fool, you've landed (sunny)

C’était probablement le sixième message qu’August laissait à Sunny. Au départ, sa voix était des plus calmes, mais maintenant que le temps passait, que les urgences ne prenaient pas Iris en charge et que le jeune homme était incapable de rejoindre sa maman, ses messages se faisaient de plus en plus pressants. Il avait évidemment été vérifier que Sunny n’était pas présentement de service dans l’aile de kinésithérapie, mais comme ce n’était pas le cas, il tentait par tous les moyens de la rejoindre. En raccrochant, il se tourna de nouveau vers Iris avec un sourire rassurant, passant sa main dans les cheveux de sa filleule. « Tout va bien aller, maman sera là bientôt, ok ma princesse ? » Il posa de nouveau sa main sur le front de la petite, elle était brûlante, en même temps c’était normal vu l’enflure et l’inflammation dans sa cheville. Elle devait avoir tellement mal, et August se sentait tellement coupable. Ils ne faisaient que jouer ensemble, comme ils en avaient l’habitude, dans la cour de la petite école. Sauf qu’autant les jeux pouvaient être trop petits pour August, autant pouvaient-ils être trop grands, trop hauts, pour Iris. Elle était tombée en bas d’une glissade et tout de suite, sa cheville avait pris des couleurs qu’August n’aimait pas du tout. Il n’avait donc pas hésité une seconde à la prendre dans ses bras et à la conduire jusqu’aux urgences de l’hôpital, ne voulant pas prendre de chance. Ce n’était peut-être qu’une entorse, mais si c’était pire, au moins il aurait pris toutes les précautions nécessaires, en parrain respectable. Bref, après un moment, il tourna sa tête vers l’entrée principale et vit Sunny se diriger vers eux. Il se leva d’un bond, ne lâchant pas la main d’Iris qui était toute petite sur sa chaise roulante. « Sunny, je suis désolé, c’était un accident, c’est arrivé tellement vite. » Il s’en voulait tellement, et il espérait que Sunny comprendrait.

Tu ne sais pas pourquoi tu avais mis ton téléphone en mode avion, mais le fait était que tu l'avais fait. Pour te couper du monde, pour profiter d'Adrian et agir comme une adolescente qui vivait son premier grand amour. C'était idiot, mais quand tu fus dans ta voiture, prête à rentrer chez toi et que tu remis ton téléphone de manière fonctionnelle, tu fus inondés de messages te priant de venir immédiatement à l'hôpital, parce qu'Iris s'était blessée. Les messages d'August se faisaient de plus en plus pressant et en observant l'heure, tout ça était arrivé il y avait une bonne heure déjà. Tu jetais ton téléphone sur le siège d'à côté, attachant ta ceinture rapidement, et tu poussais le champignon. « August, Iris ! » Tu te précipitais vers eux et avant même que tu puisses te pencher vers ton enfant, August rentrais dans un discours d'excuses. Le pauvre, il devait se sentir mal, après tout c'était lui qui était responsable de la petite, mais tu n'étais pas en colère, tu n'avais aucune raison de l'être. « Ne t'inquiètes pas, ça arrive, tu as bien agi ! » Tu levais le regard vers le sien, avant de lui sourire. Puis tu te concentrais sur Iris, qui semblait heureuse de te voir même si la douleur lui arrachait quelques larmes. Tu passais ta main sur sa joue et un médecin arriva pour la prendre afin de commencer les examens. Tu laissais ton regard glisser dans le sien, attrapant sa petite main. « Ça va aller, princesse, t'es la plus forte et la plus courageuse. » Tu déposais un baiser sur le front de ta fille, et regardait le médecin s'éloigner avec elle pour faire quelques radios. Vous n'aviez plus qu'à attendre le verdict. Mais avant de t'asseoir, tu te tournais vers ton ami, qui semblait encore secoué par tout ça. « Tu vas bien ? » Tu posais ta main sur son bras pour le rassurer, il n'avait pas à se blâmer, ça arrivait parfois et ce n'était pas la fin du monde. Il avait agit comme une personne responsable après tout.

Dès son arrivée, et tout de suite après qu’August se soit confondu en excuses, Sunny prit le temps de le rassurer et de lui dire qu’il avait bien agi. Il hocha la tête. Habituellement, le professeur d’histoire gardait bien plus facilement son sang-froid et demeurait davantage rationnel, surtout qu’il passait une bonne partie de son temps avec des gamins téméraires dont il avait momentanément la charge, mais quand il s’agissait d’Iris, August se perdait lui-même. Iris était son petit rayon de soleil, il se comptait tellement chanceux d’être son parrain. Il aurait tout fait pour sa filleule, ce qui expliquait qu’il avait l’impression d’avoir échoué à sa tâche en n’ayant pas été là pour la rattraper. Sunny avait beau dire que ça arrivait, et les statistiques avaient beau le prouver aussi, August ne se pardonnait pas que ce soit arrivé à lui, à eux. Il espérait qu’Iris ne lui en voudrait pas, qu’elle n’associerait pas cette mauvaise expérience à son parrain. Il espérait aussi que Sunny ne perdrait pas confiance en lui. Bref, August se tenait tout droit pendant que son amie se penchait vers sa fille, s’occupant d’elle alors que le médecin arrivait au bout du couloir. Heureusement que Sunny était arrivée maintenant, sinon, elle n’aurait pu voir sa fille avant que celle-ci ne soit emmenée dans les salles d’examens. August avait à peine eut le temps de sourire à sa filleule et de lui envoyer la main qu’elle disparaissait déjà derrière une porte. Sunny se tourna alors vers lui, et lui demanda s’il allait bien, posant sa main sur son bras croisé contre sa poitrine. Il hocha la tête. « Je suis content que tu sois arrivée. » Il regarda de nouveau la porte maintenant fermée, puis son amie. « Tu sais, je pense que si tu le demandes, tu pourrais l’accompagner pendant qu’ils s’occupent d’elle. J’attendrai ici. » August ne pouvait s’empêcher de penser à Iris qui devait franchement avoir bien peur avec tous ces gens qu’elle ne connaissait pas et ces grosses machines bruyantes.

Tu l'écoutais te dire que si tu voulais, tu pouvais la rejoindre, pas que tu ne le voulais pas, mais tu n'aurais pas le droit. Même en temps qu'employé ici, tu n'avais pas l'autorisation, parce que tu étais la mère de la patiente et non une collègue. Le protocole était le même pour tout le monde, et tu n'allais pas faire changer les règles. « Non, je vais être bloquée juste après, je ne pourrais pas rentrer avec elle, mais ne t'inquiètes pas, elle connait bien l'hôpital, et puis c'est pas son premier bobo ! » Ce ne serait pas non plus le dernier. Tu avais pris l'habitude, parfois de l'emmener avec toi à l'hôpital et tu la laissais à la garderie le temps qu'il fallait. Souvent, tu évitais parce que ce n'était pas le meilleur environnement pour un enfant, mais elle aimait beaucoup venir au travail avec toi. Elle voulait mettre une blouse blanche et un masque sur la tête. Elle voulait devenir docteur et elle te faisait rire à chaque fois avec son petit kit de médecin, qu'elle avait reçu pour son noël. Tu posais un regard sur ton ami. « Tu es encore un peu pâle, viens, on va prendre un café ! » ajoutais-tu doucement. Il ne devait pas paniquer à ce point, ce n'était pas non plus la fin du monde. Il devait s'en remettre, et plus vite serait le mieux. Il avait une tête à faire peur, tu avais envie de lui pincer les joues, de faire des grimaces, ou le pitre mais August était un peu trop mur pour ce genre d'enfantillages. « Et calmes-toi, ce n'est vraiment rien de grave. » Tu attrapais son bras pour te diriger vers la machine à café. Iris ne devrait pas tarder à vite revenir, tu lui achèterais un jus de fruit pour lui faire plaisir. Elle était dans sa période jus de pomme. Tous les mois, elle changeait de fruit et ça te faisait toujours rire.

Il était vrai qu’August ne connaissait rien aux règlements des hôpitaux en ce qui concernait les visites et l’accompagnement des enfants. C’était la première fois qu’il s’y rendait pour un gosse, et même pour une personne autre que lui en fait. La seule fois qu’il avait réellement mis les pieds dans un hôpital, c’était par les urgences directement et on l’avait emmené en chirurgie sans plus tarder. Il n’avait eu conscience de rien, lui qui avait perdu contact avec la réalité après sa chute, tombant dans un semi-coma duquel il était sorti sans trop de mal grâce au boulot des médecins. C’était sans doute pour cette raison qu’August était aussi nerveux par rapport à Iris ; l’inconnu lui foutait la trouille. Il aurait préféré que ce soit lui qui s’éclate un os plutôt qu’elle. Même si elle faisait ça comme une grande, comme une championne, sans doute mieux que lui ne l’aurait fait. Bref, August hocha la tête quand Sunny lui apprit qu’elle n’avait pas l’autorisation et que, de toute façon, ce n’était pas la première blessure de sa filleule. C’était un fait. « T’as raison. Iris est faite forte et dure, aussi. C’est pas un médecin qui va l’effrayer. » Il esquissa un sourire, tentant tant bien que mal de se convaincre. Alors que le regard d’August était encore fuyant, Sunny attrapa son bras, lui disant qu’il était un peu pâle et qu’il devait se calmer, et les dirigea vers la machine à café. « Je sais. Je sais. Ça n’aide pas que je sois dans cet état. Je suis désolé. » Il passa son bras autour de son amie et l’attira vers lui, pour poser son menton sur le dessus de la tête de la brune. « Merci, Sunny. T’as toujours su comment me gérer. » Il se détacha d’elle, lui sourit, et se tourna vers la machine à café pour s’en verser un, puis un autre pour Sunny. Il mit bien du sucre et du lait pour cacher le goût initialement bien horrible du café d’hôpital. Il se tourna vers son amie après avoir pris une première gorgée, et ils recommencèrent à marcher vers la salle d'attente, pour ne pas rater le retour d'Isis. « T’as de bonnes assurances, pour payer les traitements nécessaires ? » Demanda-t-il, prêt à payer de sa propre poche pour aider Sunny. Après tout, malgré les paroles rassurantes de son amie, il était quand même responsable.

Il était encore blanc comme un linge. Il reprendrait ses couleurs au fur et à mesure, maintenant que tu étais là, il n'avait plus à paniquer. Iris était aussi en sécurité, tout irait bien. Tu passait ta carte à la machine pour payer le café. Tu l'entraînais à nouveau pour vous asseoir autour d'une table à la cafétéria, vu sa tête, valait mieux être assis, sinon il allait finir par faire une syncope lui aussi. « Ne t'excuses pas August, c'est tout à fait normal de paniquer. » C'était la réaction que tout adulte aurait eu. Tu ne paniquais pas parce qu'elle avait été entre de bonnes mains. Et aussi parce que tu connaissais Iris, elle pleurait sur le coup parce que ça faisait mal, mais après elle jouait à la plus forte. Elle voulait toujours faire comme si elle n'avait pas mal, comme si tout ça n'était qu'un petit contretemps. Elle te faisait rien à chaque fois qu'elle haussait les épaules, l'air de dire que tout allait bien. « C'est bien pour ça que je suis ton amie. Et c'est aussi pour ça que tu es le parrain d'Iris, tu as toujours eu la tête sur les épaules ! » Il était aussi ton ami le plus proche. Le seul que tu connaissais depuis bientôt 10 ans. Il avait toujours été là pour Tom et toi, vous donnant un coup de main pour chacun de vos déménagements, toujours partant pour prendre un verre, et puis quand tu étais tombée enceinte, il était là pour prendre le relais de Tom si jamais ce dernier devait travailler tard. Il avait veillé sur toi comme si tu étais de sa famille, il était normal que tu le choisisses pour Iris. Et il lui racontait toujours un tas d'histoires, sa connaissance n'avait pas de limite et la petite était toujours impressionée. « Oui, en travaillant à l'hôpital j'ai des bonnes garanties, ne t'en fais pas pour ça. » Tout de même, ce n'était parce qu'elle était avec lui au moment de sa blessure, qu'il devait prendre en charge tous les frais. De toute façon, il n'avait rien à craindre, comme tu travaillais à l'hôpital, tu avais une réduction payant vraiment que le travail effectué. Tu étais exonéré des charges, si on pouvait dire, ce qui n'allait pas changer grand chose sur la facture, mais tu n'étais pas non plus pauvre.

August avait besoin de plus de soutien qu’Iris, dans toute cette histoire. Elle avait à peine pleuré, ne s’était pas plaint de la douleur, et voilà que dès qu’elle se retrouvait sous les soins des docteurs, le trentenaire commençait à paniquer au point où Sunny avait besoin de le réconforter. En même temps, c’était la première fois qu’il vivait une pareille situation. Habituellement, tout se passait très bien avec Iris, et il la ramenait avec tous ses morceaux à sa mère. August se confondit de nouveau en excuses, cette fois parce qu’il prenait justement conscience de son état alarmiste inutile. Il remercia finalement Sunny pour son calme et sa gentillesse à son égard. Elle s’était toujours montrée compréhensive, douce et à l’écoute. Effectivement, ce n’était pas pour rien qu’elle était son amie, et vice-versa. « Pas en ce moment en tout cas. » Plaisanta August à propos d’avoir la tête sur les épaules, en éclatant finalement de rire, ce qui relâcha toute la tension en lui. Ça faisait du bien de rire, ça le détendait, et tout de suite ses traits s’étaient adoucis, et ses muscles étaient beaucoup moins crispés. Le jeune homme porta son café à ses lèvres en reprenant la route vers la salle d’attente, avant de demander à Sunny, avec hésitation, si elle avait de bonnes assurances pour les frais médicaux. « Ok. Si y’a quoi que ce soit, tu me diras. » Il se doutait bien que même si Sunny avait à débourser pas mal de sa poche, elle ne lui en dirait rien, parce qu’il aurait lui-même agit de la sorte et qu’ils se ressemblaient sur ce point-là. Tant pis, au moins, il aurait proposé. « J’espère que je n’ai pas trop dérangé tes plans de ta journée de congé. » Après tout, si elle avait été aussi difficile à rejoindre, c’était sans doute parce qu’elle avait eu un horaire chargé ou alors qu’elle était en compagnie de quelqu’un d’autre. Il espérait ne pas avoir dérangé un rendez-vous ; Sunny avait bien besoin de recommencer à sortir avec des hommes. Il s’en voudrait de l’avoir ramenée les deux pieds sur terre en lui parlant de l’urgence de sa fille.

« Mais tu as su garder la tête froide et tu as eu les bons réflexes ! » Tu avais l'impression que tu parlais dans le vide, qu'il ne cherchait pas à t'écouter vraiment, comme s'il essayait de se punir pour ne pas avoir été assez vigilent. Mais ce n'était pas lui, c'était Iris qui était bien trop ambitieuse, bien trop furtive et surtout assez imprudente. C'était une enfant, rien de plus normal, d'autant plus que pour une première, il avait su faire face à la situation. Toi-même tu avais complètement perdu ton sang froid contre Tom la première fois qu'Iris était venue aux urgences. Depuis tu avais appris à relativiser les choses. « C'est promis ! » Tu verrais ça en temps et en heure, actuellement tu te moquais pas mal de la paperasse. Tout ce que tu voulais c'était que ton ami reprenait son calme que tu lui connaissais et qu'Iris sorte de là pour que vous alliez partager une glace et oublier tout ça. Peut-être même qu'elle aurait un joli plâtre et que son parrain pourrait être le premier à poser sa signature dessus, elle en serait la première ravie, ça tu pouvais en être certaine. « Pour tout te dire j'étais en compagnie d'un homme charmant.. » Tu avais esquissé un sourire, c'était bien pour ça que tu avais mis pas mal de temps à te rendre compte qu'il avait essayé de t'appeler une bonne dizaine de fois. Tu t'étais sentie coupable sur le moment d'avoir osé penser à toi, à avoir voulu te couper du monde. Mais tu étais une maman à présent et ce depuis 4 ans. Tu ne pouvais pas te permettre d'être absente, de te couper de tes responsabilités même pour passer une après-midi avec un homme. Et quel homme, rien qu'en pensant à Adrian, tu avais un large sourire sur les lèvres, te faisant oublier que Tom avait pu exister à un moment. « Mais Iris passera toujours avant tout le reste. » ajoutais-tu doucement comme si tu essayais de le convaincre. Avais-tu vraiment besoin de le convaincre lui ou toi ? Au fond c'était égoïste d'avoir voulu vivre ta vie le temps d'un moment comme si tu étais une jeune femme et juste une jeune femme. Par chance Iris allait bien, elle était forte, courageuse et elle t'aimerait toujours même si tu avais mis beaucoup de temps à venir. Après tout, tu étais sa mère et rien ne pourrait changer ça, en tout cas pas avant qu'elle ait 15 ans. Là les choses deviendront peut-être plus difficile à gérer, mais tu avais encore le temps de voir ça venir. Même si dans quelques mois elle aurait déjà l'âge de 5 ans. Ca passait à une vitesse folle et il faudrait que tu lui organises une petite fête d'anniversaire avec ses amies mais aussi avec ton entourage, comme August, Adi ou encore Axten. Et pourquoi pas Adrian, ce serait peut-être le bon moment de l'introduire un peu plus dans ta vie si l'idée lui allait.

Une fois le stress, l’anxiété et les excuses passées, August reprit finalement le calme qu’on lui connaissait et essaya de changer de sujet. Après tout, l’attente serait peut-être longue, même si Iris avait été prise en charge cela ne voulait pas dire qu’elle ressortirait tout de suite de la salle d’évaluation. Le jeune homme demanda donc à Sunny s’il avait chamboulé ses plans de la journée avec cette petite urgence, et la brunette lui apprit qu’elle était en compagnie d’un homme. August haussa les sourcils, tout de même surpris de savoir que son amie avait repris les rendez-vous galants, si c’était ce dont il s’agissait. « Ah bon ? » Elle hocha la tête, mais ajouta qu’Iris passerait toujours avant le reste, sans doute pour rassurer August quant au fait qu’il avait mis fin à cette rencontre avec le mystérieux homme. Le professeur d’histoire lui sourit, avant de tout de suite retourner au sujet le plus intéressant pour passer le temps : l’homme en question. August souhaitait tellement à Sunny de rencontrer quelqu’un qui saurait l’aimer à sa juste valeur. « Je le connais, cet homme charmant ? Raconte-moi ! » Il sourit, ravi de voir ces lumières danser dans les yeux de Sunny. Il faudrait qu’à son tour il lui parla de Willow. Leur relation avait évolué si vite qu’August n’avait pas eu le temps d’en parler à tou ses amis les plus proches. Tous les deux s’étaient vus, depuis quelques années, attendre après l’amour sans trop savoir où le chercher. Peut-être était-ce finalement à leur tour de trouver le bonheur dans les bras d’un autre ?

Tu avais eu le sentiment que son ton avait changé, comme si ça le surprenait autant que ça que tu avances dans ta vie. Pourtant, il était autant ton ami que celui de Tom. Il avait là pour te soutenir quand tu avais pris la décision de t'en aller, sans jamais prendre parti. Et là, tu avais le sentiment qu'il n'approuvait pas ton choix, ni même cette idée. « Je ne vais pas attendre éternellement. Les années ne me rajeunissent pas et j'ai tiré un trait sur Tom.. » Tu haussais doucement les épaules en arrière. Tom avait fait son choix en te trompant. Avec les années, votre couple s'était un peu, tu l'aimais toujours puisque c'était Tom, le père d'Iris. Mais ce n'était pas suffisant, tu avais eu besoin de plus. Ce que Tom ne pouvait plus te donner puisque tu n'avais plus aucune confiance en lui. « Je ne sais pas, peut-être. » Tu n'avais même pas songé un instant que les deux pouvaient se connaître. Après tout il avait le même âge, Adrian faisait un doctorat et August lui, enseignait l'histoire à l'université. Peut-être qu'il avait déjà donné une conférence à Mackay. « Il s'appelle Adrian, il a ton âge et il travaille sur son doctorat, mais ne me demande pas son sujet, on a pas vraiment discuter. » ajoutais-tu en rigolant. C'était un sujet qui était rapidement passé sur le tapis. Tu le lui avais demandé et une flopée de mots étaient sortis de sa bouche, que tu n'avais pas su en retenir un seul. Tu te sentais un peu idiote de ne pas être capable de le dire mais ce n'était pas non plus un drame. « Pour le moment, ça colle bien entre nous, mais je n'ai pas envie de m'engager dans un truc très sérieux tu sais, surtout qu'il n'a pas encore rencontré Iris. J'ai pas envie de l'embarquer dans tout ça. Si ça venait à ne pas marcher, j'voudrais pas qu'elle s'attache à un autre tu vois.. » Tu t'enfonçais sur ta chaise, te mordant les lèvres. C'était peut-être une excuse pour ne pas précipiter les choses. Peut-être que tu ne voulais pas plus que des petits rendez-vous comme deux adolescents. Peut-être que tu avais peur de t'engager parce que tu ne voulais pas subir la même chose qu'avec Tom. C'était la première fois que tu étais célibataire depuis presque 12 ans, tu voulais bien profiter de ta vie aussi.

Comme si elle avait le sentiment d’être jugée ou de ne pas être respectée dans ses choix, Sunny tenta tout de suite de se justifier. August se sentit alors coupable d’avoir réagi avec autant de surprise, mais en même temps, ce n’était que ça : de la surprise. Il ne se cachait rien d’autre derrière. Le jeune homme était même plutôt ravi que la brunette prenne un nouveau départ, avec un autre homme. Il attendait depuis tellement longtemps qu’elle soit prête à faire confiance de nouveau, en amour ! Bon, peut-être était-ce encore trop tôt pour parler avec ces grands mots, mais quand même, le simple fait que Sunny lui en parle en disait long. « Je suis d’accord avec toi sur tous les points, sauf un ! Plus les années passent, plus je te trouve éclatante, Sunny. J’ai pas de mal à croire que cet homme ait pu tomber sous ton charme. » Il sourit et posa sa main sur celle de son amie. « Je suis vraiment content pour toi. » August posa alors de nouvelles questions concernant cet homme-mystère avec qui elle avait eu rendez-vous un peu plus tôt. Il demanda alors s’il le connaissait, réponse que Sunny ignorait. En même temps, elle le lui aurait sans doute dit plutôt, si ça avait été le contraire. Il se tut donc afin d’écouter la suite de l’histoire. À l’écouter parler, August se confirma à lui-même qu’il ne connaissait pas cet homme, même s’ils avaient le même âge. « Le mec fait un doctorat et il a pas eu le temps de te dire sur quoi ? T’as encore fait ton moulin à paroles ? » La taquina August avec un rire. C’est vrai que la conversation coulait toujours très bien avec Sunny, mais il était faux de dire qu’elle en gardait le monopole. Elle avait sans doute fait très bonne impression auprès d’Adrian. Sans doute avaient-ils eu même trop de sujets à discuter. « Mais il est au courant ? Pour Iris, je veux dire ? » Demanda August quand la brunette mentionna qu’elle ne souhaitait rien de sérieux, surtout tant qu’il ne connaîtrait pas Iris. Si cet Adrian était au courant de l’existence de la petite et qu’il manifestait son intérêt à la rencontrer, c’était déjà bon signe. S’il reculait déjà à la savoir maman, alors ce n’était pas de bon augure. C’était un plutôt bon test, lorsqu’on était parent. Enfin, August n’en savait encore rien, mais il pouvait facilement se l’imaginer. « Tu sais, moi aussi j’ai quelqu’un dans ma vie … Et j’crois bien que c’est même plutôt sérieux. » Avançais-je, un petit sourire bien contenu au coin des lèvres.

Tu ne t'étais pas attendu à sa surprise. A vrai dire, depuis le départ de Tom, vous n'aviez pas vraiment pris le temps pour en parler. Il savait les grandes lignes, Tom avait été infidèle, tu décidais de mettre un point à ton couple. Peut-être que c'était sévère mais tu ne ressentais plus l'amour des premiers jours, tu n'arrivais pas non plus à lui pardonner. Et de toute façon ce n'était pas les histoires d'August, il était là pour Iris et c'était le plus important pour toi. Ça te faisait presque bizarre de lui parler d'Adrian. « Merci August, ça me touche vraiment. » Tu étais rouge comme les pivoines, tu ne pensais pas qu'un jour il te ferait un compliment sur ta beauté. Toi tu avais l'impression de t'enlaidir, de prendre des rides et des cernes, de te laisser aller. Même si ce n'était pas vrai et que tu avais une vision assez déformée de toi. « Hé ! Bon je te l'accorde. » En y repensant c'était surtout Adrian qui faisait pas mal de mystères au-dessus de ça. Tu avais posé la question mais tu ne te souvenais pas avoir eu de réponse concrète, puis il y avait eu d'autres questions, des baisers et tu avais laissé couler, pensant qu'il ne voulait pas t'ennuyer avec des détails. « Oui il sait, je lui ai dit dès le départ, je ne voulais pas lui cacher quelque chose. Je ne pensais pas le revoir plus d'une fois pour être tout à fait honnête, mais je sais pas, y a comme une alchimie entre nous. Même si je ne m'avancerais pas trop sur ça. » Tu ne dirais pas que tu étais amoureuse ou même que tu étais en couple non. Tu le fréquentais, tu prenais le temps de voir où les choses vous menaient mais tu ne te permettais pas de rêver comme tu avais pu le faire avec Tom. Tu tenais à garder les pieds sur terre cette fois-ci. Tu haussais les épaules, mettant tout ça de côté à l'annonce d'August, qui paraissait encore plus croustillante que la tienne. « Oh, le grand August est amoureux ! » disais-tu en dessinant un coeur à l'aide de tes mains. Un enfant, la pauvre, il n'avait pas trouvé la bonne personne pour parler de ça. Mais depuis que tu connaissais August, tu ne l'avais jamais vu aux bras d'une femme, vous n'aviez même jamais abordé ce sujet alors qu'il se confie à toi aujourd'hui, c'était touchant. « Elle s'appelle comment ? Et surtout, tu me la présentes quand ? » Tu avais un grand sourire sur le visage, laissant ton imagination imaginer un tas de choses le temps qu'il t'en dise plus.

Sunny demeurait très évasive quant à Adrian, à tel point qu’August s’imagina qu’elle ne voulait tout simplement pas lui en parler davantage. Comme si elle vivait dans sa petite bulle, qu’elle ne voulait pas trop ébruiter sa relation de peur qu’elle s’effrite. En même temps, si elle désirait vivre son idylle loin des regards curieux et des ragots, pourquoi pas. August ne voyait rien de mal à vivre dans le secret pour un moment, avant que ça ne devienne plus sérieux. Aussi bien profiter de cette phase enflammée qu’étaient les premiers mois d’une relation. August aurait bien d’autres opportunités d’en apprendre davantage sur cet homme s’il demeurait dans la vie de Sunny un peu plus longtemps. Puis, si ce n’était pas le cas, alors cela signifiait que ce n’était pas le bon pour elle, tout simplement. Sunny était une femme extraordinaire, nul doute qu’elle trouverait éventuellement chaussure à son pied. La brunette répondit à sa question en affirmant qu’Adrian était au courant de l’existence d’Iris ce qui était, selon lui, un très bon départ. De bonnes bases axées sur la vérité, la sincérité. Ça ne servait à rien de cacher des détails – pas qu’Iris ait été un détail, hein ! – qui sortiraient au grand jour tôt ou tard. Valait mieux mettre toutes nos cartes sur table dès le début. C’est ce qu’August et Willow avaient fait, lors de cette première soirée à révéler tout de l’un et de l’autre. En même temps, ils ne semblaient pas avoir énormément de secrets, tous les deux. Ça avait donné un sacré bon coup de pouce. « Y’a pas de presse, de toute façon, mais si vous vous êtes revus en toute connaissance de cause, et que le courant passait toujours autant, je pense que c’est plutôt bon signe. S’il ne voulait pas avoir à faire à Iris, il ne serait pas revenu vers toi. » Pour le coup, August respectait déjà cet Adrian. Il devait être difficile au départ de fréquenter une femme qui avait déjà un enfant d’un autre homme, mais visiblement il avait passé par-dessus. Pour Sunny. Ce fut finalement au tour du parrain d’Iris de parler de ses histoires de cœur, ou plutôt de la seule histoire qui l’animait ces derniers temps. Il rigola en voyant la réaction enfantine de Sunny. Il aurait dû se douter qu’elle le narguerait de la sorte. « Woh, woh, pas si vite. J’sais pas encore si on peut parler de l’amour, avec le grand A, mais certainement, cette fille me revire à l’envers. » Dès le premier regard, August avait su que ce serait différent, avec elle. Ils avaient une telle connexion. Pas pour rien qu’ils avaient parlé pendant des heures et des heures sans pourtant voir les minutes passer. « Elle s’appelle Willow … c’est … ma nouvelle colocataire. » Avoua-t-il avec une certaine gêne, bien conscient que le fait de vivre tous les deux avant même de mettre un mot sur leur relation n’était sans doute pas la meilleure façon de commencer une histoire d’amour. Mais tant pis, c’était le hasard qui avait fait les choses. « Alors te connaissant, je pense que tu vas débarquer à l’improviste dans les prochains jours en espérant tomber sur elle, non ? » Demanda-t-il avec un sourire à la limite de l’exaspération, sentant bien qu’il avait vu juste.

La sincérité, c’était une chose primordiale pour toi. Après les mensonges de Tom, tu ne voulais pas revivre le même cauchemar alors autant dire que tu avais été franche avec lui dès le départ. Tu avais parlé de Tom, du divorce à venir et aussi d’Iris. Parce que tu ne voulais pas lui cacher la moindre chose, tout avait son importance, mais pas au point de lui dévoiler tout de ton enfance, de ta relation chaotique avec tes parents, ça, ça viendrait plus tard, si jamais il y en avait un. « Après il peut revenir sans vouloir quelque chose de sérieux pour autant. » Après tout, tu ne pouvais pas être certaine de ce qu’il attendait de toi, après tout ce n’était pas une conversation qui était venue sur le tapis. Peut-être que la prochaine fois il serait temps de savoir où vous allez, ce que vous voulez et surtout comment y arriver. Tu ne voulais pas quelque chose de sérieux, tu ne voulais pas te jeter dans une relation comme ça, tête baissée en sachant que tu sortais à peine d’une relation de plus de treize ans. En soit, la seule expérience amoureuse que tu ais vraiment eu. Autant dire que c’était triste si tu te jetais à nouveau dans une relation aussi longue. « Wow ! » C’était une annonce de taille. Tu ne pensais pas que ça puisse arriver ainsi, mais parfois la vie était simplement surprenante. Sa colocataire donc. Tu riais parce que tu trouvais la situation cocasse, mais tu étais vraiment contente pour lui, même si lui ne manquait pas de calmer tes ardeurs amoureuses. « Au moins pour l’étape d’emménager ensemble, vous êtes déjà bons. » ajoutais-tu en rigolant doucement. C’était une étape importante pour un couple. Tu te souviens quand tu avais sauté le pas avec Tom, en venant vivre à Bowen. C’était la première fois que tu vivais avec un homme et même si ça faisait déjà trois ans que vous étiez en couple, ce n’était pas rien. S’ils pouvaient se supporter en tant que coloc, en couple ça devrait rouler à merveille. « Non, je te promets d’attendre ton invitation, je ne voudrais pas lui faire peur ! » Te connaissant tu serais capable de parler d’August, de cette conversation et de dire des choses complètements  délirantes. Le meilleur moyen pour toi de faire des gaffes et de t’avancer sur des sujets délicats. Alors non, tu attendrais une invitation officielle de la part de ton ami. Au moins tu étais certaine qu’il serait présent lors de la soirée et tu éviterais de commettre des bourdes. Peut-être que toi tu pourrais y inviter Adrian, une occasion pour le lui présenter. Ou alors tu prendrais Iris, pour qu’elle puisse profiter un peu plus de son parrain. Tu avais encore du temps devant toi, puisque tu te doutais bien que ça ne serait pas pour demain.

Sunny avait sans doute raison, peut-être que cet homme pourrait revenir dans sa vie tout en restant à l’écart de ce qui constituait réellement cette vie. Ce serait salaud, mais l’être humain pouvait parfois se montrer sous ces mauvais jours. August avait beau aimer connaître le passé et l’histoire de chacun pour en comprendre l’état actuel, il ne se voilait pas la face en pensant que tout le monde était parfait, que tout le monde avait une raison valable d’être come il était. Toutefois, il avait toujours le préjugé positif envers les gens, voulant donner sa chance aux premières impressions. C’est pourquoi il s’efforçait de croire que si ce Adrian restait auprès de Sunny, c’était pour les bonnes raisons. « C’est possible, j’dirai pas le contraire. Tu n’as qu’à lui demander … ce qu’il recherche vraiment. » Après tout, ne rien vouloir de sérieux n’était pas un crime. Mais mentir à ce propos, là, c’était moins bien vu. Si Adrian avait au moins le courage de lui dire la vérité, Sunny en aurait le cœur net. Il espérait juste que l’homme ne s’amuserait pas à jouer avec les sentiments de la brune. Elle méritait le respect, ce petit bout de femme. Ce fut finalement au tour d’August de parler de sa relation, qui était déjà bien plus stable que les esquisses de celles de Sunny. Willow et lui étaient pratiquement un couple, malgré le peu de temps qu’ils se connaissaient. August n’aimait pas trop le terme générique du coup de foudre, mais au fond, c’était à peu près ça qu’il avait vécu avec sa colocataire. « Ouais ! Pas le stress du moment où je lui offrirais une clé, elle les a déjà. » Renchérit-il avec un rire. C’était beaucoup, d’un coup, de devoir partager toute son intimité avec l’autre personne, dès les premiers jours d’une relation. Certes, ils respectaient les limites de l’un et de l’autre, mais il était parfois difficile de savoir reconnaître la ligne à ne pas franchir. Après tout, il ne connaissait pas Willow au point de savoir la lire comme dans un livre ouvert. Il n’arrivait pas à déchiffrer tous ses gestes, ses paroles et ses non-dits. August la taquina quant aux probabilités qu’elle débarque sans prévenir chez lui, juste pour rencontrer sa nouvelle flamme. Il sourit à sa réponse. « J’te taquine. Tu viens quand tu veux, Sunny, tu le sais bien. Ça me ferait plaisir de te la présenter. » Il lui sourit. Finalement, un médecin revint et demanda à parler aux parents de la petite. August se tourna vers son amie. « Je vais t’attendre ici. » Même s’il se doutait bien que Sunny n’en avait rien à faire, devant lui, des questions de confidentialité, August avait le respect de ne pas le prendre pour acquis.