when you look me in the eyes (pescar)

Le théâtre n’a jamais été une passion pour Perry, loin de là, il trouve ça plutôt ennuyeux. Il peut apprécier une comédie musicale car c’est entraînant mais ça s’arrête là. Cependant lorsque son meilleur ami a commencé à être connu et même avant d’ailleurs, il est allé à ses représentations, pour le soutenir. Au début il dormait moitié de la pièce puis il a commencé à réussir à rester éveillé. Aujourd’hui il se retrouve entouré de passionnés de théâtre de tous horizons, de grands acteurs qu’il ne connaît pas pour la plupart. Il n’est là que pour Oscar, il n’y a que ça qui compte. Lorsqu’il lui a proposé de l’accompagner, il n’a pas pu dire non. Une soirée à New-York pour la plus importante cérémonie de remise de récompenses du monde du théâtre, c’est comme s’il allait aux Oscars. S’il met des costumes tous les jours pour le travail, ce soir-là il a pris celui qui le met le plus en valeur sans pour autant voler la vedette à son meilleur ami. « T’es prêt ? » demanda-t-il à Oscar une fois arrivée dans la salle de bain sans se soucier de l’état d’habillement dans lequel peut se trouver son meilleur ami. De toute façon ce n’est pas comme s’il y avait une quelconque gêne entre eux. La preuve ils n’ont pris qu’une seule chambre d’hôtel avec un seul lit. Il faut dire que depuis cinq ans, s’ils étaient déjà proches avant, à présent ils le sont encore plus. Sans doute dû au fait qu’ils ont adopté un petit garçon tous les deux, il y a maintenant deux ans. Perry voulait un autre enfant, un garçon cette fois et Oscar également. Étant inséparables depuis maintenant dix ans, ils se connaissaient assez pour adopter tous les deux un enfant. Cependant étant encore trop petit, il n’est pas venu avec eux. Dans tous les cas l’organisation n’aurait pas accepté un enfant de deux ans dans la salle.

Il a suffi d'une pièce. Une représentation, un soir où la salle entière s'est levée. Parmi eux, un homme important. Un critique, un journaliste qui a aidé à ce que sa dernière pièce entièrement écrite par ses soins finisse en première page du New York Time, seulement ça. Un seul article, c'est tout ce qu'il aura fallu à Oscar pour que sa carrière décolle. Adieu Université, adieu élèves tant adorés ainsi que tous ses cours du soir qui lui manquent, parfois. Bonjour aux grandes scènes, aux publics exigeants et aux tickets sold out. Sa vie a changé, passant d'un confort australien à une existence qui lui en met plein les yeux. Il part souvent pour ses pièces, des fois seul et des fois avec Luce lorsqu'elle est en vacances. Ils ont visité le Grand Canyon, ont pu admirer de loin la Statue de la Liberté. Mais dans toute cette vague de nouveauté, il y a quelque chose qui est resté inchangé. La présence de Perry dans sa vie. Son meilleur ami trône toujours fièrement à cette place et Oscar espère bien que jamais il ne la quittera. Que ferait-il sans lui ? Sans ses encouragements, ou sans cette habitude qu'il a de toujours être capable de le faire rire ? Même si Oscar est aujourd'hui encore et toujours un père célibataire, il est incapable de se sentir seul tant qu'il a Perry. Alors qu'il est dans la salle de bain, occupé à boutonner les boutons de sa chemise, la porte s'ouvre. « Presque. » Il attache le dernier, attrape son noeud papillon, et le noue avant de se tourner vers son ami. « Est-ce que tu saurais me dire si il est droit ? » lui demande-t-il avant qu'un sourire ne vienne étirer le coin de ses lèvres. « Je suis nerveux, j'ai les mains qui tremblent. Si je suis appelé sur scène, je suis pratiquement certain que je vais tomber et me ridiculiser devant l'Amérique entière. » Et pourtant, Oscar devrait avoir l'habitude de parler devant un public. Il l'a fait devant des centaines de personnes, ne compte plus le nombre de fois où il s'est retrouvé sur scène sous le feu des projecteurs. Sauf que toutes ces fois-là, il ne jouait qu'un rôle. Ce soir, Oscar sera forcé d'être lui-même.

Perry regarde son ami attacher son nœud papillon avant de se tourner vers lui pour lui demander s’il est bien droit. Le jeune homme l’ajuste avant de lui répondre. « Je pense que c’est bon mais je suis pas hyper doué pour ça. » Il n’a clairement pas le compas dans l’œil. Il est soudain soucieux que le sien soit parfaitement droit, il se regarde dans la glace et tente de l’ajuster du mieux qu’il peut. Pas question de foirer ça, pas question d’avoir l’air débile pour accompagner son meilleur ami. Il doit être là pour lui pas lui mettre la honte devant tout le monde. Oscar lui confie alors être nerveux ce qui semble plutôt normal vu l’importance de l’événement. Lui aussi a peur de se ridiculiser, Perry se sent un peu moins seul pour le coup. Il attrape son ami par les épaules et le regarde dans les yeux. « Tu vas gérer, j’suis sûr. Et puis souviens toi Jennfier Lawrence elle est tombée aux Oscars mais elle a quand même gérer. » Comme quoi le ridicule ne tue pas. Perry ne doute pas une seconde que son ami va être parfait si jamais il gagne et il va gagner, ça aussi il en est sûr, même s’il n’a pas vu les autres en représentations et qu’il est incapable de savoir si le comédien joue bien ou non. Il pourrait jouer comme un pied qu’il dirait la même chose que pour le meilleur des orateurs. Oui sa capacité à percevoir les choses, les sous-entendus, les choses un peu plus subtiles, n’a pas changé en cinq ans. De toute façon il n’a pas vraiment changé au final, peut-être un peu plus mature mais ce n’est même pas sûr. « On y va ? » demanda-t-il à Oscar. La voiture ne va pas les attendre pendant une éternité non plus, tout comme les Tony. Perry aussi est un peu stressé mais il se garde bien de le dire, son meilleur ami n’a pas besoin de le savoir.

Ils finissent par se retrouver tous les deux devant le même miroir, occupés à regarder leur noeud respectif sans être capable de dire si celui-ci est droit ou pas. De toute façon, avec les lumières, probablement que personne ne le remarquera.  « On n'a qu'à dire que ça va, » conclut-il avec un sourire amusé avant de reculer d'un pas pour regarder Perry. Immédiatement, un sourire vient étirer ses lèvres alors qu'il fait face à son meilleur ami. « T'es carrément en beauté, » lui dit-il avant de retrouver son sérieux, avant de partager avec lui son stress de se ridiculiser pour la première remise de prix à laquelle il a été nominé. Heureusement que Perry est là pour le rassurer, lui qui a toujours été capable de trouver les mots pour le faire rire. Pour ne pas manquer à la tradition, le discours de ce dernier fait s'étirer les lèvres d'Oscar en un immense sourire qui se contente dans un premier temps de hocher la tête. « J'avoue, même après s'être mangé le sol elle avait plus la classe que les autres, » répond-il en repensant à cette fameuse cérémonie. Oscar a toujours aimé regarder la cérémonie des oscars, une tradition qui s'est installée quelques années plus tôt et qui génère bien souvent un debrifing avec Perry le lendemain. Lorsque ce dernier lui demande si ils y vont, Oscar hoche rapidement la tête et quitte la salle de bain. Il traverse leur chambre d'hôtel, sort dans le couloir, et descend jusqu'à l'entrée où les attend un chauffeur spécialement désigné pour l'événement. Ce n'est pas une limousine, l'auteur n'est pas encore assez connu que pour se permettre ce luxe. Par contre, la voiture dans laquelle ils montent est imposante et attire d'ailleurs les regards des passants. Oscar monte à l'intérieur, accompagné par Perry. « Tu crois qu'ils offrent des petits paquets de biscuits pour les participants ? J'ai lu ça dans un article, et j'ai la dale. Mais si je mange maintenant, je vais gerber, » dit-il en regardant par la fenêtre.

Même si Oscar est stressé, son ami sait bien que si l’angle formé par son nœud papillon et l’horizontale n’est pas égal à zéro, il n’en fera pas une maladie. Perry essaie tout de même de ne pas en avoir un complètement de travers, c’est aussi un moment important pour lui après tout, il ne veut pas avoir l’air d’un plouc devant les photographes, la télé et les centaines de personnes présentent. Une partie doivent ignorer qui il est dans tous les cas, il ne voit pas beaucoup les gens de quarante ans regarder des vidéos sur youtube, ni ceux de trente ans d’ailleurs. Ouais lui a plus de trente ans aussi et ça lui fait un choc d’avoir passé ce cap même si au niveau mental il n’a pas vraiment changé. Son meilleur ami se recula pour le regarder avant de lui dire qu’il est plutôt en beauté. « T’as cru quoi ? J’y vais pas juste pour t’accompagner. » dit-il en lui faisant un clin d’œil. Une célébrité est un des choses qui lui manquent à son tableau de chasse, si on peut appeler ça ainsi. Ce n’est pas comme s’il avait des cases à cocher suivant la catégorie des gens avec qui ils couchent mais c’est vrai qu’il n’a jamais eu l’occasion avec une personne connue. Dans tous les cas il ne va pas passer sa soirée à draguer son ou sa voisine, il sait un minimum se tenir. Par la suite pour le rassurer et lui dire que même s’il fait une bourde, il ne sera pas ridicule il cite l’exemple de Jennifer Lawrence, ce qui arrive à détendre un peu son ami. Ils allèrent ensuite jusqu’à la voiture, pas une limousine même si Oscar lui avait demandé, Perry aurait bien pu en louer une voir en acheter une mais non, il avait choisi quelque chose d’assez discret, enfin, de plus discret qu’une limousine dans tous les cas. Ils montèrent tous les deux à l’intérieur avant qu’Oscar ne lui demande s’il offrait à manger aux participants. « T’inquiète pas j’ai tout prévu. » dit-il en ouvrant sa veste, il avait caché dans une poche un petit paquet de biscuit. Partir quelque part sans nourriture est quelque chose d’inimaginable pour l’ogre qu’il est. En voyant son meilleur ami toujours tendu, Perry plaça ses mains sur les épaules du jeune homme pour le masser un peu, enfin essayer parce qu’il est loin d’être un pro. « Hey, ça va aller, j’suis là de toute façon. » Oui comme ci le fait qu’il soit là allait tout arranger.

Probablement que cette remise de prix suffirait à lui donner un bon coup de pub si jamais il gagnait, qu'il verrait les salles se remplir pour ses spectacles et qu'il devra faire face à une célébrité à laquelle il ne s'est encore jamais confronté. Ce n'est pourtant pas ça qui attire Oscar, la vie auprès des stars. Lui, il est parti de rien. Il faisait ses spectacles à l'université, puis dans des petites salles où il n'y avait jamais plus que ses amis et les parents d'élèves qui participaient à la pièce. Et quand les salles ont commencées à se faire plus grandes, quand le succès est devenu florissant, il a cru pendant un moment qu'il n'arriverait pas à gérer toute cette pression qui lui tombait soudainement dessus. Heureusement que Perry était là, toujours présent pour l'aider à penser à autre chose et à entièrement se changer les idées quand le besoin se faisait sentir. Et puis, il avait eu Luce aussi, sa fille qu'il aurait tant aimé pouvoir emmener avec lui aujourd'hui. Il avait du mal à croire qu'elle ait déjà onze ans, bientôt adolescente et bientôt dans la cour des plus grands. « Le contraire m'aurait étonné, » réplique-t-il en haussant un sourcil avant de se mettre à rire. Le fait de louer un taxi et pas une limousine, ça l'aide à garder les pieds sur terre. Pas qu'il risquerait de prendre la grosse tête, mais plutôt parce qu'Oscar serait incapable de se sentir à l'aise dans un monde trop tape à l'oeil, un monde qui ne lui correspondrait absolument pas. Quand il voit Perry sortir de sa poche un paquet de biscuit, un immense sourire vient étirer ses lèvres. « T'es littéralement mon héros Perry Peach, » s'exclame Oscar, s'imaginant déjà grignoter ses biscuits alors que Cameron Diaz serait occupée à l'appeler à venir sur scène. Toujours nerveux, probablement assez pour que Perry le remarque, ce dernier se met à lui masser les épaules en lui promettant que tout irait bien. Et qu'il est là, pour le plus grand soulagement du dramaturge. « Si tu t'échappes par la porte de sortie de secours pendant la cérémonie, je t'assure que je te tuerai. Enfin, d'abord je ferai une crise cardiaque à cause du stress puis je viendrai te hanter dans ton sommeil, » ajoute Oscar en riant, arrivant à se détendre à l'aide de ses stupides plaisanteries.