Qu'ai-je fait pour un tel acharnement Ô bonté divine?

Un autre rendez-vous de fini, me voilà enfin libre pour faire une pause entre celui-ci et le prochain à venir. La journée est plutôt agréable bien que venteuse mais cela n'est pas désagréable vu que ça me fait un courant d'air, ne supportant pas la chaleur. J'en suis presque au point de regretter les traditionnelles plus de Londres, c'est pour vous dire! Je m'en vais à pied jusqu'à la partie de la ville, n'étant point très loin de cette dernière et les mains dans les poches je marche le long du trottoir. Je m'arrête quelques instants en face de la mer, les yeux plissés à cause du soleil, c'est donc ainsi que j'envisage de prendre mes RayBan et de repartir de bon pied vers l'un des stands qui bordent la plage. Je commande une glace cassis/chocolat, paye le bonhomme et repars faire ma route.

Les gens semblent si pressés ici parfois. J'ai vraiment l'impression d'être à la capitale de n'importe quel pays que j'ai pu visité. C'est fou! Je suis même obligé de me décaler sur le côté pour ne pas que les gens me rentrent dedans. Mais ce qui semblait évident, arriva, une jeune femme me fonce dedans sans que je ne puisse faire quoi que ce soit, son café m'ébouillantant, ma glace salissant son chemisier blanc. Je me recule les bras écartés comme si cela allait atténuer la douleur de ce liquide chaud avant de regarder les dégâts et de rabattre un bras vers ma chemise et d'essayer de la décoller de mon torse, espérant par la même occasion que cela va sécher rapidement. Je redresse la tête en même temps que la jeune femme avant de réaliser que...

-Non mais ce n'est pas vrai! Encore vous? Vous êtes partout ma parole! Je vais finir par croire que vous me suivez, ça en devient gênant là, Madame la policière! lui dis-je en continuant de secouer ma chemise.

Je desserre ma cravate afin de l'enlever et de déboutonner mon vêtement sali en espérant que le vent le fasse sécher le plus possible. Je sais bien qu'il ne pourra pas la laver en même temps mais je me sentirai stupide de l'enlever surtout lorsque j'ai un rendez-vous juste après. Il devrait être normalement 16h30 ou quelque chose comme ça, mes clients m'attendent deux ou trois à heures après... Peut-être que si je les invite au restaurant pour manger du homard, je pourrais déjà espérer qu'ils en ont, et de deux cacher la catastrophe à l'aide d'une serviette avec écrit "Bernie le homard pour vous servir". Je suis certain que ça passera sans problème et que je ne vais pas perdre ma crédibilité.

Je reprends mon esprit afin de reprendre la parole en déposant un regard sur la femme ici présente. C'est dément comme elle paraît plus jolie quand elle ne prend pas la parole pour commencer à prendre les airs hautains sous prétexte que madame fait le bien de la population. Le silence est d'or, la parole est d'argent comme on dit. Si seulement cela pouvait rester ainsi mais je me sentirais terriblement offensé si elle ne s'excusait même pas un minimum. Après tout, elle est encore en tort, et si elle cherche à me dire que c'est moi qui l'ait sali, je dirais la vérité en lui disant que c'est elle qui a commencé à cause de son café et qu'elle ne pourra s'en prendre qu'à elle-même. Je laisse échapper un soupir avant de secouer la tête doucement vers le bas.

-Permettez-moi au moins de vous payer un autre café, lui dis-je dans un premier temps. Et pardonnez-moi par rapport à votre chemisier... Je prends une pause de quelques secondes. Sachez en tout cas que le marron et ce violet/rouge/rose autrement appelé cassis vous vont à ravir. Je crois que grâce à moi, vous avez trouvé vos couleurs et qu'à l'avance, vous saurez mieux vous habillez, ajoutais-je un sourire joueur aux lèvres.

Qu'ai-je fait pour un tel acharnement Ô bonté divine?

-Ça ne fait rien, je pense juste que je vais devoir en acheter une autre, n'ayant pas le temps de me changer, lui répondis-je en regardant ma chemise. Vous savez, vous n'êtes pas obligée de prendre chacune de mes paroles au premier degré. Je n'ai aucun intérêt à vous infliger ceci à chaque rencontre que nous avons, ajoutais-je en lui adressant un sourire.

Je m'avance vers le bar juste à côté de la plage en compagnie de la jeune femme et lui tire une chaise pour qu'elle s'assoit et fais de même pour ma personne. Elle ne veut peut-être pas de caféine en plus, mais elle peut bien se faire un petit plaisir en grignotant un peu. Un serveur arrive à notre portée et je tends la main vers la jeune femme pour qu'elle commande ce qu'elle veut et ensuite lui demander un Earl Grey avec cheesecake.

-Bien entendu, je vous ai amené ici mais si vous voulez vous enfuir, vous le pouvez. Vous êtes libres de vos actions, lui dis-je en passant une jambes sur l'autre avant de m'accouder à la chaise et me tenant la tête à l'aide de ma main.

Je ne sais quoi lui dire mais il faudra bien que je trouve un sujet de conversation. Je suis en pause, je n'ai pas envie de parler boulot bien que ce soit l'une des seules choses dont je suis capable de tenir pendant de bonnes minutes. Je pourrais aussi lui poser des questions banales, faire genre que je m'intéresse un minimum à elle avant de m'y intéresser pleinement, mais déjà, je ne sais même pas si elle est ravie d'être à la table avec l'emmerdeur de service.

-Jessalyn Lindsay, d'où venez-vous? Que faites vous dans la vie concrètement? Avez-vous des enfants, un homme à vos côtés, des passions ou des hobbis? finis-je par demander, détestant moi-même ce genre d'interrogatoire.

Qu'ai-je fait pour un tel acharnement Ô bonté divine?

Je ne sais pas pourquoi mais en l'écoutant j'ai l'impression que tous les habitants qui font partis de la police sont tous partis en Irak. Est-ce un point qu'il faut forcément mentionner à chaque fois? Comment ont-ils fait pour en survivre? Pourquoi là-bas et pas ailleurs? S'ils veulent aider dans l'armée, il y a probablement d'autres endroits qui ont besoin de recrutement donc pourquoi? Oui c'est peut-être en rapport avec la criminologie allez savoir. Je regarde la jeune femme et lui adresse un sourire avant de passer l'un de mes doigts sur mes lèvres qui s'élargissent. "Qu'y avait-il de criminel avec l'affaire que vous aviez en cours la dernière fois que je vous ai vu?" lui demandais-je par curiosité.

Je sais bien qu'à présent ça va être à moi de parler et lui donner le même nombre d'informations qu'elle m'en a donné pour qu'on soit égal l'un envers l'autre. Je réfléchis quelques instants avant de laisser échapper un soupir. Je ne sais même plus pourquoi j'ai posé ce genre de choses, il n'y a absolument rien de naturel et quelque chose de robotique à répondre à cela. Je me tiens la tête à l'aide d'un écart entre mes doigts et fais une petite moue avant de répondre. "Je viens de Londres, je fais parti d'une entreprise familiale, un complexe hôtelier et je n'ai ni femme, ni enfant, ni quoique ce soit." commençais-je donc par lui dire. Maintenant, il va falloir réfléchir à ce que j'aime. Il n'y a pas grand chose que j'apprécie mais il y a toujours des petites choses par ci par là sans aucune importance. "Sinon, j'aime bien l'art en général, sous toutes ses formes et... dirons-nous voyager et profiter de la vie comme on peut." continuais-je presque comme sur un ton lassé. "Comment profitez vous de votre vie, vous?" lui demandais-je.

Qu'ai-je fait pour un tel acharnement Ô bonté divine?

C'est vrai que parler boulot n'est pas la meilleur chose à faire en dehors des heures de service mais il faut bien que nous trouvons un sujet qui peut au moins en passionner l'un de nous deux mais cela ne fait rien. En écoutant sa seconde réponse, je ne sais pas vraiment comment réagir. Autant d'informations d'un coup, il me faut le temps de digérer. Pourquoi vivre comme une vieille fille alors qu'elle a toute la vie devant elle? C'est insensé? Son boulot l'empêche-t-elle de faire les choses les plus folles ou de se faire des voyages improvisés juste histoire de changer d'air? Comme si elle devait péter un câble, tout envoyer valser et dire bye à tout ce qui se trouve sur son passage? Je lui adresse un simple sourire en guise de réponse, essayant de trouver quoi que ce soit pour répondre à cela et continuer la conversation. Une main se passe sur mon front, mes yeux se ferment doucement et "Je suis persuadé que vous avez plus de choses à raconter sur vous. Pas une vie intéressante, oui... selon vous. Je suis certain que vous avez fait des choses incroyables, dont vous pouvez être fière, et d'autres moins pouvant toucher à l'illégal malgré votre métier, des erreurs de jeunesses, des souvenirs, des anecdotes. N'hésitez pas à en parler. Parlez moi de vous." lui dis-je en redressant la tête avant de poser mon regard sur elle. Des choses pas forcément évidentes à citer sur le moment, mais des anecdotes sur soi, c'est plus ou moins faciles. Une simple phobie est une anecdote, le pourquoi du comment de cette phobie, es histoires due à cause de cette phobie. C'est une exemple parmi tant d'autre mais en parlant d'une chose on peut rebondir sur tellement plus, c'est ça la beauté du dialogue et je ne comprends pas comment les gens peuvent rester dans un certain mutisme parfois surtout lorsqu'on ne se connait pas. On a si peu de choses à se dire mais en même temps nous avons tout à nous dévoiler. Ne pas avoir honte de nos dires, peut-être est-ce la chose la plus dure qui soit. Dois-je la guider dans ce pas? Comment? J'aime bien qu'on me guide et qu'on prenne les rennes parfois.

Qu'ai-je fait pour un tel acharnement Ô bonté divine?

Sa soeur était donc morte. J'ai l'impression en entendant son histoire de me visionner un film interne, une sorte de 10 Things I Hate About You, une fille populaire mais qui pour des raisons différentes, préfèrent l'anonymat à la popularité. Certes, ce qui lui ait arrivé peut être considéré comme quelque chose de tragique, et elle en parle si naturellement, comme si ça ne la touchait plus à présent, que la douleur s'est éteinte, comme si elle s'était finalement habitué à cette absence. "De quoi est-elle morte si ce n'est pas trop indiscret? Et à quel âge? Et vous, vous aviez quel âge?" demandais-je par curiosité, histoire d'en savoir un peu plus sur le passé de cette femme. Elle préfère changer de sujet. Très bien, si cela lui convient mais sa réaction, je me mets à mon tour à regarder autour de moi, discrètement. Apparemment, je serais la distraction de certaines. Que c'est dommage. "Je ne suis ici que depuis Mai, c'est plutôt récent en soi bien que j'ai l'impression que cela fait une éternité. Mais le fait que d'autres femmes me relookent, ça vous déplaît?" lui dis-je en m'accoudant à la table pour me rapprocher d'elle, un sourire joueur sur les lèvres. Je me redresse sur ma chaise pour plus de confort et sirote la boisson commandée tout en jetant un oeil au chien de la demoiselle qui semble se déchaîner. "Vous vivez en maison j'espère, avec un tel animal." lui dis-je sans lâcher du regard la bestiole de compagnie. "Vous vous plaisez ici? Vous n'aimeriez pas changer d'air parfois? Partir sur un coup de tête en terre inconnue ou des petites folies du genre?" lui demandais-je en reportant mon attention sur elle, tout en cherchant dans mes poches ma petite boite à petits cigares pour en sortir un et le mettre à mes lèvres. "Ca ne vous dérange pas? Vous en voulez un peut-être?" ajoutais-je en tendant la boîte vers la demoiselle.