Castle on the hill (Madby)

J’en ai marre de vivre dans une chambre d’hôtel. Si je devais vivre de manière permanente à Bowen, je ne devais pas me contenter de vivre dans cette minuscule chambre avec mon chien et mon chat. Certes, ma chambre était en face de celle de Seamus mais j’avais envie d’avoir un endroit à moi. Je me souviens alors de la proposition de Maddie que j’avais rencontré à la soirée de Nevaeh qui est une grande fan de mon show. On avait pas mal discuté et sympathisé. Je dois dire que je l’appréciais énormément. On organisait cet emménagement depuis avant mon départ précipité pour aller fêter la fin de l’année chez mes parents et la mort de Larà. Et puis, je devais lui dire pour Seamus avant qu’elle ne l’apprenne dans un magazine à scandales. Je pris donc pour commencer un sac avec deux-trois affaires, mon ordinateur, Zéro mon chien et mon chat. J’espère que tout le monde allait entrer dans l’Audi R8. Je ne suis peut-être pas propriétaire de mon propre appartement mais j’aimais les voitures. Zéro aussi. Je me rappelais la fois où je suis allée chercher Chase à la caserne. C’était juste avant son départ. Je chassais cette pensée ombrageuse pour envoyer un sms à Seamus en lui faisant part de mon intention de me barrer. Je finis par me garer devant l’immeuble dans lequel habitait Maddie avant de descendre, Zéro dans une main et Le Chat dans une autre. Je fixai la bâtisse avant d’inspirer. Je sonnai chez la jeune femme avant de faire mon plus sourire. « Salut coloc’ ! Je suis contente de te revoir ! » C’était sincère. C’était sans doute l’une des filles les plus gentilles que je connaisse.

Ça y est ! Je devais enfin emménager chez Maddie. Je sais que pour tout le monde cet élan consiste en peu de choses mais pour moi c’est un pas de géant. Ça veut dire que je ne souhaite plus retourner en Ecosse. Ou pas de sitôt. Certes, ma série se situait désormais dans une Australie colonisée par les anglais mais on pouvait tourner ailleurs. Je n’aimais pas particulièrement le soleil, lui préférant sa copine la pluie et pourtant je comptais rester dans un pays où le climat était désertique. Souvent les personnes déménagent pour un homme. Bien que ma venue à Bowen consiste à avancer dans mon divorce, elle ne tenait pas lieu d’un homme. J’avais eu un coup de cœur pour Lorenzo qui s’avérait en couple, une relation avec Seamus qui demeura platonique et donc, me voici devant la porte de Maddie à me demander si rester ici serait une bonne idée. Je souris franchement à mon amie découverte par hasard tandis que Zéro commence à tirer sur sa laisse. Ma nouvelle amie essaie de me prendre dans ses bras mais entre Le Chat et Zéro la chose est impossible. « Désolée. Ils sont très imposants. » Je ne comptais pas lui mentionner mon autre chat resté en Ecosse ainsi que mon furet. Après tout, j’étais une actrice défenseuse du droit des animaux. Il était normal que j’ai ma petite animalerie. J’entre donc dans son appartement pour détacher Zéro qui commence à tourner en rond en jappant. Tout le monde connaissait Zéro. C’était ma mascotte. Il me suivait partout. Pas comme Scraps qui était resté en Ecosse. « Merci. Ça me fait bizarre d’emménager ici. Enfin en Australie. Ça concrétise la chose. » Pour cause que j’étais vraiment nerveuse. Je ne m’étais jamais réellement posée. J’avais habitée Londres, New-York, Iverness mais jamais d’endroit fixe. Et pourtant désormais sur ma page Wikipédia, on verrait « Ruby Phelps vit à Bowen en Australie avec sa ménagerie. » Je me tourne vers ma colocataire qui me questionne sur ma santé. C’est vrai qu’après le décès de Larà, le largage en beauté de Chase, ainsi que mon échec avec Seamus nous étions en droit de nous demander si j’allais bien. « ça va. Je me remets doucement. Et toi ? » Je lui fais un petit sourire timide avant d’ouvrir la caisse contenant Le Chat qui sort un peu pataud pour me jeter un regard noir et s’enfuir en courant. Une rousse avec un chat noir. Ça changeait du Monsieur Moustache. Un maine coon de huit kilos. « Nan j’ai des assistants qui vont venir tout me livrer. Ça sert d’être actrice. » Je ris doucement avant de caresser Zéro qui vient à notre rencontre. « J’ai également un autre chat et un furet. J’espère que les animaux ne te dérangent pas. Ah et je suis végane. Désolée je suis nerveuse c’est la première fois que je partage un appartement avec quelqu’un. »

Elle rigole en voyant mes animaux mais je n’en ai que deux pour l’instant. En vérité Monsieur Moustache était encore en Ecosse et je devais aller le chercher avec le reste de mes affaires. Je pensais d’ailleurs demander à quelqu’un de m’accompagner dans cette aventure mais entre ma rupture avec Seamus et le tournage qui avait repris, je n’avais plus grand monde. Peut-être que Maddie voudrait venir avec moi pendant les congés de Pâques. Si elle n’a rien de prévu. Après tout, ça pourrait être sympa de se faire une petite excursion en Ecosse et sur le lieu de tournage de la première saison de ma série. « On verra ça. Dis-moi que tu fais à manger parce que la seule fois où j’ai essayé, j’ai fini la main en sang et je suis du genre maladroite. » La jeune femme ne cesse de rire, elle me semble nerveuse. Avec son air juvénile et son petit rire, on pourrait presque la prendre pour une enfant. On ne dirait jamais qu’elle a deux ans de plus que moi. Si elle savait ma date d’anniversaire -31 octobre- je pense qu’elle en rirait. Etre née le jour d’Halloween, on ne fait pas plus morbide. Ou sans doute porter le surnom Sally apportait encore une couche à mon style déjà bien gothique. Gothique pas dans le sens noir avec de l’eye-liner mais gothique dans le sens ancien. « Je ne suis pas une star. Je suis une actrice. Une star c’est Mariah Carey, Céline Dion, Angelina Jolie. Moi dès que la série sera annulée, je retomberai dans l’oubli et ça ne sera pas plus mal. » Je n’aimais pas vraiment mon métier bien qu’il payait les factures donc je ne pouvais pas cracher dessus mais je préférai dessiner. D’ailleurs, j’avais fait un beau dessin de Lorenzo après notre rencontre en décembre. Lorenzo. Je n’arrivai pas à me chasser son visage de mon esprit. Comme hantée par cet homme si mystérieux, atypique. Comme moi. « Non, non ça ne me dérange pas. Tu sais Seamus fume tout le temps donc. Je mangerai ma salade et mon tofu et toi, ton steak. D’ailleurs, il faut que je te montre les dernières photos de la campagne contre la fourrure. Bon, je suis nue avec mon second chat qui est encore chez mes parents mais elles sont sublimes. » Je les avais sur mon ordinateur. J’avançai dans l’appartement pour voir qu’il était luxueux. Plus que ce à quoi je m’attendais. Moi qui ai souvent vécu dans les chambres d’hôtel. « Un verre d’eau s’il te plait. » J’évite les boissons sucrées car ça me rend encore plus active que je ne le suis déjà. Zéro avance devant nous tandis que je découvre la cuisine. Vade retro. Je prends appui sur le plan de travail pour la regarder. « Détends-toi Maddie, relax. Ça te branche une soirée en pyjama avec cocktail et où on parle garçons. J’ai quelques interrogations sur ton entourage masculin. Ou féminin d’ailleurs. Je ne porte aucun jugement. » A vrai dire, j’ignorai tout de la sexualité de ma colocataire et il fallait remédier à ça. Si jamais je croisais une de ses conquêtes au petit matin.

« Au pire y’a un truc qui est pratique. Ça s’appelle commander. » Je l’ai assez fait quand j’étais à l’hotel et comme je ne mange que des plats dépourvus de viande, ça ne devrait pas être trop compliqué de faire une salade. Enfin, je l’espérai car je suis tellement nulle en cuisine. En fait, je suis plutôt nulle en tout. Sauf pour agiter mes cheveux. Talent naturel. « Ah mais elle ne risque pas d’être annulée. Il y a encore au moins trois saisons. Et j’ai dit que je cesserai de jouer dès que ça sera fini. Je pense que je passerai au théâtre ou un truc qui ne bouge pas trop. J’ai réellement envie de me poser. » Je ne disais pas ça uniquement pour Lorenzo. Après tout, Coup de Foudre à Notting Hill parle assez de ce genre de relations où l’homme est inconnu. Mais je ne savais pas encore s’il voudrait m’accompagner à toutes les avant-premières et de moi dans sa vie. Nous étions encore au début de notre relation. « Eh bien, c’est pour la bonne cause. Je dois faire quelques apparitions dans des émissions pour les associations que je parraine. Comme… » Je baisse un peu le regard en me rappelant de ma sœur qui est décédée récemment. Tentative de suicide et jamais, je ne pourrais oublier son visage. « Comme celles pour les handicapés ou le droit des animaux. » J’inspirai doucement tandis que Zéro demande un peu plus de câlins. Donc, je me baisse pour le prendre dans mes bras et le caresser derrière l’oreille. « Lorenzonien. Non masculin. Mais j’ai rencontré quelqu’un. Enfin, c’est compliqué. » Pas tant que ça. Il fallait juste que j’aille le voir pour lui dire que j’étais célibataire. « Moi non plus. Le sexe ne m’intéresse vraiment pas. » Je hoche la tête à sa demande avant de me relever. « Allez, montre-moi ton palace. »