i'll confess -r.

Tu avais hésité sur la pas de la porte. Devais-tu entrer ? Tu voulais y entrer, tu avais besoin d'y entrer. C'était idiot à dire mais faire les prières chez soi et ici, il y avait une différence. Elles étaient plus sincères dans ce lieu, parce qu'il était fait pour recevoir les prières. Les confessions aussi. Pour le moment, tu n'avais pas vraiment eu beaucoup de choses à te faire pardonner, tu avais goûté un peu à l'alcool, mais ce n'était pas tellement le plus horrible. C'était les pensées impures que tu avais pu avoir envers un homme que tu ne connaissais pas, qui t'avaient un peu troublé. Tu poussais la porte, et tu avançais d'un pas déterminé. Maintenant que tu étais là, tu n'allais pas faire demi-tour. Si. Et plutôt deux fois qu'une. Depuis que tu vivais ici, tu mettais tes valeurs de côté. Tu changeais. Tout simplement, mais parfois c'était difficile à accepter. Si tu n'étais plus la petite fille qui obéit sagement, qui étais-tu ? Tu ne le savais pas et cette question t'effrayais de plus en plus. Tu ne voulais pas découvrir qui tu étais, tu ne voulais pas voir ta vie changer du tout au tout et pourtant c'était déjà le cas. La vie australienne s'était immiscée en toi plus que tu ne l'aurais souhaité. La preuve, tu tournais les talons pour sortir d'une Eglise alors qu'avant tu te serais posée sur un banc pour prier. Pour parler au seigneur. A nouveau, tu fis demi-tour. On dirait une girouette, et tu en étais une à ne pas savoir ce que tu voulais. Tu voulais juste une vie simple, sans avoir à regretter tes choix parce qu'ils pourraient ne pas plaire à ton père. Bien que tu ne savais toujours pas pourquoi tu continuais de penser décévoir ton père, il vous avait quitté, son regard ne pourrait plus se poser sur toi et tu ne devais plus te sentir jugée. Tu ne devais plus avoir le sentiment de le décevoir. Tu fis un pas vers la gauche, pour t'asseoir un peu. Prendre le temps de mettre tes idées en ordre, pour prendre une réelle décision.

Aller à l'Eglise était devenue une activité hebdomadaire pour Annushka. Avant, elle n'y allait pas si souvent. Même si elle était pieuse, avec ses entraînements et ses ballets, elle n'avait pas le temps d'y aller très régulièrement. Alors à cette époque, elle priait dans sa chambre avant de s'endormir.
Maintenant, elle n'avait plus grand chose à faire de ses journée et venir ici était quelque chose qui la rendait heureuse. Elle avait l'impression d'être écoutée et comprise. Peut être qu'ainsi elle arriverait à avancer.

Elle était encore sur le pas de l'entrée quand elle vit une jeune femme commencer un petit manège. Elle semblait indécise sur la décision à prendre : entrer ou sortir. Annushka s'approcha d'elle alors qu'elle s'asseyait sur un banc, un sourire bienveillant sur le visage.

-Quelque chose ne va pas ?

Tu t'étais assise et tu regardais au loin. Tu voyais l'autel, les bougies, et une sculpture du christ. Tu le sentais te regarder, tu avais l'impression qu'il t'épiait, qu'il te jugeait. C'était une sensation désagréable, d'autant plus que tu avais l'impression qu'il avait le regard de ton père. Et cette pensée te glaçait le sang. Tu avais baissé ton regard pour regarder tes chaussures. Et tu sursautais lorsqu'une voix se fit entendre à tes côtés. Cette fois-ci tu eu un léger sourire, tu savais au son de la voix, que c'était une femme. Et c'était une pensée rassurante, tu n'assurais pas avec les hommes, être avec une femme, c'était plus réconfortant. Tu levais les yeux pour regarder la douce inconnue. « Je.. Non.. » bégayais-tu doucement. Tu étais dans la maison du seigneur, tu n'allais pas parler à voix haute. Tu hochais la tête pour approuver ton propos en reprenant. « Je ne voulais pas vous importuner. » Tu ne voulais importuner personne d'autres que toi. Tu ne voulais pas être un poids, un fardeau. Tu avais tes problèmes, c'était à toi de les résoudre, à toi de trouver des solutions. Tu t'étais déjà plus ou moins confiée à un inconnu l'autre soir, alors tu n'allais pas recommencer à te mettre en avant.

L'inconnue semblait perturbée, elle bégayait. Peut-être que c'était Annushka qui lui avait fait peur, après tout elle ne devait pas s'attendre à ce qu'on vienne lui adresser la parole alors qu'elle était à l'Eglise, aussi hésitante soit-elle. La Russe continua de lui faire un doux sourire comme pour la rassurer.

-Vous ne m'importunez pas, c'est moi qui suis venue vous parler.

Elle avait chuchoté à son tour, ne voulant perturber aucune autre prière de cette église mais cette femme semblait avoir besoin d'aide. Elle ne savait pas de quel ordre étaient ses problèmes, si c'était important ou non mais peut-être qu'elle avait besoin d'une oreille ou de conseils.

-Vous sembliez indécise.

Là elle marquait un point. Tu ne pouvais pas importuner quelqu'un qui venait te demander si tout allait bien. Au mieux, ta réponse lui fera peut-être un peu peur, au pire, elle pourrait toujours partir sans dire un mot, ce n'était pas toi qui allait lui courir derrière pour avoir ses conseils. Tu ne voulais pas t'imposer et tu ne le ferais jamais. Sauf quand ça semblait nécessaire. Mais là ce n'était pas le cas. « Je voulais prier.. » Tu détournais toujours le regard. Tu ne pouvais pas vraiment te résoudre à la regarder, à faire comme si de rien n'était, alors qu'il y avait cet homme dans un coin de ta tête. Tu étais une femme fiancée et même si tu n'avais pas prévue d'honorer ce mariage, tu étais engagée. Et penser à un autre homme, c'était un pêché. « Et j'ai l'impression d'être épiée, de ne pas pouvoir avoir le droit de prier ici, de confession mes fautes.. » Tu avais eu le sentiment d'être une cinglée en lui disant ça. Tu avais été vague sur le pourquoi du comment. Tu ne te voyais pas vraiment lui dire que tu avais l'impression que ton père mort te regardait à travers la sculpture dans le bois, du petit Jésus. Autant dire que ça serait étrange. Tu aurais pu lui donner l'impression de ne pas avoir toute ta tête. Quoique là, tu n'étais pas sûre de lui donner une meilleure impression.

La jeune femme voulait prier. Annushka se sentit alors légèrement de trop. Peut-être n'aurait-elle pas dû venir lui adresser la parole. Peut-être que c'était elle qui l'importunait en fin de compte. Mais elle semblait un peu perdue quand elle était arrivée. Mais la suite des propos de l'inconnue la rassurèrent un peu, enfin, en parti. Elle se sentait épiée donc ? La Russe ne trouvait pas cela si bizarre, on pouvait toujours avoir des sensations de malaise, quelle quel soient.

-Vous vous sentez sûrement coupable de quelque chose...

Annushka n'essayait pas de jouer les psychologues, cependant elle pouvait concevoir ce que ressentait son interlocutrice. Elle ne croyait pas en des forces occultes qui la poursuivraient. Non, elle ne croyait qu'en Dieu.

-Prier ne pourra vous faire que du bien !

Annushka n'était pas non plus médecin mais elle savait qu'à elle, ça lui faisait du bien. Joignant ses mains, elle commença à réciter un Notre père silencieusement.

Elle avait raison, tu te sentais coupable d'avoir désiré un homme qui n'était pas le tien. D'avoir voulu succombé au plaisir de la chair hors mariage. D'avoir vécu dans la débauche le temps d'une soirée en prenant de l'alcool. En fumant, et pas que des cigarettes. Tu ne savais pas ce qui ne tournait pas rond chez toi, mais tu avais l'impression de perdre tes repères, tes marques. Comme si la vie ici, essayait de changer qui tu étais. Tu vivais avec beaucoup de contradictions et pourtant, tu pensais que ça serait facile. Tu réalisais aujourd'hui que ça te tourmentais bien plus que tu ne le pensais. « Oui.. » Sans plus attendre, tu baissais à nouveau ton regard. Prier ne pourrait te faire que du bien, tu l’espérais, pourtant, tu avais l'impression que la religion ne pourrait pas t'aider à te débarrasser du regard que tu sentais sur toi. Tu la vis joindre ses mains et prier en silence, tu te joignis à elle. Fermant les yeux, et collant tes mains, l'une contre l'autre. Tu commençais à réciter la prière que tu connaissais par coeur après des années de récitation. Et pourtant, tu ne pouvais t'empêcher de lever le regard et d'ouvrir les yeux toutes les deux minutes pour vérifier qu'il n'était pas là. Tu avais l'impression d'être une folle furieuse, de voir des fantômes là où il y en avait pas. Mais en repensant à ses derniers mots, tu disais qu'il n'était pas lui-même. Comment un homme dur toute sa vie, pouvait changer au dernier moment ? Ce n'était pas réel. Pourtant Anna, elle semblait l'avoir accepté, alors pourquoi ne pouvais-tu pas en faire autant ?

La jeune femme avait finit par se mettre à prier également mais du coin de l’œil, Annushka la voyait lever le regard par intermittence. Est-ce que c'était à cause de ce sentiment d'être épié ? Même dans une église elle ne se sentait pas en sécurité ? Ou bien était-ce justement à cause de l'église qu'elle avait ce sentiment ? Après avoir récité ses prières, la Russe leva les yeux vers sa voisine, lui faisant un large sourire. Peut-être que si elle se changeait les idées, elle irait mieux.

-Vous restez ici ?

Ta prière arrivait à sa fin. Elle avait été coupée à plusieurs reprises puisque tu avais levé le regard pour t'arrêter un peu et regarder autour de toi. Au fur et à mesure que tu cherchais à voir si tu étais épiée, tu sentais ton sentiment s'effacer doucement. Tu l'écoutais te demander si tu comptais rester ici, tu levais les yeux pour la regarder, hochant la tête avant de lui répondre. « Non, je ne pense pas » Tu n'étais pas à ta place. Tu avais envie de te lever et de fuir en courant très rapidement, levant les bras au ciel. Tu pourrais crier aussi comme si tu courais pour ta vie mais ce n'était pas vraiment le cas. Et puis tu devais rester civilisée. « Je peux vous offrir un café ? » Tu voulais la remercier d'être si gentille avec toi. Elle aurait pu passer son chemin sans prendre l'temps de s'intéresser à toi. Mais au contraire, elle avait été accueillante, et tu voulais lui renvoyer l'ascenseur.

Annushka demanda à sa voisine si elle comptait rester et visiblement elle n'était pas venue pour prier plus longtemps qu'elle. Enfin, la Russe serait peut-être resté plus longtemps si elle n'avait pas rencontré cette jeune femme. Mais l'idée de discuter un peu avec elle était beaucoup plus attrayante que celle de prier encore quelque temps. Elle hocha donc doucement la tête à sa réponse. Elle espérait aussi ne pas lui faire peur, ne pas la faire fuir, après tout, elles ne se connaissaient pas. Annushka eut alors un large sourire quand elle lui proposa un café. Elle ne devait pas lui faire peur alors.

-Oui avec plaisir

La brunette se leva alors, tout heureuse d'avoir fait cette nouvelle connaissance et passa la porte de l'église, s'assurant bien qu'elle la suivait.

Tu n'en revenais pas de toi, tu avais réussi à proposer à une parfaite inconnue d'aller boire un café. Ce n'était pas tellement ton genre mais tu sentais que les choses pouvaient changer. Tu avais souris en espérant ne pas la faire fuir, mais elle avait accepté ton offre en se levant. Rapidement tu avais fait pareil pour la rejoindre en dehors de l'église. Et une fois sur les marches de la bâtisse, tu lui jetais un coup d'oeil, avant de le reporter sur la brune. « Par contre, je ne sais pas la direction à suivre » confessais-tu. Cette ville n'était toujours pas la tienne. « Je suis encore trop nouvelle dans cette ville et je me perds dans ces rues. » avais-tu ajouté rapidement, pour lui expliquer la situation. Tu ne savais pas pourquoi tu avais eu le besoin de te justifier mais tu l'avais fait maintenant. Tu lui offrais un sourire sympathique attendant de voir la direction qu'elle empruntait pour la suivre. Elle serait ton guide pour la journée.

Annushka eut un petit rire quand sa nouvelle connaissance lui avoua ne pas savoir où aller. Elle était donc nouvelle à Bowen ? La Russe eut un large sourire, ça ne la dérangerait pas du tout de jouer les guides pour la journée. Elle adorait se rendre utile, surtout depuis qu'elle avait emménagé à Bowen et qu'elle n'avait pas grand chose à faire en dehors de ses rendez-vous chez la psychologue et chez le physiothérapeute.

-Il n'y a pas de soucis, je crois que je sais où trouver un café ! Depuis combien de temps est-ce que vous êtes ici ?

Annushka emprunta donc une rue, vérifiant que sa nouvelle amie la suivait.

-Au fait, je m'appelle Annushka, et vous ?

Il était normal que la question tombe puisque tu avais dit juste avant que tu étais nouvelle. Tu ouvrais une porte à la curiosité et c'était une question que ne te dérangeait pas tellement. Au fond, ça permettait de lancer la conversation, et elle pourrait voir qu'elle n'était pas la seule étrangère dans cette ville. Tu avais remarqué son petit accent même si tu ne savais pas vraiment vers quel pays te tourner. Les pays de l'Est étaient vastes et il serait trop facile de la déclarer russe alors qu'elle pourrait être ukrainienne. « Je vis ici officiellement depuis quelques semaines, mais j'ai tellement l'habitude de la Turquie que je me sens perdue. » Ele prenait une rue, marchant d'un pas lent et se retournant vers toi. Elle voulait savoir si tu la suivais et c'était le cas. Tu n'allais pas t’éclipser comme ça. Surtout que c'est toi qui avait proposé de boire un café, tu n'allais pas lâchement l'abandonner sans raison. « Enchantée, moi c'est Ayda ! » Tu lui offris un charmant sourire en la suivant à la trace, tu ne voulais pas non plus la perdre de vue, on ne sait jamais, les rues sont si petites et il y en a tellement que si tu as la tête un peu ailleurs, tu pourrais ne pas voir où elle allait.

Quelques semaines ? Alors oui elle était vraiment nouvelle ! Ca ne devait pas être évident de se repérer pour l'instant. Annushka aussi avait eu un certain temps d'adaptation, c'était humain.

-Quelques semaines c'est vraiment récent ! Mais vous verrez vous allez vous y faire.

Donc elle venait de Turquie. Elle était étrangère alors, tout comme elle. Elle savait ce que c'était de s'adapter à un nouveau pays, un nouveau mode de vie, une nouvelle ville. Elle ne connaissait pas particulièrement la Turquie mais elle se doutait que c'était bien différent de l'Australie.

-Et vous n'avez pas eu trop de mal avec l'anglais ?

Annushka avait dû prendre bien des cours avant de réussir à se familiariser avec la langue. Elle hocha doucement la tête quand elle lui donna son prénom.

-Enchanté également !

Après avoir traversé quelques rues, elle se retrouvèrent devant un petit café. Annushka avait déjà dû y venir une fois ou deux, elle ne se souvenait plus très bien.

-On devrait être bien en terrasse.

Et à ses mots elle s'assit à une table sur lequel le Soleil donnait quelques rayons.

Elle semblait sûre d'elle. Au fond, pourquoi aurait-elle dit le contraire ? Bowen est une ville accueillante, une ville plaisante où il fait bon vivre. La ville semble attractive et tu avais même trouvé du travail. Elle t'offrait un bon cadre de vie. « Je l'espère bien, tout à l'air assez charmant, je ne vois aucune raison de ne pas trouver ma place. » Et pourtant il y en avait plusieurs qui te venaient en tête. Même si tu avais eu l'autorisation de venir vivre ici, tu ne pouvais te résigner à trouver ça réel. Tu avais le sentiment de toujours sentir le regard désapprobateur de ton père, quoique tu fasses. « Oh non, j'ai l'habitude de l'anglais, c'est plus les coutumes qui sont différentes. » L'anglais c'était ton dada. En particulier parce que tu regardais beaucoup de séries en version originale et que souvent, c'était l'anglais. Non, pour ça, tu n'avais eu aucun mal, même si après, ton accent tranchait un peu. On savait tout de suite que tu n'étais pas d'ici. En soit, ce n'était pas non plus un problème. Le problème ici c'était les libertés. La vie était différente. Une femme pouvait se dénuder sans soucis, pouvait travailler sans avoir la permission d'un homme, pouvait coucher avant le mariage. Et même qu'ici, une femme n'était pas forcée de sa mariée, ou alors elle était libre dans le choix de son époux. Tu n'avais pas eu une vie facile, tu en conviens, mais c'était un peu trop de libertés pour toi. « Vous prendrez un café ou autre chose ? » Tu lui avais proposé de prendre un café, mais tu étais plus thé toi. Et si jamais elle voulait prendre un truc plus rafraîchissant, elle avait le droit. Tu n'allais pas lui imposer sa commande après tout.