Let's get the party started + Julian

 

Blood links
On ne choisit pas sa famille.


Le beau temps était là, amenant avec lui sa dose de soirées en tout genre, chacun y allait de son gala de bienfaisance pour telle ou telle association, une belle occasion pour le gratin Bowenien de revêtir les robes de fête de mesdames, de cirer les chaussure de messieurs et de sortir le plus de fric possible pour se donner bonne conscience et faire mieux que le voisin, le collègue, le pire ennemi et j’en passe. En bref, ce soir il y avait une soirée caritative et Léo devait y être, ordre de sa mère, c’est elle qui avait organisé l'événement avec des amies à elle pour une cause dont il avait oublié le nom. En même temps, depuis qu’il était revenu de son voyage au Bénin l’été dernier, il avait fuit toutes ces soirées avec beaucoup de soin, il savait qu’il ne pourrait pas y échapper encore longtemps. Le problème c’était que, comme beaucoup le savaient, Léo détestait ces soirées, ce milieu et l’hypocrisie qui allait avec. Et depuis son retour de voyage c’était encore pire, il en percevait encore plus la futilité. En plus il fallait qu’il s’y rende accompagné d’une jolie fille à son bras. Sauf que la jolie fille qu’il voulait, à savoir Grace, ne voulait surtout pas se montrer et avait toujours beaucoup de mal à assumer leur relation. Comprenez que ce soir, le barbu s’était préparé le plus lentement possible pour repousser l’échéance au maximum. Il avait supplié la belle blonde de l’accompagner mais ça n’avait pas fonctionné, il avait toujours une solution de secours dans son répertoire. Ce soir, la belle à son bras s'appellerait Mia, sa meilleure amie, au moins il n’allait pas s’ennuyer avec elle et aucun risque de rendre Grace jalouse, par contre les autres hommes piafferaient de jalousie au passage de la sculpturale blonde et Léo ne doutait pas que Mia soit capable d’en faire des tonnes juste pour lui, c’était la seule perspective qui le mettait en joie pour ce gala. En plus, il avait appris que Callaway junior serait de la partie, à priori il était rentré de l’armé ou quelque chose comme ça, rien que l’idée de revoir ce sale gosse de Julian l’exaspérait.
Il avait donc revêtu sa tenue de gala, costume sobre et cheveux gominés, était allé chercher Mia, moulée dans une robe qui donnait le vertige, même lui, s’il n’avait pas eu ce statut d’ami de toujours, aurait bien succombé à la tentation qu’elle était. Et puis ils avaient pénétré dans la salle de spectacle avec presque deux belles heures de retard. Un monde fou se pressait déjà, beaucoup de sourires figés sur les lèvres, de la musique discrète, du brillant, des diamants et du champagne qui coulait à flot. On leur proposa une coupe, Léo vida la sienne, plus tard il se rendrait au bar commander son éternel whisky mais pour l’instant les bulles feraient l’affaire. Il salua sa mère, quelques connaissances, une bonne demi-heure passa, il avait déjà sifflé deux autres coupes et mangé quelques petits fours et Mia était parti faire sa vie de son côté. Il avait repéré Julian mais l’avait évité proprement. Et non loin de lui son père semblait en grande conversation avec la mère Callaway, lui avait dégainé son sourire ultra brite alors qu’elle semblait bien plus gênée. Léo n’avait rien contre cette femme, il l’imaginait un peu comme sa mère, une épouse et une mère aimante mais qui s’était laissé bouffer par son mari et leur catégorie sociale qui impliquait qu’elle soit l’image type de la femme parfaite. Il s’approcha doucement du duo après avoir attrapé deux nouvelles coupes au vol. Madame Callaway, un verre ? Le votre est vide. Il lui en tendit un et trinqua avec elle alors qu’elle lui offrait un sourire crispé. Vous êtes sublime ce soir, comme toujours. J’espère que Peter ne vous ennuie pas trop avec ses grands discours. Il se tourna vers son père qu’il n’appelait jamais papa… Maman te cherche je crois. Il sentait clairement une tension entre ces deux là, même s’il n’aurait su deviner le sujet de leur mésentente, il imaginait que Peter avait encore dépassé les bornes au sujet de son désamour pour monsieur Callaway, son rival légendaire. Au moins ils avaient ça en commun avec leurs fils, une haine de génération en génération. J’ai l’impression que je tombe mal… je vais vous laisser discuter. Passez une bonne soirée. Il tourna rapidement les talons, espérant au moins que ce verre qu’il avait offert à cette femme l’aiderait à se détendre… sans savoir qu’elle n’en était pas à sa première coupe, loin de là.

 

Blood links
On ne choisit pas sa famille.


Vingt-six ans plus tôt.
La nouvelle avait fait grand bruit quelques semaines auparavant, la jeune et jolie Emilia qui avait épousé le célèbre Alexander Callaway et vivait avec lui au Royaume Uni, avait mis au monde un garçon, le digne héritier de son père, la nouvelle fierté des deux familles et elle revenait sur sa terre natale pour le présenter comme il se devait. Ce n’était pas tombé dans les oreilles d’un sourd et Peter Emerson avait tout fait pour provoquer une rencontre. Comprenez-le, il était plutôt bon en calcule et dans sa tête les choses s’étaient mises en place très vite. Neuf mois plus tôt il avait mis Emilia dans son lit, ça n’était pas exactement la première fois qu’il trompait sa femme et encore moins avec la charmante Emilia. Mais cette fois-ci il avait comme un pressentiment, quelque chose qui le mettait bien trop mal à l’aise pour qu’il ne clarifie pas les choses. Il était allé la trouver, prétextant vouloir féliciter la jeune maman et avait posé sa question sans détour, il ne faisait jamais dans la dentelle. De toute façon entre eux ça n’était que physique, sans grande douceur et s’il y avait un scandale à étouffer, autant que ça soit fait rapidement. Emilia l’avait giflé, assurant que cet enfant n’était pas de lui mais bien de son époux, visiblement choquée de le voir insinuer une chose aussi horrible. La conversation était close,  Peter plutôt soulagé n’avait plus jamais posé de question sur ce sujet.

Léo ne comprenait pas vraiment quel était l’enjeu de cette discussion entre madame Callaway et son père mais les regards qu’ils se lançaient ne trompaient pas. Il savait que ces deux-là se connaissaient depuis l’enfance et que la rivalité entre Alexander et Peter n’avait pas amélioré leur relation. C’est pourquoi il choisit de se retirer rapidement et de les laisser régler leurs différents tous les deux, après  tout ils étaient de grandes personnes et puis rien de bien violent ne pouvait se passer ce soir, on ne faisait pas de scandale dans ce genre de soirée. Surtout de la part de Peter, il serait mal venu qu’il gâche le gala organisé par sa propre femme… Bien décidé à aller retrouver Mia pour qu’ils s’envoie un bon verre de whisky et s’amusent de la situation histoire de dédramatiser un peu, Léo s’apprêtait à fendre la foule lorsqu’il fut arrêté par le Maire lui-même. C’était un cauchemar ! Cet homme qu’il détestait était pourtant un ami de la famille, alors il le salua avec un respect forcé avant d’être alarmé par la voix d’Emilia qui se faisait plus aigu, non pas qu’elle se soit mise à crier pour que tout le monde l’entende, mais peut-être que, sans le vouloir, Léo avait laissé traîner une oreille, curieux de ce qu’il se disait entre son père et cette femme. Et ce qu’elle révéla le pétrifia littéralement. Oubliant totalement Monsieur le maire, Léo fit volte face, fixant son père d’un regard plein de colère et d’incompréhension, sans manquer de comprendre que Peter était tout aussi choqué et perdu que lui. Il le vit devenir livide, hagard, puis tourner les talons le visage décomposé. Et Léo, lui, resta planté là, perdu, le regard vide à fixer une foule qu’il ne voyait pas. Il avait appris un an plus tôt qu’il avait une sœur cachée, Maxine, fruit d’une relation entre Peter et sa secrétaire et qu’il avait étouffé avec une belle somme d’argent. Ce soir il se prenait encore en pleine figure les trahisons de son père et apprenait surtout que son pire ennemi était aussi son… frère. La voix du maire le sortit de son cauchemar éveillé. Oh, pardonnez-moi. Je dois… passez une bonne soirée. Et il prit congé, s’enfuyant presque, il avait besoin d’air. Il allait atteindre la sortie de la salle, enfin il allait pouvoir reprendre son souffle, il ne tenait plus, la porte était là, il avait juste à tendre le bras pour la pousser et se trouver dehors. Pourtant une nouvelle fois on l’arrêta dans sa course d’une main posée sur son épaule. Se retournant vivement, Léo se trouva face à un Julian visiblement presque aussi fébrile que lui. N’écoutant pas ce que le blond lui dit et laissant s’exprimer toute la rage qu’il essayait de contenir, il vint écraser vigoureusement son poings dans la figure du jeune Callaway et, le regard fiévreux, avisa qu’il s’écroulait sur le sol sans rien comprendre. Si c’est de la traînée que tu as pour mère dont tu me parles, elle se débrouille très bien toute seule. Il allait partir, sans penser que Julian était certainement plus nerveux qu’il ne le pensait et qu’il ne se laisserait pas humilier aussi facilement, parce qu’évidemment, tous les regards étaient à présent tournés vers eux.

 
Du genre colérique mais qui savait se contenir compte tenu de son rang, Léo ne se mettait que rarement en rage, il avait plutôt l'habitude de fuir et de laisser s'exprimer ses colères seul dans son coin puis retournait vers les autres comme si de rien n'était. Ou bien il en parlait avec ses amis proches, comme Mia qui était une oreille attentive et bienveillante, ou encore Liam qui lui ressemblait beaucoup et qui savait le comprendre, ça lui réussissait bien et généralement il n'avait pas à hurler sur les autres ni à sortir les poings, de cette façon il passait généralement pour un mec sociable et sympa qui ne cherchait pas le conflit. A mille lieues de celui qui venait d'écraser une droite sur le fils Callaway. En vérité il n'avait pas réfléchi, s'il avait réussi à rejoindre la sortie à temps il se serait allumé une clope, aurait tiré dessus rageusement et puis se serait calmé de cette façon. Mais il n'avait pas eu le temps d'arriver à ce but et entre temps c'est typiquement la personne qu'il n'avait aucune envie de voir qui s'était présenté à lui, mauvais endroit au mauvais moment Julian ! Et puis avouons-le, ce coup de poing ça faisait si longtemps que Léo rêvait de le sortir sans jamais en avoir l'occasion, ou le courage, que ce soir, ça le soulageait d'un poids ! Dire qu'il était calmé serait un peu fort, ce qu'il venait d'apprendre était trop choquant, trop surréaliste pour qu'il se calme. Et évidemment c'était sans compter sur le fait que le gamin ne se laisserait pas faire. Il était bien plus sanguin et impulsif que Léo alors tous deux ils offrirent un spectacle des plus pathétiques au public qui leur faisait face et le barbu fut propulsé contre le mur derrière lui sans qu'il n'ait le temps de s'en rendre compte. Il reçut un premier coup et puis cette sensation d'étranglement qui n'était pas des plus agréables. Pourtant, la lèvre en sang, il se mit à sourire de la façon la plus provocatrice au blond dont la fureur déformait les traits, il n'allait pas lui faire grand mal, quelqu'un l'arrêterait avant qu'il ait pu totalement étrangler Emerson. Et finalement Léo prenait toute conscience de cette situation grotesque qui impliquait qu'il se batte contre l'une des personnes qu'il haïssait le plus, en pleine soirée mondaine et surtout contre celui dont il venait d'apprendre qu'il était le frère. Bordel, Julian était son cadet, ça le faisait rire jaune, ça lui foutait la gerbe, c'était insensé. Il s'approcha à son tour de Julian et pouvait presque entendre le sang battre ses tempes de colère. Peut-être que tu reverrais ton jugement si tu savais que ta mère est tout en haut de ce tas. Il laissa sa phrase en suspens pour que Julian puisse en prendre toute la mesure, il ménageait son effet. En un sens, Léo était en position de force parce que lui savait et qu'une chose pareil serait impossible à comprendre pour Julian, mais il savait également qu'en le provoquant de la sorte il allait se prendre une nouvelle salve de coups. Et en même temps, n'était-ce pas ce qu'il cherchait, à se faire cogner, la peine physique pour oublier une peine plus profonde, celle de savoir que son père était un homme de la prie espèce, qui détruisait les autres et qui gâchait des vies. Infidèle envers une femme aussi douce que Charlotte, pondant des enfants dont il ignorait l’existence, combien ? C'était une surprise... cet homme était le pire exemple qu'il soit et lui en était le fils, il en avait honte.