j'ai passée, à tout ce qui est allé de travers aujourd'hui et tout ce qui ne l'a pas fait, mais qui le fera demain. Donc je flânais dans les rues de Bowen, à la recherche de ce qui me ferait m'échapper un peu de la monotonie et oublier. Et ce petit bar tombé tout droit du ciel sur mon passage semblait être l'endroit idéal.

Louis ne cautionnerait certainement pas ma présence dans cet endroit, mais comme on dit, ce que tu ignores ne peut pas te faire de mal. Assise au comptoir, je réquisitionnai le serveur en face de moi: « un scotch s'il vous plait. » un clin d'oeil en guise de remerciement lorsque je fus servie et je m'enfilai mon verre aussi vite qu'il était apparu devant moi. […] Peut-être était-ce à cause de la fatigue, ou parce que je n'avais pas beaucoup mangé, ou alors parce que j'avais bu trop vite, ou peut-être même les trois, mais je sentais déjà l'effet des verres sur mon organisme et le rouge qui me montait promptement aux joues. Mais je n'allais pas m'arrêter à si bon chemin. Je voulais que ma vision s'embellisse, ou se floute. Le grand blond qui m'avait servi avait disparu pour laisser place à un brun aux cheveux très courts, aux muscles tatoués, dont l'apparence m'était familière. Fouillant tant bien que mal dans les archives de ma mémoire, je l'appelai d'un claquement de doigts : « Un autre scotch s'il vous plait, merci. » lâchai-je, dubitative, cherchant toujours à mettre un nom sur ce corps pour l'instant sans visage.