I don't always have good ideas - tempête - [feat.Matthew]

Evidemment, si Claudia avait pris la peine d’allumer sa télévision aujourd’hui afin de regarder ne serait-ce que la météo, elle aurait pu prévoir cette levée soudaine du vent. Mais si on peut dire une chose, c’est bien qu’en ce moment, la météo est le dernier des soucis de la jeune femme. Enfermée dans son atelier, elle rattrape son retard de production. Il faut dire que la période se prête fort aux cadeaux et que si son petit business d’accessoires et de sacs en cuir ne dégage pas le chiffre d’affaire d’Hermés, elle a une clientèle assez exigeante.
Claudia a installé son atelier dans la petite baraque annexe à la ferme familiale. A l’origine, ce n’était qu’un débarras, puis sa mère avait imaginé le transformer en studio à louer mais finalement, sa fille avait décidé d’en faire son lieu de travail. Pratique car à 2 minutes à pieds de la maison, pas cher, cela évitait à Claudia de louer à un autre endroit.
La musique tournée à fond (bonheur de ne pas avoir de voisins proches), Claudia est concentrée, elle termine de coudre un sac en cuir de vachette quand un bruit sourd l’extrait de ses pensées. Elle tourne son visage vers la fenêtre et remarque qu’une pénombre menaçante a gagné l’extérieur. Elle jette un œil à sa montre, il n’est pas si tard. Finalement, elle se décide à baisser le volume de sa chaîne hi-fi et constate le bruit sifflant du vent s’engouffrant dans le moindre interstice de la baraque.

« Pfff, c’est quoi ce bordel ? »

Claudia aime être seule mais elle ne supporte pas le silence, elle se parle souvent à elle-même, ça la rassure et là, ce n’est pas le silence qui l’inquiète. Elle décide d’arrêter là pour la soirée, le travail attendra bien demain, elle range grossièrement ses affaires, éteint les objets électriques et se met en route pour rejoindre la bâtisse principale. Une fois dehors, force est de constater que le vent est déjà à l’œuvre. Le ciel gris offre une lumière des plus étonnantes et les arbres autour d’elle semblent s’être mis en transe au son d’une musique mystique. Ils balancent leurs branches dans tous les sens possibles et imaginables.
Soufflée par la bourrasque, Clo avance les yeux plissés. Elle a du mal à avancer gênée par ses cheveux lui balayant le visage. Elle parvient finalement à retrouver sa maison et allume instinctivement la radio dans la cuisine.
On annonce une tempête imminente. Les lumières grésillent puis s’éteignent, au même moment que la radio se tait. Plus de courant.

« Rhooo, merde ! »

Heureusement, Claudia a été élevée dans un esprit de résilience, elle n’a que quelques pas à faire à tâtons pour trouver une grosse lampe torche fonctionnant à piles et retrouve un peu de lumière. Le vent semble avoir regagné en vigueur à l’extérieur et quelques éclairs suivis du tonnerre commence à faire accélérer le rythme cardiaque de la demoiselle qui n’a pourtant pas peur de l’orage. Il ne manquerait plus que la pluie !

Enfin, pour l’instant, elle n’a pas grand-chose à faire, rester enfermée, allumer des bougies et lire en bon bouquin en attendant que ça passe.
Claudia trouve son programme plutôt plaisant finalement, elle part à la recherche de bougies dans le placard au-dessus de l’évier quand un coup de tonnerre la fait sursauter, suivit d’un énorme bruit proche. Elle se précipite à la fenêtre pour jeter un œil dehors.
Un des arbres vient de céder sous le poids des rafales, rien à voir avec le tonnerre mais l’atelier n’est pas passé loin. Le cœur en vrac, Claudia reprend son souffle, pas d’inquiétude. La pluie tombe finalement, en cordes. Elle reprend son souffle et vérifie quelle a encore un peu de batterie dans son portable histoire d’appeler les secours au cas où… Oui, sauf que son téléphone est bien évidemment resté dans l’atelier. Quelle nouille ! A songer à ces quelques mètres à passer pour aller le récupérer, la jeune femme n’est pas très rassurée, mas d’un autre côté, sans téléphone, elle ne pourra pas appeler les secours en cas de problème. A-t-elle vraiment le choix ?
Claudia prend son courage à deux mains, elle attrape sa veste de pluie dans l’entrée et tient bien fermement sa lampe torche en main. Une fois dehors, elle brave les éléments tant bien que mal et arrive enfin, saine et sauve, dans son petit atelier. Pas d’électricité ici non plus, en même temps, cela aurait été étonnant. Claudia repère immédiatement l’objet qu’elle était venue cherchée, par chance, il était en charge et affiche batterie pleine. Rajustant sa veste, elle glisse l’objet dans sa poche et s’apprête à repartir pour reprendre son programme idéal pour temps orageux.

Un nouvel éclair et tout à coup la toiture s’effondre devant elle.

Claudia se jette en arrière pour éviter les débris, un petit cri s’échappe de sa bouche. Un arbre vient à nouveau de tomber et cette fois il n’a pas loupé la petite habitation. Déstabilisée, Claudia tombe en arrière, heurte une étagère en bois et c’est le noir complet.

Au moment où elle reprend connaissance, elle distingue assez mal ce qu’il y a autour d’elle. Il fait froid et sombre, la nuit est tombée d’un coup. Le vent continu de souffler et les éclairs sont toujours aussi menaçant. Elle cherche la lampe torche du bout des doigts, rien. Elle veut se relever mais finit par comprendre qu’elle est bloquée, coincée sous les étagères pleine d’outils qui lui sont tombées dessus, maintenant elle commence à sentir la douleur dans ses jambes. Bon signe, mauvais signe…
Claudia, d’habitude si joviale, se dit que là : « C’est la merde totale ! »

Il parait que la douleur aide à se sentir vivant. Alors là, Claudia peut dire qu'elle ne s'est jamais sentie aussi vivante. Une douleur lancinante lui saisie la jambe droite et elle a comme des courbature dans les épaules. Elle vient de se prendre un bon coup de frayeur.
A l'instant où elle résume la situation dans un souffle désespéré, une voix s'élève dans la pénombre et c'est son cœur qui lâche et elle pousse un cri suraigüe. Elle se croyait seule et avec l'ambiance qui règne autour d'elle, sa première réaction peut se comprendre. Elle plisse alors les yeux pour mieux voir qui est entré dans la dépendance à moitié détruite.
L'être en question s'appelle Matthew, au moins il n'a pas laissé plané un mystère inutile en cette période trouble.

"Matthew, okay, oui, désolée, je croyais être seule." annonce-t-elle en essayant d'être la moins plaintive possible. Intérieurement, elle a envie de lui demander ce qu'il peut bien venir faire chez elle mais elle préfère se taire. Claudia aperçoit le sourire de l'homme puis son regard. Elle se sent sourire à son tour, par politesse peut être ou bien par soulagement.

"Moi c'est Claudia." dit-elle en voulant lancer son bras vers lui pour lui serrer la main. Mais à l'instant où elle essai de mouvoir son épaule "Aaargh!" une immense brûlure la parcoure de la nuque jusqu'aux côtes.

"Putain ça me fait super mal." constate-t-elle à mi-voix en fermant les yeux. "Désolée, non, je ne peux pas trop bouger, j'ai la jambe coincée et apparemment l'épaule en charpie."

Elle tourne son visage vers celui qui se révèle être le sauveur potentiel le plus efficace et fais une grimace: mélange de douleur et de sourire.