(freby) i missed you so much

Ça faisait une éternité que je n’avais pas revu ma brune préférée. Ou celle qui faisait office de meilleure amie ici. Et j’avais honte ! Mais tellement honte ! Mais entre les histoires avec Chase, Seamus, Lorenzo et la mort de Larà. Ce ne fut pas trop étonnant que je fasse un burn out après tout ça. J’avais tout simplement gueulé auprès de la production qui avait décidé de m’envoyer en vacances. En plus je partageai ma cabine avec un garçon très séduisant et qui ne me semblait pas être un mauvais bougre. Tandis que j’arpentai le bateau grâce à l’aide de mes tongs, mon ombrelle dans la main, je cherchai mon amie. Je m’assis au bar pour commander un cocktail sans alcool attendant qu’elle me rejoigne. Après tout, nous avions pas mal de choses à nous raconter pour rattraper le temps perdu.

En apprenant que Ruby faisait elle aussi partie de cette croisière, tu ne pouvais que te réjouir. Avoir la jeune rousse avec toi pour passer des vacances de folie, c'est tout ce que tu demandes. Et puis, cela fait un moment que vous ne vous êtes pas vues, alors, vous avez des tas de trucs à vous raconter. Enfin, surtout elle, puisque toi tu es dans une spirale de vie assez banale en ce moment. Toujours le même refrain, à savoir le travail et la fête. Rien d'autres. Pas de sentiments, pas d'attaches, c'est mieux ainsi. Ou du moins, c'est ce que tu essayes de croire, envers et contre tout. Bref, après quelques minutes à traverser le bateau, tu rejoins enfin ta meilleure amie au bar. T'approchant d'elle, tu la serres dans tes bras, réellement contente de la revoir. « Salut toi ! Tu peux pas savoir comme tu m'as manqué ! » Dis-tu en venant t'asseoir à côté de la jeune femme. Tu commandes à ton tour un cocktail mais contrairement à Ruby, avec de l'alcool. « Alors, comment tu vas ? » Ajoutes-tu, un sourire aux lèvres. Tu sais que ces derniers mois ont été assez compliqués pour la jeune femme alors tu espères qu'à présent, ces mauvais moments sont passés.

Je n’arrivai pas à en parler. Je ne sais pas pourquoi mais en parler était devenu douloureux. Je m’étais donc embarquée dans cette croisière en espérant passer un bon moment. Ne plus penser à mes sœurs, mes parents mais c’était chose impossible. C’est pour cette raison que je voulais retrouver Freja et lui en parler. J’étais restée évasive sur leur perte. Embarquer sur cette croisière était sans aucun doute une bonne idée. Je me laisse aller tandis qu’elle me serre dans ses bras. Je passe une main dans mes cheveux en lui souriant. J’essaie d’être sincère. « ça va. Je me remets doucement. Enfin, j’essaie. Et toi ? » Disons que les cachets aidaient énormément. Je porte mon verre à mes lèvres. « Tu veux boire quelque chose ? Je t’invite ! Dis-je avec entrain. » Après tout, c’était un peu de ma faute si j’avais en quelque sorte coupé les ponts.

Lorsque Ruby t'apprend qu'elle se remet doucement, tu hoches la tête encore légèrement inquiète. Tout n'est pas rétablit mais c'est en bonne voie ou du moins, tu oses l'espérer. De ton côté, tu n'as pas vraiment à te plaindre enfin pas face à ta meilleure amie qui a des problèmes bien pire que les tiens. « T'as de la chance, je suis là pour te remonter le moral ! » Dis-tu avant d'ajouter : « Moi ça va, comme toujours lorsque je suis en voyage. » Tu hausses les épaules, un sourire au coin des lèvres. Il est vrai que le voyage fait partie intégrante de ta vie et que ce n'est pas quelque chose dont tu pourrais te passer. Il n'y a qu'en voyage que tu te sens pleinement complète. Et ça, Ruby le sait pertinemment. « Avec plaisir, je prendrai un Mojito s'il vous plaît ! » Dis-tu en regardant le serveur. Une fois vos boissons servies, tu attrapes ton verre et commences à le siroter avant de demander : « Alors, avec qui partages-tu ta chambre ? Un beau mec sexy ? » Tant qu'à faire, autant joindre l'utile à l'agréable. Et comme à votre habitude, les mecs font souvent partie de vos sujets de conversation.

Mentir à ma meilleure amie semble être la meilleure solution. Lui dire que tout va bien est un énorme mensonge. J’essaie sans doute de m’en convaincre moi-même. Mais comment faire pour parvenir à surmonter tout ceci ? J’étais venue sur ce bateau justement pour essayer de palier à ce manque, ce gouffre qu’il y avait en moi. Qui s’agrandissait de jour en jour. « T’as toujours été là, dis-je dans un sourire. » C’est vrai que la brune était souvent en voyage mais quand ça n’allait pas, je pouvais compter sur elle. Elle fut l’une des rares que j’aie appelé pour la tenir au courant de la situation. Pour lui dire pour l’incendie. Mon attaché de presse avait tenté d’étouffer l’affaire au maximum. Je me souvenais encore me tenir devant leurs tombes, sans pouvoir bouger. Même encore aujourd’hui. J’en rêve tout le temps. Je vide mon verre cul sec en grimaçant pour demander au serveur de nous en mettre deux. Je n’ai jamais été apte de l’alcool mais là, disons que c’était devenu une nécessite. « Je dois t’avouer qu’il est sexy mais je ne pense pas être son type. Je crois qu’il est en coloc avec toi. Perry, ça te parle ? » Je passe une mèche de cheveux derrière mon oreille en me tournant vers ma meilleure amie. Un gentil garçon, bien que pas mon type, mais gentil quand même.

« Ca sert à ça une meilleure amie. » Réponds-tu sincèrement en souriant à Ruby. Tu sais que ces derniers temps ont été vraiment difficiles pour elle alors tu te dois d'être présente. Vu ce qu'elle a vécu, elle a besoin de soutien même si elle fait penser le contraire. Toi, tu la connais, et tu n'es pas dupe. « Mais t'hésites jamais à m'appeler si t'as besoin, tu le sais. » Ajoutes-tu comme pour conforter ton amie dans l'idée que si elle a besoin, tu es là. Parce que Ruby est un peu comme toi et elle a tendance à tout garder en elle quand ça ne va pas. Et par expérience, tu sais que ça n'apporte rien de bon. Tu souris, amusée, lorsqu'elle boit son verre d'une traite. Ce n'est pas dans ses habitudes mais tu ne relèves pas. Après tout, vous êtes sur cette croisière pour vous amuser. « Et comment que je le connais. » Rétorques-tu en souriant d'un sourire qui en dit long. « Mais t'es le type de tout le monde, t'es belle comme un coeur. » Ajoutes-tu en attrapant ton nouveau mojito. Tu trinques avec ta meilleure amie avant de le porter à tes lèvres et d'en savourer la douce liqueur. Contrairement à Ruby, toi, l'alcool ça te connaît plutôt bien et surtout, tu adores ça.

Freja ressemblait tellement à Sally. Pleine d’entrain et de confiance en elle. Tandis que de mon côté, j’étais la petite chose fragile qu’on maternait toujours. Elles étaient les sexy et j’étais la porte-manteau, celle qui tenait les sacs pendant qu’elles allaient danser. « T’es plus co… co… comme une sœur que comme ma meilleure amie, tu sais. » Je pose doucement ma main sur la sienne, dévoilant par la même occasion mon poignet tatoué. Geste tout récent et auquel j’avais pris goût. Je songeai déjà à m’en faire un second mais l’emplacement restait à déterminer. Ce dernier était la même que celui que ma jumelle a longtemps orné à ce même poignet. Une sorte d’hommage, une ode à Sally, désormais disparue. Je ne voulais pas retenir Freja avec ma dépression, avec mes mauvaises ondes. J’avais tenu une brève conversation avec Alfie que j’évitai désormais pour ne pas assombrir son humeur ensoleillé. Je hoche la tête tandis qu’elle me dit de ne pas hésiter à l’appeler. Je sais que je ne le ferai sans doute jamais. Comment dire à ma meilleure amie, celle qui était toujours près de moi que je prenais des médicaments qui m’assommaient, fumais comme un pompier et buvais comme un trou. D’ailleurs, je vide mon verre d’un trait sans grimacer pour une fois. On en vient à parler de mecs et j’éclaterai presque de rire. « C’est bien ce qu’il me semblait. » Perry semblait sympa. Un énième tombeur mais je savais que je n’étais pas son genre, tout comme il n’était pas le mien. Je me sens rougir sous les compliments de la jolie brune avant de passer une main dans mes cheveux. Je grimace alors. « C’est ça le souci, je suis jolie. Pas sexy, pas désirable mais juste jolie. » Je fais la moue. « Tu connais Alfie je pense ? Ton avis sur lui ? » Comment faire comprendre de manière détournée à ma pote que l’hispanique m’intéressait. « Tu penses que la gentille, jolie et fadasse Ruby a sa chance ou est-ce que je dois… je ne sais pas claquer le budget coiffeur et fringues ? » J’attrape le mojito sans me soucier d’un instant qu’on pourrait me juger pour le vider à nouveau d’un trait. Je tousse un peu. « Et toi avec Woody, t’en es où ? » Histoire de savoir si j’allais devoir lui snip snip les corones ou juste me contenter de lui lancer une œillade noire bien appuyée.

Tu es étonnée de voir que Ruby bégaie même en ta présence. Jusqu'ici, la jeune rousse réservait cela essentiellement aux hommes, pas à toi. Tu fronces les sourcils un instant avant de sourire en entendant la fin de ses paroles. « T'es la femme de ma vie, je te l'ai déjà dit. » Dis-tu en posant ta main sur la sienne et en remarquant par la même occasion ce nouveau petit tatouage. « C'est nouveau ça ? » Demandes-tu, fascinée par le poignet de la jeune femme. Il faut dire que toi aussi, tu penses très sérieusement à te tatouer une partie du corps. Peut-être que vous pourriez le faire ensemble, avec Ruby. C'est une idée que tu gardes dans un coin de ta tête en tout cas. Tu ris lorsqu'elle confirme ses doutes quant à ta relation avec Perry. Il faut dire qu'à part le fait que vous vivez ensemble, vous avez également couché ensemble et tu es à peu près certaine que ça pourrait se reproduire si vous le vouliez. « Nan mais c'est mon coloc'. Enfin je vis chez lui. » Dis-tu en buvant ton verre de manière plus mesurée que Ruby. Mais alors que la jeune rousse prononce le prénom d'Alfie, tu déglutis légèrement sans pour autant laisser paraître quoi que ce soit. Tu as toujours été douée pour cacher tes émotions sans doute un héritage de ton père. Et peut-être même le seul. « Pour être sexy il faut avoir l'attitude qui va avec. Mais j'suis pas sûre que t'aies envie de connaître les joies du désir parce que tu attires un tas de mecs pas très réglos. » Dis-tu par expérience avant d'ajouter : « Oui, c'est un ami. C'est un gars très bien, attentionné et avec un bon fond. Je ne peux pas te promettre que vous passerez le restant de vos jours ensemble mais si tu te sens bien avec lui et que c'est réciproque, alors fonce. » Tu fais l'impasse sur la nuit que tu as passée avec Alfie parce que tu ne voudrais pas briser les espérances de ta meilleure amie. Même si ça te fait un petit quelque chose de les imaginer ensemble, tu ne peux nier que ce sont deux personnes aussi merveilleuses l'une que l'autre. Ils se mériteraient réciproquement sans aucun doute. « Oh c'est de l'histoire ancienne avec le cow-boy. » Réponds-tu en reprenant les termes que Ruby avaient employés quelques semaines plus tôt. « Aujourd'hui, ce n'est plus que mon meilleur ami. » Dis-tu en mettant des guillemets au "que". Parce que ce n'est pas rien d'avoir une telle place dans ton coeur, après tout. Toi qui habituellement ne t'ouvre à personne.

Je régresse. Je le sais. Depuis qu’elle a disparu, j’ai perdu tous mes repères. Il n’est pas rare que je sois dans des endroits louches, que je perde la mémoire et que j’essuie de violentes gueules de bois. Mon bégaiement est la preuve que je suis en train de perdre la tête, mes moyens. Lorsque Freja me dit que je suis la femme de sa vie, je me sens rougir. Comme une pivoine. « T.. T… Toi au… aussi. » Les mots sortent péniblement. J’incline la tête vers le bas comme d’habitude. Mes longs cheveux roux tombent comme des baguettes sur mes épaules et je passe une main sur mon visage fatigué. Ma meilleure amie voit mon tatouage et j’ai un sourire triste tandis qu’une larme solitaire coule sur ma joue. « Sally avait le même. C’est… c’est… c’est pour elle. » J’ai un sourire triste. Jamais je ne pourrais dire à Freja l’ampleur de mon mal être, l’ampleur du gouffre qui s’est insinué en moi. Je passe une mèche de cheveux derrière mon oreille avant de descendre mon mojito d’un trait et de commander un autre verre. J’éclate de rire. On en vient à parler de son colocataire, Perry. C’est vrai que c’est un bel homme mais pas trop mon genre. « Juste colocataires ? T’as jamais fait autre chose avec ? » C’est que je la connais Freja. Elle est magnifique. Elles étaient très belles avec Sally. Toutes les deux, elles attiraient tous les regards. Donc forcément, je sais qu’aucun garçon ne lui résiste. « Je connais les joies de la friendzone. Oh Ruby, tu es si gentille. Oh Ruby, tu es si douce. Mais t’es trop bien pour moi. Fuck off, ça fait tellement longtemps que je me suis pas envoyée en l’air que je sens mon hymen en train de se reformer. » Je pourrais être choquée moi-même de mon franc-parler mais pour une fois, c’est vrai. J’avais perdu ma famille. Je devrais me bourrer la gueule (check), fumer des trucs bizarres (check) et me perdre dans les bras d’un inconnu. « Je veux juste qu’on me désire au moins une fois. Pas qu’on me regarde comme une putain de poupée de porcelaine qu’on a peur de briser. » Je serre mon verre un peu trop fort qui se brise dans ma main. Tempérament d’écossaise. Un peu trop volcanique. Je prends une profonde inspiration. « Je l’aime bien. En fait, il m’a sauvé d’un mec un peu trop lourd parce que je suis connue blablabla et on a discuté. Depuis… » Je fais le mouvement d’un truc qui tourne dans ma tête. « Mais soyons honnête, dis-je avec un petit rire, je n’ai aucune chance avec ce genre de mecs. Il est mille fois trop sexy pour moi. Donc mieux vaut que je reste amie avec. » L’histoire de ma vie. Celui de la bonne copine. Après tout, ne l’ai-je pas été à multiples reprises ? La friendzone est mon amie. On en vient à parler de Woody que je n’apprécie pas particulièrement. « Tu veux que j’le snip snip ? Rapide, vite fait, comme Brienne ni vu ni connu. » Je lui fais un clin d’œil. Pour Freja, je serai prête à tout. Même à casser la gueule à un beau mec.

« C'est revenu depuis quand tes bégaiements ? » Oses-tu finalement demander, le visage inquiet. Tu as bien une petite idée sur la question mais tu préfères que Ruby t'explique la cause elle-même. Et puis, tu ne veux pas émettre un jugement peut-être faux et risquer de faire de la peine à ta meilleure amie. Elle compte trop à tes yeux pour ça. Alors que la jolie rousse parle de son tatouage, tu vois une larme rouler sur sa joue que tu ne peux t'empêcher de retenir. Tu ne veux pas la voir pleurer, pas aujourd'hui alors que tu es là pour lui changer les idées. « Je crois qu'elle aimerait beaucoup ça. » Dis-tu en souriant à la jeune femme. Même si elles étaient très différentes, Sally et Ruby restent des jumelles. Et tu sais ce que c'est d'en avoir une, même si toi, tu ne la supportes pas. Du coup, tu es à peu près certaine qu'un tel geste plaît à Sally peu importe où elle se trouve à présent. Vous en venez à discuter de Perry et tu ne peux t'empêcher de sourire malicieusement en constatant que ta meilleure amie te connaît trop bien. « Si, on a couché ensemble mais c'était avant que j'emménage. » Réponds-tu, amusée. Tu n'as jamais pensé au fait qu'il t'avait peut-être proposé d'emménager dans le but de coucher avec toi plus régulièrement mais si c'était le cas, c'est raté. Car depuis lors, rien ne s'était plus jamais passé même si les occasions ne manquaient pas. Tu ne peux t'empêcher de rigoler à pleines dents en entendant Ruby parler de son hymen. C'est cru mais ça a le don de te faire rire. « Si tu ne veux pas finir avec la même réputation que moi, c'est peut-être mieux d'éviter. » Dis-tu en faisant référence au fait de coucher avec un mec sans sentiments et sans attaches. « Mais si c'est ça que tu veux, des mecs y'en a à la pelle pour ça. Faut juste prendre une attitude de séductrice. Et avec ton roux ardent, les hommes ne pourront que craquer. » Ajoutes-tu avec certitude. Peut-être qu'au fond, si Ruby ne trouve pas ce genre de relations, c'est parce qu'elle n'aime pas réellement ça. Ou peut-être qu'elle cherche trop le prince charmant. Et ça, tu sais qu'il n'existe pas. « Alfie est très séduisant, c'est vrai. Mais ne te mets pas des barrières parce qu'il est "trop sexy pour toi". C'est à lui d'en décider, pas à toi. » Ruby a tendance à se mettre bien trop de barrières de manière générale. Même avec toi parfois. Et cette attitude n'est pas adéquate pour entretenir un semblant de relation. Du moins, tu l'imagines parce qu'en terme de relations tu n'es pas un exemple. « Ce ne sera pas nécessaire. Il n'a rien fait de mal. J'imagine qu'on était pas fait pour être ensemble. » Dis-tu en haussant les épaules. Même si tu ressentiras sûrement toujours un petit quelque chose pour Woody, c'est de l'histoire ancienne.

J’ai un sourire timide à Freja lorsqu’elle me demande depuis quand je bute sur les mots. Lorsque j’étais plus jeune, c’était une vraie maladie. Il n’y avait que quand j’étais saoule que je ne bégayai pas. Un peu comme Raj dans The Big Bang Theory qui ne peut pas parler à une femme sans être saoul. « De… » J’inspire profondément avant de composer la phrase dans ma tête. Foutus exercices. « Depuis qu’elle n’est plus là. » Ma sœur était mon ancre. La personne qui me permettait de tenir sur mes deux pieds. Avouer ainsi à Freja que ma parole devenait fébrile depuis l’absence de ma moitié était une énorme confession pour moi. Je pourrais avoir mille chagrins si Freja ou Noam avait du chagrin, je mettais le mien de côté pour aller les réconforter. J’ai toujours su enfermer mes émotions dans une petite boite pour ne les sortir que lorsque je suis seule. Ce n’est pas parce que je ne faisais pas confiance aux gens. C’est juste parce que je ne suis pas assez importante pour en parler. « J’ai décidé d’en faire un pour chaque… chaque personne qui compte. Toi, t’auras des ailes là. » Je montrai le haut de mon épaule pour l’emplacement de mon futur tatouage. Et je montrai mon autre poignet. « Et j’ai déjà prévu de me faire les pattes de Zéro sur celui-ci. » Les ailes pour Freja qui était pour moi comme un oiseau. Un beau perroquet. Un Arras bleu car notre amitié durerait aussi longtemps que vivait ses oiseaux et qu’elle était libre et belle. Elle pouvait faire ce qu’elle voulait. J’éclate de rire lorsqu’elle m’avoue avoir coucher avec Perry. « Je le savais. Je te connais. Avec toi, j’ai une vie sexuelle par procuration fantastique. Et avec moi, t’as les paillettes et les jolies robes. » Je bois mon verre d’un trait avant de me souvenir d’un truc. « Tu passeras dans ma cabine bébé, j’ai des chaussures pour toi, tu vas les adorer. » Après tout, les objets de créateurs je n’en ai que faire mais je sais Freja féminine. Et j’étais assez fière de lui avoir offert une paire de chaussures à mille dollars et avec un talon rouge. Toutes les femmes rêvent de ce genre de pompes. Et puis dans les robes moulantes j’avais l’air d’un tonneau tandis qu’elle, elle s’était une sirène. « Nan j’ai la réputation d’être une meuf tellement bizarre qu’elle fait tourner court toutes ses relations. Même Lorenzo a pas voulu coucher avec moi. Mon vagin n’a pas de dents, bon sang. » Je suis sans doute saoule c’est pour ça que je parle crument. Je savais qu’avec Lorenzo, c’était autre chose. Nous avions rompu par simples incompatibilités de nos vies. « Ok, je vais être honnête. Il m’avait abordé une première fois pour…, dis-je en parlant d’Alfie, et maintenant je dois passer pour une conne. Je lui ai dit no way gars tu n’entreras pas dans mon temple sacré. » Je fais la moue. « Et l’autre soir, je pensais qu’il allait m’embrasser. J’ai genre allumé le panneau lumineux au-dessus de ma tête mais rien, nada. Donc ça veut sans doute dire que je ne l’intéresse pas. » Et ce n’est pas plus mal dans le fond car je ne suis qu’une alcoolique passionnée par la mort et les œuvres de Tim Burton. « Un jour, tu trouveras ton Jack j’en suis persuadée. » Je tapote doucement sa main avant de me mettre à rougir. « Euh… » Je vide de nouveau mon verre avant de fouiller dans mon sac pour en sortir un de mes fameux carnets. « J’ai commencé à faire une BD. Tu sais que j’aime dessiner et je voulais avoir ton avis sur les dessins de ma faucheuse. » On passera les trois premières pages où j’ai dessiné tour à tour Freja et Alfie. Grosse psychopathe que je suis.

Tes yeux brillent lorsque Ruby t'explique que c'est depuis la mort de Sally que ses bégaiements font de nouveau irruption. Tu sens déjà l'émotion gagner ta gorge parce que ce n'est pas un sujet facile à aborder. Ni pour Ruby, ni pour toi. Il faut dire que tu as toujours beaucoup aimé Sally. Pas autant que Ruby mais tu l'aimais quand même parce qu'elle était capable de rendre heureuse ta meilleure amie par sa simple présence. Tu hoches la tête faiblement en attrapant la main de ta meilleure amie comme pour montrer ton soutien et ta présence. Même si la rousse le sait sûrement déjà. Tu ne réponds rien parce que tu sais qu'il n'y a rien à dire. Vous n'avez pas forcément besoin de parler avec Ruby pour vous comprendre de toute façon. Finalement, tu l'interroges sur son nouveau tatouage et hoches la tête au fur et à mesure des explications de la jeune femme. Tu souris lorsqu'elle arrive au tatouage pour toi. Cela ramène ton idée sur le tapis que tu ne tardes pas à partager avec ta meilleure amie. « D'ailleurs, je me demandais si ça te dirait qu'on se fasse tatouer en même temps ? Et pourquoi pas la même chose ? Pour marquer le coup. Ca fait un moment que j'y pense. » Demandes-tu, les yeux brillants d'excitation. Tu adorerais faire ça avec Ruby parce qu'au moins, ça aurait un sens indélébile. « Ouais même si en ce moment c'est pas si fantastique. » Dis-tu en haussant les épaules. Il faut dire que tu ne sors plus tant que ça, préférant passer tes soirées au travail. Avec Woody, ça vous arrive de remettre ça mais c'est bien plus rare qu'avant. Vous avez préféré faire votre vie chacun de votre côté en comprenant que ce n'était pas possible pour vous deux, ensemble. « Oh putain, j'crois que je vais avoir un orgasme. » Réponds-tu en imaginant déjà la paire de chaussures que t'as ramenée Ruby. C'est l'avantage d'avoir une meilleure amie célèbre, ça. « T'es pas bizarre, t'es juste trop romantique et du coup, les mecs se sentent sûrement pas à la hauteur. Et ils ont raison. » Parce qu'à tes yeux, Ruby est trop bien pour avoir des relations d'un soir comme toi. Elle mérite bien mieux qu'un mec qui veut juste son cul. Tu l'écoutes parler d'Alfie et même si ça te fait bizarre au début, tu ne peux t'empêcher d'avoir envie de concrétiser l'affaire. « Il a peut-être eu peur de se ramasser un râteau puisque tu lui as mis un stop la première fois. Parfois, il ne faut pas avoir peur de prendre les commandes, les mecs aiment bien ça. » Dis-tu simplement. Du moins pour toi, ça marchait plutôt bien. Tu souris à ta meilleure amie lorsqu'elle ajoute que tu trouveras ton Jack un jour ou l'autre. Tu n'es pas certaine de ça mais tu ne préfères pas la contredire aujourd'hui. « Je pense que je devrai te ramener à ta chambre. » Rétorques-tu, un sourire amusé, en voyant la jeune femme boire à nouveau son verre d'une traite. Lorsqu'elle sort une BD de son sac, tu ne peux t'empêcher d'être émerveillée devant son talent. « T'as déjà pensé à montrer ça à quelqu'un de compétent ? T'es vraiment douée chaton ! »

Je constate que nous avons toutes les deux été touchées par la disparition de Sally et de mes parents. Freja m’a connue en même temps que ma sœur et leurs personnalités étaient assez ressemblantes. C’est sans doute pour cette raison que nous étions si proches désormais avec ma meilleure amie ? Je n’en avais aucune idée. Je choisis de ne pas m’étendre sur le sujet de Sally. La perte était encore trop douloureuse. J’aurai dû être là et j’étais dans cette phase de culpabilisation qui menait sans doute vers la fin. J’étais comme un bateau avec la cale percée, prêt à chavirer et je ne voulais pas en parler. Je ne voulais pas parler de mon chagrin à voix haute car ça viendrait à admettre qu’elle est morte. Alors, je change de sujet et j’évoque le tatouage. Je n’avais jamais envisagé de m’en faire un. J’avouerai l’avoir fait pour les mauvaises raisons. Je voulais souffrir. Mais ça ne m’avait rien fait. Lorsque mon amie lance l’idée d’en faire un le même jour et le même je lui souris. « Pourquoi pas. Après tout, c’est à la vie, à la mort. » On évoque sa vie sexuelle. Je ne suis pas du genre à juger les gens à ce niveau. Chacun fait comme il veut. Je suis plus du genre à ne pas être intéressée par l’acte en lui-même. Sauf si je sentais une alchimie avec une personne. Mais ça ne m’était pas arrivé depuis longtemps. « Elle est toujours mieux que la mienne. Comme ce verre, vide. » Je renverse le récipient comme pour illustrer mes propos avant d’en commander un autre. Le barman me juge, je le sens. Mais je m’en fous. Il me ressert la même chose et j’ai envie de lui faire un doigt d’honneur. « Tu verras, elles sont sublimes. » Je bois une gorgée. Ça ne me brûle plus autant qu’avant. « Je commence à revoir mes espérances à la baisse. » J’hausse les épaules lorsqu’elle affirme que les mecs ne sont pas à la hauteur. Je ne suis pas trop d’accord avec elle. Il était à la hauteur. Je me sens comme une adolescente, assise dans le couloir d’un lycée qui regarde passer le beau mec quand il passe. « Nan il est hors de ma portée. Et tu me connais dès que la situation devient un peu… à tendance sexuelle, je bégaie, je rougis et je me casse la gueule. Je me vois pas l’agripper poser mes lèvres sur les siennes. » Quoique je pense que ça serait agréable. Je ne suis pas du genre à fantasmer mais il est vrai que lorsque nous nous étions vus, j’avais passé presque un quart de seconde à mater ses lèvres et ses mains. Les mains chez un homme, c’est très important. L’alcool fait sans doute dériver mon cerveau vers mes envies sexuelles de chatte en chaleur. « Et puis, je ne sais pas si je serai une bonne amante. Je n’ai pas pratiqué depuis tellement longtemps… » Je commence à me mâchouiller l’intérieur de la bouche comme d’habitude. « Ou alors, je prends un mec test pour voir si je suis douée et je couche avec Alfie après quand on aura débarrassé mon vagin des toiles d’araignées. Un peu comme Cécile de Volanges avec le Vicomte de Valmont. » Regarder les liaisons dangereuses quand tu es seule n’est pas forcément une bonne idée. Je bascule un autre verre. Je crois que j’ai perdu le compte avant de parler en métaphore à Freja. « Mais je vais bien ! » Oui, je suis juste saoule. Ou alcoolique. Il faudrait que je m’achète une flasque et que je la mette sur ma cuisse. Je lui montre ma BD qui est sans doute un peu trop morbide. « Regarde, dis-je en tournant les pages, j’ai fait la petite faucheuse enceinte. Et là, elle court parce qu’elle a la phobie des araignées et qu’il y en avait une dans les toilettes. C’est sous forme de sketch. Mais de façon morbide. » Ayant des fourmis dans les jambes, je me relève pour m’écraser au sol. Pas bon l’alcool, alcool mauvais.

Oui, à la vie, à la mort. Cela résume plutôt bien votre relation et le sentiment que tu éprouves envers celle-ci. Ruby c'est ta meilleure amie, ta soeur, ton tout. Aujourd'hui, c'est devenu un vrai pilier dans ta vie et tu ne pourrais plus te passer d'elle et sa chevelure rousse. Tu aurais pu tomber amoureuse d'une personnalité comme Ruby fut un temps. Mais aujourd'hui, cette amitié vous convient parfaitement à toutes les deux. C'est pourquoi, tu évoques l'idée d'un tatouage identique réalisé au même moment. De quoi marquer le coup et être dans la peau de l'autre, à vie. « Faudra qu'on programme ça alors. » Dis-tu en souriant à la jeune rousse. Très vite, vous revenez à votre sujet principal favori à savoir les mecs et le sexe. En ce qui te concerne, ta vie sexuelle est plutôt mouvementée. Du moins, en règle générale. Pourtant, en ce moment, c'est bien plus compliqué que ça. Mais tu ne veux pas embêter Ruby avec tes histoires de couple débiles. Pas après ce qu'elle vient de traverser parce qu'à côté, ça semble bien dérisoire. « Trinquons à nos situations amoureuses merdiques ! » Dis-tu en tapant légèrement ton verre contre celui de ta meilleure amie, une fois celui-ci plein. Doucement, tu portes ton verre à tes lèvres, savourant cette douce liqueur. « Je n'en doute pas. » Réponds-tu en faisant référence à cette fameuse paire de chaussures qui t'attend. « Alors montre-toi un peu plus explicite mais pas trop pour que ce soit lui qui fasse le premier pas. » Tu hausses les épaules. Pour toi, ça semble assez simple mais pour Ruby, tu sais que c'est une toute autre affaire. « Ouais pourquoi pas. J'suis pas sûre qu'un mec test fonctionne réellement pour toi. T'as besoin de quelqu'un qui te mérite pas un mec de passage. Et tu sais, le sexe c'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas. » Ruby n'est pas comme toi. Toi, tu t'en fiches pas mal de coucher avec un homme que tu ne reverras plus jamais. Toi, tu t'en fiches d'avoir une sale réputation parce que tu sais que derrière tout ça, quand on creuse, il y a plus. Ruby, elle, elle mérite d'avoir quelqu'un de bien qui la respecte. Et qui l'aime pas seulement pour son corps et sa beauté mais également pour ce qui se cache en dessous. « Je ne dis pas le contraire mais je ne te laisserai pas rentrer seule. » Rétorques-tu en faisant allusion à son état avancé d'ivresse. Lorsque tu regardes sa BD, tu ne peux t'empêcher de trouver son talent majestueux. Elle est douée il n'y a pas de doute. Et même si ses dessins sont morbides, oui, ils sont sincères et transmettent des émotions. Et ça, c'est le principal pour un artiste. Enfin, de ton point de vue. « Morbide mais magnifique. Est-ce qu'il y a quelque chose que tu ne sais pas faire ? » Demandes-tu en souriant. Une fois ta meilleure amie debout, tu n'as pas le temps de la rattraper qu'elle est déjà à terre. Très vite, tu lui tends la main pour l'aider à se relever. « Je crois que c'est un signe. Il faut que je te mette au lit ! » Dis-tu à la jeune rousse.

J’aurai aimé être belle comme elle. Et pas être une godiche débile sans cervelle. J’aurai aimé être indépendante, libérée, bref j’aurai aimé être tout sauf moi. Une imbécile sans avenir lorsqu’elle est séparée de sa jumelle. Seulement, Sally n’était plus et j’étais donc seule. Arrachée à ma moitié comme un mollusque à son rocher. « Quand tu veux. » Je n’ai pas conscience que j’ai attrapé une serviette sur laquelle je dessine. J’ai pris cette habitude pour me changer les idées et ainsi oublier ma routine. Ma vie pourrie. Elle tape contre mon verre et m’arrache un sourire. Je vide le mien d’un trait avant de le regarder. « Bah vu que je lui plais pas, je vais pouvoir mourir de vieillesse. Il viendra me dire que mon dentier lui plait lorsque je serai en maison de retraite. » Alfie, l’inaccessible. Il était évident qu’il était mon dernier coup de cœur. Mais c’était limpide comme de l’eau de roche. « Je l’ai fait qu’une fois donc il se pourrait que j’ai oublié. » Le barman vient nous servir un nouveau verre et je lui tends un billet beaucoup trop gros pour la somme demandée. Ma tête remue au rythme de la musique qui passe dans ce bar. J’ai envie de faire quelque chose d’insensé. Son idée de tatouage en tête. La plume dessiné, je glisse le papier vers ma meilleure amie. Des tatouages jumeaux. Jumeaux. Ma mine s’assombrit pendant un quart de seconde et je pense à Sally. J’aurai envie de lui dire que j’étais seule. Que tout le monde était parti mais j’ai cette fâcheuse habitude à tout garder au fond de moi. Je tourne la tête vers Freja avant de lui sourire. Je fouille dans ma poche pour sortir les papiers griffonnés et les poser à côté de ma planche de dessin. « Me faire aimer ? Garder mes proches en vie ? » Je finis de nouveau mon verre avant de me lever et de finir au sol. La main douce et délicate de mon amie s’empare de la mienne et je me lève. Qu’est-ce que j’étais en train de devenir ? Je n’en avais pas la moindre idée.