that's me in the spotlight (gin)

Comme plusieurs personnes autour, je lançais un regard blasé sur Gin. Cette personne un peu folle, extravagante mais drôle et même si je ne souriais pas beaucoup pour m'exprimer, je n'en pensais pas moins. C'était son côté unique qui faisait que je l'appréciais. Peut-être aussi parce qu'elle arrivait à faire chier les gens sans le vouloir, en parlant comme si elle était seule au monde alors que le monde se poussait pour prendre leur boisson, comme si elle parlait à tout le monde en fait. J'avais l'impression d'être dans une conversation ouverte à tous alors qu'on n'était que deux ce soir. C'est pour ça que je me retenais de lui parler de sujet un peu plus privée, histoire de garder un minimum de secret, que la ville ne soit pas au courant demain que dans “la vie d'Aino, il se passait un truc.” « T'as bu avant de me voir ou tu tiens juste très mal l'alcool ? » Je riais en continuant de zieuter autour. Quand je me faisais remarquer, c'était principalement à cause des bagarres dans lequels je me retrouvais, que je le veuille ou non. Ce n'était pas pour autre chose et là, elle nous faisait remarquer parce qu'elle avait bu un verre de trop. Peut-être pas qu'un. Si par nature je n'avais pas la parole aisée, l'alcool m'aidait un peu à ouvrir plus ma gueule, pas complètement. Je ne pense pas arriver un jour à être aussi décontractée qu'elle sur ce sujet. Puis je restais aimer le fait que je n'étais pas bavarde quand il s'agissait d'inconnus.« Y'a pleins de regards sur toi, fais le chaud ! » J'esquissais un sourire aux coins de lèvres avant de tourner mon regard vers une personne se situant à côté de moi, elle semblait faire la gueule, clairement, Gin la saoulait. Et moi je ne pouvais rien faire d'autre que de fuir son regard en buvant une nouvelle gorgée de ma boisson. C'était soit ça, soit je la provoquais et je préférais garder un peu de mon sang froid.

J’avais un verre entre les mains et clairement je m’amusais comme une folle. Ce soir-là j’avais trop bu, comme à chaque fois que je fais la fête d’ailleurs. Je tiens peut-être très mal l’alcool mais surtout j’en bois un peu trop. Après tout on a qu’une vie autant en profiter un peu, non ? Comme d’habitude je gueulais et je parlais trop fort, racontant ma vie à tous ces inconnus. Mais bon j’m’en tape de ce qu’ils peuvent penser. J’étais avec Aino, une fille qui arrive à me supporter même quand j’ai bu, autant dire qu’elle a du courage, enfin j’imagine. Elle est plus réservée que moi même s’il lui arrive aussi de gueuler, donc je fais un peu la conversation pour deux mais ça me dérange pas, j’aime bien parler et raconter ma vie de petite emmerdeuse. « On peut dire les deux j’crois. » Je lui répondais ça alors que mon verre de gin tonic, parce que j’ai de l’humour, valsait dangereusement. C’est clair que j’allais finir par en foutre par terre, là dessus y’a pas de doutes. J’ai pas des fortunes à dépenser en alcool donc j’ai pas franchement envie que le sol en profite mais mes petits bras font n’importe quoi. Aino se tape vraiment l’affiche avec moi, elle va finir par se barrer en me voyant gesticuler dans tous les sens et gueuler des trucs comme « T’façon les gens sont tous coincés ici sérieux, on dirait une maison de retraite ! » C’est peut-être parce que les gens sont moins cons que moi et qu’ils font pas n’importe quoi, bourré ou pas. Je file relativement souvent la honte à mes potes, bourrés ou pas. Suffit d’aller boire un café avec moi pour avoir envie de s’enfuir en voyant tous les gens qui ne regardent parce que je parle comme ci j’étais en boîte de nuit près de la musique. Ouais la fille qui vous saoule et qui parle toujours trop fort et dont on entend toute la vie ben c’est moi. Aino m’indique que pas mal de monde me regarde et qu’il est temps que je fasse mon petit show. « C’est partiiiii ! » Je rigole comme une autruche avant retirer ma pseudo veste pour la faire tourner au-dessus de ma tête comme un cow boy avec un lasso ou un strip-teaseur avec son t-shirt, au choix ! Je trouve le cow-boy un peu plus classe mais clairement Magic Mike est pas mal. Pour éviter l’accident de l’alcool j’en bois une gorgée histoire que le verre soit moins plein puis je commence à danser n’importe comment. Franchement je peux faire des trucs pas trop dégueu en danse mais quand j’ai bu même la macarena c’est la grande classe à côté de mes gestes très approximatifs.

Je tournais doucement mon regard vers Gin qui semblait déjà bien amochée question alcool. Soit je buvais trop lentement, soit j’avais vraiment du mal à commencer la fête après les gens, ce qui ne serait pas vraiment étonnant. Je disais sortir moins et boire moins, ça ne m’empêchait pas de me retrouver à chaque événement que la ville pouvait proposer quand il y avait de l’alcool, de boire quand j’étais chez-moi, même si ce n’était pas en grande quantité ou alors me retrouver en compagnie de potes dans un bar, bien qu’ils étaient peu. Le seul endroit où je ne buvais pas finalement, c’était quand j’étais au boulot, bien que je travaillais dans un endroit où les vapeurs d’alcool imprégnaient le bois et où les gens n’arrivaient pas à se contrôler. Je pourrais facilement aller contre les règles que mon boss imposaient en me servant un verre de temps à autre. Mais se faire servir par une serveuse complètement torchée, ça ne fait pas belle image, je créer déjà assez de problèmes avec les clients à cause de mon sang chaud, il ne fallait pas que je finisse à la porte si je ne voulais pas me retrouver à la rue. « J’te félicite pas, t’es pas capable de m’attendre et tu dis être ma pote. » Un léger sourire aux commissures des lèvres et je finissais par finir en cul sec  mon verre avant d'en commander un second. Si j’voulais atteindre le même niveau qu’elle, bien que la folie y serait moins prononcée, il fallait que j’commence à presser le pas sur l’alcool. J’n’étais pas là pour faire la babysitter, ça allait clairement pas être amusant. Même si la tournure que prenait la soirée ressemblait fortement à devoir tenir Gin en laisse pour ne pas qu’elle fasse n’importe quoi, même si sur ce point c’était trop tard. « T’es bourrée avant tout le monde, j’suis à trois cent pourcent certaine qu’il est tôt. » Tôt. En vrai j’avais aucune idée de l’heure, je savais juste qu’on était pas en boîte ou dans un carnaval, que les gens n’étaient pas ici pour danser, bien qu’il y avait une sorte d’espace consacrée pour. Peut-être qu’en voyant une femme gigotée dans tout les sens, ils se décideraient à bouger aussi. Gin commençait à enlever sa veste pour la faire tournoyer au-dessus d’elle et pour finir par danser. En voyant un homme s’approcher d’elle, je plaçais ma main devant ma bouche, puis chuchotait en saturer comme pour un tokiwoki. « Pchhht, agent Abernathy ! Plan B, je crois que ton lasso à attrapé quelqu’un ou qu’un gros lourd veut te serrer. »

Bon peut-être que je ne l’ai pas vraiment attendu pour commencer à boire, et alors ? Est-ce que c’est grave ? Franchement il y a des choses bien plus graves dans le monde comme les ours polaires qui meurent, la montée des extrêmes, la guerre. Plein de sujets hypers joyeux en fait. Et puis dans la vie il faut bien s’amuser un peu, non ? De toute façon je tiens pas hyper bien l’alcool. Enfin ça veut dire quoi bien tenir l’alcool ? Parce que je dois quand même m’enfiler un certain nombre de verre avant de plus savoir marcher droit. Donc je tiens peut-être bien l’alcool au final, j’irais chercher sur internet. Y’a bien un type qui doit avoir fait un barème pour savoir si on tient bien l’alcool ou pas, les gens font n’importe quoi sur internet. « Roooohhh, ça vaaaaaa ! » Oui on peut dire que j’ai vraiment une super répartie, surtout quand j’ai bu. On remarque ici des arguments bien construits à base d’introduction, thèse, anti-thèse, synthèse permettant à mon interlocuteur de comprendre aisément mon point de vue et de répondre point par point aux arguments que je lui expose. Je dis toujours : roh ça va, aux gens lorsqu’ils me font une remarque. Tout le monde est bien trop sérieux de toute façon. Je sais que je suis une chieuse la plupart du temps mais bon, on l’est tout un peu donc ça vaaaa. Aino c’est mon amie sympa mais un peu trop sérieuse enfin, ce n’est pas elle qui va commencer à danser la macarena au milieu de tout le monde pour mettre de l’ambiance par exemple. Mais c’est pas grave, je l’aime bien quand même et puis je sais que je peux compter sur elle. Parce que les gens comme moi, ils sont là au début pis après ils partent faire n’importe quoi et on les revoit plus de la soirée, bonjour la bonne ambiance ! « C’est quoi tôt de toute façon hein ? Le temps n’est rien pour ceux qui en profitent ! » Des fois j’ai un peu une âme de poète philosophe quand j’ai bu. Quelque chose de plutôt pathétique mais je pourrais parler des heures à une cruche en lui expliquant pourquoi elle a tord sur sa vision de l’existentialisme. Alors que bon, soyons honnête, j’y connais strictement rien en philosophie et en poésie. J’ai remarqué que les gens aiment bien parler de politique après quelques verres, du coup il m’arrive souvent de me prendre la tête avec eux parce que je suis du genre à pas mal m’énerver là-dessus. Alors que je fais ma petite danse pour mettre un peu d’ambiance, un type d’approche de moi, je le regarde avec un sourire avant d’entendre Aino me dire que j’ai chopé quelqu’un avec mon lasso et que c’est peut-être un gros lourd. J’éclate de rire avant de prendre le même ton qu’elle « Agent Eklund, l’individu est plutôt mignon, j’vais aller voir ça de plus près. » Évidemment je dis pas ça discrètement du tout donc le type m’entend. Du coup j’m’avance faire lui en faisant mine de l’avoir attrapé avec mon lasso, tout est dans la mise en scène, puis il commence à danser avec moi. Sauf que bon il doit pas avoir toute sa tête non plus et il commence à me tripoter les fesses. Je le pousse avant de lui dire « Tu m’as prise pour un morceau d’jambon ou quoi ? Connard ! »

Je faisais semblant de tirer la tête, comme si j'étais réellement vexée qu'elle commence à s'amuser sans moi, même si ça arrivait à me freiner un peu, sans doute parce que je ne voulais qu'on arrive toutes les deux dans un état pitoyable, ça n'allait pas m'empêcher de m'amuser un peu. Bien qu'à côté d'une personne avec tant d'énergie, je m'effaçais un peu, beaucoup. « On verra si tu seras contente la prochaine fois que je te ferais ça ! » Même si bourrée ou non, je doute que Gin ait du mal à s'intégrer dans une fête, elle était assez pétillante et spontanée de nature. Le seul problème c'était moi. Quand elle se mettait à danser, je la regardais avec un léger sourire aux lèvres, la danse n'était pas faite pour moi, je n'avais aucune coordination dans les mouvements alors je ne m'y risquais que lorsque je n'étais pu capable de réfléchir. Même si j'avais des chances d'avoir plus d'élégance que les mouvements qu'elle offrait à l'heure actuelle, je préférais zieuter les réactions des gens autour de nous. Si je dois me faire remarquer, ce n'était pas en me donnant au public, en dansant, j'étais clairement plus connue pour avoir une grande gueule, me servir de la parole pour attirer l'attention que utiliser mes talents inexistants. Peut-être que je me serais mise à danser si Gin n'était pas la seule à le faire, si chaque regard de ce bar se rabattait sur nous. Sur ma coéquipière parce qu'elle n'était pas assez discrète et sur moi parce que je ne faisais rien pour que ça change, je ne l'engueulais pas parce qu'elle n'avait pas de retenue. Les gens pouvaient aller se faire voir, elle faisait ce qu'elle voulait et s'ils voulaient de la discrétion, ils avaient toujours des musées ou des bibliothèques. « Tu sors ça d'où ? » J'étais presque certaine qu'elle sortait ça d'une série ou je-ne-sais-quoi. Ou peut-être qu'elle arrivait à avoir l'esprit clair avec des verres en trop. Un jour, elle réussirait sans doute à régler un conflit de guerre avec la boisson. L’idée me faisait sourire. « Rapportez-nous des informations dès que possible. » Je détaillais à mon tour l’homme qui semblait avoir toutes les intentions sur monde sauf les bonnes. J’étais trop méfiante à chaque fois, mais avec mon boulot, j’avais eu le temps d’observer le comportement des gens et dès que je pouvais me tenir à l’écart d’eux, donc derrière le comptoir, je le faisais volontiers. Et je ne saurais dire si c’est mon amie qui l’a trop cherché ou quoi, mais j’essayais de ne pas trop m’énerver. « Putain mec, t’es lourd, tu l’as entendu ? » Sauf que d’un coup, c’était de la faute de Gin parce qu'elle l'avait aguiché, il commençait à gueuler un peu trop fort des conneries plus grosse que sa personne. « Quel gros con. » Soufflais-je en zieutant mon verre qu’était plus intéressant que lui. « La prochaine fois, dirige mieux ton lasso. » Sur le ton de l'humour, pour pas qu'elle se retourne contre moi.