les vagues sont peu de choses au regard de l'océan (poppy)

En ce moment Perry a l’impression d’être vraiment une larve. Avant ça ne le dérangeait pas spécialement parce que ça consistait en passer sa journée devant la télé en caleçon à manger des céréales mais à présent, avec sa fille, être une larve, ça ressemble plutôt à dormir à des heures pas possible, passer son temps à faire du lait trop chaud et devoir attendre qu’il refroidisse, changer sa fille, se réveiller en sursaut lorsqu’elle crie. Bref ce n’est pas réellement une partie de plaisir même s’il l’adore, bien évidemment. Il a hâte qu’elle fasse enfin ses nuits et que ce soit un peu plus agréable que maintenant.
Il a besoin de prendre l’air, d’aller quelque part, de se détendre un peu et surtout de parler à quelqu’un qui soit là pour l’écouter et le rassure : tout va bien se passer, il sera un bon père et il n’y aura aucun problème. Cette personne est toute trouvée pour lui, il s’agit de sa sœur, Poppy. Elle a toujours été là pour lui et il sait qu’elle sera toujours là. La preuve elle est venue vivre à Bowen en même temps que lui pour veiller sur son petit frère totalement irresponsable. Il lui a envoyé un sms pour savoir si elle pouvait le retrouver à la plage. A présent il l’attend, assis sur le sable en maillot de bain. Ça lui fait réellement du bien de sentir le soleil contre sa peau et d’entendre le bruit des vagues. Heureusement qu’il a plein d’amis qui sont là, prêt à surveiller sa fille dès qu’il en a besoin.

Perry adore sa sœur et il aimerait la voir plus souvent, comme lorsqu’ils vivaient tous les deux dans son appartement, il y a un peu plus de deux ans. Parfois ça lui manque ce temps où il la voyait tous les jours, qu’il ne faisait rien à part boire des mojitos et bronzer toute la journée. Mais les gens changent, le monde évolue. Et si lui adore vivre en coloc et pourrait sûrement le faire toute sa vie, ce n’est pas forcément le cas de tout le monde. Après tout la vraie vie c’est pas friends.
Le jeune homme sent quelqu’un le serrer et il sait que c’est Poppy et puis qui ça pourrait être d’autre de toute façon ? Il reconnaît sa voix tandis qu’elle lui ébouriffe les cheveux, ce qui lui fait lâcher un rire. « Hey ! » dit-il en se tournant vers elle. Si au début leur relation ne partait pas sur un bon pied, Poppy s’est toujours montré très gentille avec lui et a réussi à dompter l’enfant insupportable qu’il était autre fois. Elle lui dit qu’il avait l’air fatigué, sûrement à cause de Siobhan mais elle le rassura en disant que c’est un super papa. « Les bébés c’est teeeeellemeeeent fatiguant en vrai ! Mais bon je fais avec. » dit-il avant d’ajouter en souriant. « J’vais devenir un super-héros, super papa, le héro de tous les papas. » Il vaudrait mieux pas, pour tous les papas du monde. « Et toi alors ? T’es plus à plaindre que moi ! » Elle n’a peut-être pas d’enfant mais elle gère tellement de trucs que Perry se demande tout le temps comment elle fait pour avoir une vie et le temps de dormir.

Poppy a toujours eu les pieds beaucoup plus sur terre que lui et elle a raison, à quoi s’attendait-il ? Lorsqu’il a appris qu’il était père il savait que ce serait dur, que ce ne serait pas comme avec Penny, ni comme avec une famille normale où les deux parents vivent ensemble et sont là pour s’aider. Bien sûr Aisling a été là mais il ne vivait pas ensemble et c’est lui qui gardait Siobhan la majorité du temps. De toute façon il avait largement plus le temps qu’elle. Lui n’a pas des études, un boulot qu’il ne peut pas arrêter car il a besoin de manger. Il a juste pris un congé et c’est tout, les choses sont simples de son côté. « Tu sais j’ai jamais vraiment eu d’animaux moi, j’suis direct passé par la case enfants. » dit-il en riant. Si sa sœur adore les chevaux, lui n’est pas un amoureux des animaux comme elle. Il les aime bien mais n’en a jamais eu par peur de ne pas réussir à s’en occuper. Et puis maintenant à l’appartement il y a le chien de Concho.
Perry lui demanda ensuite de ses nouvelles, sachant qu’elle a un emploi du temps largement plus chargé que le sien. Elle lui explique que sa levée de fond pour l’association s’est bien passée et qu’elle en est satisfaite. « Voilà, comment tu veux que j’rivalise face à ça ? Genre tu aides des asso’ et tout. » dit-il pour rire avant d’ajouter. « N’empêche c’est super cool ! » Il est réellement content que tout ce soit bien passé et qu’elle soit heureuse.
Elle lui explique ensuite que son boulot et le fait d’avoir un enfant n’est pas comparable et que s’il veut, elle est là. « Comment tu veux caler dans ton agenda de t’occuper de ta nièce, hein ? T’as trente-six mille choses à faire ! J’sais pas comment tu fais. » Lui se sent débordé pour un rien.

Peut-être que d’une certaine manière il est courageux d’avoir été père sans aucune expérience et sans savoir s’occuper vraiment de lui-même en premier lieu. « C’est plutôt qu’j’ai pas eu trop l’choix. » Enfin si, il l’a eu. Pour Penny il aurait pu dire non et elle aurait été en foyer et pour Siobhan il aurait pu la laisser à Aisling même si elle n’en voulait pas. Seulement, il a lui même été en foyer, certes il était encore petit mais il s’en souvient. Il sait qu’il est tombé sur une super famille qu’il adore mais ce n’est pas le cas de tout le monde, il en a vu des visages tristes pendant les quelques temps passés à l’orphelinat.
Perry voyait sa sœur gênée devant son compliment « Hey détend-toi ! Si tu veux pas que j’te dise ça t’as qu’à j’sais pas...tuer des gens et là j’te dirais que c’est pas bien. » Oui il peut vraiment être autoritaire et dire...c’est pas bien. Il a intérêt à changer un peu s’il ne veut pas avoir à dire oui à tout ce que veut Siobhan. En tout cas Poppy aura le temps de la voir, c’est peut-être elle qui va apprendre à Perry à dire non à sa fille, enfin quand celle-ci sera en âge de vouloir quelque chose, ce qui ne devrait pas tarder puisque mine de rien, elle grandit. « T’façon tu peux passer quand tu veux. » Le 17 c’est presque chez elle de toute façon, elle le connaît cet appart, elle en a même encore la clef, Perry lui a laissé. Au moins s’il a un problème il sait qu’elle peut venir et rentrer. « C’parce que c’est vrai aussi, t’es la fierté d’la famille. » dit-il en la poussant légèrement avec son épaule pour la taquiner. « Tu sais j’fais pas grand-chose en c’moment, j’vais reprendre le boulot pis Siobhan va aller à la crèche du coup, elle va s’faire des amis bébés. »