Eye of the tiger + Logan

Un soir en semaine où Léo avait accepté de sortir avec quelques collègues pour prendre un verre, jusqu'ici rien de bien extraordinaire. La soirée s'était prolongée et les verres enchaînés. La bonne humeur était de mise alors ils ne s'en faisaient pas trop pour l'heure qui tournait. Et puis c'était agréable de se retrouver entre hommes, à parler de tout, de rien, surtout rien de sérieux. Bref, le barbu avait passé une bonne soirée. Mais toutes les bonnes choses avaient une fin et lorsqu'ils s'étaient tous rendu compte qu'ils avaient dépassé l'heure décente à laquelle ils devaient rentrer pour espérer être frais le lendemain et puis, surtout, la quantité raisonnable d'alcool, chacun avait décidé de retourner chez soi. Mais Léo n'avait pas envie de se retrouver seul chez lui, il aimait la compagnie, surtout en ce moment, il en avait besoin, il serait bien allé toquer à la porte de Grace, s'aurait pu être sympa, il aurait pu bien terminer la soirée, dans des bras chaleureux, dans sa tête d'homme alcoolisé ça sonnait bien, mais il était encore assez lucide pour ne pas vouloir tenter l'expérience en sachant qu'il se ferait jeter, avec son haleine qui empestait. Alors il avait déambulé dans les rues, du moins il avait marché, de travers, lentement, très lentement. Et puis il avait entendu du bruit, relevant la tête il était tombé nez à nez avec la porte d'un bar, La Licorne Hurlante, il rit de bon cœur face à ce nom qu'il trouva ridicule, mais plus important, la porte était close, rideau baissé. Il tendit un peu plus l'oreille, il entendait pourtant du bruit, il en était sur. Alors, curieux comme il était et surtout obstiné, il fit le tour du bâtiment pour comprendre d'où ça pouvait provenir. Il fallu un petit moment, pour ne pas dire une éternité, pour qu'enfin Léo trouve une porte plus ou moins dérobée, il tenta de l'ouvrir, surpris par le fait qu'elle ne soit pas verrouillée il faillit tomber à la renverse mais se retint comme il pouvait à la poignée. Face à lui, un escalier qui descendait en sous-sol et surtout, des cris d'hommes, plus audibles et aussi comme des coups un peu sourds. A ce moment là il pensa bien faire demi-tour, sa lucidité venait de le rappeler à l'ordre. Mais son intérêt avait été touché, voir même attisé. Alors il tenta de descendre l'escalier, ce qui fut bien plus périeu qu'il le pensait, il trébucha sur une marche, la scène était relativement pitoyable à voir, notre homme risible, mais, selon lui, personne ne le voyait et il essayait d'être discret, juste un coup d’œil et, promis, il rentrait chez lui. Arrivé à mi-parcours il se baissa en se tenant au mur et pu voir une partie de la scène. Une sorte de cave mal éclairée, une bonne dizaine d'hommes en cercle qui semblaient surexcités et au milieu, deux qui se battaient. Du combat illégal ! Léo, qui était aussi reporter en plus de photographe, y vit comme un scoop, il n'avait jamais entendu parlé de réunions pareilles, c'était du lourd, du sérieux. Il resta un instant à observer la scène, comme obnubilé par ces enragés qui semblaient combattre pour leur vie, c'était violent, virile, presque animal, en un sens ça lui plaisait, même s'il n'était pas de ceux qui entreraient au milieu du cercle, il devait admettre que c'était presque grisant, mais peut-être que c'était l'alcool qui parlait. Au moment où il pensait ne avoir assez vu, le barbu chercha à remonter à la surface, respirer l'air pur de la nuit parce que l'atmosphère était un peu moite. Il rebroussa alors chemin, avec la plus grande discrétion dont il pouvait faire preuve.

Son esprit semblait tourner à cent à l'heure alors que Léo tentait de rebrousser chemin, il ne pouvait s'empêcher de se dire qu'il tenait là peut-être un sacré scoop, de ceux qu'on avait trop rarement à Bowen, une aubaine en soi ! Il n'était pourtant pas de ceux qui colportaient des ragots, il en avait même horreur, mais là, une sorte de réunion illégale pour se taper dessus, c'était du pain béni, il ne pouvait le nier. Il devrait creuser, enquêter, il n'allait pas balancer son info comme ça de but en blanc, il n'était pas ce lâche de Writer qui se cachait derrière son blog pour cracher sur les habitants de la ville, non Léo, c'était un vrai reporter, il ferait ça bien. Dans son esprit ça sonnait bien en tout cas à ce moment précis, tout aussi bien que sa sortie discrète, pourtant son corps lui faisait clairement défaut à cause de tout le whisky ingurgité, il avait le pas lourd et se cognait tant au mur qu'à la rambarde, sans parler du fait qu'il voyait presque double. En gros, si tous ces hommes réunis ne faisaient pas un boucan monstre, il aurait déjà été grillé depuis un moment. Mais là, il allait s'en sortir, il y était presque, il allait rentrer chez lui, se coucher et demain il aurait les idées claires pour repenser à tout ça.
Pourtant Léo se sentit violemment tiré vers l'arrière par l'encolure de sa chemise, la puissance du choc plus l'impression d'être étouffé lui firent voir des étoiles alors qu'il avait en même temps la désagréable sensation de tomber au ralenti, c'était assez étrange et surtout imprévu. S'il avait maîtrisé la situation à un moment, et croyez bien qu'on puisse largement en douter, à présent il ne maîtrisait plus rien du tout, impuissant face à la poigne de l'espèce de cerbère, notre homme se sentit plaqué brutalement contre un mur froid, ce qui eut pour effet de lui remettre quelque peu les idées en place. L'autre ne semblait pas ravi de le voir et sa gueule amochée ajoutait un petit quelque chose qui fit comprendre à Léo qu'il ne devrait pas jouer au malin avec lui. Sa question, posée avec rage n'engageait pas non plus à la plaisanterie et le brun chercha ses mots, ceux qui pourraient peut-être lui éviter de passer un sale quart d'heure. Je... j'me suis perdu. Il y eut presque comme un éclair de génie qui passa dans les yeux lourds de Léo, comme s’il avait trouvé l’excuse du siècle, il en aurait presque sourit, l’effronté ! Juste avant que le poing de l’autre ne s’abatte tout près de son visage, contre le mur. Il grimaça, de surprise, presque de douleur et de soulagement mêlé, parce qu’il réussit à comprendre assez rapidement qu’il avait échappé de peu à une belle raclé. Mais l’autre, s’il avait voulu lui mettre en pleine face, il ne se serait pas loupé, c’était certain, ce coup dans la brique c'était une mise en garde, rien de moins. Arrête !! J’ai entendu du bruit. En passant dans la rue mec ! Vous n’êtes pas discrets, bordel ! Il en faisait trop, comme s'il avait le droit de lui hurler dessus alors que l'autre resserrait la pression sur son col, un autre coup allait bientôt s’abattre sur lui et cette fois-ci, il n’y échapperait pas. Il se ratatina presque par réflexe, cherchant comment s’en sortir. J’ai cherché d’où ça venait et j’suis entré… vous faites quoi ici ? Finit-il par demander innocemment, tel un jeune gamin qui venait de surprendre ses parents en pleins ébats, parce qu’il ne pouvait pas s’en empêcher, la curiosité l’emportait sur la raison, surtout qu’il n’avait pas vraiment de raison à ce moment précis.