TRAPPED -r.

Son livret de banque et une petite enveloppe remplie de quelques billets en main, Ezekielle attendait en file, devant le comptoir. L’activité de tricot à laquelle elle prenait part, depuis quelques semaines, lui avait été fort utile. Durant ses temps libres, la jeune femme s’était mise à tricoter ici et là, des accessoires en tout genre, qu’elle revendait par la suite à un prix raisonnable. L’argent récolté, elle le déposerait aujourd’hui à la banque, dans un compte destiné à des œuvres de charité. C’était sa façon de faire sa part, ici, en Australie, et d’aider les gens ou les animaux dans le besoin. Elle faisait d’ailleurs du bénévolat, de temps à autres, dans un refuge pour animaux. Ezekielle chérissait l’idée en elle d’un jour y adopter une petite boule de poils, avec Isaiah. Pour le moment, elle se concentrait toutefois à amasser un bon montant d’argent afin d’en faire profiter des organismes et des individus. Quelques personnes la précédaient encore et pour patienter, Ezekielle fredonnait la mélodie qui jouait; une douce balade que l’on entendait à la radio. Elle avança finalement d’un pas, puis son regard se posa sur l’enveloppe qu’elle tenait entre ses mains, jouant machinalement avec le papier. La blonde en oublia presque les gens autour, voyageant dans ses pensées. Un homme poussa la grande porte de la banque, un manteau long sur les épaules, le capuchon sur la tête. Malgré la température estivale, il portait un foulard camouflant presqu'entièrement son visage. QUE PERSONNE NE BOUGE! s'écria-t-il. Son coeur battait drôlement rapidement, Ezekielle tenta subtilement de ranger l'enveloppe contenant les billets dans sa poche, mais laissa maladroitement tombé son livret de banque par terre. Elle figea. Si vous faites ce que je dis, tout ira bien. Sa voix résonnait à travers le silence total dans la banque. Personne n'osait se retourner, à peine pouvaient-ils respirer. Les pas de l'homme se firent entendre. Un pas lent, mais distinct. Il portait probablement des bottes. Ezekielle fixait la jeune caissière se trouvant de l'autre côté du comptoir, elle était terrifiée, son regard la trahissait. L'Américaine distingua le bras de la jeune adulte qui s'étirait, probablement à la recherche d'un bouton d'alarme. De ses lèvres, sans un son, Ezekielle lui mima un «non». L'homme continua de traverser le grand hall de la banque puis s'arrêta, fouillant dans la poche intérieure de son long manteau. Il en sortit une arme.

Même dans le domaine de la photo, des clients il y en avait de toute les sortes. Oliver s'était fait approché pour un contrat photo un peu étrange, mais il n'avait pas voulu poser trop de questions. Tant qu'il se faisait payer, même en argent contant, ce n'était pas de ses affaires. Il avait hésité à mettre la somme dans son coffre avec le reste de choses qu'il gardait "Au cas où" au lieu de la déposer. Mais il était temps pour lui de plus investir dans son futur ici au lieu de toujours prévoir un plan de fuite. Il était donc aller à la banque pour faire un dépôt. La file devant lui était assez longue pour qu'il se demande si il n'aurait pas du aller au guichet plus loin en ville. Il avait remarqué Eze un peu plus loin devant lui, il la saluerait si jamais elle le voit, leur relation était encore un peu étrange pour qu'il soit très à l'aise d'aller lui faire la conversation en publique. Il jouait distraitement avec son trousseau de clé au fond de sa poche quand il sursauta, une voix ferme résonna dans la banque. Il se tourna vers la provenance de cette dernière pour y voir un homme au visage couvert par une écharpe. Tandis que plusieurs avait une expression d'horreur ou de surprise collé au visage, Oliver s'était contenter de froncé les sourcils et de serrer les dents. Pourquoi devait-il toujours se retrouver au coeur des pires drames? La tranquillité ne semblait pas être faite pour lui. Il porta son regard instinctivement vers Ezekielle, c'était idiot mais il se sentait presque en colère contre elle parce qu'elle était là. Il ne voulait pas qu'il lui arrive rien, ça le briserait. Oliver rapporta son attention vers l'homme qui avait désormais une arme à la main. Il eu le souffle couper. Il avait envie de courir et lui arracher des mains, l'empêcher de tirer sur qui que ce soit. Mais est-ce que tout le monde serait vraiment plus en sécurité avec lui en possession de l'arme? Était-il vraiment mieux que le braqueur? Les mains toujours au fond de ses poches, il hésitait à sortir son téléphone.

On pourrait presque dire que c'est un grand jour pour Oscar. Touchant du bout des doigts la liasse de billets qu'il a glissée dans sa poche, il compte les personnes le séparant de la femme qui ouvrira le premier compte en banque de Luce, sa fille. Il a décidé qu'il était temps pour elle d'avoir un début d'argent pour plus tard, pour quand elle sera majeure et qu'il faudra penser à lui payer une voiture, un appartement, et toutes ses futures folies de jeune adulte. Elle n'a que cing ans, et pourtant Oscar a l'impression qu'elle grandit à chaque fois qu'il cligne des yeux. Sa princesse, sa chérie pour qui il est aux petits soins à chaque fois qu'elle débarque chez lui, la bouche encore pleine de chocolat. Il sourit pensivement en y songeant, mais ce rictus ne tarde pas à s'envoler lorsqu'une voix menaçante s'élève de derrière lui. Non, tout mais pas ça. Il a assez vu de films et séries pour comprendre ce que cette phrase présage, et il sait que ce n'est clairement rien de bon. Discrètement, il ose un regard en direction du nouvel arrivant au visage couvert. Un simple voleur qui veut juste ramasser ce qu'il y a dans la caisse ? Pire ? Les battements de son coeur s'accélèrent jusqu'à arriver au niveau des tempes, et il sent son souffle se couper lorsque son regard tombe sur l'arme. Autour de lui, il entendait des murmures à peine audibles de personnes effrayées. Devant lui, une femme secoue négativement la tête comme si elle était en train de communiquer de loin avec quelqu'un. L'homme s'avance en direction d'un des guichets, et Oscar en profite pour se pencher vers cette inconnue qui disait non. « Il vaudrait mieux s'éloigner discrètement, » murmure-t-il en regardant autour de lui, cherchant après un endroit où ils pourraient se planquer en attendant que le type armé soit parti. En attendant une quelconque réaction de sa part, tous ses muscles restent figés.

Candy était stressée, n’ayant pas l’habitude de venir à la banque à part pour retirer de l’argent, elle se sentait un peu mal à l’aise. Venant tout juste d’emménager en colocation, elle devait à présent demander un prêt pour pouvoir financer à la fois ses études et son loyer. Elle portait un tailleur assez austère, bien différent de ce qu’elle porte d’habitude, pour avoir l’air professionnelle. Peut-être aurait-elle plus de chances de voir son prêt accordé si elle a l’air sérieuse. En entrant, la jeune femme remarqua la file de personnes attendant devant le guichet, ainsi que quelque autres assises dans un fauteuil. Ayant un rendez-vous avec un conseiller elle n’avait pas besoin de faire la queue, elle alla donc s’asseoir directement dans l’un des fauteuils. Nerveuse, elle parlait dans sa tête pour tenter de se calmer et se détendre. Elle jouait avec le bord de sa veste pour faire diminuer le stress. La jeune femme était complètement perdue dans ses pensées et ne faisait pas attention aux gens autour d’elle. Ce n’est que lorsqu’elle entendit un homme crier quelque chose de peu rassurant, qu’elle sortit de son monde imaginaire.
Pourquoi fallait-il qu’à chaque fois elle n’ait pas de chances ? Elle ne venait jamais à la banque et la seule fois où elle y venait, un homme, armé en plus, venait y faire un braquage. Sa priorité ne fut pas de s’enfuir ou de se mettre en sécurité mais de se parler à elle-même pour surtout rester elle-même justement. Ses muscles étaient complètement crispés et elle sentait les larmes monter à ses yeux. Elle plaça sa tête entre ses mains pour tenter de se détendre ou en tout cas de se contrôler. Qui sait ce que pourrait faire Alice dans cette situation ? Peut-être qu’elle irait voir le braqueur pour le frapper ou bien elle se cacherait. Une chose est sûre, Candy ne veut pas savoir ce que sa seconde personnalité ferait. Elle savait qu’à côté d’elle se trouvait une plante et à côté de cette plante un couloir. La demoiselle ignorait où il menait mais c’était sa seule solution pour se mettre un peu plus en sécurité. Mais elle n’avait pas le courage de se lever, ses muscles ne voulaient pas bouger.

Après le mariage, il y avait une nouvelle étape que vous deviez sauter. Celle de créer un compte commun, de voir pour mettre en place un plan épargne pour un logement ou pour un futur enfant à venir. Ne sait-on jamais ce que l'avenir nous réserve. En tout cas, c'était une nouvelle étape que vous étiez prêt à passer puisque vous aviez rendez-vous à la banque. Seulement vous n'étiez pas les seuls, il y avait déjà un monde fou alors que la journée ne faisait que commencer. Vous étiez assis sur des chaises plutôt inconfortables, attendant qu'on vienne vous chercher pour vous amener jusqu'au bureau de votre conseiller. Tu avais l'impression que ça faisait une éternité que tu étais assise là. Tu avais besoin de marcher, de te dégourdir les jambes et aussi d'aller prendre un verre d'eau au distributeur en face de toi. Tu esquissais un sourire à ton mari, te levant dans la foulée. Tu jetais un coup d’œil à la file d'attente. Tu avais reconnu Ezekielle un peu plus loin mais tu irais lui dire bonjour après, si elle était toujours là. Tu avais presque atteint ton but quand une voix avait résonné. Suivi d'un cri, ce qui t'avait fait peur et tu étais tombée au sol. Tu n'arrivais pas à te relever, de toute façon tu étais tétanisée par la peur, on venait d'hurler de ne pas bouger. Que tout se passerait bien si chacun acceptait de suivre les ordres. Qu'est-ce que ça pouvait vouloir dire sérieusement ? Qu'ils allaient vous coller une balle dans la tête si vous refusiez de donner votre porte-feuille ? Clairement, s'il y avait une chose que tu ne donnerais pas c'était bien ta bague de mariage.

« Mais c’est loooooong. » Se plaignait Nelligan, après chaque minute qui passait. Il n’avait jamais été très patient, du moins pas pour des questions financières. Faire la file à partir de cinq heures du matin jusqu’à l’ouverture d’un magasin de jeux vidéo afin d’obtenir une copie d’un nouveau jeu, ça, il savait faire. Mais attendre pour rencontrer un conseiller qui lui parlerait de notions qu’il ne saisissait pas encore tout à fait malgré son âge maintenant assez avancé dans la vie d’adulte, ça, non. Lily-Anaëlle en avait sans doute assez de l’entendre se plaindre mais, étant trop douce et gentille pour le lui faire remarquer, elle s’était tout simplement levée après lui avoir souri et se dirigea vers les distributrices. QUE PERSONNE NE BOUGE!, s’était crié une voix provenant de l’entrée de la banque. Après avoir sursauté, Nelligan tourna la tête vers la personne qui venait de sortir une arme à feu et leur criait de suivre ses consignes pour que tout aille bien. Évidemment, et sans doute comme tout le monde, Nelligan pensa aux possessions qu’il avait sur lui. C’était con, après tout, le butin se trouvait dans les pièces fermées de la banque et certainement pas dans les poches de tous ces pauvres individus. De toute façon, mis à part sa bague de mariage, Nelligan n’avait pas grand-chose à se faire prendre. Ce qu’il avait de plus précieux n’était même pas sur lui, non, ce qu’il avait de plus précieux se tenait à des mètres de lui, hors de sa portée. Nelligan tourna lentement sa tête vers Lily-Anaëlle, qui était au sol ; sans doute que la surprise et la peur l’avaient déstabilisée. D’ailleurs, si Nelligan tenait encore en équilibre sur son banc, ce n’était que par miracle. Ses yeux croisèrent enfin ceux de son épouse, et son cœur se serra. S’il fallait qu’il la perde, alors qu’ils venaient à peine de se retrouver, alors qu’ils venaient tout juste de commencer à bâtir un avenir à deux, il ne s’en remettrait jamais. Incapable d’ouvrir la bouche ne serait-ce que pour lui mimer des paroles, par peur que tout se termine, il ne faisait que la regarder, avec une immense détresse dans le regard.

Les pas continuaient de résonner dans la banque, le silence s'était installé, mais des murmures étaient audibles. Certains retenaient leurs sanglots, d'autres tremblaient de peur à en grincer des dents. Ezekielle se concentrait sur sa respiration, cherchant à ramener son coeur à un rythme cardiaque plus normal. C'était un peu stupide, à vrai dire... qui pouvait garder son calme dans une telle situation? Derrière elle, un homme murmura à son oreille. « Il vaudrait mieux s'éloigner discrètement. » Par chance, les pas que le braqueur faisaient avait couvert le son de sa voix.  Ce dernier continuait d'avancer, d'un pas lent, mais certain. Il observait chacun des clients, guettait la réaction des employés de la banque, Ezekielle pouvait le voir du coin de l'oeil. « Impo.... » Il avait tourné la tête en direction de la file du guichet dans laquelle elle se trouvait.  Ezekielle se mordit l'intérieur de la joue, nerveuse. L'homme possédant l'arme posa son regard sur chacun des clients dans la file, la blonde faillit s'écrouler au sol lorsque son regard croisa la sien. Finalement, il se tourna vers le premier guichet, à l'opposé complètement, gardant bien à la vue de tous l'arme de poing. Ezekielle se recula lentement d'un pas, éliminant la distance entre Oscar et elle. La jeune femme au premier guichet s'affairait à vider le contenu de son tiroir-caisse, sanglotant. C'était parfait, mais malheureux. C'était malheureusement parfait, pour Ezekielle, qui put répondre à son interlocuteur avec plus de discrétion. « J'vois pas comment on sortirait d'ici », souffle-t-elle. La file dans laquelle ils se trouvent est en fait presque située au centre de la banque. Autour d'eux, d'autres clients en file, une salle d'attente avec des fauteuils, des chaises et des tables basses. La jeune Américaine ignore que des gens qui lui sont chers se trouvent en ces lieux, elle cherche à la fois à se protéger et à répondre à la demande du braqueur, en même temps, Ezekielle cherche par tous les moyens une issue.