de se voir en somme tel que nous sommes (alfie&tala)

La falaise, c'est un peu devenu son lieu favori depuis quelque temps. La hauteur, l'impression d'être loin de tout, comme si Bowen et tous ses problèmes n'étaient qu'une image au loin. Comme si il n'y avait plus Freja, ou Jordan pour bousculer ses pensées et le faire se perdre encore une fois dans une vague de questionnements qui lui file des migraines. Sans Manu aussi, même si il ne peut s'empêcher de penser à sa petite soeur depuis qu'elle a fait réapparition dans sa vie. C'est tellement le bordel dans son existence, ça l'a toujours été. Alfie, il est pas fait pour vivre normalement. À vingt-cinq ans, il pourrait faire tellement mieux que ça. Un boulot de serveur, une colocation à trois comme si il était encore un ado, et cette fichue habitude de foutre la merde dans chaque relation qu'il entretient. Alfie est un gros bordel dont même sa sœur ne veut plus. Pourtant, de là-haut, il est enfin maître de lui-même. La solitude lui fait du bien, et il arrive à vider son esprit et à se focaliser sur autre chose que sur ce trop plein de personnes dans sa vie. Il ne remarque pas tout de suite qu'il n'est pas seul, et ce n'est que quand une voix féminine s'adresse à lui qu'il lève les yeux en direction de la personne. « Tala, » répond-il en retour, un fin sourire étirant petit à petit ses lèvres. Tala ne fait pas partie de ce trop plein, heureusement. Elle est différente, amusante, même si il ne sait pas encore si il l'apprécie ou pas. « Je commençais à me lasser des bars et des boîtes de nuits, » ment-il, n'ayant pas envie de citer les nombreuses raisons qui l'ont poussé à se rendre ici. « Et toi ? Rassure-moi, tu ne comptais pas sauter quand même. Je voudrais pas gâcher ton moment. » Tala, elle est de ces personnes qu'il aime embêter. Alfie a toujours été quelqu'un de taquin, parfois même un peu trop d'ailleurs. Mais avec elle, c'est trop fréquent que pour n'être que quelques piques de temps à autres. C'est un jeu, rien de méchant mais pas toujours très gentil non plus.

L'endroit peut-être beau comme il peut être glauque, cela dépend à travers de quelle paire d'yeux il est admiré. Composé d'une vue à couper le souffle, d'un couché de soleil facilement observable, et de toutes les lumières de la ville qui s'illuminent une fois cette boule de feu endormie. Mais aussi hanté par quelques pensées morbides, l'idée qu'on puisse en finir avec sa vie par un moyen simple, qui ne demande qu'un pas de trop. La réponse de Tala à sa question le fait sourire. Il en est presque ravi, même. Ce soir, il n'a pas envie de perdre son temps à se prendre la tête. Et puis, les falaises ne sont pas faites pour régler ses problèmes avec une fille parfois un peu trop grande gueule à son goût. Là-haut, on profite de la chance qu'on a d'être en vie. On se perd dans l'admiration d'une ville et non plus dans nos pensées. Dommage pour toi le fait sourire un peu plus. « Bowen s’ennuierait de son emmerdeuse préférée. » Il marque une pause avant de reprendre. « Mais pas moi. » Ou peut-être que si. C'est pas de l'affection qu'il a pour Tala parce qu'Alfie, il a toujours eu du mal à ressentir quoi que ce soit pour les autres. Il sait qu'il est attaché à certaines personnes, mais c'est pas la même chose avec elle. En réalité, cette fille anime ses journées. Ils ne partagent rien, se connaissent à peine, il ne connait d'ailleurs même pas son nom de famille. Sauf que la voir, c'est s'éloigner de tous ceux qui en savent trop sur lui et sur sa vie trop pleine d'imprévus à son goût. Tala, c'est sa falaise de poche. Dangereuse mais revigorante. En l'entendant parler, il lève d'abord les yeux au ciel avant de partir à son tour dans un rire franc. « J'avoue qu'ici la musique est plutôt pas mal. » Alfie s'approche d'elle, mais pas trop. Il se met à son niveau, à un bon mètre du bord afin d'éviter tout accident. Face à la ville, il prend une grande inspiration. « C'est marrant, je m'attendais vraiment pas à te voir ici. Je ne dirais pas que t'as pas l'air d'une fille à avoir des problèmes parce qu'après tout, je connais pas ta vie. Mais par contre, t'as l'air de celle qui en a et qui en a vraiment rien à taper. » En général, ce sont les personnes perdues qui viennent ici. Celles qui ne savent plus quoi faire, qui ont l'esprit trop embrumé que pour réussir à faire le tri entre ce qu'il y a garder et ce qu'ils devraient effacer à tout jamais de leur mémoire. Et puis, il y a lui. Alfie, ressentant des émotions pour la première fois.