J'vais t'faire tourner la page / Tathur

Quelle ironie pour un dealer, de se rentre au commissariat. Détrompez-vous, Arthur ne va pas se dénoncer. À moins qu'il ne veuille dénoncer son amour pour Tahlia, la jolie flic de Bowen. Pour lui elle est le trophée de ses conquêtes. Il a gardé sous son coude les plus belles phrases de baratineurs. Des paroles cousu-mains qui font fondre la gente féminine. C'est tellement facile. Elles veulent toutes la même chose. Elles veulent toutes se sentir unique.

Arthur l'attendait avec une fournée de cookies. Il avait mis ça dans un tupperware. Tant pis pour la jolie présentation, et puis ne dis t-on pas il y a que l'attention qui compte? En vérité il les avait chippé à sa première fournée de ce matin, au restaurant. Il était plus doué à cuisinier des plats que des petits gâteaux, m'enfin, cela le permettait toujours de gagner des points.

Aujourd'hui, Tahlia n'avait pas bougé de son bureau. Son tas de paperasse délaissé depuis quelques jours l'avait empêché de pointer le bout de son nez dehors. Et elle avait cru devenir folle. Etre enfermée entre quatre murs n'était décidément pas pour elle. Encore plus quand elle était dans un tel état d'esprit. Même ses collègues se rendaient compte qu'il y avait un problème. Tahlia n'était pas "comme d'habitude" disaient-ils. Elle ne ronchonnait pas, ne les taquinait pas et on voyait beaucoup moins son sourire apparaître sur ses lèvres. Une mauvaise période, répondait-elle, sans s'attarder sur les détails. Perdue dans ses pensées, ce fut un collègue qui la fit sortir de sa rêverie en lui souhaitant une bonne soirée. Les yeux de Tahlia se posèrent sur l'horloge. En effet, pour elle aussi, c'était l'heure de partir. Elle passa par les vestiaires afin de se changer, fourrant son uniforme dans ce gros sac qu'elle mit sur son épaule. Elle salua ses collègues et sortit rapidement à l'extérieur. Le soleil brillait encore, fort heureusement. Mais ce fut une silhouette posée devant le commissariat qui attira son regard. "Arthur ?" Tahlia descendit les quelques marches de l'escalier et se posta devant lui. Un léger sourire vint illuminer son visage. "Qu'est-ce que tu fais là ? Tu as un problème ?" Non, Tahlia ne s'imaginait pas qu'il était venu ici pour elle.

Voyant le charmant sourire de sa charmante policière, Arthur jubilait. Tahlia avait l'air d'être heureuse de le voir. Sa venue lui avait fait plaisir, il avait vu juste. Les femmes adorent les surprises.

Arthur était prêt à beaucoup de choses pour la faire rire. Il ne manquait pas d'imagination, ou plutôt de bêtise.

- Je suis là pour t'arrêter, dit-il sous un air de gangsta, les yeux plissés.

À l'aide de ses mains, il forma un pistolet imaginaire en sa direction. Puis il s'abaissa, lui fit une référence tel un prince venant sauver sa princesse.

- Parce que t'as volé mon coeur.

C'était nul, mais ça valait le coup d'essayer. Baratineur ou non, il ne pouvait nier que les sourires de Tahlia sont des rayons de soleil.

Dans son esprit, il était clair que le jeune homme avait un problème. Alors, quand elle comprit qu'il était venu ici pour elle, Tahlia trouvait cela flatteur, même si elle n'était pas l'une de ces femmes qui cherchaient à être perpétuellement surprises par ces messieurs. Mais elle appréciait le geste, surtout qu'il savait rendre le moment amusant, et non pas gênant. Alors qu'il fit tout son numéro de gangster, la policière croisa les bras contre sa poitrine et arqua un sourcil, le regard malicieux : "M'arrêter ? Vraiment ? Fais attention, Arthur, je crois que je manie un peu mieux les menottes que toi." Mais quand il fit une révérence, accompagnée d'une phrase de lover, au même niveau que le fameux "ton père est un voleur parce qu'il a volé toutes les étoiles pour les mettre dans tes yeux", la policière ne put garder son sérieux et se mit à rire joyeusement. "Mais quel beau parleur ! s'exclama-t-elle. "Cette phrase fonctionne encore de nos jours auprès des femmes ?!" Elle soutint son regard, ses lèvres s'étirant de nouveau en un sourire. Elle appréciait Arthur, évidemment, mais elle se faisait un plaisir de lui mettre quelques bâtons dans les roues. On n'attirait pas les faveurs de Tahlia aussi facilement...

Il est vrai qu’il jouait à un jeu dangereux en flirtant avec une flic. Mais cela lui donnait encore plus envie de la conquérir et pour ça Arthur était prêt à se donner en public pour elle. Il faisait l’imbécile. Certes il la connaissait, mais pas suffisamment pour lui déclarer sa fausse flamme. Il n'avait pas encore besoin de jouer sur ce terrain. Chaque chose en son temps, Tahlia n’était pas encore amoureuse. Il n’en était pas à ce stade-là.

- Oui, oh ça va! Je sais que c’était tout pété, mais au fond, avoue que t’as kiffé, hein ? la taquine t-il en lui faisant un clin d’œil.

Parce qu’il avait réussi à décrocher son sourire, il jubilait.  Et la voyant ainsi, si malicieuse, si radieuse, il regrettait presque de mettre ses sentiments dans un sac en plastique. Ce jeu-là était bien trop tentant pour lui. La belle & la bête : un dealer qui séduit une flic.

- La fleuriste était en panne, alors je t’ai ramené des cookies.

Il ouvra ensuite sa petite boite en plastique, dévoilant une dizaine de cookies aux pépites de chocolat. Il n’aura peut-être pas Tahlia par les sentiments, mais il l’aura peut-être par la gourmandise.

La légèreté d'Arthur avait su remettre un peu de baume au coeur de Tahlia qui commençait à sourire sincèrement. "Oh oui, j'ai kiffé ! J'en suis même sous le charme, ça ne se voit donc pas ?!" répondit-elle, toute aussi taquine. Elle ne savait pas vraiment à quel jeu ils étaient en train de jouer, mais c'était plaisant. C'était agréable et sans prise de tête, même si la brune était loin de comprendre que tout n'était que magouille. Alors qu'il ouvrit sa boîte, prétextant que la fleuriste était en panne, Tahlia se mit à rire : "Tu as de la chance, je ne suis pas une fille à fleurs." Elle garda son regard posé sur lui, avant de montrer les cookies. "En revanche, avec ça, je suis conquise. Je vois que tu sais parler aux femmes." Un nouveau rire vint ponctuer sa phrase, alors qu'elle prit un cookie en le remerciant. Alors qu'elle croqua un bout, elle s'exclama : "En plus, ils sont super bons ! C'est toi qui les a faits ?"

Les talents de drague d’Arthur n’étaient pas une science infuse. C’était quitte ou double. Soit on le trouvait adorable, soit on le détestait. Parfois il se demandait même ce que les filles lui trouvaient. Il n’avait rien d’un mannequin, il avait un portefeuille plutôt modeste et ce n’était pas un grand romantique.

- Oui, complètement. Je vois bien que tu en train de tomber amoureuse de moi, dit-il sur un ton pas sérieux du tout.

Il savait pertinemment qu’il avait encore du chemin pour y parvenir. Ce n’est pas grave, il saura avoir de l’endurance. Pour Tahlia, cela valait le coup. Elle est jolie, sympa, rigolote. Il est presque certain qu’il pourrait lui aussi tomber amoureux d’elle, si bien sûr, il ne fermerait pas son cœur. Ce qu’il fera aussitôt dès que la situation deviendra trop dangereuse à ses yeux. Jusqu’à présent, il s’en sortait pas trop mal. Il était venu la chercher au boulot et le fait qu’il ne vienne pas avec des fleurs mais plutôt des cookies, avait l’air de plaire à Tahlia.

- Parles aux femmes moi? Mais non, je voulais et il insista bien sur le mot vraiment te faire plaisir !

Il prit un air faussement offusqué. Règle numéro douze : ne jamais laisser une femme supposer qu’on est un coureur de jupons. Le but, c’est de la rassurer. Et puis ce qui était vrai, au fond. Arthur voulait marquer des points, d’accord, mais il voulait aussi lui faire plaisir.

- Bien sûr que je les ai faits ! T’as plutôt intérêt à faire semblant qu’ils sont bons ! le prévint-il. Parce que j’ai galéré à les faire.

Petit mensonge de pacotille.

A l'origine, Arthur était le genre d'homme avec qui cela n'accrochait pas. Il était bien connu que deux forts caractères, ensemble, ne faisaient jamais bon ménage. Mais Tahlia semblait s'être adoucie ces derniers temps, à un tel point que le côté grande gueule du jeune homme avait su capter son attention. Alors qu'il répondit à sa plaisanterie, Tahlia le regarda, avec amusement : "Follement amoureuse, même. Continue comme ça et je te demande en mariage." Elle se mit à rire, sachant pertinemment qu'ils étaient de la même trempe, ces deux-là. Ils étaient le genre de personnes qui ne tombaient pas amoureux. Triste réalité, certes, mais c'était peut-être la meilleure solution. L'amour, c'est pour les faibles.

Alors qu'il lui sortit les cookies, Tahlia continua de plaisanter sur sa manière de parler aux femmes. Mais l'insistance d'Arthur la déstabilisa un peu. Il voulait vraiment lui faire plaisir ? Ou bien était-ce une stratégie de sa part ? On avait du mal à cerner Arthur et c'était ce qui la rendait folle. Elle aimait lire entre les lignes. Quand ce n'était pas le cas, Tahlia voyait cela comme un défi. Et Arthur était un beau défi, pour le coup. "ça me fait vraiment plaisir..." répondit-elle alors, avec un sérieux qui détonnait clairement des tons employés précédemment. Alors qu'ils parlèrent de ces fameux cookies, Tahlia le regarda, un nouveau sourire se dessinant sur ses lèvres : "Je n'ai pas besoin de faire semblant, ils sont vraiment bons. Je croyais que tu n'étais pas doué en pâtisserie." Son regard était étrange, montrant peut-être qu'elle avait saisi le mensonge du jeune homme. N'oublions pas qu'elle avait une formation de policière et que les mensonges étaient son quotidien. Arthur lui avait déjà dit qu'il était plus cuisinier que pâtissier. Mais elle appréciait l'attention dans tous les cas. "Je pense qu'il faudrait que l'on s'arrête à un café pour avoir de quoi accompagner ces gâteaux. Tu m'accompagnes ?" Une invitation toute en subtilité, évidemment.

Spoiler:

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Il aimait ça, sa légèreté. Tahlia était une fille rigolote.
 
- Pas sûr que j’accepte ta demande en mariage, attends ! J'suis pas un mec facile. s'esclaffa t-il.

Lui faire plaisir lui faisait plaisir. Une vague de prétention monta en lui quand elle affirma qu’elle n’avait pas à faire semblant que ses cookies étaient bons. Ils étaient vraiment bons. Toutefois Arthur se montra sous une facette de modestie.

- Mais je ne suis pas doué en pâtisserie ! insista t-il. Je suis cuistot pas pâtissier.

Bien qu’il adorait s’en goinfrer. Il admirait énormément les grands pâtissiers comme Pierre Hermé, Philippe Conticini, Gaston Lenôtre, Christophe Michalak, Sadaharu Aoki, et bien d’autres. Jamais il n’arrivera à leurs chevilles. Ni même aux talons. Arthur n’a jamais été intéressé par les cours, sûrement aurait-il échoué son CAP cuisine. Mais en dépit de sa négligence scolaire, il ne manquait pas d’envie de s’investir. Dans la vie, il a deux passions. La cuisine… et le PSG. Aucun rapport, effectivement.

Tahlia lui propose de s’arrêter à un café, afin qu’ils aient de quoi accompagner pour manger les gâteaux qu’il avait apporté.

- Ouais, bien sûr.

Sans plus attendre, ils se dirigèrent vers un café où ils s’installèrent. Les serveurs n’étant pas débordés, leur commande fut rapidement prise. Il n’y avait pas trop de monde, ce qui leur permettait d’avoir une conversation intime. Arthur sauta sur l’occasion. Il se redressa de sa chaise et fit face aux yeux incroyablement verts de Tahlia.

- Bon, et si on parlait de choses sérieuses.

Il se racla la gorge et prit un air grave.

- J’suis pas doué non plus pour les conversations sérieuses. Mais bon… Voilà. Je trouve qu’on rigole bien ensemble, tout ça. J’sais pas… T’as pas envie de plus ? Moi j’suis bien avec toi, t’sais.

Aussitôt dit, il regretta ses paroles. Au fond il ne savait pas très bien pourquoi il disait ça, là maintenant. Il ne voulait pas la brusquer et faire dix pas en arrière.

"Tu oserais refuser ma demande en mariage ?!" demanda-t-elle sur un ton faussement outré, avant de hausser les épaules, comme si elle l'acceptait. "Tant pis, je serais obligée de sortir les grands moyens et de te harceler jusqu'à ce que tu dises oui." reprit-elle en lâchant un rire joyeux. Sorties de n'importe quelle bouche, ces paroles pouvaient vous faire passer pour une vraie folle hystérique. Mais Arthur commençait à connaître Tahlia et savait pertinemment qu'elle était une adepte de la plaisanterie et du second degré. Alors qu'elle dégusta les cookies apportés par le jeune homme, il lui avoua ne pas être doué en pâtisserie. "Pas grave, tu as d'autres points forts." répondit-elle avec malice. En effet, il en avait d'autres, des points forts...

Alors qu'elle le suivit au premier café qu'ils trouvèrent, Tahlia et Arthur s'installèrent sur la terrasse et passèrent commande. Quand leurs boissons arrivèrent et que le serveur s'éloigna, Arthur lui annonça qu'il était temps de parler de choses sérieuses. La jeune policière arqua un sourcil, suspicieuse. En temps normal, parler de choses sérieuses n'auguraient rien de bon, mais elle ne répondit rien afin de lui laisser l'opportunité de s'exprimer. Ce qu'il exprima, en revanche, Tahlia ne s'y attendait pas vraiment. Bien sûr, ils se cherchaient, mais elle s'était attendue à ce qu'ils restent à cette étape-là. "Tu vas toujours droit au but, toi." Pour autant, la jeune femme lui adressa un sourire. C'était risqué de parler de tout cela avec Tahlia. En temps normal, cela l'effrayait, mais la jeune femme n'avait pas l'air de vouloir fuir. Pas pour l'instant, du moins. "Qu'est-ce que tu entends exactement par "avoir envie de plus" ?" Son regard s'était plongé dans le sien, sans ciller, comme si elle tentait de le déstabiliser. Lui qui n'était pas doué pour les conversations sérieuses semblait être testé par notre chère policière.

Ils se taquinaient mutuellement. Arthur avait fini par déceler quelques traits de son caractère.  Tahlia n’était pas du genre collante, bien au contraire, c’était une femme qui s’armait d’une carapace. Il fallait gratter bien à la surface pour découvrir ce que cachait sa petite tête de linotte. Jamais de la vie Tahlia ferait une chose pareille. Dans une autre vie, oui, peut-être, elle lui aurait demandé en mariage et l’aurait harcelé jusqu’à ce qu’il accepte. Oui, oui, dans une autre vie.

- Ouais, prépare-toi alors à mettre ton genou à terre !

Arthur prit alors un air supérieur. Un air qu’il n’afficha pas bien longtemps sur son visage lorsque Tahlia lui dit qu’elle avait d’autres points forts. Si elle pensait qu’il avait des points forts, c’est qu’elle devait l’apprécier un minimum.

- Ah oui, genre quoi, comme points forts ? demanda t-il curieux. Oh oui flatte-moi ! rajouta t-il enthousiaste.

Il l’écouta attentivement. Puis après qu’elle lui ait proposé qu’ils s’installent pour boire un café, Arthur prit son courage à deux mains et se lança dans une conversation sérieuse. En général il n’aimait pas ça, mais le but, c’était de conquérir Tahlia. La connaissant, il était étonné qu’elle ne s’enfuie pas en entendant les mots « envie de plus ». Un signe qui l’encouragea davantage dans sa démarche. Elle affrontait son regard, qu’il évita aussitôt. Si elle voulait le déstabiliser, il lui fit croire qu’elle avait réussi. Il était faussement gêné.

- Tu sais bien. On joue au chat et à la souris, mais moi j’ai envie d’une relation sérieuse. lui dit-il d'une voix rauque.

Lui-même se perdait dans ce mensonge. Il en avait marre d’enchaîner des conquêtes, surtout qu’il trouvait sa façon de draguer pitoyable. Arthur n’avait rien d’un tombeur. Au fond de lui-même, il aimerait se ranger sentimentalement. Il aimerait trouver une fille, une femme, qui l’aime et qu’il l’aimerait en retour. Mais Arthur fermait son cœur. Il refusait qu’on puisse le piétiner. Il refusait d’être vulnérable. Il refusait de souffrir, tout simplement.

Tahlia aimait ce genre de relation où la complicité et la taquinerie étaient de mises. Arthur commençait à comprendre comment elle fonctionnait et il la suivait pleinement dans ces délires, comme à cet instant durant lequel il parlait "mariage". Mariage... un mot qui faisait tellement peur à Tahlia. Pourtant, elle enviait les relations qui duraient, comme celle de ses parents, mais elle ne se pensait pas capable d'en vivre une elle-même. Elle préférait donc en rire, affirmant qu'elle demanderait Arthur en mariage. "Tu veux aussi le genou à terre ?! Tu es bien exigeant, mon cher. Bon... laisse-moi le temps de rassembler la bague, la jolie robe et l'endroit romantique à souhait." Leur conversation était plus que légère et pourtant, il y avait parfois quelques paroles qui pouvaient être prises au sérieux. Lui affirmer qu'il avait des points forts en était un parfait exemple. La jeune femme le regarda avec malice et fit mine de réfléchir, ce sourire sur les lèvres. "Si je te les énonce, ça risque de te flatter un peu trop. Je ne sais pas si je dois prendre ce risque ou non..." Elle posa ses yeux verts sur lui et répondit, pourtant, au bout de quelques secondes : "Tu me fais rire, et ça, je trouve que c'est un sacré point fort." Oui, Arthur était intéressant. Il était ce genre de personne que l'on voulait écouter.

Alors qu'ils avaient pris place à la terrasse de ce café, une conversation bien plus sérieuse fit son apparition. Arthur était plutôt direct dans ses paroles. Il avait envie de plus. Tahlia tenta de le destabiliser en le fixant de son regard si intense, mais c'était pour qu'elle-même garde la face. A l'origine, elle aurait dévié subtilement la conversation, mais elle ne comprit pas pourquoi elle lui posa cette question, pourquoi elle voulait avoir plus de détails. Peut-être pour confirmer que c'était bien ce qu'elle pensait et qu'elle ne faisait pas fausse route. La réponse d'Arthur lui confirma tout cela. Il était vrai qu'ils jouaient au chat et à la souris, depuis un moment maintenant. Mais elle n'avait jamais pensé à plus. Ce n'était pas dans ses objectifs... avec qui que ce soit. Pourtant, Tahlia savait qu'elle passait aussi à côté de sa vie et qu'elle fermait des portes à des hommes qui auraient pu prendre une belle place au sein de son existence. Elle touilla sa boisson, comme si elle voulait s'occuper les mains, avant de répondre doucement : "Tu nous verrais vraiment mener une relation ? Je suis plutôt nulle dans ce domaine-là." Tahlia releva la tête vers lui, craignant que sa question si directe passe pour un rateau. "Tu me plais, Arthur, je ne vais pas te mentir. Mais il faudrait d'abord que l'on cesse de jouer au chat et à la souris, afin de voir s'il peut y avoir plus..." Tahlia ne semblait pas tomber aussi facilement dans les bras du beau Delacroix. Il fallait du temps pour se connaître davantage et s'apprivoiser. Faire les choses dans l'ordre, tout simplement.

Le mariage était un projet qui ne faisait pas partie de son avenir. Arthur n'en avait pas une très belle image. Effectivement, son père n'avait rien d'un époux exemplaire. Le peu de fois qu'il était présent, il se comportait comme un parfait crétin égoïste. Voilà pourquoi aujourd'hui il avait tellement de difficulté de s'engager dans une relation amoureuse.

D'ailleurs il en parlait avec légèreté, plaisantant avec Tahlia. Elle aussi, ne semblait pas prendre le mariage au sérieux. Et c'est tant mieux. Nombreuses sont les femmes qui s'accrochent à l'envie de se marier. Arthur fut bien content qu'elle n'était pas l'une d'entre elles.

- N'en fais pas trop! fit-il avec un sourire au coin.

Il l'observait en diagonal, tout en appréciant chaque trait de son visage. Chez Tahlia, le plus renversant était de loin ses yeux en amande. Son regard avait quelque chose de profond et il ne pouvait s'empêcher d'en être captivé. Il tenta de dissimuler sa fierté quand elle avoua qu'elle lui faisait rire, mais son sourire en disait long. Il jubilait.

- Tu savais que c'est le plus beau compliment que l'on puisse entendre d'une femme? Merci, merci... finit-il par dire d'un air faussement supérieur.

Sans le vouloir, elle lui avait montré le chemin pour l'approcher plus dangereusement. Ce n'est qu'une fois installés autour d'un café qu'Arthur se lance. Ils jouaient au chat et à la souris depuis un moment et même si il aimait leur jeu de séduction, il voulait passer à la vitesse supérieure. Il parla de relation sérieuse. Elle ne prit pas la fuite mais elle ne sembla pas extasiée non plus.

- Vraiment? s'étonna Arthur surpris d'apprendre qu'elle était nulle en "relation".

Il n'avait pas tellement envie de l'entendre parler de ses anciennes histoires amoureuses mais la curiosité l'avait rattrapé. Il lui plait mais... le grand MAIS lui tomba sur la tête. À lui de contrer la raison de sa réticence. Il avait déjà sa réponse toute faite.

- Je suis entièrement d'accord avec toi. J'veux plus jouer. Je pense que tu es une fille bien et c'est vraiment ce que je recherche.

Droit dans les yeux, il n'avait éprouvé aucune difficulté à lui mentir. Mais peut-être que ce mensonge n'en était pas un? Tahlia lui plaisait et il se pourrait qu'elle soit la femme qui lui correspondait.

Plaisanter sur le mariage - alors que c'était une institution pour un bon nombre de femmes - n'était pas banal. Mais elle était contente de trouver un écho en Arthur qui avait probablement la même vision qu'elle. Elle sourit quand il lui répondit, tout de même, de ne pas en faire trop. "Tu devrais savoir que je ne fais jamais dans la demi-mesure. Avec moi, c'est tout ou rien." avait-elle répondu, un poil provocatrice. Seulement, le côté provocateur de la policière ne fit pas long feu. Le piège se refermait peu à peu sur elle, alors que le jeune homme prenait les rênes. Il savait la faire parler. Elle leva les yeux au ciel, amusée, quand il jubila par rapport aux révélations de Tahlia. Faites un compliment à un homme et voilà ce que ça donne. "Ne t'attends pas à ce que j'en lâche tout le temps..." Autant le mettre au fait dès le début.

Puis vint le moment sérieux. Tahlia ne sut à quel moment la conversation avait vrillé, mais voilà que nos deux jeunes camarades évoquaient les relations sérieuses. Tout ce qui faisait peur à la brune, qui tenta de le mettre en avant, en évoquant à quel point elle était nulle en relation. Mais elle ne se sentait pas prête à en parler, si bien qu'elle répondit vaguement à la question du jeune homme : "Oui... Je suis douée pour gâcher les relations." Un sourire gêné vint accompagner ses paroles. Peu de personnes savaient qu'elle était restée quatre ans avec son premier petit ami. Quatre ans de violence. Quatre ans qui avaient laissé des plaies béantes, encore maintenant, dix ans après cette rupture douloureuse. Depuis, elle s'était promis de ne jamais plus se laisser atteindre par un homme, si bien qu'elle se fermait. A force, on lui reprochait de ne pas être impliquée dans la relation. Bien sûr, elle n'était pas qu'un coeur de pierre. Il lui était arrivée de s'amouracher de quelques hommes, mais elle avait le don pour choisir les mauvais, ceux qui la brisait au lieu de la relever. Il était donc évident qu'elle se montre de plus en plus réticente à tout cela. La réponse d'Arthur lui fit arquer un sourcil, alors qu'elle touillait encore plus nerveusement sa boisson qui ne devait plus être si chaude, maintenant. "Ou alors tu te rendras compte à quel point je suis insupportable et tu ne voudras plus jamais entendre parler de moi." avait-elle répondu en riant. C'était peut-être malvenu mais il n'y a qu'à travers le second degré que Tahlia se sentait mieux. "Laissons faire le temps, Arthur. Il nous surprendra peut-être..."

Certains ont un pied gauche pour danser, Arthur lui, a un pied gauche en matière de séduction. Toute sa vie il a eu l’impression de ne pas savoir s’y prendre. Certes, il connait les faiblesses des femmes et en général celles-ci sont mordues pour l’amour. Mais concernant Tahlia, il s’agissait de tout autre chose. Elle n’était pas comme toutes les autres filles, à s’éprendre aussi facilement. Voilà pourquoi il est si content de l’entendre le complimenter, sans pour autant se sentir proche de la victoire. Car oui, Tahlia, c’était son petit trophée. Il voulait la gagner.

- Pourquoi ça ? questionna Arthur, piqué par la curiosité. Il se passait quoi avec tes exs ?

Très sincèrement il n’avait pas envie de le savoir. Il n’avait pas envie d’imaginer Tahlia avec un autre homme. Toutefois il se dit que cela pourrait l’aider à ne pas faire la même erreur que ses anciens petits copains. Il ne s’imagine pas une seule seconde que Tahlia puisse être « douée pour gâcher les relations ». Là encore, quand elle affirme qu’elle est insupportable, il ne comprend pas.

- Ne dis pas ça, j’suis sûr que tu dis n’importe quoi, dit-il d’un air détaché.

Même si elle disait cela sur le ton de la rigolade, Arthur se doutait qu’une partie d’elle croyait en ses propos. Lui, il n’y croyait pas du tout.

- Comme ça tu veux attendre ? Ok. Pas de problème, je patienterais.

Il s’adossa au fond de sa chaise, avec un petit sourire. Il devait bien admettre que cela ne s’annonçait pas très positif tout ça.