all that I hope, is it just smoke and mirrors ? (olivia & lily-anaëlle)

Depuis qu’il avait retrouvé Olivia, depuis que celle-ci était revenue à Bowen après un départ soudain, Nelligan avait eu de la difficulté à renouer avec elle. Certes, leurs retrouvailles distantes et quelque peu houleuses en raison d’Asriel et du côté que Nelligan avait pris dans l’histoire n’avaient pas aidé à remettre sur les rails leur amitié. Même par la suite, leurs échanges se faisaient principalement via les réseaux sociaux, de rares sms. Des échanges de formalités, par politesse peut-être, ou en souvenir d’avant. Il l’avait invitée à son mariage, mais elle n’était pas venue. Olivia lui manquait terriblement, seulement Nelligan ignorait comment recoller les pots cassés. Lily-Anaëlle avait bien sûr rapidement compris que le trentenaire avait sans doute besoin d’un coup de pied dans le derrière pour se décider à renouer avec elle, ou alors peut-être avait-elle réellement une soudaine envie de rencontrer Olivia, mais dans tous les cas, la brunette avait proposé Nelligan de l’inviter à dîner. Tous les trois. Quand il en avait glissé un mot à la blonde, elle avait semblé plutôt enthousiasme, contre toute attente. Nelligan avait même pensé que toute la rancœur n’était que dans sa tête, que ça se passerait bien. Que pendant tous ces mois il n’aurait pas dû craindre que quelque chose se soit brisé entre eux. Bref, le fait d’être accompagné de Lily-Anaëlle pendant cette seconde rencontre officielle avec Olivia lui facilitait grandement la tâche. S’il y avait des malaises, s’il y avait des silences, ils auraient trois têtes pour les combler. Ce ne serait pas aussi intimidant. Et dire qu’Olivia et Nelligan étaient si proches l’un de l’autre avant, et voilà qu’il appréhendait un repas en sa compagnie. C’était idiot. Le repas était donc prévu pour ce soir, et Lily-Anaëlle et lui venaient de terminer de préparer les accompagnements. Ni l’un ni l’autre n’était un chef cuisinier, mais ils s’étaient débrouillés avec des recettes faciles. « Pffff. Un stress de moins. » Lança Nelligan en refermant la porte du fourneau après s’être assuré que tout se passait bien là-dedans. « Dis-moi que ça va bien aller. » Supplia-t-il à son épouse, avant de l’embrasser. Au moment où ses lèvres touchaient les siennes, la sonnerie retentit. La boule qui s’était nouée dans l’estomac de Nelligan s’affirma un peu plus. Il se rendit jusqu’à la porte d’entrée et ouvrit la porte à Olivia. Il afficha un grand sourire. Malgré tout ce qui s’était passé, l’avoir près de lui était toujours rassurant. « Livia ! Rentre, fais comme chez toi ! » Il s’écarta pour la laisser passer, ne sachant même pas s’il devait lui faire la bise, l’étreindre ou lui serrer la main. Comme il était bête.

Nelligan avait demandé à inviter une des ses amies pour le souper et tu n'y avais vu aucun inconvénient, proposant même de lui laisser la maison pour la soirée, tu en aurais profiter pour aller chez Nevaeh, en savoir plus sur sa demande en mariage de St-Valentin, ou peut-être chez Léo et voir comment Jonathan avait pu grandir, à condition qu'il l'ait eu ce soir là. Mais non, il avait refusé, demandant à ce que tu restes avec lui, il voulait te présenter Olivia, la fiancée d'Asriel, aussi l'un de ses amis. Tu étais ravie de pouvoir partager son monde, de faire une nouvelle rencontre. Tu avais rigolé lorsqu'il avait proposé de faire le dîner mais avec toute ta bonne foi, tu avais fait ce que tu avais pu pour lui venir en aide. Il en avait fait plus que toi, c'était bien vrai mais tu avais mis la main à la pâte et pour le moment rien n'avait cramé. Tout avait l'air bon en plus. Un progrès pour toi, si tu devais inviter Fleur et Concho, tu en connaissais deux qui seraient ravis. Tu allais te laver les mains, tandis qu'il jeter un énième regard au four. « Tout va bien se passer. » Tu lui attrapais la main, avec un grand sourire sur le visage. Pour toi, c'était une évidence. Cette soirée allait être génial. Tu savais qu'il y aurait peut-être des tensions d'un côté comme de l'autre, des appréhensions aussi. Mais tu étais là pour jouer le tampon entre les deux si le ton venait à changer. Tu ne voulais plus qu'ils se déchirent, tu ne voulais pas le voir triste, le savoir triste parce qu'elle manquait à sa vie. Tu avais peut-être trop d'illusions, trop d'optimisme à vouloir que tout le monde soit ami avec tout le monde et que de vieux amis le soient toujours. C'était bien risible quand on savait que de ton côté, tu n'avais plus le moindre contact avec Jade et Brett. Pourtant, elle a été ta meilleure d'enfance. Ou même avec Ally, si on voulait prendre quelque chose de plus récent. Pour Ally, peut-être que c'était elle qui avait coupé les ponts, ne te donnant aucun moyen de la contacter mais il n'en restait pas moins que tu ne cherchais pas à faire l'effort non plus de la retrouver. Tu te contentes d'attendre qu'elle revienne vers toi, vers vous. Tu sors de tes pensées lorsque l'on sonne à la porte. La voilà. Tu lâches sa main et il s'empresse d'aller ouvrir. Tu restes derrière lui, le temps qu'il l'accueille et lorsqu'il lui propose de faire comme chez elle, tu t'avances à ton tour, un large sourire sur les lèvres. « Bonsoir Olivia ! » Tu t'approchais d'elle pour la prendre dans tes bras. C'était peut-être trop chaleureux mais tu avais envie de l'accueillir comme il se devait. Après tout, c'était une très bonne amie de Nelligan et tout ami de ton mari serait aussi ton ami.

Lily-Anaëlle était toujours là pour le rassurer, à coup de paroles réconfortantes, d’étreintes et de sourire. Rien qu’à croiser son regard, c’était suffisant. Tant qu’il aurait Lily-Anaëlle dans sa vie, il était vrai que tout allait bien aller. Parce que peu importe les misères ou les difficultés rencontrées dans une journée, il savait que le soir venu, il s’endormirait sur le même oreiller qu’elle. C’était tout ce dont il avait besoin, pour s’y accrocher, pour continuer à avancer. Avec Olivia, Nelligan désirait réellement aller de l’avant, mettre derrière eux leurs retrouvailles des plus ratées. Alors qu’il aurait dû être heureux de la revoir, peu importe les circonstances de son départ, peu importe le mystère de son retour, Nelligan s’était mêlé d’affaires qui ne le regardaient pas. Ça avait foutu en l’air leur complicité. Il voulait maintenant la retrouver. D’ailleurs, elle sonna à la porte, et le couple alla l’accueillir. C’est Nelligan qui ouvrit la porte et la laissa rentrer, ne sachant même pas comment bien la saluer, alors il ne fit que s’écarter. Lily-Anaëlle en profita, elle, pour s’approcher d’Olivia et la serrer dans ses bras. Il les regarda avec un sourire gêné. Il aurait aimé avoir la simplicité de son épouse, elle ne se posait jamais trop de questions inutiles, elle ne mettait pas trente ans à prendre une décision avant de réaliser qu’il était trop tard pour poser le geste. Mais Nelligan était Nelligan, un malaise sur pattes, une timidité bien trop grande, un manque de confiance qu’on pouvait confondre avec un besoin de distance. Quand Olivia et Lily-Anaëlle se détachèrent l’une de l’autre et eurent terminé de se parler, Nelligan osa quand même rattraper son erreur et s’approcha de son amie pour l’enlacer à son tour. On va dire qu’il n’avait pas eu le temps de le faire avant … « Je suis content de te voir. » Dit-il, la bouche contre sa chevelure dorée. Il se recula de nouveau et ferma finalement la porte derrière elle. « Le repas sera prêt bientôt, tu veux quelque chose à boire en attendant ? Bière, vin rouge, vin blanc ? » Nelligan avait acheté un peu de tout, ne sachant même plus ce qu’Olivia préférait boire. Ça n’avait été que deux mois d’absence et pourtant, il avait l’impression que tout en elle pouvait avoir changé. Il réaliserait bien vite qu’au fond, l’un comme l’autre était les mêmes, et que rien ne les empêchait plus maintenant de se retrouver comme avant. Le jeune homme se tourna vers son épouse après avoir mentalement pris en note le choix d’Olivia. « Et toi mon amour ? » Demanda-t-il. Elle en avait assez fait, tout l’après-midi, à l’aider à préparer le repas. Elle pouvait se laisser servir, maintenant.

L'étreinte avait été réciproque. Elle t'avait gardé dans ses bras pendant une longue minute. Toi qui pensais avoir peut-être été trop loin dans ta façon de l'accueillir, tu étais ravie de voir que non. Que ça semblait lui allait et même lui faire plaisir. Elle t'offrait un sourire radieux, en te demandant si elle pouvait te tutoyer. C'était une question qui n'avait pas besoin de réponse pour toi parce que c'était une telle évidence : bien sûr qu'elle le pouvait. Elle était libre de t'enlacer, de te sourire, de te tutoyer, de te poser des questions sur tout et n'importe quoi. Tu te ferais un plaisir de lui répondre  « Le plaisir est partagé, et tu le peux oui ! » Tu affichais un grand sourire, déjà toute excitée comme une puce. La soirée venait de commencer maintenant qu'elle était entrée chez vous. Et très vite, Nelligan semblait rattraper son accueil, peut-être lui avait-il semblait trop froid, trop impersonnel. Tu ne saurais pas dire, mais le voir la prendre dans ses bras, ça te faisait chaud au coeur. Signe que la soirée, allait être génial. Du moins, c'est ce que tu espérais. Tu l'écoutais lui proposer diverses boissons pour entamer l'apéritif, t'apprêtant à t'en charger pour lui laisser le temps de parler un peu avec elle mais il te coupait l'herbe sous le pied en te demandant ce que toi tu voulais. Tu n'avais même pas réfléchis à ce que tu voulais. Tu avais le ventre un peu barbouillé, réalisant maintenant que tu n'étais pas en si grande forme. Tu évaluais rapidement les options pour ne pas le laisser sans réponse trop longtemps. Tu avais pris la résolution de boire moins, tu n'étais pas une pochtronne, mais pendant quelques mois de ta vie l'an dernier, tu avais un peu trop forcé sur la bouteille. Tu ne voulais pas vraiment revivre quelque chose de semblable et en même temps tu avais l'impression d'être une intrus si tu prenais quelque chose sans alcool. Tu allais tout de même écouter ton corps et éviter les folies. « Moi je pense que je vais prendre quelque chose de plus léger, avoir cuisiné toute la journée, ça m'a retourné l'estomac, alors je vais opter pour un jus de fruit. » ajoutais-tu avec une légère moue. Il s'en allait en direction de la cuisine et tu reportais ton regard sur Olivia, toujours debout là, face à toi. « Viens donc t'asseoir, tu ne vas pas rester debout à l'entrée ! » Sans plus attendre, tu lui tires un peu sur le bras pour qu'elle entre un peu plus dans la maison. Tu devais bien te douter qu'elle était intimidée, peut-être un peu surprise de ton accueil et de celui de Nelligan mais vous étiez là pour passer une bonne soirée et tu avais envie de te donner à 300% pour que ça puisse arriver.

Face à l’étreinte de Nelligan, Olivia laissa s’échapper un doux rire d’entre ses lèvres, sans doute amusée de le voir se rattraper ainsi, ou alors ravie qu’il se soit un peu décoincé. Elle affirma être contente de le voir. Après ces salutations plus longues qu’à l’habitude, Nelligan ferma enfin la porte derrière eux et invita la blonde à se diriger vers le salon. Il proposa aux deux femmes quelque chose à boire, et ce même s’il avait bien vu le mouvement de Lily-Anaëlle qui avait annoncé son intention de le faire. De un, elle en avait déjà fait bien assez alors qu’elle ne connaissait pas encore Olivia, et de deux, ça lui permettrait de se remettre les idées en place. Il avait l’impression qu’il pourrait se mettre les pieds dans les plats à n’importe quel moment en disant une connerie, et il allait devoir s’enlever un peu de pression parce que sinon, la soirée allait être bien malaisante. « Deux verres de vin rouge, et un jus ! Je reviens. » Il lança d’ailleurs un regard à Lily-Anaëlle après qu’elle ait opté pour un jus de fruits. Certes, son explication était justifiée, mais depuis qu’ils étaient mariés et essayaient d’avoir un enfant, il était toujours un peu aux aguets de ce genre de signe. Il ne devait toutefois pas trop y lire quelque chose, parce qu’il finirait par être déçu à force de se faire des espoirs à chaque fois qu’elle passait son tour sur l’alcool ou qu’elle était un peu plus fatiguée qu’à l’habitude. À son retour, le verre et les coupes tenant miraculeusement dans ses deux mains, Nelligan tendit son verre à Lily-Anaëlle. « Tiens, honey. » Et se dirigea ensuite vers Olivia. « Et pour toi Liv’. » Il se permettait de reprendre ses vieilles habitudes, après tout c’était comme ça qu’ils retrouveraient ce qu’ils avaient eu auparavant. Le jeune homme s’installa à côté de son épouse et leva les yeux vers son amie. « Lily avait tellement hâte de te rencontrer. On a pas mal de photos ensemble dans mes vieux documents sur l’ordinateur, et je pense qu’il était plus que temps de lever le mystère sur ta personne ! » Dit-il avec un rire, se remémorant les diverses photographie avec Olivia, notamment à des fêtes d’Halloween. « Alors, quoi de neuf depuis … depuis la dernière fois ? » Inutile de mettre l’emphase sur le fait que leur dernière rencontre avait été désastreuse, mais son manque de tact laissait bien comprendre qu’il y pensait encore.

Tu avais vu son regard lorsque tu avais parlé de prendre un jus de fruit. Comme un signale de détresse et tu n'avais pas pu t'empêcher de sourire. Son esprit était peut-être un peu trop en alerte depuis le mariage. Certes, vous aviez parlés des enfants, c'était un sujet quasiment inévitable pour un couple marié et encore plus pour vous parce que l'un comme l'autre, vous en désiriez plus que jamais. Alors forcément, le fait de ne pas boire d'alcool pourrait le laisser penser que c'était le cas mais tu avais juste un mal de tête et tu ne voulais pas l'accentuer. Tu secouais doucement la tête avec un fin sourire pour qu'il relâche toute sa pression. Pas encore, peut-être bientôt, en tout cas, tu l'espérais. Maintenant que tu l'avais épousé, tu désirais plus que tout porter ses enfants et construire une colonie de bébés Malinowski. « Merci ! » Tu lui offrais un grand sourire alors qu'il prenait place juste à côté de toi. Tu le laissais parler de la raison de sa présence ici. Certes, tu avais envie de la rencontrer, parce que c'était toujours intéressant mais la vraie raison de ce dîner c'était de leur permettre de renouer dans l'ambiance la plus sereine possible. Dû moins, c'est ce que tu allais essayer de réaliser. « Oh oui, ça c'est bien vrai ! Nelligan a rencontré tellement de mes amis au mariage, que forcément, je voulais rencontrer aussi ceux qui partagent sa vie et ça ne peut pas se faire sans te connaître, toi ! » ajoutais-tu lorsqu'il avait fini de parler. Tu offrais un sourire à Olivia et tu laissais Nelligan reprendre la parole, prête à écouter ce qu'il y avait de nouveau dans la vie de la jeune femme. Bien que tu n'en saches pas beaucoup sur elle au final.

Quand Lily-Anaëlle secoua la tête doucement, il ne put s’empêcher d’être soulagé, pour cette fois. Juste parce que cette soirée était entièrement dédiée à Olivia, et que c’était déjà un stress assez immense, alors s’il fallait en plus qu’il apprenne qu’il allait être papa, même si c’était en soi une très belle nouvelle il ferait certainement une crise cardiaque. Trop d’émotions. Il hocha donc la tête avec un doux sourire et alla chercher les trois consommations avant de rapidement revenir au salon, ne voulant pas laisser Olivia et Lily-Anaëlle dans un silence inconfortable. Il savait fort bien ce que c’était que d’être en compagnie de quelqu’un qu’on ne connaissait pas, et même si ça lui avait permis de respirer un peu mieux le temps d’une minute, il revint bien vite. « Ça fait plaisir. » Répondit Nelligan quand la blonde le remercia pour le verre de vin. C’était tellement trop formel, en ce moment. Ça lui tordait le cœur, ça lui nouait la gorge, de voir à quel point ils s’étaient perdus en chemin, tous les deux. Eux qui avaient autrefois tant de facilité à s’amuser, à rire, à s’aimer. La présence de Lily-Anaëlle n’était pas anodine, elle avait toujours su faire ressortir le meilleur chez les gens. Il espérait qu’elle les aiderait à se retrouver, tous les deux, même s’il se sentait bien con de lui demander de jouer un tel rôle. Ce n’était pas à elle de réparer les pots cassés, c’était à Nelligan et à Olivia de réparer leur gaffe. Question d’intégrer davantage sa femme, le jeune homme releva le fait qu’elle était bien impatiente de rencontrer Olivia. Lily-Anaëlle attrapa la perche tendue et renchérit sur le sujet. Olivia se contenta de sourire, et le cerveau de Nelligan recommença à rouler à cent milles à l’heure pour trouver quelque chose à dire. Alors il lui demanda ce qu’il y avait de neuf dans sa vie, même si dans les circonstances, c’était le pire sujet à aborder. Olivia leur confia alors avoir revu Asriel, ce qui eut évidemment l’effet d’une bombe sur Nelligan. Il ne s’attendait pas à ce que son prénom soit dit aussi rapidement ce soir. Ce sujet était tellement tabou. « Oh … » Fut la seule chose qu’il réussit à dire avant que la blonde ne reprenne la parole pour changer de sujet, complètement. Elle parla de son emploi, cet endroit où ils s’étaient revus par hasard, cet endroit où tout avait changé entre eux. « Ah, oui, je vois ça ! Ils devraient vous fournir des gants de caoutchouc pour protéger vos mains … ou … un truc comme ça. » Dit-il, peu certain de ses propres paroles. C’était du small talk qui habituellement passait bien entre amis, mais là, ils ne savaient que trop bien que c’était pour remplir un silence trop pesant. Nelligan se tourna vers Lily-Anaëlle, même si son envie de questionner Olivia sur Asriel était grandissante. Ça exploserait, bientôt, il le savait. « Lily aussi en a arraché avec le boulot, ces derniers temps. Sa librairie a été fortement touchée par le séisme et il a fallu tout reconstruire. » Commença-t-il à expliquer.

Tu les regardais se parler, avec un peu de timidité, de gêne dans les mots choisi chez l'un comme chez l'autre. Tu voyais de la tendresse, dans leurs regards. Mais peut-être qu'il y avait aussi de la rancune. Des reproches qui vont jaillir comme des flammes et faire plus de mal qu'on ne le voudrait vraiment. Dans un silence, tu buvais ton jus de fruit, essayant de suivre les histoires. Tu vis la réaction de ton mari à la prononciation du prénom d'Asriel. Mais il n'en ajoutait pas un mot, bien que ça devait le démanger, tu le voyais dans son regard, dans son comportement. Et malgré tout, il essayait de détourner la conversation sur toi. Ce qui ne te mettait pas vraiment à l'aise. « Je ne suis pas sûre que ce soit vraiment très intéressant tu sais. » Tu sentais les choses prendre une tournure qui ne te plaisait pas. Une tournure qui te faisait même peur parce que cela voulait dire que ça allait éclater. Et tu voulais à tout prix éviter que ça arrive, mais tu n'avais aucun contrôle sur la situation, tu n'étais pas certaine de trouver la bonne chose à dire mais il fallait quand même le tenter. « Et si on passait à table ? » proposais-tu dans un élan, presque désespérée. Mais tu n'étais pas découragée, pas encore en tout cas, tu devais bien avoir plus d'un tour dans ton sac. Il te fallait juste trouver le sac. « Moi je meurs de faim ! » Tu esquissais un grand sourire, te levant dans un bond pour aller poser ton verre et continuer la discussion autour d'un bon repas. Il y a bien un adage qui disait que la penche pleine, les rancunes s'effaçait. Et tu étais persuadée que ça pouvait vous arriver.

Alors que Nelligan essayait du mieux qu’il le pouvait d’intégrer Lily-Anaëlle dans la conversation, et par la même occasion de dissiper le malaise qui régnait entre Olivia et lui, son épouse semblait tout aussi intimidée. Elle tentait même de taire le sujet de conversation la concernant, comme pour passer à un prochain numéro sans avoir à rajouter quoi que ce soit. Décidément, cette idée de dîner à trois était peut-être prématuré. Nelligan aurait dû prendre son courage à deux mains et revoir Olivia seul à seul, question de s’ouvrir l’un à l’autre une bonne fois pour toute et, surtout, mettre toutes ces histoires derrière eux. Là, en utilisant Lily-Anaëlle comme point d’équilibre, comme diversion, il avait mis tous les trois dans une situation délicate et plutôt désagréable. Il s’en voulait, c’était évident. « Well, c’est pas à tous les jours qu’un séisme arrive à Bowen et détruit ton lieu de travail … » Avait dit Nelligan, presque agacé que la brunette ne réponde pas à son appel à l’aide de changement de discussion. Pourtant, ce n’était pas de sa faute, il savait bien que tout était sur lui. Il ne savait plus où se mettre, tout simplement. Olivia prit le flambeau en accrochant plutôt sur le métier de Lily-Anaëlle, lui posant des questions à ce sujet.

Lily-Anaëlle proposa finalement de passer à table, ce qui changerait peut-être l’ambiance. La pièce du salon était officiellement lieu de malaise et de non-dit. Espérons qu’avec un peu de chance, la salle à manger leur réservait une plus belle soirée. Comme si elle avait un ressort sous les fesses, la jeune femme bondit et se dirigea vers la cuisine, suivie par Olivia et Nelligan qui ne s’étaient pas faits prier pour la suivre. « On a préparé des manicottis, il y en a avec de la viande et d’autres végétariens, je ne savais pas vraiment tes préférences … » Avoua-t-il. « On a aussi fait quelques salades pour accompagner. » Ils s’étaient donnés, c’était le cas de le dire. Alors si la conversation ne coulait pas, le vin et la nourriture, eux, se feraient aller. Olivia fit alors une remarque sur son vin déjà terminé. Nelligan éclata de rire à son tour, comme emporté par le rire de sa vieille amie. « Tant mieux ! J’avais acheté des bouteilles pour trois, mais puisque Lily nous les laisse pour nous deux, alors on a bien des verres devant nous ! » S’exclama-t-il plus chaleureusement. Évidemment, ils n’avaient pas à tout boire ce soir juste parce qu’elles avaient été achetées, mais Nelligan se disait qu’au fond, ça leur ferait du bien de se détendre un peu avec quelques verres en plus. Il resservit donc Olivia et sa propre coupe par la même occasion.

Tu n'avais pas tout de suite compris que ton mari te lançait un appel de détresse, comme s'il avait peur de dire une bêtise et qu'il voulait que tu l'épaules à trouver un sujet de conversation. Un sujet neutre et peut-être inutile comme la pluie et le beau temps, pour éviter de faire une gaffe et d'engager une conversation que l'un ou l'autre ne serait pas prêt à entendre. « Non c'est vrai. D'ailleurs le séisme a causé beaucoup de dégâts. Tu étais en ville ce jour là toi ? » demandais-tu en jetant un grand regard à Olivia, peut-être qu'elle avait eu la chance d'éviter la catastrophe. Tu n'avais pas eu l'occasion d'appeler tous tes amis et avoir des nouvelles de tout le monde, juste après tout ça, tu avais été retrouvé ton cher et tendre à l'hôpital parce qu'il avait eu des jours difficiles. Le coma pour commencer, puis les petites complications au réveil. Et après, il y avait eu tous les préparatifs pour le mariage et le monde avait tourné à une vitesse incroyable. Vous vous étiez levés pour passer à table. Elle avait une seule question, à savoir ce qu'il y avait de prévu pour le repas ce soir. Tu laissais ton mari prendre le soin de lui répondre, tandis que tu lui adressais un grand sourire. « Et il y a mis tout son cœur ! » Il avait longtemps réfléchis à ce que vous pourriez faire, à ce qu'elle aimerait ou non, ne se souvenant plus de si elle mangeait ou non de la viande. Le choix avait été assez compliqué mais au final, tu étais ravie de votre création. « J'espère que tu as bon appétit parce que sinon, tu auras des restes pour des jours. » Parce qu'en plus des manicottis, comme il venait de le dire, il y avait diverses salades pour accompagner le tout. Vous aviez vraiment cuisiné pour tout un régiment, tout le quartier aurait pu vous rejoindre pour le repas. Mais c'était fait de bon coeur et même si vous n'en mangiez même pas un quart. « Et si tu as besoin de dormir ici, on a une superbe chambre d'amis ! » Tu lui offrais un charmant sourire, tu espérais qu'ils ne boiraient pas plus que de raison, mais on ne sait jamais, avec la tension des retrouvailles, ils seraient capables de se laisser emporter. Le fait que tu ne boives pas, te donner aussi l'occasion d'être un meilleur tampon en cas de problème.