such a holy fool (june)

june & sloan

Une cigarette à la commissure des lèvres, un tas de feuilles en vrac remplies d'écritures à peine lisibles à ses pieds, un stylo noir en main, Sloan croulait littéralement sous le poids du travail qu'il avait accumulé ces derniers temps. Il était sorti tous les soirs cette semaine, faisant la fête jusque l'aube, complètement alcoolisé et détaché de toute bonne raison. Ça ne lui ressemblait pas. Lui qui était pourtant si consciencieux et si appliqué dans son travail, avait pris un retard considérable dans les articles qu'il devait écrire pour la semaine qui suivait. Et autant dire qu'il n'y avait rien d'autre qui pouvait autant le stresser que de se savoir en retard dans son job. Putain Sloan, t'as merdé là, bouge toi ! Pensait-il, alors que l'inspiration ne semblait vraiment pas être de son côté aujourd'hui. Il avait l'impression de suffoquer dans son appartement, et rester là à espérer inutilement que le génie qui sommeillait en nuit arrive enfin n'était pas vraiment la meilleure solution pour faire avancer son article en cours. Il avait besoin de respirer. Juste prendre l'air, un instant. Faire évacuer la pression qui pesait sur ses épaules. Se vider l'esprit pour réussir à écrire des articles pertinents. Bâcler ses écrits, c'était bien quelque chose que Sloan détestait ; il ne supportait pas le travail mal fait, pour lui c'était inadmissible. Une pochette de feuilles sous le bras, un stylo dans la poche, le jeune Phillip prit alors la décision de se rendre au Mullers Lagoon, un endroit qu'il appréciait particulièrement dans Bowen, surtout en des jours ensoleillés comme celui-ci. Après quelques minutes de marche dans la petite ville australienne, Sloan arriva à destination, et s'installa au creux d'un arbre, ayant une vue particulièrement paradisiaque sur le lac. Ici, le calme régnait en maître. La petite brise fraîche qui venait caresser la peau du bel australien lui faisait un bien fou ; il prit évidemment le temps de prendre quelques bouffées d'air frais, emplissant ses poumons de cet oxygène qui lui paraissait si pur et sain. Profitant le l'instant paisible et calme, Sloan sortit les quelques feuilles se trouvant dans sa pochette, et commença à gribouiller quelques idées pour son article. Un sujet pas très emballant ni passionnant puisqu'il s'agissait d'écrire sur l'ouverture d'une nouvelle boutique dans le centre ville de Bowen, histoire de faire la promotion du nouveau commerce et d'attirer les clients, par le biais de cet article. Même s'il n'était pas vraiment pris de passion pour le sujet, le jeune homme refusait de faire la différence en terme de motivation et de qualité sur les articles dont il était responsable. Pour lui, il se devait de faire son travail, en temps et en heure, et quitte à le faire, il voulait que l'on prenne du plaisir à lire ses écrits.

such a holy fool + sloan & june

Le parc est loin d'être l'endroit que tu préfères. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il est souvent fréquenté par des gens que tu n'as pas envie de voir que ça soit des anciens amis, des gens qui se prétendent être tes amis ou encore tes anciennes conquêtes. Bref, tout ça à la fois. Donc cela ne t'enchante pas te rendre là-bas mais aujourd'hui tu n'as pas le choix. Ton photographe t'as proposé de faire des photos pas loin du lac. Tu appelles donc ta maquilleuse et l'emmène avec toi au lac. Après quelques heures de préparation et de shooting photos, tout le monde rentre chez soi. Tous, sauf toi. Tu préfères respirer encore un peu l'air frais, profitant des derniers rayons de soleil. Tu t'approches d'un arbre, désirant t'y poser. Mais lorsque tu arrives presque près du tronc, tu remarques une silhouette d'homme. Tu soupires en imaginant devoir changer d'endroit mais ce visage ne t'es pas inconnu. Tu as déjà vu ce beau brun mais tu ne sais plus exactement où. Puis lorsqu'il lève les yeux vers toi, tu te souviens. C'est un journaliste qui a écrit un article sur toi il y a quelques années, à Paris. Sloan si tu te souviens bien. Un journaliste de la pire espèce. Ceux qui écrivent sans vérifier leur source, ceux qui écrivent pour écrire. Ceux qui écrivent des torchons et qui brisent ta vie sans même s'en rendre compte. Tu hais les journalistes depuis ce jour-là. Tu le regardes, un peu méprisante et lui lances en pleine figure une réplique dont tu as le secret. Comme le cloporte, le journaliste se cache dans les coins et recoins. Surtout là où on ne l'attend pas. Tu passes une main dans tes cheveux et jette un regard dans sa direction, intriguée par sa réaction. A Paris, il a été à l'origine de ta dégringolade. C'est en partie de sa faute si tu es revenue en Australie alors oui, tu lui en veux car il a gâché ta vie. Lui comme beaucoup d'autres.

Assis au creux de cet arbre, au sein de cette verdure respirant le calme, Sloan avait l'impression d'être sur une île déserte, seul au monde, tel son grand héros d'aventure. Bien évidemment et fort heureusement, il n'était pas seul, quelques riverains déambulaient tranquillement sur l'herbe fraîche, profitant eux aussi de ce silence aux vertus apaisantes. Le jeune homme se trouvait enfin dans des conditions idéales pour travailler, pouvant même espérer rattraper le retard accumulé cette semaine. Un stylo en main, des idées plein la tête, il s'apprêta enfin à se mettre au boulot, mais comme le destin en avait décidé autrement, il fut vite arrêté dans son inspiration grandissante puisqu'une voix eut l'effet de dévier son attention. "Comme le cloporte, le journaliste se cache dans les coins et recoins. Surtout là où on ne l'attend pas." Presque charmé par cette réplique à l'originalité débordante, Sloan leva les yeux vers cette voix qui lui semblait presque inconnue mais qui avait tout l'air de dévoiler un certain mépris envers lui. Il eut la surprise de découvrir une de ses "victimes" d'articles. C'était comme ça qu'il avait l'habitude de les appeler. En vrai professionnel, Phillip mettait un point d'honneur à conserver chacun de ses articles, et à essayer de ne pas les oublier. Évidemment, en un regard, il avait tout de suite reconnu la jeune femme qui se dressait devant lui, se remémorant même l'article qu'il avait pu lui dédier il y a des années de cela. C'était à Paris. Il avait l'impression que cela faisait une décennie. C'était cette époque où il avait été désarmé par cette fille dont il était tombé amoureux. Il se souvient maintenant que ce douloureux souvenir avait presque été coupable de ce futur déchaînement de haine sur ses articles à venir, et tout particulièrement sur celui qu'il avait écrit sur la demoiselle qui se tenait devant lui. "June Mainfield... Quelle surprise." Sloan avait cette capacité à se remémorer chaque tête sur laquelle il avait écrit, surtout sur celles sur lesquelles il avait pu balancer un tas de saloperies. "Il me semble que la dernière fois où l'on s'est vu, c'était il y a une éternité, à Paris. Je suis surpris de te retrouver ici." Finit-il par dire, encore inconscient de l'effet qu'avait produit son article sur la vie de la belle demoiselle. Sloan, c'était le genre de mec à ne pas regretter ce qu'il faisait, surtout dans le domaine professionnel. Quand il devait écrire un article, il assumait jusqu'au bout chaque mot imprimé sur le papier. Mais là, tout semblait différent, savait-il au moins qu'il avait ruiné la vie d'une personne ? Savait-il que ses mots avaient pu être à l'origine d'une vie gâchée ? Pour l'instant, il était loin d'imaginer le désastre qu'il avait déclenché avec un simple écrit, quelques années auparavant.

Tu aurais vraiment aimé te poser au creux de cette arbre toi aussi. Tu aurais fermé les yeux et profiter des derniers rayons de soleil qui se seraient glissés sur ton doux visage. Seulement le destin en a décidé autrement. Au creux de cet arbre se trouve Sloan, un journaliste que tu n'apprécies vraiment pas. Mais qui apprécie réellement les journalistes ? Peu de gens. En général, ils sont là pour foutre leur nez là où il ne faut pas et ça leur plait davantage. Seulement voilà, toi ça ne te plaît pas du tout. Les journalistes ne semblent pas se rendre compte à quel point ils peuvent détruire des vies. Alors dés que tu aperçois le jeune Phillip, tu ne gênes pas pour lui faire une remarque des plus mesquines et remplie d'amertumes. Cela ne te fait pas plaisir de le croiser, pas du tout. Son article a bousillé ta vie, pour toujours. Et il ne pourra jamais réparer ça. Mais il ne semble pas être au courant vu la façon tout à fait désinvolte avec laquelle il s'adresse à toi. June Mainfield... Quelle surprise. Tu hausses les sourcils. N'est-il pas au courant de ton retour à Bowen, ta ville natale ? Cela t'étonne, il faut l'avouer. Il me semble que la dernière fois où l'on s'est vu, c'était il y a une éternité, à Paris. Je suis surpris de te retrouver ici. Une éternité oui mais pas assez longtemps pour toi. L'éternité semble trop courte à tes yeux. Tu aurais préféré qu'elle dure jusqu'à ta mort. Car tu éprouves beaucoup de rancunes à l'égard de Sloan et tu détestes te montrer vulnérable à ce point. Que ça soit devant le jeune homme ou devant n'importe qui d'ailleurs. Mauvaise surprise. Réponds-tu du tac au tac. Ceci en est une, en tout cas pour toi. Tu aurais préféré profiter de ta solitude après quelques heures intenses de shooting. Disons qu'après ton article, j'ai pas vraiment eu le choix. Dis-tu en soupirant. Non, tu n'avais pas le choix. Ta carrière en Europe était terminée, tout comme ta vie amoureuse. Le jeune homme a détruit beaucoup de choses dans ta vie et tu espères qu'il n'en était pas conscient sinon c'est la pire pourriture que tu connaisses. Et des journalistes pourris, il y en a des masses à Bowen. Tu pourrais mettre Sloan dans le même paquet mais vu la façon dont il s'adresse à toi, tu t'en abstiens. Tu sembles étonnée, tu aimerais en savoir plus sur lui. Après tout il connaît une grande partie de ta vie, lui.