brilliant dog + leo

Habituellement, je ne traîne pas trop dans le coin sauf lorsque j’ai une bonne raison d’y être. Avec Einstein sur les talons je suis assis dans le sable à trier mes vêtements hors de mon sac. J’en ressors les sales, les propres je les mets dans le fond sans trop d’ennui. Je sors le savon à vaisselle qu’un idiot m’a donné pour que je puisse faire mon lavage sur la plage. Je m’approche de l’eau avec les vêtements sales que je lave puis que je rince au mieux que je puisse le faire. Des chaises sont installées pas trop loin de moi, je m’y rends avec Einstein sur les talons pour que je puisse étendre mes vêtements afin de les faire sécher. C’est déjà le soir et il n’y a pas grand monde... Je tords mes vêtements puis je les installe sur les chaises où je reste à proximité. Pas envie de me faire voler les deux ou trois ensembles que je possède. Mon chien s’éclipse et revient avec un bâton de bois que je tire au loin. Einstein part et revient vers moi pour mieux déposer le bâton auprès d’un homme de dos. Je m’en approche. « Désolé, mon chien a dû faire une erreur... » dis-je maladroitement en tendant les mains vers le bâton qui se trouvait maintenant dans les mains de l’inconnu. Je relevais le regard vers celui-ci. « Léo? » demandais-je pas très sûr d’avoir visé dans le mille.

Alors que mon chien se sauvait vers l’étranger, je le rejoignais rapidement alors que ce même étranger se retournait vers moi en me disant de ne pas m’excuser. « Adrian? Mais qu’est-ce que tu fais là? » J’échappais un sourire malgré moi pour lui serrer la main comme un ami en voyant qu’il me confirmait son identité. « Des projets, Léo... Des tas de projets! Et toi? C’est par ici que tu t’es éclipsé? » Je riais doucement en me remémorant toutes ces soirées mondaines où nous nous sauvions de nos parents respectifs. Il n’était pas rare de nous trouver à l’arrière avec une bière à la main. Parfois même avec des cigares... La vie de riche ne devait sans doute pas être difficile, mais elle n’était pas non plus facile. Je m’installais sur le sable pas très loin d’où nous étions avec Einstein qui me retrouvait. Je l’invitais à s’assoir près de moi et il obéissait allant même jusqu’à s’allonger sur le sable sagement. Il regardait Léo et j’en faisais de même attendant ses réponses. « Toujours derrière l’appareil et jamais devant, n’est-ce pas? » J’échappais un petit sourire en pointant son appareil, ce n’était pas bien difficile de savoir qu’il venait pour capturer les plus beaux clichés de l’heure. Je le savais, et ce, sans même les avoir vus.

Leo s’ouvrait à moi en me disant qu’il habitait maintenant à Bowen et je hochais positivement la tête avec un grand sourire. « Et tu t’y plais? » lui demandais-je en me disant que Bowen n’était pas Sydney, mais que la petite ville avait elle-même son charme. Il ne suffisait qu’à penser à la grosse Mangue pour y découvrir tout son potentiel. « Mes projets, mais voyons : tu me connais! » Je pouffais de rire en lui donnant une tape amicale sur l’épaule. « Les photos officielles sont toujours fausses... C’est pas comme si on y prenait du plaisir. » Je lui lançais un regard plein de compréhension en secouant la tête. C’était le bon temps. Cette année, la photo se prendrait sans doute sans moi. Je n’allais pas m’y autoriser pour le bien de mon étude. À sa question, mon sourire s’étirait. « Pas exactement. C’est l’un de mes fabuleux projets. » Je riais un peu mal à l’aise alors que je ne croyais pas croiser quelqu’un de mon entourage dans le coin. « Ma thèse de doctorat porte sur la psychologie des sans-abris, des SDF si tu préfères. » J’hausse les sourcils avec un sourire aux lèvres. « C’est une étude terrain et je te serais reconnaissant de ne pas divulguer l’information. » Je lui adressais un clin d’œil en riant doucement. « Le fait de vivre comme un SDF dans une ville où personne ne connait le nom Palladino et la réaction des gens surtout. D’étudier comment les gens aident, s’ils le font... » Évidemment, cette étude était à mes frais et je remettais l’argent gagné à des causes aidant les sans-abris. J’attendais sa réaction en espérant qu’elle soit positive, mais je n’en doutais pas, étrangement. « Ça et je suis venu retrouver une amie qui semble avoir besoin d’aide. » lui confiais-je en tirant un bâton à mon chien qui partait à la course pour me le rapporter.

Léo me rappelait qu’il était de Bowen et je me sentais idiot parce qu’il devait l’avoir mentionné à quelques reprises. « Désolé, vieux. J’avais oublié ce détail. » lui dis-je un peu mal à l’aise. Par contre, son territoire, fallait pas pousser! Je riais néanmoins. Par la suite, je lui expliquais mes plans. Ce devait être la seule personne à Bowen au courant de toute la saga et de la comprendre. Il me disait que j’étais tombé sur la tête, ce qui me faisait rire de plus belle. La même réaction que ma mère... « Merci des compliments et pour ta première réaction, tu as eu sensiblement la même que ma mère. » Je le poussais un peu en riant comme pour me moquer de lui. J’étais brillant selon lui et mon ami devait uniquement être l’une des rares personnes au courant de ce petit secret. Après tout, je m’étais presque exilé de Sydney pour faire cette expérience, ensuite rédiger ma thèse et tout remettre. J’allais présenter mes conclusions et mon étude devant un jury important. Il semblait réellement intéressé en concernant mes conclusions et avec Einstein, il avait mis le doigt sur quelque chose alors que je riais. « Ouais, les gens adorent Einstein. Certains m’aident, j’en aide d’autres. Et j’envisage peut-être tenter de trouver des gens avec qui faire du troc... de l’aide physique contre une nuit au chaud. Les femmes sont plus généreuses que les hommes. C’est le seul truc que j’peux te dire pour le moment. » que j’lui dis toujours avec un fin sourire aux lèvres. Puis, je lui parlais de mon amie pour qui je venais à Bowen et il me questionnait davantage concernant la nature de ma relation. Je levais les yeux au ciel. « Une amie, oui. Et tu sais que je suis marié, j’ferai pas de conneries. » S’il me connaissait minimalement, il s’y opposerait parce que clairement, je faisais des conneries avec Sienna en la trompant à droite et gauche. Enfin, faut dire que je suis presque un enfant de cœur, maintenant. Les sans abris, ça couche plus trop à gauche et à droite, ça drague moins aussi, clairement. « Ceci étant dit, je viens rejoindre Maxine, tu sais, ma voisine d’enfance? »

« J’imagine que ta mère a essayé de te dissuader de faire une expérience pareille? » Je pouffais de rire en me remémorant sa réaction en hochant la tête positivement. « Évidemment, qu’est-ce que tu crois! Et ma sœur, ça a été pareil... Ma femme par contre le prend plutôt bien. Je crois qu’elle s’attendait à rien de moins de ma part. » lui dis-je en affichant une mine songeuse. Rarement je m’étais soucié de la réaction de Sienna, elle ne semblait presque pas en avoir. À sa nouvelle question, je haussais les épaules. « Environ trois mois. J’ai un peu perdu le décompte, en fait. » lui dis-je simplement et pour son second questionnement, c’était un peu plus vague comme réponse. « Je reste pas toujours aux mêmes endroits. J’ai beau être un grand gaillard, je prends tout de même ma sécurité au sérieux. » lui dis-je sans plus, comme si c’était la chose la plus naturelle pour moi. Il confirmait mon mariage alors que je riais doucement. Je hochais la tête positivement comme pour approuver en ce sens. Et en voyant les yeux de Léo, j’ai compris que quelque chose ne tournait pas rond. « Ouais, je crois qu’elle habite ici maintenant. Et mon sujet de thèse, évidemment. C’est ma voisine d’enfance – et aussi une des principales raisons du pourquoi c’est à Bowen que je suis venu. » lui dis-je avec un sourire. J’adorais Maxine. C’était pas la femme de ma vie, cette fille grognait parfois pendant des miles, mais j’me passerais pas d’elle même pour tout l’or du monde. « Bowen reste Bowen, pourrait-on dire. » Je haussais les épaules ignorant moi-même le sens de ma propre affirmation. « Et toi, tu fais quoi maintenant? Moi je suis un SDF, mais toi? » lui demandais-je en sachant qu’il avait toujours eu beaucoup de talent en photo.

« Comment va Autumn? » Je souriais de plus belle et je levais les yeux vers le ciel en échappant un petit soupir. « Elle va bien, c’est toujours la même. Toujours aussi déterminée, toujours aussi cinglante... C’est ma sœur. » C’était la meilleure explication que je pouvais donner. Léo comprendrait sans doute cette explication puisqu’il devait l’avoir croisé à quelques reprises. Léo ne tardait pas non plus à me questionner davantage alors que je pouffais de rire. « C’est un choix que j’ai fait et je ne le regrette nullement. Quant à la vie de clochard, je te dirais qu’Einstein a de très bonnes oreilles et qu’on ne m’emmerde pas. Je choisis bien mes endroits si ça peut te rassurer. » Je haussais simplement les épaules comme pour chasser le sujet. J’avais bien passé les derniers temps à me justifier à tout le monde que maintenant, je conservais cette précieuse énergie pour autre chose. Il m’offrait une clé de chez lui et je secouais la tête négativement. « J’apprécie beaucoup ton offre, mais je dois la décliner. Tu laisserais pas n’importe quel sans abris avec tes clés. » lui dis-je en lui adressant un clin d’œil, comme si j’allais le laisser biaiser mes études avec sa gentillesse. Tsssk. Il me parlait de ses projets, de rencontrer sa sœur et je fronçais les sourcils... Si Max avait été aussi vague, je me doutais forcément de ce qui allait se passer. Bowen est un petit monde effectivement, je ne pouvais que hocher la tête positivement. « Effectivement. » lui dis-je sans trop m’avancer. Après tout Maxine était un prénom relativement courant, non? Je haussais les épaules. « Une petite blonde avec de la hargne qui a l’air d’une thug, mais qui est comme un petit chaton du moment qu’on sait bien la prendre? »lui demandais-je, clairement amusé. Il m’annonçait qu’il était photo-reporter ce qui me faisait sourire en apprenant qu’il vivait de sa passion. « Wow. Décidément... T’as atteint tous tes buts. » lui dis-je en lui donnant une petite tape amicale dans le dos. « Fais-moi plaisir et capture quelques photos de Bowen pour que j’aille des souvenirs et des photos pour la remise de ma thèse. » Évidemment, j’allais le payer, malgré la non mention présente. « T’inquiètes, ce sera rémunéré et crédité. Et si t’es sympa, je t’inviterai aux séminaires les plus chiants de toute la planète. » Je riais doucement en repensant aux divers séminaires plus barbants les uns que les autres. J’étais une espèce rare, sans doute.

Les gens avaient beaucoup de difficulté à accepter que je dorme dans les rues volontairement... Surtout Léo en me disant que je n’étais pas n’importe qui, je m’esclaffais doucement. Tout pour me contredire, définitivement. Il me disait que j’étais sans doute le plus fortuné d’entre tous, il n’avait sans doute pas tord. Il me disait que si jamais il y avait quoi que ce soit, je connaissais le numéro ce qui me faisait sourire. Je hochais la tête positivement avec un fin sourire aux lèvres. « T’inquiètes, je saurai te trouver. » Je le remerciais inconsciemment car malgré l’argent que j’avais, ce n’était pas la même chose que de se faire supporter par des proches. Max serait la première à m’encourager, Léo serait sans doute présent également en bon deuxième parce qu’il le vivrait bien. En parlant de la première, il parlait d’un chaton avec des griffes et je riais doucement. « Suffit de savoir comment la prendre pour pas qu’elle ait de griffes. » C’était mieux ça que de savoir comment la dégriffer, fallait pas non plus lui faire mal. Alors que Léo semblait déjà avoir trouvé l’angle de mes photos potentielles, je riais doucement. « T’inquiètes, je te fais confiance. C’est principalement pour ma thèse et pour montrer à ma mère que je suis pas encore devenu squelettique. » Puis, il poursuivait en se moquant du paiement moyennant un open bar et je pouffais de rire. « J’suis pas certain que ce soit dans les plans, mais je te tiens au courant pour ces possibilités. » C’était vrai, parfois avec quelques collègues on sortait et d’autres fois non. Ceci étant maintenant dit, il poursuivait en m’invitant à manger. « C’est toi ou ma mère qui trouve que j’ai perdu du poids au final? » Je ris doucement et je hochais la tête, principalement pour la dernière raison. « J’adorerais voir ton travail. » lui dis-je alors que mon cher canin recommençait à vouloir de l’attention. Je lui tirais de nouveau le bâton question d’avoir encore quelques minutes de tranquillité. « Je refuse moins les repas, surtout ces temps-ci. » lui avouais-je en me frottant derrière la tête un peu maladroitement. Les gens n’étaient pas très généreux ces temps-ci.

« Je crois qu’elle me ménage pour l’instant... » Je riais en levant les yeux au ciel. Pour l’instant, c’était le groupe de mots qui prenait tout son sens, évidemment. « Tu l’as dit, pour l’instant. Attends quelques temps et tu verras bien! » m’exclamais-je toujours avec un sourire aux lèvres. Il me confirmait que je n’étais pas squelettique. « Même si je pesais plus de 100 kilos, j’aurais peur que ma mère ne me trouve pas encore suffisamment dodu. » lui avouais-je. Il devait l’avoir croisé une ou deux fois au bras de mon père. Il me suggérait de terminer la soirée dans un bar, ce qui me faisait sourire une fois de plus. « Je te payerai la tournée! » dis-je avec amusement. Par la suite, Leo me parlait concernant toute la situation de la gazette locale, ce qui me faisait grimacer. « Oh, t’inquiètes pas pour ça. Et ne répands pas de rumeurs, tu veux bien... Et entre temps, souhaites pas ma mort, ce serait sympa. » Il me disait de passer et ça serait une joie pour moi en sachant que je verrais finalement son travail. Je me sentais néanmoins coupable de l’offre de nourriture et je secouais la tête négativement. « Je dois le faire... Sinon cette étude ne sera pas réaliste, la première dans son domaine, qui plus est. La seule façon que j’ai de l’accepter, c’est si tu faisais réellement la même chose avec un réel SDF. » Et bien souvent, les gens ne le faisaient pas réellement. Je haussais vaguement les épaules, un peu désolé par toute cette situation.