we never seem to make it through the door (lily-anaëlle)

Son ordinateur portable sur les cuisses, les jambes légèrement ramenées vers son corps, Nelligan faisait défiler les pages d’appartement sans vraiment y voir les annonces présentées. Il n’arrivait même pas à se concentrer, ses pensées s’en allant dans tous les sens, sans pourtant le mener où que ce soit. Toute sa vie avait changée en moins d’un mois, et c’était loin d’être terminé d’ailleurs. Peu de temps après la St-Valentin, à la fête à Zach, Nelligan avait commencé cette chaîne d’événements qui le mènerait là où il était aujourd’hui, c’est-à-dire, à la case départ. Il avait embrassé Ally, alors que Lola l’aimait tellement, alors que Lola était tellement bonne pour lui, et qu’ils vivaient une relation saine malgré leurs horaires différents. Il avait reçu de l’attention de la part de cette rouquine, et il s’était laissé prendre. Quelques jours plus tard, ils étaient allés un peu plus loin, avant que Nelligan ne se réveille et y mette fin. Mais il était déjà trop tard. Il le savait. Il ne pourrait pas le cacher à Lola, il ne le voulait pas. Il lui avait donc tout raconté et, même si elle savait déjà pour le baiser parce que certaines personnes à la fête les avaient vus, elle ne savait pas pour l’autre soirée chez Ally et ça, ça les avait détruits. Ça avait été le coup de grâce pour Lola. Celui de Nell, ce fut l’annonce de la grossesse de Lola. Et, plus récemment, la perte de ce bébé. Et tout lui revenait sur le dos. Si Lola avait fait une fausse couche, c’était parce qu’elle avait tenté de noyer son chagrin dans l’alcool. Chagrin causé par nul autre que lui. Nelligan était le fautif, dans toute cette histoire. Il s’était lui-même mis dans cette situation. En même temps, il aurait forcément dû s’y attendre, lui qui ne savait même pas sur quel pied danser depuis des mots, voguant entre son passé avec Lily-Anaëlle qu’il ne semblait pas prêt à laisser aller, le présent passionné qu’il avait vécu avec Ally, et le futur paisible qu’il aurait pu avoir avec Lola, mais qui n’aurait peut-être pas été le bon pour lui. Son incertitude avait eu raison de lui, d’eux. Cela l’avait conduit ici-même, chez Zach et Lily-Anaëlle. Quel perdant il faisait, de se retrouver sans toit sous lequel dormir, forcé à demander de l’aide à un des seuls amis qui pourrait l’accueillir chez lui, même si cela voudrait dire que Nelligan devrait également dormir sous le même toit que son ex-copine, celle à qui il avait pourtant convenu de tourner la page quelques mois plus tôt. Pourtant, lui, n’y arrivait pas. Et ça lui ferait tant de mal de voir la brunette avoir enfin continué à vivre sa vie sans qu’ils ne se tirent vers l’arrière à tout bout de champ. Il ne pouvait plus continuer ce manège avec Lily-Anaëlle. Il ne pouvait l’empêcher de vivre sa vie. Et même si, encore aujourd’hui, Nelligan avait cette impression que s’il se retrouvait de nouveau à la case départ, c’était pour mieux repartir à zéro avec Lily-Anaëlle, il ne pouvait plus lui faire subir ses changements de cap incessants. Son retour vers elle arrivait constamment quand il était perdu dans le brouillard. Il venait de rompre avec Lola, et venait de traverser un éventail d’émotions avec cette grossesse et cette fausse couche. Comment pouvait-il prétendre savoir ce qu’il désirait plus que tout au monde alors qu’il était complètement atterré ? Lily-Anaëlle méritait bien mieux que lui. Et pourtant, ça lui faisait tellement de mal de s’imaginer vivre les prochains jours ici, avec elle dans cette maison, sans pouvoir être complètement honnête avec elle. La porte s’ouvrit finalement, lui qui était seul depuis la fin de l’après-midi puisque Zach était parti on-ne-sait-où. Lily revenait sans doute de chez son dernier client de la journée. Comme il s’était installé ce matin dans leur chambre d’ami, Nelligan et Lily-Anaëlle n’avaient pas vraiment eu l’occasion de parler de cette situation des plus inattendues. Il ne savait pas vraiment s’ils devaient en parler. Malgré tout, il laissa son ordinateur portable sur le lit et s’avança vers le salon et la cuisine, dans laquelle Lily-Anaëlle se trouvait. Il lui sourit faiblement. « Bonsoir, Lily. » Zach lui avait dit que la jeune femme avait accepté qu’ils hébergent Nelligan le temps qu’il se trouve un nouvel endroit où vivre, mais il ne savait tout de même pas réellement comment elle avait pris la nouvelle. Il ne savait donc pas comment agir avec elle. Il s’avança vers elle, plongeant ses mains dans ses poches. « C’est vraiment gentil d’avoir accepté de m’héberger quelques temps … Je me doute que ça ne doit pas être facile. Alors … merci. » Lâcha-t-il, visiblement gêné.

Les événements des derniers jours te laissaient perplexe. Depuis le dernier soir où tu était sortie, tu n'étais pas aller à l'hôpital. La peur te tenait en joue et tu ne savais pas comment t'en sortir, c'est vrai. Mais au fond, voulais-tu savoir ? Le savoir t'apporterait quoi ? Tu avais lu sur internet que ça pouvait être un souffle au coeur, donc tu risquais de mourir ? Génial non ? Autant ne pas le savoir. Tu ne le voulais pas non. Quitte à mourir, autant ne pas le savoir. C'est ce qui t'angoisserait plus que jamais. C'était décidé, tu n'irais pas faire d'examens. En plus c'était sûrement trios fois rien, pour une fois que tu ne faisais tout une histoire autour de ça, tout irait bien. Tu n'avais qu'une envie en ce moment, rentrer chez toi et te terrer dans ton lit. Tu voulais juste essayer d'oublier, ou de te réveiller d'un mauvais rêve. Zach t'avait prévenu, il t'avait dit de mettre des limites, et tu n'avais pas réussi. Tu étais bien contente de ne pas l'avoir croisé en rentrant complètement débraillée. Tu aurais eu tellement honte de toi, deux fois plus. Bon dieu, faudrait que t'essaies d'avoir une nouvelle discussion avec lui pour lui demander de t'aider à redevenir normale. Au fond t'aimais bien la coincée que tu étais. Empotée et timide, mais au moins tu étais gentille. Tu étais normale. Pour le moment, tu accomplissais la première étape qui consistait à rentrer chez toi. Mais tu fus vite accueilli par ton nouveau colocataire. Evidemment, c'était une situation à laquelle tu t'étais attendue toute la journée, en espérant que ça ne devraient pas bizarre. Mais en fait, ça l'était déjà, et depuis un moment. « Hey ! Bonsoir » Tu lui esquissais plus un truc qui ressemblait à une grimace, qu'à un sourire. Mais ça c'est parce que tu ne savais pas trop comment te comporter avec lui. C'était étrange, au fond tu avais l'impression de revivre un souvenir et tu n'avais pas forcément envie de le repousser. Mais en avait-tu le force ? « Oh, ce n'est rien, quand Zach m'en a parlé, je ne me voyais pas lui dire : Euh non sans façon, laisses le à la rue. Tu vois, ça sonne pas bien dans ma bouche ! » Tu avais repris avec l'humour. Depuis quelques jours tu essayais de noyer une conversation plus que gênante en essayant de faire rire l'autre pour passer à autre chose. Sans grand succès jusque là.

Un sourire mal à l’aise et timide s’installa sur le visage de Nelligan suite à la grimace qui se voulait sans doute un sourire que venait de lui offrir Lily-Anaëlle. Sans doute n’était-elle pas autant d’accord que Zach le lui avait laissé croire en lui disant qu’il pouvait rester chez eux le temps de se remettre sur pieds. Il se sentit tout de suite de trop, même s’ils n’étaient que deux dans cette maison, même s’ils étaient tout petits dans ce grand monde. Il y avait toujours eu quelque chose de plus, quelque chose de non-dit, entre Lily-Anaëlle et lui et là, ça prenait toute la place. Ça les écrasait. Pour essayer de se rattraper et de montrer à la jeune femme à quel point il était reconnaissant de son ouverture face à cette situation, Nelligan la remercia sincèrement de sa générosité. Il rigola légèrement à sa réponse, ne sachant tout de même pas s’il devait totalement déculpabiliser suite à cela ou pas. Après tout, elle ne se voyait peut-être pas le dire à Zach, mais l’avait-elle quand même pensé ? Lily-Anaëlle aurait-elle préféré que Nelligan se trouve un autre endroit plutôt que chez elle ? Aurait-elle préféré que Zach ne lui propose pas son aide ? Peut-être. Sans doute. Nelligan aurait compris. Après tout ce qu’ils avaient traversé, après tout ce que Nelligan lui avait fait endurer, il aurait compris. Évidemment. Il ne lui en aurait pas voulu, non plus. « Ça ne sera pas pour longtemps, en tout cas, je t’assure. Je suis déjà en train de regarder pour un nouvel appartement, ou pour de nouveaux colocataires. » Avoua-t-il en s’approchant un peu plus d’elle, pour qu’ils ne restent pas éternellement chacun de leur côté de la pièce. Nelligan avait toujours détesté être trop loin de Lily-Anaëlle. « D’ailleurs, si tu connais des gens qui ont une chambre à louer, je suis pas mal prêt à accepter n’importe quelle offre pas trop chère. » Il croisa les bras et s’accota la hanche contre un comptoir de la cuisine, un fin sourire aux lèvres. Il essayait de rester normal, détaché et en contrôle devant la jeune femme, même si en ce moment son esprit était tellement confus. Par Lola, par Ally, par Lily. « Je crois que Zach ne revient pas dîner ici ce soir. J’ai acheté une pizza congelée … t’as faim ? » Une question si banale alors que Nelligan aurait eu tellement de choses à dire à Lily-Anaëlle. Des sujets qu’il ne voulait plus se permettre d’aborder avec elle, de peur de la perdre à tout jamais. De peur de la mener au bout du rouleau. De peur de la repousser involontairement, inconsciemment. Il préférait avoir Lily-Anaëlle dans sa vie, même si ce n’était que pour cette relation distante et confuse, plutôt que de ne pas l’avoir du tout.

Il semblait si loin de toi, et pourtant plus proche jamais. Cette scène, depuis deux ans, tu la tournais en boucle dans ta tête. Tu l'imaginais se jeter sur toi, t'embrasser partout avant de te prendre sur la table. Tu chassais cette pensée aussi vite qu'elle arrivait. Si tu partais comme ça, c'est toi qui allait te jeter sur lui après un sourire en t'imaginant tout un tas de choses. En ce moment, ce n'était pas forcément bon pour toi. Tu devais réfléchir à autre chose. « Oh Nell, c'est bon tu sais, t'es le bienvenu ici et si tu dois rester 6 mois, tu resteras autant de temps. Tu devrais prendre le temps de vraiment t'en remettre, te relancer dans une colocation c'est peut-être pas une bonne idée » Tu voyais bien que ça semblait l'embêter, mais tu ne pensais pas que repartir dans une colocation, après tout ce qu'il venait de traverser. Mais tu lui adressais un sourire pour reprendre doucement « Mais si c'est ce que tu souhaites, je garde mes oreilles ouvertes au cas où j'entends parler de quelque chose. » Tu le voyais faire un pas pour se rapprocher de toi. Ton cœur se serre d'un coup. Plus de pression pour toi. Après tout, avec le mauvais coton que tu files en ce moment, tu serais prête à tout. Après tout, tu devais te détendre un peu. Tu semblais trop crispée, et ça devait pas renvoyer une bonne image de toi. Tu allais finir par lui faire croire que tu regrettais de l'avoir ici, ce qui n'était pas le cas. « On ne dirait pas, mais il pourrait arriver d'un instant à l'autre. Après moi j'ai ramené du chinois, j'ai même pris ta soupe préférée, enfin si tes goûts n'ont pas changé, et si ça t'as envie de manger ça ! » Tu parlais trop. Beaucoup trop. Et encore, tu avais fait mieux la dernière fois, mais au moins il ne pourrait pas te reprocher d'être muette.

Les mots de Lily-Anaëlle le touchèrent droit au cœur. Elle ne voulait que son bien, en fait. Malgré tout ce qu’ils avaient vécu, la jeune femme se souciait seulement du bien-être du jeune homme, peu importe si elle devait être confrontée à lui à tous les jours pour cela. Lily-Anaëlle, au fond, avait toujours été sa lumière lorsque les nuits se faisaient trop noires. Quand les étoiles ne brillaient pas assez pour Nelligan, Lily-Anaëlle lui donnait toute la lumière dont il avait besoin. Elle guidait chacun de ses pas. C’était vers elle qu’il se dirigeait, vers elle qu’il avançait. Si seulement il ne s’était pas égaré du sentier aussi souvent. Si seulement elle savait qu’aux yeux de Nelligan, tous les chemins menaient à elle. « T’as peut-être raison. C’est vrai qu’avec tout ce qui s’est passé, si vite, en si peu de temps … ça me ferait sans doute du bien de m’arrêter un peu, et de … de réaliser tout le changement, en fait. » Avoua-t-il avec un sourire gêné et triste. En même temps, il n’était pas certain que le fait de vivre chez son ex-copine pour qui il avait toujours eu des sentiments, pour qui il en avait encore, était une bien meilleure idée. Lily-Anaëlle avait beau être sa lumière, celle-ci était parfois tellement éclatante qu’il s’en trouvait aveuglé, incapable de distinguer quoi que ce soit d’autre qu’elle. Incapable de se raisonner. Exactement comme présentement. Alors que Nelligan venait de vivre une rupture douloureuse, alors qu’il se détestait profondément, alors qu’il venait d’apprendre que Lola avait perdu leur enfant … Nelligan se tournait quand même vers Lily-Anaëlle, alors qu’il aurait plutôt dû se tourner vers lui-même et faire la paix avec ce qu’il avait fait. Mais non ; il préférait se perdre dans les yeux de la jeune femme que de contempler l’échec qu’il était. Nelligan proposa alors à Lily-Anaëlle de manger la pizza congelée qu’il avait acheté le matin-même, mais la jeune femme avait posé sur le comptoir un sac avec du chinois, dont une portion était destinée à Nelligan. Il lui offrit un sourire reconnaissant. « Mes goûts n’ont pas changés. C’est gentil, Lily. » Il s’approcha d’elle, pour se poser juste à côté et l’aider à sortir tous les plats du sac. « Te souviens-tu, quand on était ado … C’était toujours ça qu’on se commandait, quand on allait chez ta mère ou chez mes parents. Vers la fin, ma mère me grondait parce qu’elle aurait préféré que je te cuisine quelque chose. Question d’être un vrai gentleman. » Nelligan rigola légèrement, même si ses propres mots « vers la fin » avaient laissé un arrière-goût amer à ses paroles. Comme il aurait aimé que ce ne soit que le début, en fait …

Il semblait être sur la même longueur d'onde que toi. Même si au fond ce n'était peut-être ta une si bonne idée. Avec toi rodant dans les parages, en étant toujours amoureuse de lui, ça n'allait pas l'aider. C'était au moment où vous vous étiez quittés en vous disant adieu, et en voyant son baiser avec Ally, que tu avais réalisé que tu ne pouvais pas tourner la page. Et la conversation que tu avais eu avec elle ne t'avait pas aidé. « Après je te promets pas la tranquillité avec Zach, il t'aimes bien et j'pense qu'à chaque fois qu'il aura du temps, il viendra te tanner ! » Tu imaginais déjà Zach aller le trouver dans sa chambre, pour jouer à la console, boire un coup, sortir entre potes, et tu ne savais pas quoi d'autres encore, mais au moins, il n'aurait pas le temps de s'ennuyer ici. Et si jamais un soir il était lassé de Zach, il pouvait aussi venir te voir. Après tout, si tu voulais essayé de l'avoir comme ami, ce qui était mieux que rien pour toi, vous deviez passer du temps ensemble afin de pacifier vos relations. Que ça ne soit plus bizarre, ce qui était loin d'être le cas là. Tu lui fis un sourire, c'était un drôle de souvenir, toi ta mère râlait parce que tu mangeais toujours la même chose, elle te manquait. « Ah oui ? Ta mère était toujours au petit soin pour moi, moi je me souviens qu'une fois, au repas familial du dimanche, elle m'avait cuisiné un plat spécialement pour moi à cause de mon allergie au fruits de mer ! » Tu le fis un grand sourire en te remémorant le bon temps. Il y avait de nombreux souvenirs qui te remontait en tête - en te souvenant à quel point, tu étais heureuse. Et aussi à quel point c'était douloureux après tout ça. « Ça te tente de regarder un film après ? Ou si tu veux parler, j'ai une oreille à te prêter. » Tu ouvris ta boîte après avoir mis celles de Zach au frigo, tu lui prenais toujours un truc au cas où il rentrait tard ou au cas où il aurait un creux dans la nuit et jusqu'à présent, tu n'avais jamais eu de reste. Donc ça devait lui convenir. Tu attrapais ta fourchette pour casser la croûte.

Un sourire amusé se dessina sur les lèvres de Nelligan à l’évocation du fait que Zach ne le laisserait jamais tranquille quand il aurait du temps. Honnêtement, Zach avait beau être le mec le plus étrange qu’il connaissait, il lui faisait du bien, dans le sens où il le faisait rire et lui faisait prendre la vie à la légère. Même que de plus en plus, il embarquait dans ses conneries et jouait le jeu, parce que Zach savait bien que ce n’était rien de sérieux. Nelligan l’avait bien mis au clair, ça, au départ. Maintenant qu’il savait que c’était seulement dans la personnalité de Zach, Nelligan l’acceptait mieux. Et il arrivait à en rire avec lui. « Ça va me changer les idées, c’est une bonne chose. J’vais avoir besoin de pas mal d’action pour m’enlever de la tête tout le reste. » Avoua-t-il avec un léger rire. Si Zach voulait bien jouer aux jeux vidéo et boire avec lui, ça ne ferait que très plaisir à Nelligan, parce que dans le cas contraire il le ferait seul et ça, c’était pas mal plus triste comme image. Il se rappelait encore des nombreux mois passer à broyer du noir suite à sa rupture d’avec Tara et ça, il n’était pas prêt à le vivre de nouveau. Il avait énormément souffert, il s’était perdu, il avait tout perdu. Pourtant, il se doutait bien que s’il ne trouvait pas une bouée à laquelle s’accrocher, il allait encore une fois sombrer. C’est pourquoi l’idée de vivre ici plutôt que seul dans un petit logement lui avait parue bien plus alléchante. Et puis, même si c’était encore étrange entre Lily-Anaëlle et lui, ils semblaient tous les deux prêts à faire des efforts. Rien que là, à se remémorer des souvenirs en ouvrant les boîtes de chinois, ça le détendait. « Oui ! À chaque fois que tu venais elle s’assurait que tout serait à ton goût. Elle t’aime tellement. » Dit-il en souriant. Et il parla au présent, parce que c’était encore le cas. La mère de Nelligan demandait souvent des nouvelles de Lily-Anaëlle, et Nelligan la renseignait du mieux qu’il le pouvait, avec l’aide de Lexi qui la côtoyait beaucoup plus que lui maintenant. Leur mère se réjouissait toujours d’avoir de ses nouvelles. Lily-Anaëlle proposa finalement de regarder un film, maintenant qu’ils avaient chacun leur repas avec eux, et une fourchette en main. « Un film, oui, je peux pas refuser ça ! » Il sourit. « Je pense que c’est préférable ça que de parler de … du reste. » Il ne savait même pas si Lily-Anaëlle était au courant pour la grossesse et la fausse couche ; il en avait parlé à Lexi, mais elle avait sans doute gardé ça pour elle. Ou peut-être pas. Dans tous les cas, il n’avait pas vraiment envie d’en parler. Rien que d’y penser il avait une boule dans l’estomac. « Pas parce que c’est toi … enfin … si, un peu … mais … je … je suis juste pas vraiment prêt à verbaliser comment je me sens, je pense. » Expliqua-t-il avec maladresse, comme d’habitude.

Il semblait ravi de pouvoir passer du temps avec Zach. Tu ne pouvais pas l'expliquer, mais Zach, il était un chic type. Il dégageait quelque chose que tu n'avais toujours pas compris. Il serait une bonne influence pour Nell, tu ne pouvais pas le nier. La seule chose qu'il fallait dans tout ça, c'était de refréner tes envies. « Il a du t'inviter juste pour avoir un adversaire, parce que c'est vrai que j'ai pas souvent l'occasion de jouer avec lui, et puis il est comme toi, beaucoup trop fort, j'ai à peine le temps d'appuyer sur trois boutons que ça recommence ! » Oh, oui Zach adorait ça. Passer du temps sur la console, et ça te rappelait ton douce jeunesse. Quand tu allais passer la journée chez Nell, parce que toi tu n'avais pas tout ce qu'il avait. Tu te passais de vivre sans console, mais quand vous étiez chez lui, tu aimais bien y jouer. Il te montrait les touches, t'expliquait tout bien, et se moquait de toi parce que tu faisais n'importe quoi. C'est surtout que tu avais eu du mal à assimiler toutes les règles et que tu devais faire avec ton handicap. Tu finissais par appuyer sur tous les boutons et parfois tu gagnais. Presque jamais. Ça avait du arriver une fois. « Et la mienne, dont ! » Par chance, tu côtoyais encore Lexi, par qui tu demandais souvent des nouvelles de leur parents, ça te gênait de le lui demander. Ça semblait si étrange, alors qu'avec Lexi, ça venait dans la conversation, c'était plus naturel. Il accepta ton choix de film, et semblait vouloir se justifier à tout prix. Ce qui te faisait rire, parce que ça faisait longtemps que tu n'avais pas entendu Nelligan aussi maladroit. Comme s'il faisait face à une fille pour la première fois. Certes tu étais une fille, mais Nell et toi vous aviez passé un stade où la timidité n'existait plus. « Tu n'as pas à me donner la moindre explication, je voulais juste que tu saches que si tu avais besoin de parler, je suis là. C'est à ça que servent.. les amis ? » Tu avais eu un doute au moment de le dire. Tu ne savais pas ce que vous étiez en fait. Pour être honnête, tu ne savais pas où vous en étiez dans votre relation. C'était fini avec Lola pour mieux repartir avec toi ? Et toi, que voulais-tu au fond ? « Bon, plutôt un film d'action, avec des explosions de partout et des super-vilains, et des super-gentils pour sauver la ville, ou plutôt un truc léger pour rire un peu ? » Tu avais déjà une idée sur le film choisi, mais il pouvait encore te surprendre et changer d'avis. Même si un bon film sur les comics, ça serait toujours mieux qu'autre chose. Tu t'étais levée pour mettre en route le lecteur DVD et la télé, le temps qu'il fasse son choix. 

Nelligan rigola quand Lily-Anaëlle releva le fait que Zach avait sûrement été très ravi de l’inviter surtout pour jouer avec lui aux jeux vidéo. Il se souvenait fort bien à quel point Lily-Anaëlle n’avait jamais vraiment saisi toutes les combinaisons d’attaque possibles sur une manette. Chaque bouton entraînait un mouvement, et après il suffisait de les combiner avec d’autres pour en faire de nouvelles. Lily-Anaëlle, elle, s’était toujours contentée d’appuyer sur tous les mêmes boutons l’un après l’autre, laissant surtout la chance faire son œuvre. Il avait toujours trouvé cela adorable, en fait. Et la belle brunette avait toujours été la seule avec qui Nelligan ne s’était jamais montré comme un mauvais perdant, ou comme un trop grand compétiteur. Avec Ally, il s’était montré sous son pire jour de joueur de jeux vidéo, à tel point qu’elle s’était sentie coupable de l’avoir battu à quelques reprises. Nelligan était vraiment mauvais perdant, oui. Mais chaque petite victoire de Lily-Anaëlle avaient toujours été, à ses yeux, une fierté. Aujourd’hui, il n’avait plus la chance de la voir évoluer ainsi dans ses petites victoires, que ce soit dans les jeux vidéo ou dans sa vie. Ça lui manquait, tout ça. Il s’en rendait encore plus compte quand il l’entendait parler du passé, du présent avec Zach, bref de tout ce que Nelligan avait manqué. Parce qu’il avait été trop stupide pour réaliser que la femme qu’il attendait depuis si longtemps, elle avait été là depuis le tout début. Sous ses yeux. Et il l’avait regardée partir. Pire ; il l’avait aidée à partir. Se convainquant en même temps qu’elle qu’il était temps qu’ils tournent la page. Alors qu’il fixait une page blanche depuis toujours, attendant que leur histoire soit complétée. Ne vivant rien d’autre qui était assez beau pour être écrit en lettres attachées. « Ça me fera plaisir de le détruire, alors. » Lança-t-il en rigolant, alors qu’il savait bien que s’il y avait bien un adversaire à Bowen qui pourrait réduire Nelligan en miettes, c’était Zach. Et il ne savait pas encore que c’était vrai aussi pour un autre domaine que celui des jeux vidéo. Bref, concernant le choix du film, Nelligan s’était quelque peu enfargé dans ses mots, mais après tout Lily-Anaëlle l’avait d’abord connu aussi maladroit que ça. Retour aux sources. Si seulement c’aurait pu être un retour à zéro, aussi. Quand elle lui assura que c’était à ça que servaient les amis, le sourire de Nelligan demeura un sourire, mais des plus déconfits. Il hocha la tête doucement. « Oui … oui bien sûr … » Il baissa les yeux, fuyant surtout le regard de son ex copine parce qu’il ne voulait pas qu’elle arrive à y lire toute la déception. Son cœur s’était un peu serré dans sa poitrine, parce que même si là, il était encore trop tôt pour dire si Nelligan était prêt à se lancer de nouveau dans une histoire avec Lily-Anaëlle, après tout ce qu’il venait de lui arriver, c’était difficile de voir que même s’il avait été persuadé que c’était la chose à faire, Lily ne partagerait pas son avis. La brunette lui proposa quelques choix de film, et Nelligan songea réellement au meilleur choix possible ; celui qui aurait le moins de scènes romantiques. Honnêtement, il n’avait pas besoin de ça. « Un film d’action avec tout le monde qui meure et du sang partout, t’as ça ? Et des héros, bien sûr, on peut pas faire sans. » Il rigola.  

Un plaisir de l'écraser tient, tu te demandais bien lequel des deux avait plus mauvais caractère ? Nelligan probablement. Zach - qui était un grand compétiteur - savait prendre la défaite avec légèreté et joie de vivre. D'un coté, tu ne pouvais pas dire que Nell avait déjà été mauvais joueur avec toi, il t'encourageait à progresser et te félicitait quand tu le battais. Mais tu l'avais déjà vu jouer avec Ted, et ce n'était pas beau à voir. Ça t'avait beaucoup amusé sur le coup, mais tu avais bien compris que gagner ce n'était pas bien, c'était capital. Comme si ça vie en dépendait. Et c'était une chose que tu avais du mal à comprendre, encore aujourd'hui. Toi, tu jouais pour jouer, eux jouaient pour gagner. Tu esquissais un sourire à sa phrase. Tu t'en doutais bien. Et puis il y eu un malaise. Il avait peut-être baissé les yeux, mais tu avais bien réalisé ce qui se passait. Même toi, ça te faisait bizarre. En le disant, il y avait eu comme un mélange de déception et de tristesse. Après tout ça, vous n'étiez pas fait pour être amis, c'était trop compliqué. Il y avait trop de sentiments en jeu, trop de non-dit, trop d'actes manqués. « C'est étrange, non ? J'ai l'impression de faire un bond de 8 ans en arrière, c'est assez déstabilisant.. » Tu replaçais une mèche de cheveux qui ne faisait que tomber sur ton visage pour la quinzième fois depuis que vous vous étiez mis à parler. Cherchant dans la collection de DVDs ce que tu pouvais bien choisir. Un film avec plein de morts, pas de soucis. Mais pas trop violent non plus parce que sinon tu n'aurais pas le courage de le regarder avec lui, tu aurais bien trop peur. Tu reviens vers lui, trois boîtiers en mains, prête à les proposer ses choix. « Je peux te proposer Star Wars, Jurassic Park même si c'est plus des dinosaures que des super héros, ou bien Captain America, il me semble que y a pas mal de mort, mais si tu veux autre chose, on a la vidéo à la demande ! » Tu lui avais vendu chacun des films avec les meilleurs critères possible, même si pour Jurassic Park, tu n'avais plus l'histoire en tête. Tu savais que vous l'aviez déjà vu ensemble, mais tu te souviens aussi t'être endormie devant, et à part qu'il y ait des dinosaures, tu n'avais rien retenu. Mais bon, ça ne t'empêcherait d'essayer de le regarder une nouvelle fois, et sans t'endormir ce coup-ci. 

Gêné, surtout parce que Lily-Anaëlle venait de relever le malaise qu’il tentait de passer sous silence, Nelligan hocha la tête en la regardant, un sourire timide aux lèvres. Il ne savait pas vraiment ce qu’il fallait dire à propos de cela. Il était vrai qu’ils étaient de retour dans les jeunes esprits qu’ils étaient au début de leur relation ; au moment où celle-ci était encore belle et romantique. Mais ce n’était bel et bien que dans leur attitude que cela se ressentait. Parce que dans les faits, Lily-Anaëlle et Nelligan étaient à des années lumières de cet amour jeune et fou. Ils étaient à des kilomètres de cet endroit, cette petite bulle, qu’ils avaient habitée ensemble pendant quelques années. Les plus belles années de Nelligan. Alors face à la remarque de la brunette, Nelligan ne savait pas s’il devait être d’accord ou non. Dans son cœur, il avait effectivement l’impression ne pas avoir bougé. Mais eux, ils avaient changé. Ils avaient traversé les saisons. Les unes après les autres. Et les saisons s’étaient transformées en années. Et les années les avaient séparés, peu à peu. Alors même si Nelligan avait constamment cette impression qu’ils ne s’étaient jamais vraiment tout à fait quittés, il savait aussi pertinemment qu’ils n’avaient jamais plus été ensemble. Et qu’ils ne le seraient sans doute plus jamais. « Ouais, enfin … J’ai aussi l’impression qu’on en a fait du chemin. T’es allée de l’avant et moi, je suis retourné à la case départ. Malheureusement, comme j’y suis allé de reculons, j’ai pas pu empocher mon 200$. » Dit-il avec un petit sourire mi-amusé, mi-triste. Il avait essayé de faire un peu d’humour avec Monopoly, mais au fond on voyait bien que ça le dérangeait. De tourner en rond. De faire des allers-retours incessants. La vie de Nelligan stagnait. Comme s’il n’arriverait jamais à aller de l’avant si ce n’était pas aux côtés de Lily-Anaëlle. Dès qu’il se sentait trop loin d’elle, il revenait à ses sentiments initiaux, dans l’espoir de pouvoir tout reprendre à zéro avec elle. Correctement, cette fois. Pour le moment, les confidences avaient suffi et Nelligan décida plutôt de finalement choisir un film d’action. Il écouta attentivement les propositions de Lily, avant de déclarer : « Captain America, tiens. C’est le moins long des trois, alors y’a moins de risque que tu t’endormes avant la fin. » Plaisanta-t-il, faisant référence aux nombreuses fois où Lily-Anaëlle s’était endormie sur son épaule, et qu’il était resté pendant des heures à ne pas bouger, même après la fin du générique, pour ne pas la réveiller. Oh, il donnerait n’importe quoi pour revivre ces moments. Mais il savait bien que ce soir, si Lily-Anaëlle s’assoupissait, ce serait sur le bras du fauteuil, et pas sur lui.

Tu l'écoutais parler de son retour en arrière et du fait qu'il n'allait pas pouvoir empocher l'argent parce qu'il l'avait fait à reculons. Ça te faisait rire mais c'était triste. Si tu devais faire le bilan de ta vie, tu pouvais dire que tu avançais toi, mais pas dans la bonne direction. Tu faisais des choses dont tu ne t'aurais jamais cru capable. « Et moi je m'approche dangereusement de la case prison.. » Tu l'avais dit à demi-mots, plus pour toi-même que pour lui, avec un sourire mi-amusé, mi-triste. S'il était là à te parler ce soir, c'est qu'il ignorait ce que tu avais fait. Ou alors qu'il ne voulait pas en parler, mais c'était plus ou moins ta faute si son couple s'était cassé la gueule. Non, d'ailleurs ça ne devrait pas être ta faute, ce n'est pas toi qui avait embrassé Ally, ni toi qui avait déconné avec Lola. Tu avais été un messager, certes, mais il lui aurait bien dit un jour non ? Il était honnête, enfin, tu le pensais honnête, tu avais juste accéléré les choses. Habituellement, tu t'accablerais, mais pas ce soir. Tu en avais marre de t'aplatir devant les autres. Tu fis un sourire amusé à sa remarque, bon dieu, il est vrai que tu t'endormais bien trop vite. Mais ce n'était pas ta faute, tu te sentais tellement bien contre lui, que tu fermais les yeux un instant pour savourer ton bonheur, et tu t'endormais. Maintenant que tu étais seule, tu avais appris à regarder des films en entier. « Je fais des efforts maintenant, je peux quasiment le regarder en entier ! » Tu lui fis un sourire, te posant dans le canapé une fois le dvd mis dans le lecteur, une polaire sur tes jambes. Et Nelligan à ton côté. Tu avais envie de glisser ta tête sur ses jambes et qu'il passe doucement sa main dans tes cheveux, comme avant. Mais rien ne pourrait jamais être comment avant au fond. Les yeux rivés sur la télé, tu pensais à Zach. Il commençait à se faire tard, et il n'était pas encore rentré. Il devait vagabonder de gauche à droite, et ça te faisait sourire, mais tu aimais bien le savoir à la maison avec toi. Mais tu fis l'effort de te plonger dans le film, si tu commençais à penser à autre chose, l'heure qui allait suivre allait être longue, et tu finirais par t'endormir. Tu voulais relever un défi, lui montrer que maintenant, tu étais capable de veiller. Enfin uniquement parce qu'il n'y avait personne pour te caresser les cheveux, et rien dans ta vie pour te rendre heureuse et te permettre de t'endormir, insouciante du reste. Lorsque apparu le générique de fin, tu jetas un coup d'oeil sur ton ex/ami/tu ne sais pas trop. « Tu vois, encore en pleine forme ! » Tu t'étais levé pour faire un petit pas de danse, ce que tu trouvais ridicule mais amusant. Au point où tu en étais dans ta vie, le ridicule ne te tuerait jamais.

Lily-Anaëlle avait décidé de rentrer dans sa comparaison avec le Monopoly, mais sa réponse le laissa un peu perplexe. Il rigola légèrement, mais pas longtemps, fronçant les sourcils pour ensuite déclarer : « J’espère que c’est encore une métaphore … » Lança-t-il d’un ton plus inquiet qu’amusé. Il s’imaginait pourtant que Lily-Anaëlle vivait une vie bien rangée, bien heureuse, qu’elle allait dans la bonne direction la tête bien haute. En tout cas, c’était bien l’image qu’elle lui envoyait. Elle avait été en mesure de tourner la page sur lui et d’aller de l’avant, de vivre ses rêves. Même après l’attaque à la librairie, la jeune femme avait su se relever et faire ce qu’il y avait de mieux pour elle. Elle s’était reconvertie en décoratrice d’intérieur et ça la réussissait vraiment bien. Il ne s’imaginait pas une seule seconde que Lily-Anaëlle n’était pas satisfaite de la vie qu’elle menait. À ses yeux, si l’un des deux avait réussi, c’était bien elle. Mais non, visiblement, tous les deux couraient encore dans tous les sens sans pouvoir se retrouver dans ce brouillard qu’était leurs vies. Bref, ils allèrent s’installer sur le fauteuil pendant que Nelligan rappelait à la brunette qu’elle s’endormait toujours sur les films et qu’il valait donc mieux sélectionner le plus court des trois choix. Le jeune homme rigola à sa réponse. « Wow ! Félicitations ! Qui aurait cru que ça arriverait un jour … » Lâcha-t-il avec un sourire amusé. Au moins, ils étaient encore capables de se taquiner sans trop de mal, tous les deux. En même temps, ils se connaissaient si bien, mieux que bien d’autres. C’était facile de titiller l’autre sur n’importe quel sujet. Même s’ils avaient changés depuis dix ans, le fond restait le même, à quelque part. Après avoir mis le DVD dans le lecteur, Lily-Anaëlle vint s’asseoir et, évidemment, ce fut à une bonne distance de lui. Le jeune homme baissa le regard vers cet écart entre eux, essayant de ne pas se faire remarquer. Il soupira silencieusement, posant sa tête dans la paume de sa main alors que son coude était posé sur le bras du divan. Le film débuta, et ils restèrent silencieux durant tout ce temps. Surtout parce que tous les deux étaient bien trop concentrés dans l’action du film. À la fin, Lily-Anaëlle lui jeta un coup d’œil avant de le narguer en disant qu’elle était encore en plein de forme. Il rigola ; encore plus quand la jeune femme fit un pas de danse devant lui. « J’vois bien ça ! Je t’ai rarement vue aussi enflammée ! » Il aurait bien déconné un peu plus avec elle, mais honnêtement en ce moment le rire ne lui venait pas aussi facilement que d’habitude. La présence de Lily-Anaëlle avait beau l’apaiser, comme d’habitude, il n’oubliait quand même pas ses erreurs et l’état de Lola. Tout ce qu’ils auraient pu avoir. Et surtout tout ce qu’ils avaient perdu. « Bon … » Déclara-t-il. « Je devrais aller dormir. C’est moi qui ouvre le magasin demain … » Déclara-t-il. Même s’il savait qu’il ne dormirait pas cette nuit. Comme toutes les autres nuits depuis sa conversation avec Lola.

Tu t'étais levée rapidement, peut-être un peu trop parce que l'instant d'une minute, tu avais eu la tête qui tournait. Mais tu voulais crâner un peu, pour lui montrer ce dont tu étais capable maintenant. « Mais bon, je n'ai aucun mérite, j'ai eu pas mal de temps pour m'entraîner ! » Et ce n'était pas pour dire. Depuis que tu vivais seule, tu avais eu pas mal de temps à passer devant la télé, et encore plus l'an passé lorsque tu avais passés des jours entiers enfermés chez toi. Tu te souvenais être allée deux fois à la vidéothèque, et de la gentillesse d'Emily qui t'avait laissé emprunter tous les films que tu voulais. Et de Casey, qui passait chaque soirs pour t'apporter un truc à manger, et reprendre les films que tu avais vu, pour ne pas laisser tout ça s'encombrer dans ton appartement de l'époque. Tu te figeais face à lui, en adressant un tendre regard à ton ex amant. « Veux-tu que je te prépare une infusion avec un peu de miel ? » Ce à quoi il hocha la tête pour approuver. C'était grâce à lui si tu connaissais ça, et depuis qu'il te l'avait fait goûter, tu en avais bu un chaque soir ou presque. Tu éteignis le lecteur dvd tout en laissant la télé allumé, tu trouverais bien un truc à regarder pour te faire patienter, le temps de trouver le sommeil. « Tu as l'occasion de parler à Lola, ou à Ally ces derniers jours ? Moi j'ai pu voir les deux, et avoir des conversations assez étranges.. » Il ne voudrait sûrement pas aborder ce sujet avec toi, ce que tu trouverais légitime au fond, mais tu commençais à ressentir la culpabilité de ce que tu avais fait, et tu sentais que tu devais lui en parler, quitte à ce qu'il t'en veuille, après tout, ça ne serait pas le premier, et encore moins le dernier. La pilule serait plus difficile à avaler par contre.

Après que Nelligan eut mentionner son éventuel départ pour sa chambre, question d’aller dormir un peu – ou plutôt fixer le plafond en attendant que le temps passe, laissant ses pensées le torturer jusqu’au lever du soleil -, Lily-Anaëlle lui proposa une infusion avec du miel. Nelligan sourit et hocha la tête. C’était toujours ce qu’il prenait lorsqu’il devait aller dormir mais ne ressentait aucune fatigue. La brunette s’en souvenait. Ou alors elle avait incorporé cette habitude de Nelligan aux siennes, elle aussi. Alors ça lui venait naturellement, comme proposition. « Merci. » Dit-il par après alors que la jeune femme avait éteint le lecteur dvd. Elle était partie dans la cuisine pour faire bouillir l’eau, et en revenant, elle avait demandé au jeune homme s’il avait eu l’occasion de parler à Lola ou à Ally, dans les derniers jours. Ça lui faisait vraiment étrange de parler de son ancienne amante et de son ancienne copine à Lily-Anaëlle, qui était elle aussi une ex copine. La plus significative de toutes, à ses yeux. Celle qui avait tout chamboulé en lui. « Ally, non, et je n’ai pas vraiment l’intention d’aller vers elle … » Il secoua la tête. La jeune femme n’avait pas cherché à reprendre contact avec lui, par après. Il fallait croire qu’elle avait eu ce qu’elle voulait, ou alors qu’elle ne cherchait pas à avoir plus. Elle avait déjà décidé d’aller ailleurs. « Je pense qu’on n’a plus grand-chose à se dire maintenant. » Ou plutôt rien de bien. Nelligan en voulait à Ally, quand même, parce que même si lui aussi avait joué avec le feu, c’était Ally qui s’était montrée insistante à son égard pour finalement le laisser tomber après avoir gâché sa relation avec Lola. Il ne comprenait toujours pas pourquoi une amie d’enfance aurait voulu lui faire cela. « Et Lola … on s’est reparlés, oui. Parce que … » Parce qu’elle avait fait une fausse couche. Parce qu’elle avait perdu leur enfant en devenir. « Parce qu’on avait encore certaines choses à régler. Maintenant je pense bien que … que tout est terminé. » Avoua-t-il avec la voix légèrement tremblante. Puis Lily-Anaëlle lui avoua qu’elle avait eu l’occasion de parler à toutes les deux, et d’avoir des conversations qu’elle qualifia d’étranges. Nelligan fronça les sourcils en relevant les yeux vers elle. « Qu’est-ce que tu veux dire ? » C’était plutôt la conversation avec Lola qui l’inquiétait, parce que les deux femmes ne se connaissaient pas, à priori.