Un souffle d'espoir / Fléo

Le combat contre son cancer continuait pour Fleur. La chimiothérapie se révélait efficace mais l’affaiblissait énormément. Elle ne sortait quasi plus, et malgré elle, elle se renfermait sur elle-même. Maxwell faisait son possible pour la réconforter et il y parvenait extraordinairement. C’est d’ailleurs lui qui la convainquait d’entretenir ses relations amicales. Le couple avait rencontré Jim et Ingrid. Tahlia venait régulièrement lui rendre visite, ainsi qu’Eleanor et Frida. Elle avait également des nouvelles de Concho et Lily. Et puis il y avait Léo, dont elle avait annoncé la nouvelle par téléphone mais qu’elle n’avait pas encore vu. Cet après-midi, ils avaient convenu de se voir chez elle. Maxwell était chez sa sœur et Fleur en avait profité pour l’inviter afin de ne pas être seule. Lorsqu’elle ouvra la porte, elle vit dans son regard la compassion. Elle en eu un pincement au cœur. « Salut » souffla-t-elle. Était-ce à cause de son visage pâle ? Ou de sa perruque de cheveux ? Malgré tout elle sourit, ses joues creuses firent apparaître une fossette.

La vie s'écoulait doucement pour Léo, il était rentré à Bowen depuis peu après un voyage de plus d'un mois au Moyen Orient, entre pays en guerre et beauté à couper le souffle, il avait avalé des milliers de kilomètres, mangé pas mal de poussière et ramené des photos sublimes, tous les jours il avait cherché à repousser le moment de rentrer chez lui mais il avait bien fallu reprendre cet avion qui le ramènerait à sa solitude, face à lui-même. Parce que tout allait de travers depuis qu'il avait quitté Grace, chaque jour il se disait qu'il avait fait la plus grosse connerie de sa vie et pourtant il lui était simplement impossible de retourner auprès de celle qui lui avait mentit durant des mois. Alors il se vautrait dans le travail et puis il sortait, avec ses potes, seul dans les bars, il cherchait à se vider la tête pour oublier même quelques heures qu'il n'avait qu'elle à l'esprit. Il buvait plus que de raison et puis fumait clope sur clope pour compenser le manque qui s'insinuait en lui comme un mal presque incurable. Pourtant des maux bien pire que la maladie d'amour il en existait et il en avait pris pleine conscience quelques jours plus tôt lorsque Fleur lui avait téléphoné. Ils ne s'appelaient jamais, ou bien rarement, pour se donner rendez-vous, mais pas pour se raconter leur vie. Mais il y avait des choses qui se révélaient bien plus facilement lorsqu'on ne se voyait pas, comme d'apprendre à l'autre qu'on était malade. Fleur avait un cancer une saloperie qui s'accrochait à elle depuis déjà quelques mois et dont Léo n'avait aucune connaissance, sa Fleur se flétrissait chaque jour et lui se plaignait d'avoir perdu l'amour. Que la vie était chienne, qu'elle était mal faite, elle avait la vie devant elle et voilà que celle-ci lui faisait défaut, qu'elle la mettait à l'épreuve. Léo n'avait su que dire, ce jour là, choqué, mis K.O par cette nouvelle qui l'ébranlait tout entier. Il avait demandé à la voir, elle avait refusé. Alors il avait attendu, le temps que lui digère la nouvelle et qu'elle le rappel, il lui avait bien dit "Appelle-moi quand tu veux, à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, je serai là". Et elle avait fini par le faire. Mais plus l'heure du rendez-vous approchait plus il avait la trouille, une peur sourde qui le prenait aux tripes, qui lui rappelait trop de souvenirs douloureux, ceux d'un combat qu'il avait perdu des années plus tôt et qui lui avait enlevé sa petite amie. Comment allait-il réagir en découvrant sa Fleur affaiblie, rongée par le traitement ? Lorsqu'elle ouvrit la porte il fut frappé par sa pâleur, par son visage creusé et épuisé, il savait qu'elle détesterait mais pourtant il n'arrivait pas à se composer une mine joyeuse, c'est donc avec une expression pleine d'une compassion mal placée qu'il la salua. Salut jolie Fleur ! Mais le ton n'était pas si enjoué qu'i l'aurait voulu. Il lui tendit un bouquet de roses et répondit à son sourire. Comment vas-tu ?

Des roses. Léo lui avait apporté ses fleurs préférées. Le ton de sa voix ne trahissait pas l'expression de son visage.  Fleur avait cerné la compassion et elle sentit son coeur se compresser. Elle qui avait la larme facile, elle essayait toujours de ne pas se laisser submerger par ses émotions.  《 Oh Léo, merci... Je  vais bien et toi? 》 lui demanda-t-elle à son tour en l'invitant à rentrer. Elle lui indiqua de prendre le couloir où elle avait installé une petite tablée dans le salon. Rien de bien extraordinaire. Juste quelques cookies et de l'eau chaude pour un café ou un thé. 《 Je suis désolée, tu sais. Ce n'est pas contre toi. Je n'avais pas très envie de voir qui que ce soit. 》 admit-elle très sincèrement. Il était important pour elle de le lui signaler. En apprenant son cancer, elle est passée par plusieurs phases. Le déni, la peur, la tristesse. Puis il y a eut ce passage où elle ne voulait plus voir personne. Pourtant elle appréciait Léo, elle le considère comme un être cher qui a fait et fera toujours partie de sa vie. Il a été son amourette, sa passion, son confident. Léo n'était pas qu'un ex ou un ami. Il connaissait aussi bien toute sa famille que les différentes facettes de son caractère. Elle n'aimerait plus Léo comme elle l'a aimé autrefois car son coeur appartenait maintenant à Maxwell. Cependant Léo, c'était son Léo. Pour toujours et à jamais.

Non Fleur n'allait pas bien, tout son petit corps frêle en était la preuve, la pâleur de son visage, ses traits tirés et même ce sourire qu'elle se forçait à garder aux lèvres mais qui était fané. Fleur était malade et elle ne pouvait pas le cacher alors quand elle osa affirmer qu'elle allait bien, pire, même demander à Léo comment lui allait, il faillit vaciller, c'était trop difficile de la voir ainsi, elle qu'il connaissait pleine de vie et de joie. Pourtant il n'avait pas le droit d'être abattu, ni de pleurer sur son sort, il devait se montrer forte pour qu'elle sache que rien n'était perdu et que cette sale maladie ne vaincrait pas, qu'elle était entourée et soutenue. Alors il l'attrapa par les épaules et l'attira contre lui, Léo était un grand tactile, il avait besoin de sentir les gens, il en avait toujours été ainsi avec la jolie française et il sentait qu'aujourd'hui elle avait besoin d'un câlin. Moi ça va, mais on s'en fou. Leur étreinte ne dura que quelques petites secondes, il ne fallait pas que ça devienne gênant non plus. Et déjà ils s'avançaient dans le salon où Fleur avait tout préparé pour sa venue. C'est normal, il t'a fallu du temps, tu n'as pas à t'excuser. Il s'installa dans le canapé à côté d'elle et pris sa main glacée. Tu en es ou aujourd'hui ? Tu as besoin de quelque chose ? Jamais Léo n'aurait l'indélicatesse de vouloir s'imposer auprès d'elle ni de vouloir la materner, mais il aimait Fleur, il avait pour elle une tendresse toute particulière qu'il n'arrivait pas à s'expliquer, elle n'était pas une amie, c'était plus que ça, pas une sœur, ça serait presque incestueux que de la considérer ainsi, une confidente certainement, un peu tout mélangé, comme les sentiments qu'il avait toujours éprouvé pour elle. Aujourd'hui il était triste et il avait peur de la perdre un jour, vous pouvez le trouver pessimiste mais il savait trop que ce genre de mal pouvait se jouer de nous sans qu'on s'y attende.

《 Non on ne s'en fout pas! 》 s'offusqua Fleur, la main sur la poitrine. Ce n'est pas parce qu'elle était gravement malade qu'elle ne se préoccupait plus de ses amis. Bien au contraire, elle était soucieuse de ce qu'elle leur infligeait. Elle les embarquait, eux aussi, dans ce combat contre le cancer. Et lorsque Léo la prit dans ses bras, une étreinte forte et amicale, Fleur sentit ses yeux se voiler de larmes. Cela ne dura que quelques secondes mais rapidement elle se retourna pour se diriger vers le salon. Dos à lui, elle essuya ses yeux cernés. 《 Oui... J'ai besoin de voir mes amis.》 Et Léo en faisait partie. Autrefois, elle l'avait aimé de toutes ses forces. Elle sait qu'elle éprouvera pour toujours une tendresse particulière envers lui. Il a été son premier amour, son coup de coeur. Leurs baisers sous le Sacré-Coeur resteront des souvenirs ancrés dans sa mémoire. Toutefois les choses étaient différentes, à présent. Elle avait rencontré l'amour de sa vie. Maxwell. Maxwell est celui qui l'a aidé à tourner la page, à oublier toutes ses peines amoureuses. Elle l'aimait plus que tout au monde.

Fleur avait en tête toute autre chose. 《 J'ai besoin de parler. 》 continua-t-elle de se confier. 《 Si jamais... tu sais...》 elle baissa son regard. Il lui était difficile de dire clairement  si jamais je ne m'en sors pas. Tous ses proches eurent droit à leur déclaration d'amour. Si elle avait bien compris une chose en apprenant son cancer, c'était que la vie était bien trop courte pour remettre les choses au lendemain. C'est pourquoi elle désirait tant ouvrir son coeur à Léo.

Peut-être en effet qu'on ne s'en foutait pas... Encore une fois il manquait cruellement de tact. Peut-être au contraire que Fleur avait besoin qu'il lui parle de sa vie, des petites choses du quotidien, des petits rien qui faisaient tout. Parce qu'elle était cloîtrée entre les quatre mures de son appartement, elle avait sûrement besoin de savoir que la vie continuait et qu'on ne l’évinçait pas, que rien n'avait changé et que rien ne changerait. T'as raison on ne s'en fout pas, mais d'abord on parle de toi, moi je passerai après. Il lui sourit doucement alors qu'elle se dégageait de son étreinte pour mieux essuyer ses yeux à l'abri de son regard, la pudique Fleur. En même temps il comprenait, lui n'aimerait certainement pas être vu comme une victime, comme il ne pouvait s'empêcher de la voir aujourd'hui. On sera là pour toi, tes amis, ta famille, on ne t'abandonnera pas. On sera tous là pour vaincre cette maladie. Il sentit son cœur se serrer alors que la française semblait vouloir s'ouvrir à lui pour l'une des confessions des plus sincères mais aussi des plus difficiles qu'il lui ait été donné d'entendre. Léo s'assit, leur servit une tasse de thé à chacun. Puis il pris sa main lorsqu'elle s’installa près de lui. Si jamais... comme si une chose pareille était imaginable, comme s'il pouvait vraiment croire que la jeune et jolie Fleur allait le quitter, les quitter tous. Il s'y refusait, pourtant il se devait d'entendre ses mots, de les écouter jusqu'au bout sans l'interrompre, parce que ça la soulagerait, parce qu'elle en avait besoin. Il serra sa main et d'un regard encourageant il lui fit comprendre qu'il était prêt, aucun mot ne sortit de sa bouche, il avait la gorge trop nouée pour pouvoir dire quoi que ce soit.

Il ne le faisait pas exprès mais Léo ne rendait pas les choses faciles. Fleur savait qu'il n'allait pas aimé ce ton qu'elle utilisera. Ce ton triste et défaitiste. Mais même si il ne va pas apprécier son pessimisme, elle se devait d'ouvrir son cœur. Tout simplement parce qu'elle désirait ardemment enlever ce lourd poids de sa poitrine. 《 J'ai pris conscience que la vie est bien trop courte. Tout est si... fragile. Je l'ai réalisé.》 elle baissa son regard et ses doigts se touchaient nerveusement. 《 Ce que jai à te dire ne change en rien les sentiments que j'éprouve pour Maxwell, d'accord? 》 lui prévint-elle en levant enfin ses yeux du sol. Maxwell c'était l'homme de sa vie. Le coeur battant, tel une appréhension avant un examen oral, Fleur se lança dans sa thérapie.

《 Léo, je t'ai aimé tellement fort. J'ai été stupide. Tu n'étais pas le bon... Mais tu sais quoi? Tu auras toujours une place spéciale dans mon coeur. Tu es une belle personne, tu ne t'en rends pas compte mais crois-moi, tu es quelqu'un de bien. Et quand je ne serai plus là... Je voudrais que tu te souviennes que de nos bons moments.》 Comme lorsqu'ils dansaient jusqu'au matin à Montmartre. Qu'ils dégustaient des macarons sous le Sacré-Coeur. Et qu'ils se cachaient dans les rues étroites parisiennes pour s'échanger un baiser ou deux. Ces souvenirs resteront à jamais ancrés dans sa mémoire. Elle souriait par nostalgie du bon temps, mais aussi parce qu'elle était apaisée d'ouvrir son cœur à son amour passé. Si jamais elle devait quitter ce monde, elle n'aurait aucun regret. Parce que Fleur gardait en tête ces atroces statistiques en tête. Seulement 15% des patients survivent plus de 5 ans après un diagnostic du cancer du poumon.

La vie était fragile, Léo le savait bien, tout pouvait basculer en quelques secondes seulement, virer au cauchemar voir au pire, sans que personne ne l'ait prédit, c'était une sorte de loterie, une roulette russe des plus cruelles. Alors c'était peut-être pour cette raison, parce qu'il savait, que Léo faisait n'importe quoi, il ne s'attachait à personne, qu'il détruisait tout sur son passage comme pour choisir lui-même de souffrir sans qu'on le lui impose. Et parmi tout ce chaos qu'était sa vie il y avait son fils, celui auquel il ne s'était pas attendu, cette surprise des plus merveilleuse, il lui donnait envie de vivre, envie d'y croire, de se dire qu'on pouvait avoir foi en quelque chose. Tous les jours il avait peur pour lui mais tous les jours il souriait grâce à lui, John avait changé sa vie de la façon la plus surprenante. Les mots de Fleur lui  serrèrent d'avantage la gorge, le pauvre garçon avait l'impression de manquer d'air, elle semblait tellement avoir perdu tout espoir, forçant Léo à réaliser la gravité de sa situation, peut-être que Fleur ne s'en sortirait pas, même s'il ne voulait pas y croire. Oh oui elle l'avait aimé, fort, sûrement bien plus qu'il le réalisait, mais déjà bien trop pour ce qu'il méritait, cette fille avait besoin d'un homme bien et il lui avait répété bien souvent qu'il n'avait rien du prince charmant qu'elle pensait qu'il était. Il aurait pu la rendre heureuse, un temps, certainement, mais jamais elle n'aurait trouvé le véritable amour avec Léo et il avait eu raison de lui résister malgré l'attirance qu'il ressentait également, aujourd'hui Fleur était heureuse avec un autre homme, avec cet homme bien qu'elle méritait, Léo espérait qu'il prendrait soin d'elle, même dans les pires heures. Une larme coula sur la joue de notre homme, on pouvait dire qu'il était dur, qu'il n'avait aucun sentiment, c'était mal le connaitre, sous la carapace se cachait un vrai sensible, un cœur d'artichaut. C'est beau de te savoir heureuse avec ce Maxwell, même si je ne l'ai pas encore rencontré, tu auras besoin de mon approbation un jour tu sais ! Il lui sourit à travers les larmes. C'est toi qui sait voir le beau en moi, mais je m'en souviendrai oui, je n'ai rien oublié tu sais, je n'oublierai jamais rien. Il souffla pour chasser un peu l'émotion qui l'avait gagné, pour retrouver une contenance et continuer au lieu de s'effondre, il se racla la gorge et pris une gorgée de son thé. Tu n'as pas intérêt de me faire un sale coup Fleur, tu restes avec nous. Moi j'ai besoin de toi, j'aurai besoin de toi tellement souvent... qui me dira que j'ai fais une connerie en faisant en sorte que Grace me quitte, hein ? Il prenait un ton presque léger pour son annonce, Fleur ne sachant pas du tout que Léo se retrouvait esseulé. Et puis qui m'aidera à acheter des vêtements pour mon futur bébé... parce que j'ai fais la même connerie, qu'avec Billie. Grace, on s'est quitté alors qu'elle est enceinte. Alors tu peux pas baisser les bras ni partir maintenant, t'as trop de boulot avec moi ! Je suis toujours aussi nul pour acheter des vêtements si petits. Il n'avait pas envie qu'elle le plaigne, ni même qu'elle le rassure, mais il espérait que ces quelques nouvelles lui donneraient encore plus l'envie de se battre, de savoir qu'elle n'était pas oubliée, qu'on avait besoin d'elle, autant qu'elle avait besoin des autres.

Avant que Fleur ne tombe malade, elle eut l'immense chance de rencontrer Maxwell. Bien que les sentiments se soient arrivés rapidement, ils étaient tout deux certains d'être des âme-soeurs.  Au vu des circonstances et de leur relation naissante, ils n'avaient pas encore eut le temps de leur présenter tout leur entourage. Cependant Léo connaissait Maxwell à travers les nombreux éloges de Fleur. Elle est d'ailleurs certaine qu'il lui donnera son approbation sans aucun problème. 《 Tu vas l'adorer. 》 promit-elle, pensant qu'il était bien difficile de ne pas apprécier Maxwell.

En déclarant son amour amical pour Léo, Fleur avait brisé sa carapace. Chose qu'elle ne s'y attendait absolument pas. C'était elle la femme sensible, celle qui avait la larme facile et qui montrait à nue ses sentiments. Voir une larme sur son visage lui tordit l'estomac. Elle déglutit, serra ses dents et s'approcha de lui pour essuyer ses larmes.  Elle lui rendit son sourire alors qu'il but une gorgée de son thé. Il lui était impossible de contenir son émotion mais le fait que Léo lui confie ses péripéties amoureuses, la retenait de pleurer. 《 T'as toujours été nul en amour! 》 rigola-t-elle les yeux rouges et brillants. Aussi nul qu'elle. Dans une vie antérieure ils auraient été le couple parfait. Mais leur relation fonctionnait bien mieux maintenant qu'elle était amicale. 《 Dans quelle histoire tu t'es encore fourré hein? 》   demanda-t-elle en reprenant ses esprits. Léo allait de nouveau être papa? De toute façon, elle n'allait pas le sermonner. Fleur était l'une de ses personnes qui pardonnait facilement et qui voyait le bon en chacun. Parfois pour réaliser qu'on fait une erreur, il faut la commettre. On peut même la commettre deux fois pour être bien certain qu'on a fait une bêtise. Non pas que ses enfants représentaient une erreur ou une bêtise. Mais connaissant Léo, il devait croire qu'il en avait fait une.

Un sourire énigmatique se dessina sur les lèvres du garçon, il allait l'adorer... ça il n'en était pas certain, Léo avait cette fâcheuse tendance à ne pas aimer les copains de fleurs, la meilleure preuve était ce Noah, qui était clairement un choix désastreux, mais peut-être qu'au fond il était simplement jaloux sans vraiment se l'avouer. C'était un peu le même problème qu'avec sa meilleure amie Mia, rien ne se passerait jamais entre Léo et Fleur ou Léo et Mia mais il avait malgré tout du mal à accepter qu'elles aient un homme dans leur vie, contradiction quand tu nous tiens. Pourtant, plus que tout, il restait heureux pour Fleur parce qu'elle méritait plus que quiconque d'avoir quelqu'un de bien qui partage sa vie, surtout dans des moments tels que ceux qu'elle vivant actuellement. Et rien que le fait de savoir que ce Maxwell était resté, qu'il n'avait pas pris la fuite à l'annonce de sa maladie prouvait que c'était un homme convenable. Je n'en doute pas, tu as toujours un bon goût en matière de garçon ! Petite fleur ironique à lui-même. Sauf pour ce crétin de Noah, je suis bien content qu'il soit retourné en France celui-là. Voilà, c'était dit, même si Fleur était parfaitement consciente du désamour entre les deux hommes, c'était de bonne guerre comme on dit et puis il fallait bien un peu de légèreté, elle en avait besoin, de rire un peu, Léo n'était pas un bon clown, mais il essayait de ne pas trop dramatiser.
Il rit carrément lorsque la belle lui dit qu'il était nul en amour, elle avait mille fois raison, il le savait. Il baissa les yeux en se passant la mains dans les cheveux. J'sais pas dans quelle histoire... mais je suis en plein dedans. C'est pas le fait de devenir père qui m'ennuie, au contraire même. Le problème c'est qu'on n'est plus ensemble avec Grace alors que je l'aime comme un fou, c'est con hein ? Je ne sais jamais comment je fais mais je m'y prends toujours mal. Il est certain que Léo était mauvais en amour, il aimait trop, trop fort, de manière intransigeante, il se faisait du mal et en faisait autour de lui, avec lui il n'y avait pas de demi-mesure et ça n'est qu'après qu'il se rendait compte de ses erreurs. Ce bébé n'en était pas un, ou c'était une heureuse bêtise, c'est tout le reste autour qui était un désastre.

Les histoires d'amour de Fleur se sont fânées aussi vite que l'aube de l'automne. Son histoire avec Maxwell était différente. Il y avait de la sincérité. Un coup de foudre réciproque. Un avenir. Rien à voir avec Noah, qui se montrait instable et impulsif. Cette allusion la fit sourire. "On n'a à peine échangé un baiser avec Noah." rectifia Fleur. Il avait volé scrupuleusement ses lèvres, ce qui lui a valu de grosses larmes de chagrin. Léo avait été là au bon endroit et au bon moment pour les sécher. Elle l'adorait son Léo. Encore plus lorsqu'il se montrait un poil possessif.

Il était quelquun bien et il méritait de connaître le bonheur, lui aussi. Seulement les choses n'étaient pas aussi simples, d'ailleurs, pour Léo, elles ne l'ont jamais été. "Pourquoi faut-il que ce soit si compliqué? Tu l'aimes? Alors qu'est-ce que t'attends?" lui demanda-t-elle, attendrie, avec le sourire. Elle posa une main contre sa joue. "Je suis sûre qu'elle t'aime aussi." certifia-t-elle très confiante. Car quelle femme pourrait ne pas aimer Léo? 

Ce qu'il avait pu se passer entre Noah et Fleur ne regardait pas Léo, même s'il pouvait se montrer possessif et maladroitement jaloux, il n'avait aucun droit sur la jolie française, il avait perdu toute possibilité d'avoir une quelconque objection sur sa vie sentimentale, il ne pouvait qu'être l'ami qui écoutait, qui conseillait, même mal, ou qui réconfortait, c'était ça se place et il la trouvait plutôt chouette finalement. C'était beaucoup moins prise de tête et de cette place là il ne risquait pas de la perdre... enfin il l'espérait de tout son cœur. De toute façon Noah c'est du passé, et puis le climat Australien ne lui a pas trop réussi on dirait ! En référence à son départ, après tout il n'avait passé que quelques mois sur cette île.
Ce qu'il attendait ? Le déluge, un truc du genre. En vrai il n'attendait rien, seulement que Grace soit prête et elle ne l'était pas, peut-être qu'elle ne le serait jamais et malgré tout il se sentait prêt à attendre comme un idiot qu'il était, juste parce qu'il était fou d'elle. C'est elle qui est parti, je lui ai tout dit, tout avoué, il faut peut-être que ça fasse son chemin dans sa tête. De toute façon cet enfant sera aimé, peu importe les circonstances. Même s'il avait comme un mauvais goût de déjà vu. Son téléphone sonna, brisant cet instant de confidences entre les deux amis. C'était Grace, comme si elle avait entendu parler d'elle. Léo décrocha en s'excusant, ce fut bref. Ma Fleur, il faut que je te laisse, Grace est à l'hôpital pour une échographie... elle veut que j'y assiste. Il avait l'air penaud, déçu de devoir la quitter si vite et en même temps heureux que Grace l'appelle alors qu'il ne s'y attendait pas. Il se leva doucement. Prends soin de toi, tout ira bien ma jolie. Et puis tu me présenteras Maxwell quand tu iras mieux. Il la pris dans ses bras et l'embrassa sur le front.