(angelle) j'ai demandé à la lune mais le soleil ne le sait pas

Une croisière ? Pourquoi pas ! Je nous avais inscrites avec Angus –sans lui demander son avis- parce que déjà ça allait être mon anniversaire et en plus, on pourrait apprendre à faire connaissance sur le bateau. J’avais pris mon violon comme d’habitude, laissée mes perruques au placard pour ranger mes affaires. Puis après avoir laissée un mot à Angus comme quoi, je serai sans doute sur le pont avec un cocktail à la main, j’avais quitté la cabine. J’ai du mal avec les lieux étroits. Non pas que je souffrais de claustrophobie mais presque. Violon en main, je me pose donc une chaise longue pour sortir mon instrument et entreprendre de changer les cordes. J’avais noué mes cheveux en espèce de chignon grotesque pour continuer mon ouvrage, ne me souciant pas des gens qui passaient devant moi.

Evidemment, tu n'avais pas tout vu. Si tu trouvais Lou Belle déconcertante, tu ne savais pas à quel point elle pouvait l'être avant d'apprendre que vous embarquiez pour une croisière, et dans la même cabine. Tu t'en es senti le besoin d'en parler à ton ex-femme, probablement car elle est la seule à te connaître suffisamment bien, et puis car tu lui fais confiance, tu lui confierais ta vie, alors pourquoi pas le côté relationnel de celle-ci. C'est pareil dans l'autre sens, d'ailleurs, vous agissez encore rarement sans avoir l'aval de l'autre, comme par sécurité, pour vous rassurer. Elle t'a dit de foncer, ce à quoi tu as tout de même réfléchi un moment avant de confirmer ta venue à la jeune violoniste. Et te voilà, dans la cabine que vous partagez, à lire le mot qu'elle t'a laissé. Un fois prêt, ayant enfilé bermuda rouge et t-shirt gris, tu rejoins le pont et le balaies du regard à la recherche de la rouquine. Elle n'est pas difficile à repérer, son violon représente une fameuse distinction. Tu prends place sur la chaise longue voisine, glissant tes lunettes de soleil sur ton nez avant de te tourner vers elle. « Tu m'as traîné ici pour me laisser au profit de ton violon ? » Tes lèvres forment un léger sourire alors que tu te détournes, ton attention se posant sur l'eau.

Je n’avais pas de chaussures. Je déteste les chaussures tout comme je déteste les endroits clos. Trop serrés, trop à l’étroit. J’avais donc fui rapidement la cabine, pensant qu’Angus finirait par me suivre sans se soucier du reste. Les cheveux attachés, vêtue d’un short en jean –ex-pantalon- et d’un maillot trop large mais que j’avais acheté avec mes sous, je m’évertuai à accorder mon violon. Une corde avait cassé l’autre jour et je voulais qu’il donne un son mélodieux lorsque je jouerai le soir de mon anniversaire. Je n’avais donc pas mis mes lunettes qui trônaient sur le sommet de mon crâne. Je vis une ombre passer devant moi et ne relevai la tête que lorsqu’Angus eut commencé à parler. « Hm. » Ce fut la seule chose que je répondis avant de poser l’objet couteux à côté de moi. « Tu m’embrasses pas pour me dire bonjour, demandai-je en me tournant complètement vers mon beau brun, ne t’ai-je pas manqué ? » Ou alors, il me trouvait moche à la lumière du jour. Il est vrai que nous nous étions vus au clair de lune. Je me hisse donc pour déposer mes lèvres sur les siennes de manière chaste. Après tout, j’avais déclaré qu’il était mon mec. Sans lui laisser le choix. Je lui offre un sourire. « Ou alors tu me trouves laide à la lumière du jour. » Je croise mes jambes avant de me mordiller la lèvre inférieure pour le fixer. « Je ne te délaisse pas pour mon violon, je n’aime pas les cabines. Comme les chaussures, je m’y sens à l’étroit. » Je regarde un instant mes pieds avant de lui sourire d’un air entendu.

Tu n'es pas du tout prêt à entretenir une nouvelle relation. Tu n'y songeais pas, en tout cas, mais il semblerait que ce n'est pas toi qui décide dans l'histoire. C'est peut-être mieux ainsi, tu n'as pas à réfléchir, seulement à te laisser porter. Ou tirer, par Lou, sur un bateau. Tu n'as jamais fait de croisière, et tu n'es pas très sûr d'aimer ça, jusqu'ici, mais c'est ce que ton ex-femme appellerait "une expérience" car il n'y a pour elle pas d'erreur, seulement de mauvais choix dont ressortent des histoires à raconter. Tu prends exemple sur elle, du moins dans le cas présent. Tu as embarqué sans aimer ni nager, ni la foule, en gros tu l'as fait pour Lou et c'est un choix que tu ne devrais pas trop regretter. Tu prends place aux côtés de celle-ci sur le pont, l'observant une seconde mettre tout le soin du monde à changer les cordes de son violon, avant de parler. Comme tu pouvais t'y attendre, sa remarque ressemble à toutes les autres, déstabilisante et impliquant que votre relation est plus avancée qu'elle ne l'est véritablement. Ou tu as raté un épisode, ce qui n'est pas à exclure mais pas tout à fait sûr non plus. Elle décide donc de faire les choses elle-même, et tu sais que tu pourrais t'habituer à son contact. « Je ne suis pas démonstratif, ça n'a rien à voir avec toi », fais-tu, secouant légèrement la tête face à une telle réflexion. « Qu'est-ce qu'on fait là si le principe même de la croisière te déplaît ? » Tu esquisses un sourire, la tête penchée sur le côté tel un animal attentif.

J’étais complètement sous le charme d’Angus. C’est pour cette raison que j’avais demandé à ce dernier de venir avec moi. Pour qu’on passe du temps tous les deux. Qu’on se découvre en tant que personnes et qu’on voit si on pouvait s’entendre un minimum. Je pose donc l’extension de moi-même sur le côté avant de me lever pour déposer un chaste baiser sur ses lèvres. Je secoue légèrement la tête avant de réfléchir à ma réponse. « Je le serai pour nous deux. » Je penche doucement la tête sur le côté avant de lui sourire. « Parce que je voulais passer du temps avec toi. » Je me lève doucement pour aller me poser sur ses genoux. Du bout des doigts je caresse son visage avant de le regarder. « Et puis si j’attendais que ça vienne de toi, je pense qu’on serait encore au stade des sms. » Je pose ma tête sur son épaule. « Tu regrettes pas d’être venu au moins ? »