We all make mistakes (Scott et Kida)

La journée touchait à sa fin quand Tahlia et son partenaire reçurent un appel de la centrale. Une vieille dame venait d'appeler la police, après avoir entendu une forte dispute chez ses voisins. Il s'agissait visiblement d'un jeune couple avec un bébé. Et ce n'était pas la première fois qu'elle les entendait se disputer. La jeune policière tiqua en entendant cela. Elle tentait de fuir, du mieux qu'elle pouvait, tous les cas de disputes ou violences conjugales, parce qu'elle savait qu'elle ne serait jamais totalement objective dans ce genre de situation. Mais là, elle ne pouvait s'enfuir, alors elle confirma, à travers le talkie-walkie qu'ils prenaient en charge la mission. Son partenaire démarra la voiture et prit la direction de l'adresse indiquée par la centrale. En moins de cinq minutes, les deux policiers furent sur place. Tahlia poussa un long soupir en descendant du véhicule, fermant la portière d'un coup sec. Son partenaire lui lança un regard interrogateur, mais l'expression sur le visage de Tahlia le dissuada de poser la moindre question. Ils entrèrent dans l'immeuble et montèrent jusqu'à l'étage où se trouvait l'appartement. La petite dame se trouvait sur le pallier de sa porte, alors qu'elle montra d'un signe de la main, la porte de l'appartement où quelques éclats de voix se firent encore entendre. Des pleurs de bébé s'entendaient également. Tahlia avança jusqu'à la porte et appuya longuement sur la sonnette, afin de faire taire la dispute. Les voix s'arrêtèrent de l'autre côté de la porte et Tahlia lança, d'une voix forte et claire : "Ouvrez, s'il vous plaît. C'est la police !"

Toujours ce même foutu reproche. Et Scott a eu le malheur de lui rétorquer que c’est elle qui l’avait poussé à se lancer là-dedans. Il aurait dû le sentir venir que ça allait dégénérer, il le sait maintenant qu’elle part au quart de tour pour un rien. Mais il n’arrive pas à ne rien dire, il ne peut pas juste la laisser le rabaisser comme ça en permanence, il a encore un minimum d’amour propre à sauvegarder. Il essaie, mais sans succès. Ça commence avec une gifle. Scott se tient la joue, mais ne dit rien. Il tente de calmer le jeu. Mais plus il parle, et plus elle devient violente. Le pire, il ne sait pas comment, mais elle semble savoir comment faire pour que ça ne se voit pas. Il n’a jamais de mal à dissimuler les traces que leurs « disputes » peuvent laisser sur lui. Il s’est déjà posé la question, mais hors de question d’essayer de la lui poser à elle. Il est évident qu’elle ne lui répondra pas et il risquerait simplement de l’énerver, plus encore. Alors il subit, encore et toujours, sans répliquer. Il ne lèvera pas la main sur elle, même pour se défendre, il n’en est pas capable. La seule chose qui lui ferait réagir violemment, c’est si elle venait à s’en prendre physiquement à leur fils. Ce dernier d’ailleurs, pleure, et il aimerait pouvoir aller le calmer, le réconforter, mais il ne semble pas pouvoir s’échapper de la fureur de sa compagne. Le pire dans tout ça, c’est que comme d’habitude, après coup, elle va s’excuser, lui dire qu’elle aime, et lui, il va lui pardonner. Ça cri, ça hurle, il ne se laisse pas complètement faire, il ne peut pas ne pas lui répondre, c’est plus fort que lui. Se taire la calmerait un peu — ou peut-être pas d’ailleurs —, mais c’est plus fort que lui, il n’y arrive pas. Et les pleurs de Soan par-dessus le marché, n’aide pas à calmer sa mère. La sonnette retentit, mais ne coupe pas totalement la dispute. C’est l’annonce qui résonne juste après, qui met fin à l’altercation. Scott panique en entendant que c’est la police. Il lance un regard inquiet vers Kida, et le regard qu’elle lui lance en retour est plein de reproches. Ce n’est pas très rassuré qu’il entre ouvre et se retrouve face à une femme et un homme un peu en retrait. Il aperçoit aussi leur voisine de palier, et comprend que c’est elle qui les a prévenus. Il lui en veut, car ça ne va pas arranger la situation ça. Mais en même temps, il comprend le geste et ne lui en veut pas vraiment. « Bonjour ? » Le jeune homme tente d’esquisser un sourire et de faire bonne figure, en espérant qu’ils ne chercheront pas à entrer, même s’il se doute que c’est un peu utopique de l’espérer. S’ils sont là, ce n’est pas pour repartir comme ça… malheureusement. Il ne veut pas mêler la police à ses histoires de couple. Ce n’est rien, ça va bien finir par s’arranger, non ?

We all make mistakes.

Tahlia & Scott

Je rentre de ma journée de boulot, je suis fatiguée. Et j’espère pouvoir me poser. Mais bien entendu c’est trop demander. C’est trop te demander. Tu es assis à ton bureau quand je rentre dans notre appartement. « Salut. » C’est peut être un peu froid mais vu le bordel difficile de faire mieux. La vaisselle traine dans l’évier et le linge n’est pas plié. La seule chose positive c’est Soan qui dort tranquillement. « Tu as encore passé ta journée à glander. Génial quelle chance tu as de pouvoir te le permettre. » Et le ton monte. Encore une fois. Je ne supporte plus de te voir là sans rien faire. Tu as surement passé ta journée à faire des traductions mais tu aurais pu prendre quelques minutes pour ranger ce qui traine. Histoire que je n’ai pas encore une fois la sensation que tu ne sers à rien. Et je m’emporte et tu ripostes. Tu me tiens tête et cela rend ma rage plus vorace. Tu ferais mieux de fermer ta gueule mais non tu insistes. Du coup une gifle part. « Tu l’as mérité. Tu me cherches. A croire que tu le fais exprès. Juste pour me mettre en colère. » Cela me rend dingue et je tape encore sachant où poser mes coups pour que cela reste discret. Pas besoin d’étaler nos problèmes à la vue de tous. Déjà que les voisins font chier avec les disputes qui se font plus fortes. Mais la faute à qui ? Pas à moi en tout cas. Et je crie. Je hurle. Soan se réveille en pleurant. « Génial franchement tu es le roi des cons Scott. Putain tu fais chier. Tu ne peux pas juste faire ce qui a à faire. Non. » Pas question que j’aille le calmer. Dans les moments comme ça je ne le supporte pas. Cela me dégoute encore plus d’être mère. « Fais le taire putain. Sinon tu vas encore t’en prendre plein la gueule. » De toute manière tu ferais n’importe quoi pour Soan. Même si j'insinue le doute dans ton esprit en te balançant qu'il n'est pas ton fil. Tu as peur pour lui, je le sens. Mais je ne le toucherais jamais. De toute façon après je regrette toujours et je reviens vers toi pour me faire pardonner. C'est ma façon de t'aimer et de me battre contre mes démons. Parler serait plus simple, mais comment te dire qu'une partie de moi est morte à mes 17 ans. Et qu'elle est morte encore durant ma grossesse. Je croyais qu'avec toi tout serait différent. Que je retrouverais cette sensation de conte de fée. Mais ce ne fut que le temps d'une rose. La sonnette retentit. Et le silence ce fait. Brutal et froid. Et je te regarde. Tu n’as pas intérêt à jouer au con en ouvrant la porte. Du coup je m’occupe de Soan presque à regret mais pas le choix si je veux le faire taire. J’attends. Le petit dans les bras je reste en retrait. Calmant mon cœur et mon souffle de tous mes mots. Me demandant qui est là, à cette heure un peu tardive. Je te sens hésitant. « C’est qui chéri ? Un voisin ? » Ma voix c’est faite plus douce d’un coup. Je la trouve presque irréelle. J'emploie même un mot d'amour comme si tout était parfait. Je tiens Soan contre ma poitrine. Je le câline, le calme. Lui dit des mots doux mais je ne te quitte pas des yeux. Espérant que cet intermède ne va pas s’éterniser. Nous n’avons pas fini de régler le problème.

La porte s'ouvrit sur un jeune homme d'une vingtaine d'années. Un sourire vint étirer ses lèvres mais Tahlia n'était pas dupe. Elle connaissait ce sourire. C'était celui que l'on affichait pour montrer à tous que tout allait bien. Tahlia l'avait utilisé durant ses jeunes années et aujourd'hui encore, cela restait une chose commune. On ne pouvait pas la berner sur ce terrain-là. Le policier qui l'accompagnait répondit à son bonjour, auquel Tahlia ajouta un hochement de tête comme simple salutation. Elle était bien trop occupée à observer le jeune homme, comme si elle espérait trouver le moindre détail qui la mènerait sur une première piste. C'était peut-être une simple dispute conjugale, propre à tous les couples. Mais ce n'était pas la première fois que cela avait lieu... la voisine l'avait assuré. Une voix féminine se fit entendre dans l'appartement, faisant sortir Tahlia de ses rêveries. Les pleurs du bébé commençaient peu à peu à se calmer. C'était le calme après la tempête.  La jeune femme reposa son regard sur l'homme se tenant à l'encadrement de la porte et annonça doucement : "Nous avons eu un appel de vos voisins, nous expliquant qu'une dispute était en train d'éclater chez vous." Elle avait tout de même baissé la voix afin de ne pas alerter tout l'immeuble. Elle ne voulait pas les mettre dans une position d'autant plus délicate. "Peut-être pourrions-nous en discuter à l'intérieur, si vous nous le permettez ? Ce serait mieux." C'était une question qui évidemment n'envisageait aucun refus. Quand la police se présentait à votre porte, il valait mieux abdiquer.

Comme si ce n’était déjà pas assez la merde comme ça entre lui et Kida, il fallait qu’une voisine ait la merveilleuse idée d’appeler les flics et que ces derniers viennent foutre leur nez dans leurs histoires de couples. C’est vrai que Scott a conscience que leur relation est loin d’être une relation de couple normal, mais il espère que c’est que passager. Il sait qu’elle n’a pas toujours été comme ça. Ça va bien finir par passer. Ça va bien finir par redevenir ce que c’était avant, non ? S’il pensait avoir besoin de la police, il se serait chargé lui-même de les faire venir. Mais non, la vieille voisine s’est senti l’âme d’une héroïne en pensant sûrement bien faire. Le pire, c’est que si le jeune homme lui en veut un peu, parce que cet intermède va sûrement rendre Kida folle de rage et que c’est sur lui que ça va retomber, il ne lui en veut pas totalement. Il se doute bien qu’elle ne pensait pas à mal. Les disputes c’est récurant chez eux, la vieille sait aussi qu’ils ont un bébé et puis, elle doit juste en avoir marre de les entendre se hurler dessus à longueur de temps. Comment lui en vouloir ? Scott essaie de paraitre le plus normal possible. Il fait bonne figure comme si tout allait bien, alors que ce n’est absolument pas le cas, comme pourrait en attester quelques bleus cachés sous son t-shirt. « C’est la police chérie. » Ne pas mentir, ce serait le pire à faire. De toute façon, ils sont là, juste devant lui, que pourrait-il répondre d’autre ? Tout ce qu’il espère, c’est juste qu’ils ne s’éternisent pas, qu’ils n’entrent pas. Le problème peut se régler entre Kida et lui, pas besoin d’agents de police pour ça. Peine perdue. « Oh euh oui. C’est rien vous savez, juste deux caractères forts pas toujours d’accord. » Il tente de les dissuader de vouloir en savoir plus. Il essaie de les rassurer sur le fait que ce n’est rien de grave, même si au fond de lui, il sait que si, c’est grave et loin d’être normal comme dispute. Mais rien à faire, ils veulent entrer. Scott regarde une nouvelle fois vers sa compagne, qui tient leur fils qui s’est enfin calmé. Il n’a pas le choix que d’abdiquer et de les laisser entrer. Le jeune papa ouvre la porte un peu plus largement. « Je vous en prie, entrez. » Il referme rapidement derrière eux, jetant un dernier coup d’œil vers la voisine. Regard entre colère et compréhension. Puis Scott se rend rapidement auprès de Kida et Soan, il prend d’ailleurs ce dernier des bras de sa mère pour le câliner. Il en a sûrement besoin plus que le bébé. Mais simule le couple heureux, en entourant la taille de sa compagne, d’un bras. « C’est la voisine qui les a appelés à cause de la dispute. Je leur ai dit qu’on a juste des caractères forts tous les deux et qu’on n’est pas toujours d’accord. Comme un couple normal quoi. » Son regard n’a de cesse de faire des va et vient entre les policiers et Kida, cherchant son approbation sur le fait s’il a bien répondu ou non. Il ne veut pas créer plus de soupçons que ce qu’ils doivent déjà penser.

We all make mistakes.

Tahlia & Scott

Les cris fusent. Et les gestes partent. Répondant en écho à mon agacement. Je suis à bout et les pleurs de Soan n’arrangent rien. J’ai juste envie qu’il se taise. Mais en criant comme je le fais c’est assez difficile de faire arrêter ses pleurs. Et toi tu restes là acceptant encore une fois ma colère. Et puis la sonnette résonne comme un appel au calme. Au départ je pense que c’est notre vieille voisine qui vient nous demander de baisser le ton. Mais j’ai la surprise d’entendre que c’est la police. La police devant notre porte. Il ne manquait plus que ça. « La police ?? » Je joue vraiment celle qui ne s’entendait pas à cette visite. Je me doute de qui les a appelé. Comme si la vieille ne pouvait pas s’occuper de ses fesses. Bon elle n’a surement pas fait cela dans avec de mauvaises intentions. Elle doit juste avoir envie de calme et avec nous comme voisin ce n’est pas gagné. Je me demande si elle se doute de ce qui se passe vraiment entre nous. Si elle se doute que c’est moi le démon dans l’histoire. Et toi la pauvre victime qui subit et t’écrase sous ma violence de plus en plus virulente. Nos regards se croisent. Mon cœur accélère. Je calme Soan ou du moins j’essaie. Espérant que tout va bien se passer et qu’ils vont vite s’en aller. Mais ils insistent pour rentrer. J’écoute chaque mot que tu prononces. Tu es parfaitement conscient qu’il vaut mieux que tu évites les faux pas. Mais malgré le fait que tu es rassurant sur la situation, ils insistent. Du coup nous nous retrouvons avec deux flics dans l’appartement. Un mec et une femme. Je les regarde tenant toujours Soan serré contre moi. Mes lèvres viennent même couvrir ses tempes de tendres baisers. Tu viens nous rejoindre et tu reprends Soan. Tu glisses ton bras autour de ma taille. Ton geste me trouble et me fait frissonner. Même si mes colères mettent à mal notre amour. Je ressens toujours les mêmes sensations quand tu me touches. Je  souris. Mon cœur s’apaise un peu. Peut être est ce du à ta présence réconfortante contre moi. Je te sens fébrile, et tu sembles chercher à justifier la situation. Mon regard capte parfois le tien. Avant de glisser sur les deux agents de police avec réserve. « Oui la pauvre elle a du paniquer.» Je prends une voix désolée, comme si j'étais vraiment ennuyée de l'avoir dérangée. Ce qui doit arriver assez souvent, mais je ne compte pas leurs dire ce genre de chose. « J’ai tendance à avoir le timbre un peu haut. Et après une journée épuisante pas toujours facile de maitriser nos tempéraments assez explosifs. Du coup on parle un peu fort sans vraiment s’en rendre compte. Mais rien de grave. Quel couple ne se dispute pas ?  En plus la réconciliation est toujours des plus agréables après. » Je glisse ma main contre ton bras. Cherchant le contact pour rendre la situation de couple parfait plus vraie et lever le doute qu'il pourrait effleurer les flics. J’ignore combien de temps ils comptent rester. De toute façon il n’y a aucune trace de lutte dans l’appartement. Aucune marque de coup sur Soan ou sur toi. Même si moi au cas où ils pensent que c’est toi le bourreau. Il y a juste une voisine qui a crié au loup alors que cela n’en valait pas la peine. « Je peux vous offrir quelque chose à boire, un jus de fruit ou un soda. » Je pourrais leur proposer de s’assoir mais je ne veux pas qu’ils s’éternisent. Même si la femme flic à l’air plus suspecte que son collègue.

Tahlia sentait cette tension qui émanait du couple, en plus du malaise apporté par les deux policiers. Pourtant, tous savaient qu'il valait mieux faire entrer les deux agents, afin de ne pas envenimer la situation. Le jeune homme leur ouvrit la porte, Tahlia passant devant son collègue pour entrer la première dans l'appartement. D'un signe de la tête, elle salua la jeune femme. Son visage était toujours aussi fermé et son regard était inquisiteur. Elle vit le jeune homme rejoindre sa compagne, jouant alors le couple heureux, qui s'aimait malgré les disputes. Son collègue lui chuchota à l'oreille, lui demandant si ça valait vraiment le coup de rester. Tahlia hocha doucement la tête. Elle ne pouvait pas l'expliquer, mais elle sentait que quelque chose clochait. Qu'ils n'étaient pas aussi heureux qu'ils voulaient le faire croire. Peut-être se montait-elle la tête pour rien, peut-être que sa propre histoire ne la rendait pas pleinement objective, mais elle ne pouvait pas repartir avec de tels doutes. Encore plus quand il y avait un enfant dans le lot. Elle les écouta tour à tour. Ils voulaient bien trop jouer le "couple normal". Le couple normal ne se balançait pas des horreurs dans la figure tous les jours ! Alors que la jeune femme leur proposa à boire, Tahlia refusa : "Non, ça ira, merci." Elle observait l'appartement, comme si cela pouvait lui donner de quelconques indices puis elle reporta son regard sur la jeune femme, l'inspectant discrètement, comme si elle cherchait la moindre trace de coups ou blessures. "Je sais que les disputes peuvent être choses courantes chez un couple. Mais ce n'est pas la première fois que nous recevons des plaintes concernant votre foyer. Avec un enfant au milieu, nous étions dans l'obligation de nous rendre ici pour nous assurer que tout allait bien." Elle observa le jeune couple, son collègue toujours aussi muet. Il avait du mal à agir face à de telles histoires. "Serait-il possible de vous parler ? Séparément, évidemment. Je commencerai par Madame..."

Scott retient difficilement le soupir de soulagement lorsque la femme refuse la proposition de Kida, cela indique probablement qu’ils ne comptent pas trop s’éterniser. Tout du moins, il l’espère fortement. Il fait tout pour donner le change, sa compagne également. Mais ce que lui rétorque la flic lui ôte tout espoir de les voir s’en aller rapidement. Il angoisse et ne sait plus vraiment quoi dire pour les convaincre que tout va bien et qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter. D’autant qu’au ton qu’elle emploi en le regardant et lui répondant, il se doute qu’elle s’imagine, comme le commun des mortels qu’il est celui qui inflige les coups à sa compagne. Dans les cas de violences conjugales c’est toujours l’homme le bourreau évidemment. A croire que cela ne peut en être autrement. Pourtant, non, ce n’est pas toujours que dans ce sens et il en est la preuve vivante. Mais non, il ne veut pas en parler, non il ne veut pas le dire, l’avouer. D’une, il en a honte. De deux, il ne veut pas enfoncer Kida, il reste encore convaincu que ça va s’arranger, il veut croire que ça peut s’arranger. Elle n’était pas comme ça avant. Alors oui, il se doute qu’elle le pense coupable de ce qu’il se passe sous leur toit, mais non, il ne fera rien pour lui faire penser le contraire. Tant pis, qu’elle croit ce qu’elle veut. Ce qui l’agace, c’est qu’elle puisse penser que Soan est en danger. « Notre fils va très bien. Oui on se dispute peut-être un peu souvent en ce moment, y’a des passages comme ça ou on n’est pas d’accord sur tout et comme je l’ai dit, on a deux caractères fort, alors rapidement ça part en dispute. Mais on se réconcilie aussi très rapidement juste après. Y’a vraiment pas de raison d’en faire un plat. » Scott n’a aucune idée de s’il arrange la situation où de s’il l’empire, même si vu l’entêtement dont la femme semble faire preuve, c’est peine perdue d’avance et peu importe ce qu’il dira, elle restera jusqu’à s’assurer que Kida et le bébé se porte bien. Heureusement en un sens que c’est l’inverse, elle n’aura probablement pas l’idée de vérifier le corps de Scott et verra donc qu’il n’y a rien à voir ni sur la mère, ni sur le fils. Comme il s’y attendait, elle ne compte pas partir et il a compris qu’il vaut mieux aller dans son sens. « Oui d’accord. Si ça peut vous assurer que tout va bien. » Scott libère Kida de son étreinte, puisque c’est à elle que la femme veut parler en premier. Lui tient toujours Soan dans ses bras, observant l’homme qui n’a pas beaucoup parlé depuis leur arrivée. Il n’a pas l’air à l’aise et semble n’avoir qu’une envie, s’en aller. Dommage que sa collègue ne soit pas comme lui. « Ça vous dérange si on va au salon, pour le petit, l’occuper ? » Il s’adresse à l’homme, en attendant que les femmes discutent ensemble. Soan commençant à s’agiter dans ses bras. C’est un petit garçon calme, mais ne rien faire en restant dans les bras de ses parents trop longuement, ça l’ennui vite. Scott le pose doucement dans son parc, en dessous de son mobile avec lequel le petit se met immédiatement à jouer en babillant gaiment. Scott sourit. Au moins ça montre que leur fils est heureux et ne semble pas traumatisé outre mesure.

We all make mistakes.

Tahlia & Scott

J’essaie de rester calme. De prendre cette visite de flic comme un accro sans importance, à notre vie de couple souvent troublée par nos disputes. Je suis consciente que parfois je vais trop loin mais quel couple ne se chamaille pas. Bon il n’y a pas que des cris, mais je regrette toujours mes gestes violents au final. Et tout s’arrange rapidement. La voisine aurait pu s’abstenir d’appeler la police pour quelques cris plus forts que les autres fois. Tu restes à mes côtés, prouvant que cette dispute n’abime en rien notre relation. Que nous sommes soudés et heureux  malgré ces différents toujours causés par des broutilles débiles. Nous reconnaissons l’un comme l’autre que parfois les mots nous emportent. Au moins elle voit notre honnêteté de ce côté là. De toute façon pas la peine de nier cela risquerait de nous mettre en porte à faux. Surtout qu’il y a Soan au milieu de tout ça et que c’est ce qui à l’air de chagriner la policière. Elle ajoute même que ce n’est pas la première fois qu’ils reçoivent des plaintes. Tu relèves aussitôt la chose, presque ulcéré par cette remarque. Comme si Soan nous servait de punchingball. Je resserre mon étreinte contre toi comme pour te rassurer. Te calmer. Et m'apaiser par la même occasion. Moi aussi cela me fout en boule de savoir que les voisins sont là à guetter le moindre de nos faits et gestes. J’appuie juste tes paroles. « Nous allons très bien. Notre voisine c’est juste inquiétée pour rien. Mais bon vu son âge c’est logique. Et vous savez nous ne sommes pas les seuls à nous disputer dans l’immeuble. » Je te regarde avec douceur. Et je pose un baiser sur la joue de Soan. J’ai juste envie que cette situation se termine. Mes parents se disputaient, les voisins n’ont jamais appelé les flics. Et quand j’ai crié pour échapper à mon beau-père personne non plus n’a appelé les flics. Ce jour là j’ai hurlé en m’en percer les poumons et pourtant il n’y eu que le silence en échos à mes appels au secours. Cette pensée me fait frissonner. Et là pour des mots plus hauts que d’autres, la voisine en fait tout un pataquès. Quelle connerie. Et la policière qui se la joue sauveuse de femme en détresse. Si elle savait, que c’est toi qu’il faudrait sauver. Son collègue, lui a l’air de vouloir se tirer. Je lui souris. Essayant de faire passer le message. "Je suis une femme et une mère très heureuse et parfaitement comblée par l’homme avec qui je vis." Mais voilà que madame veut nous interroger séparément. Elle croit quoi ? Qu’elle va en apprendre plus comme ça ? Tu me libères de tes bras et tu t’adresses à son collègue. Lui proposant d’aller dans le salon, histoire de pouvoir poser Soan dans son parc. Il commence à en avoir marre d’être dans les bras. Je te souris alors que tu sors de la pièce. Je m’assois sur une des chaises de la cuisine. Je la regarde dans les yeux. Je n’ai aucune crainte et rien à cacher. Enfin. « Je vous écoute. Vous voulez savoir quoi ? Je suis vraiment heureuse avec Scott. C’est un compagnon et un père formidable. » Mes paroles sont sincères, de toute façon je le pense. Le problème vient juste de moi et de mon passé. Passé que je n’arrive pas à gérer et dont je ne t’ai jamais parlé. Mais je ne compte pas plus en parler avec cette policière. J’ai juste envie qu’elle pose ses questions et qu’elle parte rassurer sur notre complicité et notre bonheur. Et lui montrer que ni Soan, ni moi ne sommes en danger.  

Le couple était souriant. Avec l'enfant dans les bras, ils représentaient la petite famille parfaite. Mais étrangement, Tahlia avait du mal à croire en cette relation de famille sans accro. Oui, les disputes de couple existaient - elles étaient même normales - mais apeurer les voisins, qui juraient que c'était monnaie courante, c'était beaucoup moins fréquent. Tahlia avait peut-être tendance à voir le mal partout, de par son passé, mais elle devait en avoir le coeur net. Elle demanda à la jeune femme de bien vouloir la suivre pour quelques questions. Le jeune homme avait l'air plus apte à répondre qu'elle. Tahlia ignora le regard de son collègue, qui n'avait qu'une envie : se tirer pour aller chercher son donut bien gras à la pâtisserie du coin. Ce dernier se tourna d'ailleurs vers le jeune homme, avec qui il se rendit dans le salon : "Ne vous inquiétez pas, dans quelques minutes, tout sera réglé." Il n'osait pas dire que Tahlia était dans l'exagération, puisqu'il se devait de soutenir sa collègue, mais il n'en pensait pas moins. Il commença à parler enfant avec Scott puisque lui-même en avait un, mais c'était surtout pour meubler ce silence qui devenait inquiétant. Dans la pièce d'à côté, Tahlia se trouvait face à la jeune femme. Une jeune femme qui lui confirmait ô combien son compagnon était parfait. La jeune policière l'observa, en se pinçant les lèvres, pleinement partagée entre l'envie de la croire et cette voix qui lui rappelait qu'il y avait un couac derrière tout cela. Si Tahlia savait qu'elle se plantait de coupable. "Je ne veux pas vous embêter, mademoiselle, ni même remettre en doute votre couple. C'est simplement la procédure. Comme je vous l'ai déjà dit, nous avons eu plusieurs plaintes à votre encontre, comme quoi de nombreuses disputes se faisaient entendre chez vous. Des disputes de plus en plus virulentes. Je veux simplement m'assurer de votre bien-être et de celui de l'enfant. Vous me confirmez que tout va bien dans votre couple ? Qu'il n'y a jamais eu de dérapages ?" Dérapages... voilà comment bien arrondir les angles.

We all make mistakes.

Tahlia & Scott

Tu prends Soan contre toi et vous éloignez. Je vous regarde sortir de la pièce, en compagnie du collègue de la policière. Celle-ci souhaite me parler en privé. Je me demande bien ce qui se passe dans sa tête. Surement pense t-elle que le problème vient de toi. Et que le fait que je sois seule je vais me sentir plus à mon aise pour parler. Le problème c’est que je n’ai aucun reproche à te faire. Logique vu que c’est moi le souci. Moi qui déclenche les cris et les larmes. Les coups même. Je lui dis la vérité sur ton comportement. Je n’ai pas l’intention de lui mentir pour qu’elle pense que je suis une pauvre femme malheureuse. Voir battue. Enfin si je suis malheureuse mais ce n’est pas à cause de Soan ou de toi. La douleur vient juste d’une blessure que je porte en moi depuis des années. Mais ça non plus je ne vais pas lui dire. Personne dans ma famille le sait. Je ne t’en ai même jamais parlé. Je ne vais pas tout balancer à une inconnue, juste parce qu’elle fait partie de la police. Je parle calmement espérant qu’elle ne va chercher à aller plus loin. « Je ne sais pas qui vous a dit que nous disputes étaient virulentes. Mais bon pour moi ce sont justes des prises de tête du à la fatigue, aux tracasseries de la vie quotidienne. Rien de bien inquiétant. Et oui je vous confirme que tout va bien dans mon couple. Et qu’il n’y a jamais eu de dérapage. Scott est quelqu’un de bien. » Je lui souris. Je veux qu’elle comprenne que notre couple va bien. Que nous sommes heureux. Les soucis qui se glissent dans notre histoire ne la regardent pas. De toute façon même si je laisse ma rage éclater contre toi, je ne toucherais jamais notre fils. Même si ce qui c’est passé durant ma grossesse a favorisé cette descente en enfer. Je ne ferais pas de mal à Soan. Je ne devrais même pas te faire souffrir. « Vous voulez savoir autre chose ? » Je ne veux pas me montrer impatiente. Mais j’aimerais venir te rassurer car je me doute que pour toi cette situation d’attente doit être difficile. Et puis cela m’agace d'avoir quelqu'un qui vienne s'incruster dans ma vie privée. Surtout sur des ont dits de voisin. Bon je sais que parfois les cries lors de nos disputes sont un peu forts mais quel couple ne se dispute pas après une journée de boulot harassante ou une nuit perturbée par un enfant qui pleure. « Vous voulez parler à Scott seule. Parce que je peux aller le chercher. Récupérer Soan et vous l'envoyez en retour. » Je veux juste que cette discussion prenne fin. Et qu'ils partent pour que l'on se retrouve tous les trois.

Toute cette histoire était étrange. Une partie de Tahlia avait envie de croire en l'image de ce couple si mignon en apparence, pour qui il y avait seulement quelques disputes dues à des caractères trop forts. Mais d'un autre côté, une partie d'elle-même lui disait qu'il y avait anguille sous roche. Que ce couple si souriant était trop beau pour être vrai. Peut-être parce qu'au fond, elle se retrouvait dans ces sourires si faux, dans ces regards qui voulaient laisser croire que tout allait pour le mieux. Que tout allait s'arranger. Elle se revoyait dix ans en arrière, avec Elias à son bras, quand elle disait qu'ils étaient heureux mais qu'elle tirait sur les manches de son pull pour dissimuler ses bleus. Qu'elle disait que ce n'était qu'une passade et qu'elle avait envie de croire en son petit ami, en ces larmes qui coulaient sur les joues du jeune adolescent quand il se rendait compte de ses gestes. Oui, elle avait envie aussi de croire en ce couple, à ce bonheur qu'il criait. La jeune femme semblait vraiment sincère quand elle annonçait que son compagnon était quelqu'un de bien. Une sincérité qui fit douter Tahlia. Voyait-elle le mal partout ? S'était-elle trompée sur toute la ligne ? Il semblerait que oui. En réalité, Tahlia n'avait pas totalement tord, elle se trompait juste de destinataire alors qu'elle devrait être la première à savoir qu'il n'y avait pas que des femmes qui souffraient de violences conjugales. « Très bien... » répondit-elle simplement, afin de ne pas laisser ses doutes l'aveugler pleinement. A la nouvelle question de la jeune femme, Tahlia ouvrit la bouche pour de nouvelles questions, mais son collègue apparut devant la porte, lui faisant signe de mettre fin à cette entrevue. « Non, plus de questions. Il est inutile d'appeler votre conjoint. Je pense qu'il est temps de vous laisser. Cependant, si vous avez besoin de quoique ce soit, n'hésitez pas à faire appel à nous. » C'était important de préciser, qu'en cas de problèmes, la police était toujours là. Tahlia rejoignit son coéquipier et regarda le couple. « Quand vous n'êtes pas sur la même longueur d'ondes, essayez tout de même de ne plus rameuter tout l'immeuble, s'il vous plaît. Excusez-nous pour le dérangement et merci pour votre coopération. Monsieur, Madame, passez une très bonne soirée. » Tahlia garda son regard posé sur eux quelques secondes encore, avant de tourner les talons, suivi de son coéquipier qui les salua chaleureusement.