hoping my feelings, they would drown -r.

Le retour à Bowen avait été plus difficile que tu ne le pensais. Lou te manquait. Elle aurait vraiment su quoi faire pour t'aider dans cette situation. Tu avais le coeur tiraillé. Tu ne savais plus où donner de la tête. Et en parlant de ta tête, tu étais encore bien amoché, tout était dégonflé, ton oeil au beurre noir avait viré au jaune, signe qu'il serait bientôt normal. Quant à ta côté, c'était toujours douloureux. Karel avait posé des questions et tu étais resté dans un mutisme qui faisait peur à voir. Comme si tu avais perdu toute vie en toi. La seule à qui tu n'avais pas encore eu l'occasion de parler depuis que tout ça s'était passé, c'était Théia. Et elle te manquait. Tu avais envie de la voir, tu avais songé à débarqué chez elle, pour lui parler. Mais tu ne savais pas vraiment quoi lui dire. C'était vraiment confus comme situation. Tu avais attrapé ton skate, ton casque et tu avais filé en direction du terrain abandonné. Tu n'y avais pas mis les pieds depuis ton arrivée en ville. Tu avais rencontré cette fille étrange au nom de Zara, qui était tombé et s'était blessé au genou. Une couette fille en passant, même si tu ne l'avais jamais revu depuis. Avait-elle réussi à retrouver sa sœur ? Tu ne le saurais jamais. Tu avais une sensation étrange, comme une boule au ventre. Tu avais fini par envoyer un message à Théia, pour lui dire que tu aimerais bien la voir, et que si jamais ça la bottait, tu te trouvais sur le terrain abandonné. Comme son nom l'indique, il n'y avait pas un chat. Et tu jouais avec ta planche, en sachant pertinemment que si tu tombais, tu pourrais prendre le risque d'empêcher ta côte de guérir. Mais tu comptais bien y passer le reste de la journée et peut-être la nuit.

Elle n'a pas eu de nouvelle depuis l'autre soir, mais elle n'a pas osé en donner non plus. Trop honteuse que pour faire face aux conséquences de leurs actes, Théia a préféré agir pendant quelques jours comme si tout ça n'avait été rien d'autre qu'un rêve, même si des souvenirs de leurs baisers et de ses mains sur son corps venaient encore la hanter alors qu'elle essayait de les effacer. Elle se sentait déjà coupable quand elle était encore dans l'ignorance, mais la rumeur lancée par The Writers est ce qui l'a achevée. Son nom n'est mentionné nul part et elle n'a aucune idée de si CJ l'a dit à Nevaeh, mais elle n'a pas envie d'attendre pour le découvrir. Tout aurait si simple si il n'était pas fiancé, ou si elle n'était pas venue toquer à sa porte ce soir-là pour se plaindre de sa solitude. Allongée sur son lit, occupée à relire encore une fois les mots rédigés par la main d'une anonyme, un message s'affichant sur son écran la tire de sa lecture et réussit à lui nouer le ventre. C'est lui. Il veut la voir, et elle n'a aucune idée de pourquoi. Enfin non, il ne veut même pas la voir, il s'est simplement contenté de mentionner le lieu où il se trouve sans lui demander de venir. Peut-être qu'il la déteste, qu'il l'insultera de tous les noms lorsqu'elle lui fera face, et qu'il l'obligera à partir définitivement de sa vie. Et pourtant, Théia enfile ses vieilles baskets, fourre les clés de son appartement dans la poche arrière de son jeans, et roule en vélo jusqu'au terrain. Une fois arrivée, elle fait tomber ce dernier dans le sol poussiéreux et est attirée par le bruit des roulettes d'un skateboard contre une rampe. Elle le connaît, elle l'a déjà tellement entendu qu'elle pourrait l'identifier les yeux fermés. En se mordant les lèvres, Théia marche dans sa direction.  « Hey, » murmure-t-elle avant de glisser une mèche de cheveux derrière son oreille, réflexe qu'elle a lorsqu'elle est nerveuse. Lorsque CJ lui fait fasse et qu'elle peut voir l'état de son visage, elle retient sa respiration.  « Ton oeil, » dit-elle simplement, sentant de plus en plus la culpabilité monter en elle. CJ s'est pris un coup, et c'est certainement de sa faute.

Le son de sa voix se fait entendre derrière toi. Ton coeur se serre doucement. Tu ne savais pas trop si elle allait venir ou non, maintenant tu étais fixé puisqu'elle était là. Tu avais envie de courir vers elle, de la prendre dans tes bras. Mais tu te retenais. Tu ne savais pas comment agir envers elle. Comment tu devais te comporter. Pourtant, tu ne voulais pas te montrer froid et distant. Ce n'était pas ce que tu voulais, sauf que tu devais aussi prendre en compte ce qu'elle voulait. Et pour ça, il allait falloir parler de l'autre soir, ça ne pouvait pas rester en suspens dans vos vies. « Bonsoir Théia ! » Tu te tournes lentement vers elle. La première chose qu'elle remarque c'est ton œil. Tu grimaces rapidement, en haussant les épaules. Ce n'était rien. C'était pire lorsque c'est arrivé, ou il y a quelques jours de ça. Pourtant, tu vois son regard. Tu la connais, assez bien et tu ne peux t'empêcher de savoir ce qu'elle pense à cet instant précis. « Ce n'est rien. On va dire que les frères Rutkowski sont pas les plus aimables. » Tu ne dirais rien de plus, ce qui était arrivé, était arrivé. Il n'y avait pas vraiment grand chose à ajouter ici. Tu faisais un pas de plus dans sa direction, t'arrêtant à quelques centimètres de son corps. « Mais ce n'est pas ta faute, d'accord ? » Tu venais poser ta main sur sa joue, plantant ton regard dans le sien. Elle n'était coupable de rien. Si ce n'est d'avoir craqué un jour pour le mauvais garçon. Tu aurais dû te douter que tu allais lui faire du mal, malgré toute ta bonne attention. « Comment tu te sens, toi ? » demandais-tu en gardant votre proximité. Tu ne savais pas trop ce qu'elle voulait, ce qu'elle attendait. Pour toi, il était évident que tu ne voulais pas qu'elle s'éloigne, qu'elle quitte ta vie. Ce serait bien trop vide sans elle.

En le voyant, elle voudrait s'avancer jusqu'à lui, s'approcher jusqu'à pouvoir se glisser dans ses bras et qu'il ne la lâche plus. Elle aimerait qu'il lui promette que tout ira bien, que rien n'est cassé, et qu'elle n'est pas qu'une sorte d'aimants à problèmes comme elle en a de plus en plus l'impression. Elle rêve qu'il lui promette que rien n'a changé, qu'ils resteront toujours aussi proche qu'ils l'ont été. Pourtant, Théia reste à la même place sans bouger. Elle tire sur les manches de sa blouse et les sert dans ses poings alors que son attention se porte directement sur son oeil. Son ventre se noue en imaginant ce qu'il a pu subir, tout ça par sa faute. Et même si il la convainc du contraire, elle continue de le penser. Les frères de Nevaeh lui ont fait ça et, si elle savait qui ils étaient, elle serait capable d'aller les trouver et de leur cracher son venin en pleine face. Elle ne ferait certainement pas le poids face à deux hommes baraqués mais si ils ont minimum d'amour propre, ils ne la frapperaient pas. Alors qu'il s'avance, elle ne bouge toujours pas. Elle le laisse poser sa main sur sa joue, soutient son regard, et laisse naître sur ses lèvres un semblant de sourire censé être convainquant.  « D'accord, » répond-elle simplement d'une petite voix. Pourtant, elle sait que si. C'est sa faute, leur faute à tous les deux. Ils n'auraient pas dû et ils le savaient, sauf que ça ne les a pas empêchés de le faire. À la question de CJ, Théia hausse les épaules. « Ça va, je crois. » Elle baisse les yeux, regarde furtivement autour d'eux sans savoir quoi dire. Au final, son regard retrouve celui de CJ. « Je suis désolée pour tout ça. J'ai pas envie de te dire que je regrette parce que ce serait te mentir, mais je m'en veux que toutes les conséquences te retombent sur le dos. Je voudrais t'aider, mais j'ai aucune idée de comment. » Elle attrape sa main plus tôt posée sur sa joue et la sert doucement entre les siennes.

Elle avait attrapé ta main et tu laissais un sourire apparaître sur ton visage. Sa chaleur était douce, tu la serrais doucement. Tu l'écoutais te dire qu'elle ne savait pas comment t'aider et tu avais les larmes aux bords des yeux. Tu l'attirais à toi pour l'avoir dans tes bras. Ta main libre glissait dans ses cheveux. Pendant un instant, tu restais là, avec elle contre toi. « Théia, arrête s'il te plait. » Tu ne voulais pas qu'elle soit triste pour toi, tu ne voulais pas qu'elle soit triste tout court. Elle était venue te trouver il y a plusieurs soirs de ça parce qu'elle était malheureuse, parce qu'elle avait peur de mourir seule et tu lui avais fait une promesse. Tu n'allais pas briser cette promesse. Pas après tout ça. Tu étais un bon ami, du moins, c'est ce que tu osais croire. Tu venais l'embrasser sur le haut du front. « On est pas là pour parler de ça, d'accord ? Mais pour parler de nous. » Tu plantais ton regard une nouvelle fois dans le sien. Plus tu passais du temps avec elle et plus tu te sentais perdu. Tu avais eu l'occasion de voir Nev, il y a plusieurs jours de ça. Une conversation pas très plaisante. Tu l'aimais, il n'y avait pas de doute pour ça. Mais dans l'équation, il y avait Woody, qui t'empêcherait de la reconquérir si jamais c'est ce que tu voulais. Mais il y avait aussi Théia. Depuis le Gala, tu la regardais d'une façon différente et avec ce qu'il s'était passé chez toi, tu savais que tu ne retrouverais jamais ce que vous aviez. C'était modifié et ça te faisait peur. « J'ai pas envie qu'on s'éloigne, qu'on se perde de vue. Que ça devienne bizarre. » Tu tenais trop à elle pour ça.

Son étreinte lui fait l'effet d'une grande bouffée d'air frais. Ses gestes sont si doux, si agréables qu'ils pourraient lui faire oublier pendant quelques secondes la situation dans laquelle ils se trouvent. Elle le laisse lui caresser les cheveux et, lentement, sent sa respiration reprendre un rythme normal. Théia ne sait pas vraiment pourquoi il lui demande demande d'arrêter, elle se perd dans cette bulle de confort et voudrait y rester jusqu'à s'endormir et oublier. Au réveil, tout serait redevenu comme avant. Ils seraient amis, lui heureux, elle aussi. Personne ne souffrirait. Le baiser de CJ sur son front la rappelle sur Terre. « Je me souviens de ce que tu as dit, CJ. Pas de promesse, rien qui pourrait prouver que tu es attaché à moi d'une manière dont tu ne devrais pas. » Et elle y a cru. Elle a dit oui à ce moment d'égarement, pensant à un simple moment de plaisir qui finirait par rapidement se transformer en un simple souvenir qu'ils garderaient chacun enfoui dans un coin de leur mémoire. Pourtant, malgré les mots qui ont été prononcés, Théia a du mal à se tenir à ce qu'elle a pu dire. Elle y est attachée à CJ, elle l'a toujours été. Et ce soir ne l'a pas aidée à se faire à l'idée qu'il est à jamais devenu inaccessible pour elle. Ce qu'il lui dit ensuite lui serre le coeur. Rapidement, elle secoue négativement la tête. « Ça n'arrivera pas, je te le promets. Enfin, ce sera peut-être bizarre au début, mais j'ai pas non plus envie qu'on s'éloigne alors ça peut juste... pas se passer comme ça. C'est impossible. » Elle cherche dans son regard une approbation, quelque chose qui lui prouverait qu'elle a raison et que jamais il ne quittera sa vie. Malgré ça, Théia ne peut s'empêcher d'avoir la gorge nouée. Sans qu'elle ne s'en rende compte, l'emprise de ses doigts autour de la main de CJ s'est resserrée un peu.

L'avoir dans tes bras, l'avoir contre toi, c'était vraiment réconfortant. L'impression d'avoir à nouveau une bulle de sécurité. Vous contre le monde entier. Vous deux et rien d'autre au monde. C'était plaisant de savoir que vous pouviez vous retrouver, que vous pouviez vous perdre à nouveau l'un dans l'autre. L'un avec l'autre. Et pourtant, elle relève le regard, te rappelant ce qu'il y avait eu l'autre soir. « Beaucoup de chose ont changé, depuis l'autre soir Théia.. » Pour commencer, tu n'étais plus vraiment fiancé. Tu ne savais pas ce qu'il en était et tu n'allais pas presser Nevaeh pour savoir. Tu devais attendre et pendant cette attente, tu ne pouvais pas non plus faire des promesses que tu ne pourrais pas tenir. C'était compliqué pour toi, tu étais dans le flou le plus total. Mais il y avait des choses que tu ne pouvais pas ignorer. « Et même si je ne peux pas te faire de promesse, je ne peux pas non plus te dire qu'il n'y a rien. » Tu ne voulais pas lui mentir. Tu avais vraiment l'impression de tout foutre en l'air. Et même si tu sais que tu ne veux pas qu'elle quitte ta vie, que rien ne change entre vous, il fallait être réaliste. Ta main glissait sur sa joue, l'autre serrait sa main. « Alors je sais que ça va être compliqué au début. Mais je pense qu'on peut dépasser tout ça. » Ton regard ne la quittait pas. Un léger sourire se dessinait au bord de tes lèvres. Peut-être que tu perdais un peu la raison, que tu te voilais la face parce que tu ne voulais pas admettre qu'à l'avenir tout allait être différent. Tu ne semblais pas réaliser l'importance de la rumeur sur toi, de la pression qu'il y aurait dans ta vie à cause de Woody. Il t'avait peut-être cassé la gueule mais tu ne devais pas oublier qu'il ne s'arrêterait sûrement pas là. A chaque pas dans ta vie, il te suivrais, à la trace, comme une ombre pour te pourrir la vie. Et il le ferait sûrement avec Théia, sauf si tu le fais tout seul.

Beaucoup de choses ont changé. Elle n'est pas sûre de comprendre. De quoi parle-t-il ? De sa relation avec Nevaeh ? Son altercation avec les Rutkowski ? Ou bien des sentiments qu'il a envers sa fiancée, envers elle ? Elle est incertaine et pourtant, Théia sent son ventre se nouer en une boule de nerfs. Elle ne sait plus dire si elle est excitée ou seulement stressée, heureuse ou pas. Tout ce dont elle est certaine, c'est qu'elle aimerait garder ce moment tout en effaçant les parasites qui l'entourent. Elle voudrait s'asseoir sur cette rampe aux cotés de CJ, le voir rire, le taquiner et l'entendre faire de même avec elle. Elle aimerait pouvoir se glisser contre lui sans que cela ne soit mal vu, perdre la notion du temps et réaliser trop tard que l'heure des aurevoirs et déjà passée depuis longtemps. « Je n'ai pas envie d'influencer tes choix de vie, mais je n'ai pas non plus envie de te voir partir dans la famille que ceux qui t'ont fait ça. » Avec toute la douceur dont elle est dotée, Théia vient effleurer son visage au niveau de son oeil, là où le coup a été donné. Elle récupère ensuite sa main et sent celle de CJ venir se poser sur sa joue à elle. Dépasser ça, oui. Sûrement qu'ils y arriveront. Elle a été capable de mettre en sourdine ce qu'elle a toujours ressenti pour lui durant de longs mois, elle n'a jamais pris la peine d'attiser cette petite flamme qu'elle a cru voit apparaître un jour entre eux deux, puis qui s'est si soudainement transformée en un foutu feu de cheminée. Lentement, elle hoche la tête et force un demi-sourire. « Je veux juste que tu sois heureux, peu importe le prix à payer. » Quitte à ce qu'elle soit obligée de s'effacer pendant un certain temps afin de l'aider à retrouver son chemin vers Nevaeh. Elle a envie de se coller à lui, de passer une main dans ses cheveux, de jouer avec le bord de son t-shirt tout en s'enivrant de son parfum. Mais à la place, Théia croise les bras contre sa poitrine et fait semblant d'être d'accord avec cette situation vers laquelle ils se dirigent.

Elle avait peut-être peur de te poser la question, de savoir ce qui avait changé. D'entendre que tu pourrais avoir de quelconques sentiments pour elle alors que pour le bien de votre amitié, elle essayait sûrement de taire les siens. Eviter de s'attacher trop à toi, tandis que toi, tu te laissais aller, laissant tomber toutes tes barrières. Ne plus savoir quoi faire, ne pas réfléchir à quoi faire, ni à comment le faire. C'était ton problème actuel. Mais tu ne le voyais pas tellement comme tel. En tout cas, pas maintenant. Aveuglé par la situation. « Je ne suis pas sûr de le vouloir non plus. » De toute façon, même si c'était un choix que tu acceptais de faire par l'avenir, tu n'étais pas certain de pouvoir le faire. Justement, tu pourrais te faire à nouveau casser la gueule juste parce que tu aurais oser parler à Nevaeh. Autant dire que ce n'était pas une situation vivable et que si elle acceptait de te pardonner, elle aurait à choisir entre sa famille et toi. Un choix que tu ne pourrais pas imposer à qui que ce soit. C'était égoïste. Mais c'était aussi égoïste de penser que tout est fini sans même avoir une chance. « C'est pareil pour moi. Mais je veux que tu saches que tu ne feras jamais parti du prix à payer. » Tu voulais être certain qu'elle le sache, qu'elle le comprenne. Et si tu devais perdre Nevaeh à jamais pour ça, alors tu l'accepterais. Tu n'étais juste pas prêt à la sacrifier elle. Elle qui souffrait tellement en ce moment, tu voulais juste l'aider à aller mieux, à traverser tout ça. Et pour ça, tu avais une idée en tête. « Tu veux essayer ? » proposais-tu doucement, un léger sourire sur le visage. Parler de ça, n'était pas le plus important, vous aviez fait le tour du sujet et il n'y avait pas grand chose à ajouter. C'était le moment de la faire sourire, de faire battre son petit cœur et de faire naître le bonheur en son fort intérieur.

Malgré ses non promesses, Théia a eu du mal à se retirer de la tête ces sensations qu'elle a ressenties lorsqu'il a posé une première fois ses lèvres contre les siennes. Elle eut l'effet d'un feu d'artifice dans son ventre, de tout un festival de musique qui jouait dans sa tête. Elle s'était si bien, ailleurs, tirée du monde réel par une bulle immense et confortable à les fois qui les enveloppait tous les deux. Elle n'a plus voulu y croire par la suite, elle s'est empressée d'effacer ses souvenirs et d'agir comme si ce moment n'avait jamais existé. Du moins, elle avait essayé. En réalité, Théia sait que jamais elle ne pourrait l'oublier. À sa réponse, elle hausse les sourcils et entre-ouvre les lèvres. Elle a un million de choses à dire, de questions à poser, sauf qu'elle juge plus judicieux ne pas les prononcer tout haut. Elle n'a pas son mot à dire, il n'y a que CJ qui peut savoir si ou non il se sent prêt à terminer sa vie auprès de Nevaeh et de ses abrutis de frères. Rassurée de savoir qu'il ne sacrifierait pas leur relation au prix de son bonheur avec sa petite amie, Théia sourit un peu plus. Elle a les yeux qui brillent, un mélange d'émotion et de satisfaction. Elle aime ce qu'il lui dit, même si ça ne vaudra jamais ce qu'il a pu prononcer lors de cette soirée d'égarement. Au moins, elle a la certitude que CJ n'est pas prêt à faire définitivement une croix sur elle. Alors qu'il lui demande si elle veut "essayer", Théia met un certain temps avant de comprendre de quoi il parle. « Ton skate ? » s'exclame-t-elle enfin, retrouvant cet air jovial qui ne la quitte en général pratiquement jamais. « Carrément ! J'ai toujours voulu essayer. » Son regard jongle entre le visage de CJ et l'objet qui est à ses pieds.

Tu avais gardé la main de Théia dans la tienne, pendant ce qui paraissait être une éternité - mais qui n'était en réalité que quelques minutes, deux tout au plus - tu ne la quittais pas du regard. Il y avait des choses qui restaient en suspens pour le moment et c'était mieux ainsi. Pourtant il y avait une chose qui te démangeait. Une envie qui te brûlait les lèvres : l'embrasser à nouveau. Ressentir ce que tu avais ressenti il y a de nombreux soirs de ça. Mais ce n'est pas le moment de craquer. Tu devais essayer de penser à autre chose, essayer de ne pas compliquer la situation plus qu'elle ne l'était déjà à l'heure actuelle. Et le meilleur moyen pour toi de ne plus y penser c'est de détourner la conversation. Habituellement tu ferais un tour de magie mais là tu n'avais pas vraiment le coeur à ça. Et tu n'avais pas non plus le matériel adéquat. Et vous étiez sur une rampe de skate alors il n'y avait pas de meilleur détournement que ça. « Sauf si t'as envie de faire des roulades sur la rampe, mais j'ai déjà essayé et j'peux te dire que c'est pas agréable. » Tu rigolais doucement, mais tu étais très sérieux. Tu avais essayé une fois ou deux de faire des roulades, la première fois, tu t'étais fait mal au dos et la seconde fois, tu étais passé à pas grand chose de te casser une jambe. Aujourd'hui, tu avais un bras en écharpe - bien que tu ne la portais pas - alors tu n'allais pas tenter d'en faire une pour l'impressionner. « Tu sais comment te positionner ? » demandais-tu en te relevant, positionnant ton skate sur le haut de la rampe. Tu attendais qu'elle se mette en place, la rampe étant assez petite, même si elle venait à tomber, elle ne risquerait pas grand chose.

Une envie de plus lui noue le ventre, un goût de trop peu lui brûle les lèvres. Le regard de Théia se fait intense dans celui de CJ, insistant. Elle retient chaque geste jusqu'à ce que ses muscles lui fassent mal, mais il n'y a pas un instant depuis ce dernier soir où elle a été capable de faire taire ses envies comme elle l'a pourtant autrefois si bien réussi. Sa raison se bat avec ses pensées déplacées à tel point qu'à chaque fois que leurs corps entrent en contact, rien que par l'effleurement de ses doigts contre le dos de ses mains, Théia doit se retenir de ne pas frissonner. Heureusement pour elle, il arrive à détourner son attention vers ce moyen de transport qu'elle n'a encore jamais essayé, bien qu'elle en ait souvent eu envie. Sa réponse la fait rire. « Je préfère te faire confiance sur parole, » réplique-t-elle en plantant dans les yeux de CJ un regard amusé. Elle n'a pas trop de mal à l'imaginer roulant sur une rampe de skateboard, il a toujours été capable de la surprendre tout en réussissant à ne jamais se couvrir de ridicule. Ce doit être une qualité que lui seul a, être capable d'agir de manière absurde tout en gardant une certaine classe. Alors qu'il place le skate sur le bord de la rampe, Théia regarde vers le bas en se pinçant les lèvres. « Pas vraiment, mais je suppose que je peux m'en tirer. » Un peu hésitante, elle pose un pied sur l'objet et sent immédiatement les roues glisser sous son poids. Elle titube en arrière et, par réflexe, sa main se plaque sur le torse de CJ afin de trouver un point d'équilibre. « Je retire ce que j'ai dit, » ajoute-t-elle en riant légèrement, sentant son coeur battre plus rapidement dans sa poitrine.

Elle acceptait de te croire sur parole, elle avait bien raison, même si tu aurais bien ri si elle avait eu le courage d'essayer. Tu te contentais de la regarder se lever à son tour, te disant avec beaucoup d'assurance, qu'elle pourrait y arriver facilement. Elle posait son pied sur la planche, manquant de tomber à la renverse. Elle se rattrapait sur toi, tu glissais ta main dans son dos pour la soutenir. « T'es sûre ? » demandais-tu en rigolant, alors qu'elle affirmait le contraire. Tu l'aidais à se redresser et lorsqu'elle tenait à nouveau sur ses jambes, tu la lâchais pour aller chercher la planche de skate qui était en bas de la piste. Tu remontais jusqu'à elle, la repositionnant au même endroit qu'avant. « Très bien, prends une grande inspiration et laisses-moi te guider. » Tu te mettais derrière elle, l'avançant jusqu'à la planche, tu pliais les genoux, posant ta main sur sa jambe gauche. « Tiens-moi par l'épaule et pose ton pied sur la planche. » Tu tapotais sa cuisse pour qu'elle la mette en place. Elle te tenait fermement l'épaule et ce contact avait eu l'effet de t'hérisser les poils. C'était encore électrique pour toi. Malgré tous tes efforts pour essayer de penser à autre chose. « Maintenant, pose l'autre, plie doucement les genoux. Quand tu te sens prête, souffle un bon coup, lâches-moi et lances-toi ! » Elle te tenais toujours l'épaule et tu glissais ta main dans le bas de son dos pour lui assurer une certaine stabilité. Tu ne la tenais pas vraiment, comme ça, lorsqu'elle voudrait se lancer, elle pourrait le faire en toute sécurité. Il lui manquait peut-être des protections pour les genoux, les coudes et la tête, mais c'était un monde où vous aviez commencé à vivre dangereusement et où vous continuez de braver le danger.

Il la touche pendant un instant bref, rapide, et retire sa main comme si le simple contact de ses doigts contre ses vêtements l'avait brûlé. Du moins, c'est comme ça qu'elle l'a ressenti. Alors que CJ s'éloigne d'elle pour aller récupérer la planche, Théia le regarde tout en croisant les bras contre sa poitrine. À sa question, elle s'est contentée de secouer négativement la tête sans être certaine qu'il ait pu le voir. « Je pense en effet que je vais avoir besoin d'un coup de main, juste pour commencer. » Et après, elle pourra se vanter qu'elle y arrivera. Elle sera heureuse de pouvoir faire du skate, rira à gorge déployée, et elle aura l'esprit si vide qu'elle oubliera pendant un instant que quelque chose dans leur amitié s'est cassé et ne pourra jamais être réparé. D'abord un peu incertaine, elle se laisse faire alors qu'il pose sa main sur sa jambe. Cette fois, il maintient le contact et le moment lui paraît durer une éternité. Lentement, Théia réalise qu'elle est totalement en train de perdre la notion du temps. Comme demandé, elle pose sa main sur son épaule et place son pied sur la planche. Cette fois, celle-ci ne part pas en avant comme lors du premier essai. Après avoir pris une grande inspiration, elle pose son autre pied et plie les genoux. Rapidement, elle sent la planche glisser vers l'avant, et le contact avec CJ se rompre. Elle glisse sur quelques mètres, rien de bien impressionnant, mais au moins elle ne s'est pas retrouvée à terre. De l'autre coté de la rampe, Théia pose un pied à terre et se tourne pour faire face à CJ. Un grand sourire étire ses lèvres et ses yeux brillent comme un millier d'étoiles. « Bon, je suis loin d'être au niveau de Tony Hawk, mais je ne suis pas tombée. » Pour célébrer sa réussite, elle se permet un roulement des hanches pendant que le reste de son corps se dandine dans une danse de la victoire. Rapidement, elle repose son regard sur CJ. « C'est ça qui est génial avec toi. Je découvre pleins de nouvelles choses, je vis des expériences hors du commun. T'ajoutes des couleurs à ma vie, » conclut-elle avec un léger rire en baissant le regard, jouant avec la planche du bout de son pied.

Tu la tenais contre toi, sans pour autant la tenir puisque sinon elle risquait de glisser encore et de retomber en arrière. Tu attendais, le souffle court, qu'elle se lance. Ce qu'elle fit dans la seconde d'après. Tu expirais un grand coup, gardant ta main en l'air, même si son dos n'était plus là. Tu la regardais s'éloigner de toi, elle se faisait de plus en plus petite jusqu'à ce qu'elle atteigne l'autre bord de la rampe. Une fois de l'autre côté, tu finissais par remettre ton bras le long de ta cuisse, un léger sourire au bord des lèvres. Tu l'écoutes parler et tu hoches doucement la tête. « Crois-moi, pour une première fois, tu t'en es sortie comme une pro ! » Tu te souviens encore de ta première fois, tu étais tombé au moins une bonne dizaine de fois avant de comprendre comment poser ton poids, comment trouver l'équilibre sur la planche. Et le pire pour toi, c'est que tu étais sur une piste droite puisque tu étais sur le trottoir devant chez toi. Alors qu'elle, elle venait d'affronter une pente. Point positif pour elle, tu étais là, tu savais comment mettre ton corps en position, ce qui lui permettait d'éviter la chute. Tu l'écoutais une nouvelle fois parler et elle te touchait en plein cœur. Tu mettais de la couleur dans sa vie. Mais depuis que tu étais arrivé à Bowen, depuis que tu avais fait sa connaissance, tu avais le même sentiment. Elle mettait du fun dans ta vie. Avec elle, tu pouvais t'évader. « Et c'est ça que j'aime faire avec toi, mettre des couleurs à ta vie. » Tu avais un grand sourire, tu avais une grande envie de la prendre dans tes bras et de l'embrasser sur la joue parce que c'était une très belle déclaration d'amitié. Et en ce moment, avec ce qui arrivait dans votre relation, c'était ce dont tu avais vraiment besoin. « Tu fais le retour seule ? » demandais-tu avec un grand sourire, prêt à voir comment elle allait se débrouiller cette fois.