Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.
J’suis dans un café assise bien sagement avec mes écouteurs sur les oreilles. J’travaille durement sur mon discours pour l’ouverture de la galerie d’art. Aujourd’hui, Hayden et Sara sont sensés tout se charger pour s’assurer que personne ne touche au projet de Concho. D’ailleurs, nous allions devoir en reparler pour s’assurer de la suite des choses. Avec mon Macbook sous les yeux, j’tente de rédiger au mieux mes sentiments et la réalité des choses. J’ai un café près de moi que je sirote lentement. Il doit être environ midi et j’ai pas très faim pour l’instant. J’regarde autour de moi et je vois une brunette qui entre, je lui fais un sourire. Je crois l’avoir déjà vu dans une pâtisserie où je vais à l’occasion. J’retourne à mon discours avec mes écouteurs sur les oreilles le temps d’un instant, puis je la vois s’asseoir devant moi avec un grand sourire alors qu’elle dit quelque chose. J’enlève mes écouteurs. « Excuse-moi, j’écoutais de la musique un peu fort. Tu disais? » Je lui faisais un sourire navré comme pour l’aider à répéter.
Je la regarde au travers de la vitrine depuis une bonne dizaine de minutes. Il n’y a aucun doute : il s’agit bien d’Ally. Elle a les mêmes cheveux que maman, cette chevelure que j’ai toujours envié à la femme qui m’a donné la vie. Pourtant, il y a beaucoup de personnes qui rêvent de tout sauf d’être roux. Je décide enfin à rentrer dans la boutique et d’un pas décidé, je me dirige vers elle. Je m’assois en face. Elle va sans doute se demander ce qui prend à une inconnue de s’installer comme cela à une inconnue de l’accoster. Si ça se trouve, elle va croire que je suis en train de la draguer. Du coup, je prends la parole, je ne peux pas qu’elle se méprenne sur mes intentions.
« Bonjour, je m’appelle Jazz-Aimee. Est-ce que tu as déjà entendu parler de moi ? »
Je sais beaucoup de choses sur elle mais la réciproque est-elle vraie ? A-t-elle appris notre échange à la naissance de la même manière qu’on me l’a annoncé il y a quelques années maintenant ? Je suis étonnée lorsqu’elle enlève ses écouteurs et m’indique qu’elle n’a pas entendu mes paroles. Du coup, je reprends un peu autrement, ayant peur de sa réaction.
« Je m’excuse. Je ne voulais pas te déranger. J’ai voulu faire ta connaissance depuis longtemps mais je n’ai jamais osé franchir le pas. Je suis Jazz-Aimee. Tes parents ont dû te parler de moi ?! »
Elle s’assoyait devant moi avec une assurance hallucinante et ça me faisait un peu peur, même. « Je m’excuse. Je ne voulais pas te déranger. J’ai voulu faire ta connaissance depuis longtemps mais je n’ai jamais osé franchir le pas. » Au départ, je souriais gentiment et je secouais la tête négativement lorsqu’elle pensait me déranger. J’enregistrais mon document, prête à l’écouter. Puis à mesure qu’elle avançait dans ses paroles alors qu’elle souhaitait vraiment faire ma connaissance, je fronçais les sourcils l’air méfiant. Jamais osé franchir le pas? Mais pourquoi? Je tenais ma langue le temps qu’elle poursuive. « Je suis Jazz-Aimee. Tes parents ont dû te parler de moi?! » Je secoue la tête négativement en tremblant presque. Mais qui est cette fille? Elle se prend pour qui là? Elle était là pour la galerie d’arts? Pour les emmerdes de mon père? C’était la deuxième fille illégitime de ma mère? J’avais sérieusement la frousse. « Heum... » Je cherchais les mots pour ne pas flipper, mais de l’autre côté : n’était-ce pas flippant? « Pourquoi tu me cherchais à me rencontrer exactement? » J’avais un peu peur pour ma propre sécurité. Je regardais autour de moi comme si quelqu’un pouvait faire quelque chose. J’aurais voulu appeler Concho pour qu’il me prenne dans ses bras doucement et me dire que tout allait bien. Ou Levi pour qu’il me confirme qu’il n’ait pas fait de trucs idiots. J’tremblais même sur ma chaise. « Non, mes parents ne m’ont pas parlé de toi. Pourquoi? » Que je lui disais un peu nerveuse, quand même. J’hésitais à lui dire que mon père était décédé il y a un peu plus de cinq ans et ma mère... Ben ma mère... J’sais même plus comment décrire la femme qui m’a mise au monde. « Est-ce que tu abordes tout le monde comme ça? » que je lui demandais, franchement nerveuse en passant la main dans mes cheveux. Qu’attendait-elle de moi exactement? J'avais peur parce que selon ce qu'elle me disait, elle semblait m'épier et moi, je ne m'étais rendue compte de rien... Enfin, je devais me faire des idées.
Au fur et à mesure que la jeune femme me répond, je me rends compte que je n’ai peut-être pas usé de la meilleure stratégie pour l’accoster puisqu’elle semble vraiment nerveuse en ma présence. Et j’ai comme l’impression que ce que je vais lui annoncer ne va pas arranger les choses, bien au contraire. Elle m’avoue bientôt qu’elle n’a jamais entendu parler de moi et là, tout se remet en question dans ma tête. C’est à mon tour d’être pris d’une panique mémorable alors lorsqu’elle me demande si c’est une tactique pour approcher les gens, je me lève brutalement avant de bredouiller « Je… Je suis désolée… J’aurais pas dû venir… » Je me tourne et commence à partir lorsque pris d’un nouvel élan de courage, ou plutôt du fait que je ne suis pas une lâche qui abandonne aussi facilement, je reviens sur mes pas. « En fait non, il faut que tu saches ! » Et sans plus attendre, sans même qu’elle ait le temps de me répondre, j’enchaine sans mâcher mes mots, telle une bombe qui exploserait sans minuteur : « Nous avons été échangé à la naissance. » Et comme s’il fallait que je lui explique plus en détails, je continue sur ma lancée d’une traite : « Mes parents sont les tiens et tes parents sont les miens. Biologiquement, je veux dire. » Parce que sinon, j’aime beaucoup ma famille et dans mon cœur, personne ne pourra jamais les remplacer. Je me rassois à la place que j’occupais quelques minutes plus tôt. Mes jambes flagellent tellement que j’ai bien du mal à me tenir debout. « Je m’excuse. Je pensais que tu savais quand je suis arrivée. »
J’ai vu son visage s’effondrer lorsque je lui avais dit que je ne la connaissais pas et je me sentais un peu coupable, mais de l’autre côté... Je ne savais pas exactement comment prendre la chose. « Je... Je suis désolée... J’aurais pas dû venir... » Je fronce les sourcils. « Mais attends... » que j’avais eu à peine le temps de souffler alors qu’elle faisait volteface pour quitter le plus rapidement possible et elle revenait sur ses pas. « En fait non, il faut que tu saches. » « Que je sache quoi? » Vraiment cette fille m’intrigue et je fronce les sourcils. « Nous avons été échangées à la naissance. » « Attends... Quoi? » Je suis pas certaine de tout comprendre. « Mes parents sont les tiens et tes parents sont les miens. Biologiquement, je veux dire. » Hein?! Mais cela ne fait aucun sens, j’ai vu ma mère récemment... Et Isaiah? Son père? Et le mien? Celui de Jazz-Aimee, étais-je Jazz-Aimee? Woah... Et j’suis perdue la bouche ouverte. « Je m’excuse. Je pensais que tu savais quand je suis arrivée. » Je reste silencieuse, mais je suis consciente que ça va pas l’aider, la pauvre fille. Je secouais la tête négativement. « Assieds-toi. » J’allais devoir lui poser quelques questions parce que je me sens profondément larguée. Et loin... très loin. « Et tu t’appelles Jazz-Aimee? » Que je reprends. Si elle avait raison... « Moi c’est Ally... » que je lui disais doucement, sans trop savoir si je lui disais quelque chose qu’elle savait déjà, sans doute. « Mais mon prénom complet c’est Alexandria, on m’appelle jamais comme ça. Sauf ma mère... Enfin la tienne? Je crois? » Je souffle. Putain d’histoire. Après une saga, ça en est une autre. J’ai peine à le croire... Isaiah n’y croira pas non plus. J’avais envie de pleurer face à tous ces drames et de rire à l’absurdité de la situation. À la place, j’affichais un visage neutre. « Écoute... Je sais pas où tu as entendu ça, mais il doit y avoir des tests sanguins, des vérifications ou des tests d’ADN? » Et une autre chose me tracassait... « Et ça fait longtemps que tu me connais? Enfin, que tu sais qui j’suis? » J’étais vraiment confuse et j’avais si peu d’explications à lui fournir. J’avais compris que ses parents étaient les miens et inversement. « Et comment t’as su? Et comment ... tes parents, nos parents l’ont su? » J’avais envie de me lever et de me mettre à courir, mais j’avais l’impression qu’on m’avait soudée à ma chaise. J’tremblais comme une pauvre idiote qui ne savait rien.
Sujet: Re: wait, what? + jazz-aimée Ven 6 Mai 2016 - 18:58
Je vois bien la surprise sur son visage à mesure que je lui fais la déclaration et je suis étonnée moi-même. Mais si mes parents ont attendu mes 24 ans pour m’annoncer la nouvelle, je peux comprendre que les siens n’aient jamais franchi le cap et moi, je ne suis pas la plus diplomatique pour présenter les faits généralement avec ma franchise légendaire. Je m’assis lorsqu’elle m’y invite, ne cherchant d’ailleurs pas du tout à m’y opposer. Puis, je hoche la tête lorsqu’elle prononce mon nom avant de se présenter elle-même. « Oui. » Je lui dis alors, n’osant plus rien dire de peur d’ajouter quelque chose qu’il ne faudrait pas. S’enchaine alors tout un tas de questions sortant de la bouche de la rousse. Et cela me fait doucement sourire alors qu’une question vraiment idiote me vient en tête. « Tu ne t’ai jamais demandé pourquoi tes parents ont une chevelure qui n’a rien à voir avec la tienne ? » Après tout, c’est une couleur que l’on peut qualifier de génétique dans beaucoup de cas et je sais pertinemment, depuis que j’ai vu une photo d’eux, que mes parents biologiques sont loin d’être roux. Bref… Il est temps de faire suite à ses interrogations je crois mais par où commencer ? « Mes parents m’en ont parlé il y a à peu près trois ans maintenant. J’ai mis pas mal de temps à accepter, et à comprendre d’où le fait que je ne me sois jamais manifestée avant… Et puis, je n’étais pas sûre d’en avoir envie, parce que ça aurait voulu dire que toute cette histoire était vraie. » J’avais nourri l’espoir pendant quelques temps qu’il s’agissait en fait d’une mascarade, d’une bonne blague de mes parents, même si cela n’a rien de drôle, ou que même eux avaient cru à cette histoire alors qu’elle n’était pas réelle, tout simplement. « Mon père m’a donné une sorte de journal intime qui appartenait au tien. J’ai cru comprendre qu’il est mort désormais ? » Comment il l’a eu ? Je ne lui ai jamais posé la question à vrai dire. J’ai juste imaginé que les deux couples étaient au courant depuis bien longtemps et avaient passer une sorte de pacte. « Apparemment, il aurait demandé à une infirmière de l’hôpital de nous échanger pour que j’ai une ‘meilleure vie’ que ce qu’il pouvait m’offrir. Je suis désolée de dire cela de cette manière. Je conçois que ça ne doit pas être facile à entendre. » Des tests ADN, je n’y avais pas spécialement pensé, ayant tout de même confiance en mes parents et c’est surtout qu’il est difficile de mettre cela en pratique sans l’autre bout de la famille… « Il y avait des photos dedans. De toi… De moi… » C’est sans doute ce qui m’avait le plus marqué dans toute cette histoire d’ailleurs. « Cela fait quelques semaines déjà que je sais qui tu es mais j’osais pas faire le pas… »
Invité
Sujet: Re: wait, what? + jazz-aimée Sam 7 Mai 2016 - 18:17
wait, what?
Surprise. Le terme n’est pas assez fort pour décrire comment je me sens en ce moment. Je suis perdue, désorientée, vidée, abusée, souillée... trahie, surtout trahie. « Tu ne t’es jamais demandé pourquoi tes parents ont une chevelure qui n’a rien à voir avec la tienne? » Mes yeux s’arrondissent et je prends une mèche de mes cheveux entre mes mains pour mieux l’observer de longues secondes. C’était génétique, Jazz-Aimee avait raison et j’étais perturbée. Profondément, même. Ma mère n’était pas rousse et même si mon père n’avait que quelques reflets auburn dans sa barbe, ce n’était pas la même chose. Je m’étais dis que je devais tenir de mes grands-parents et j’avais cessé de chercher plus loin inutilement. L’interrogation était perceptible dans mes yeux. « Mes parents m’en ont parlé, il y a à peu près trois ans maintenant. J’ai mis pas mal de temps à accepter, et à comprendre d’où le fait que je ne me sois jamais manifestée avant... Et puis, je n’étais pas sûre d’en avoir envie, parce que ça aurait voulu dire que toute cette histoire était vraie. » Je ne savais pas quoi dire, je ne savais pas comment réagir. J’avais déjà du mal à tout assimiler qu’avec elle qui continuait de m’annoncer des effets nouveaux. J’avais le souffle coupé. « Et ils n’ont pas cru bon de m’en parler? » crachais-je, finalement. J’étais leur fille biologique, après tout! Pourquoi ne m’avaient-ils rien dit? Pourquoi avaient-ils gardé le silence? J’étais blessée et perdue. Surtout perdue. Je me demandais comment ils avaient su... « Mon père m’a donné une sorte de journal intime qui appartenait au tien. J’ai cru comprendre qu’il est mort désormais? » Je détournais le regard quelques instants. Mon propre père savait... Je me retrouvais à lui en vouloir profondément. J’arrivais à peine à parler, mais j’avais hoché la tête positivement. « Oui, il est décédé il y a quatre ans. Je suis désolée. » lui disais-je avec une mine dépitée sachant qu’elle ne gagnerait sans doute pas grand chose... Mon père était si exceptionnel et pourtant, j’étais clairement perdue. Je regardais Jazz-Aimee, visiblement confuse. Elle m’expliquait le tout en me disant qu’il voulait avoir une meilleure vie pour sa fille. Je me levais d’un bond, les yeux remplis d’eau. Je n’étais qu’une enfant de substitution? Qu’une gamine de qui on se foutait, au final? Je marchais dans le café, j’devais marcher. Je ne savais pas comment gérer le tout. Je n’avais jamais su comment gérer les choses, mais là encore moins. J’étais troublée, perturbée. Les larmes coulaient de mes yeux alors que je faisais les cent pas autour de nous. « Je conçois que ça ne doit pas être facile à entendre. » Pour la première fois depuis le tout départ, je lui en veux et je la jalouse. Elle ne devait pas se rendre compte de ce qu’elle me disait. « Une substitution... » soufflais-je en m’essuyant les yeux et en me reculant. « Il y avait des photos dedans. De toi... De moi... » Elle revenait avec ce foutu journal qui allait me hanter chaque jour de ma traître vie. Moi qui m’était battue de nombreuses fois pour mon père, moi qui avait payé la somme hallucinante pour ses funérailles, moi qui avait brisé une année de ma vie pour me faire annoncer que je n’avais aucun lien avec cet homme. « Cela fait quelques semaines déjà que je sais qui tu es, mais j’osais pas faire le pas... » « Je ne sais pas quoi te dire. » lui confiais-je finalement, dépourvue de toute réaction. Vidée, détruite, anéantie et surtout triste. « Tes parents qui sont les miens ont pas voulu me... rencontrer? » lui demandais-je un peu perdue. Sa franchise m’avait déjà fait mal, au moins j’allais pouvoir tout tirer au clair. Je me rassoyais, le yeux toujours perdus dans l’eau. Je n’osais plus la regarder droit dans les yeux, j’avais peur. Après toute la saga avec Isaiah, ce deuxième drame familial me heurtait de plein fouet et je n’étais pas sûre que j’étais la bonne personne pour gérer ça. J’avais juste envie de me mettre à courir, longtemps, loin. Sans dire un mot. J’avais envie de fuir. Autant que j'avais envie d'en connaître davantage sur eux, que je ne désirais que fuir loin.
Sujet: Re: wait, what? + jazz-aimée Dim 22 Mai 2016 - 20:13
Cru bon de lui en parler ? Je ne leur avais pas posé la question et à vrai dire, je ne suis même pas sure qu’ils sachent qu’Ally est leur fille. Ils n’ont jamais vraiment cherché parce que malgré que toute cette histoire soit vraie, leur vie telle qu’elle est leur convient parfaitement, tout comme le fait de m’avoir comme fille. Et comme ils me l’ont dit le jour où ils m’ont tout avoué, ils ne souhaitaient pas que cette révélation change quoi que ce soit dans nos rapports. Je suis leur fille à leurs yeux, leur vraie fille et personne ne pourrait jamais changer cela. « Sans vouloir t’offenser, je ne sais pas s’ils ont vraiment envie de te connaitre. J’ai dû faire toutes les recherches seules et même s’ils me soutiennent dans mes démarches, ils évitent le sujet en général. » Je lui souris, assez mal à l’aise vis-à-vis de ce que je viens de lui annoncer. Lui apprendre que toute sa vie est un mensonge pour au final lui avouer que ses parents biologiques renient son existence… J’imagine bien que ce n’est pas facile à entendre. D’un autre côté, j’avoue que cela m’arrange car je n’ai pas à partager mes parents, pas à avoir peur qu’on me pique ma place de fille unique, même si je considère déjà la jeune femme qui est en face de moi comme ma sœur. J’ai toujours eu peur depuis que je suis enfant, que mes parents me voient différemment si je faisais quelque chose de travers et cette peur n’est jamais partie, malgré le fait que j’ai bientôt la trentaine. Et puis, je redoutais aussi pour ma place à la tête des boutiques Coldman, même si à ce que j’ai pu comprendre, Ally est loin d’être pauvre, vu qu’elle possède une galerie d’art qui tourne pas si mal depuis son ouverture.
La rousse me confirma le décès de son père et je n’en fus que plus triste, même si je n’éprouvais pas de sentiments à l’égard de cet homme, dont je partage pourtant les gènes. J’avais été heureuse et intriguée par le journal intime et j’étais passée par plusieurs stades aux niveaux des émotions au cours de la lecture de celui-ci mais après trois ans, c’est une totale neutralité qui m’envahissait en parlant de mon père biologique. Après tout, même si ses intentions étaient humbles, je trouve totalement anormal de vouloir échanger sa fille. Comment est-ce possible d’ailleurs d’y penser ne serait-ce qu’une seconde ? Puis, la jeune femme se lève et je la vois faire les cents pas avant de m’annoncer un mot qui ne m’était jusqu’alors jamais venu à l’esprit. Je n’y avais pas pensé. Pourquoi est-ce que je n’y avais pas pensé ? « Je suis désolée. » C’est tout ce que je trouve à dire et encore une fois, je ressens le besoin de m’en aller mais je suis clouée à ma chaise, incapable de bouger. Alors, je continue à parler, espérant que la suite de mes paroles aura un effet moins négatif sur la miss. « Pour l’instant non ou en tout cas, ils ne l’ont pas mentionné, mais au fond, je pense surtout qu’ils ont très peur de ta réaction, ou que leur vie change. » Si cette histoire n’avait pas eu lieu, ils seraient sans doute les plus heureux du monde. « Mais ce sont des gens géniaux. Je suis certaine qu’ils changeront d’avis si je leur explique que je t’ai rencontrée et si toutefois tu souhaitais les voir. » J’essayais de la rassurer du mieux possible mais je ne suis pas du tout sur de l’effet escompté.
« Sans vouloir t’offenser, je ne sais pas s’ils ont vraiment envie de te connaître. J’ai dû faire toutes les recherches seules et même s’ils me soutiennent dans mes démarches, ils évitent le sujet en général. » J’ai les yeux ronds et j’ai une seule envie, celle de fuir. La seule chose qui me rattache encore c’est l’impossibilité de la chose mais avec tout ce qu’elle me dit, je flippe. Tout ce que je croyais être se déconstruit peu à peu. Peut-être serais-je celle qui serait auprès d’eux, heureuse, sans soucis d’argent? Celle qui aime et qui sait faire les pâtisseries... Je ne sais pas trop comment gérer. « Je suis désolée » me révèle Jazz-Aimee alors que je ne sais toujours pas quoi faire. « Pourquoi l’être? C’est toi qui a été gagnante en bout de ligne. C’est toi qui a une ‘meilleure vie’ et moi j’suis le rejeton que personne ne veut avoir, ni mon père décédé, ni mes parents biologiques. » Je lui lance un regard noir, rempli de haine, de jalousie avec la seule envie de partir à la course en hurlant ma douleur et laissant couler les sanglots de solitude effarante dont je suis pourtant que victime. Pas assez d’être rejetée par Levi, que je dois être celle qui est perdante dans tout cet échange après 28 ans. « Pour l’instant non ou en tout cas, ils ne l’ont pas mentionné, mais au fond je pense surtout qu’ils ont très peur de ta réaction ou que leur vie change. » « Et la mienne, c’est pas sensé la changer? J’reste Ally et eux restent dans leur putain d’monde idyllique avec leur fille parfaite. » que je crache comme du venin alors que j’encaisse la nouvelle comme je peux. Jazz-Aimee me dit qu’ils sont géniaux et j’en ai strictement plus rien à foutre. « Je ne souhaite rien. Je veux ma vie d’avant. » que je lui dis en colère. Je referme mon ordinateur que je range rapidement dans mon sac. Je ne la regarde plus directement dans les yeux car les miens s’embrouillent. « J’dois quitter. J'ai un rendéiunion. » Je quitte le café sur un pas vif et rapide, presque à la course. J’ai besoin de me changer les idées, je refuse que tout ça soit vrai. J’refuse tout ça, j’refuse que ma vie soit construite sur un tissu de mensonge. Je repars à la course les larmes coulant sur mon visage.