(CJou) Don't be shy, take control of me

Vivre avec Ciàran était une mauvaise idée. Et pourtant, j’avais accepté. Une connerie selon moi car en emménageant avec un homme, je me coupai les ailes. J’aime trop ma liberté pour me laisser emprisonner dans une cage. J’étouffais. Enceinte de cinq mois, mon ventre s’était brusquement arrondi à l’annonce de cette grossesse inattendue et non espéré. Je me savais incapable d’aimer, d’apprécier quelqu’un. Qu’il soit de ma famille, mes amis ou encore au niveau romantique. Et pourtant, je me surprenais à aimer ce bébé. Essayer du moins. Une casquette dans les cheveux, ces derniers devenus roses depuis peu de temps, je les avais laissés détacher pour une fois. Vêtue d’une chemise à Ciàran et d’un short de cycliste, je devais avoir un look d’enfer. Mais je ne rentrai dans plus aucun de mes vêtements. Une fois à l’extérieur, j’appréciai le soleil pour une fois. Mon violon dans la main, il était encore tôt. Sous les coups de sept heures du matin sans doute. Bowen s’éveille tout juste. Je scrute les environs, attendant le moment propice avant de sortir mon archet pour accorder mon violon. J’ai pris cette habitude de jouer au coin de cette rue, pieds nus et vêtue comme l’as de pique. Mais je n’ai pas le temps de commencer à jouer que je reconnais un visage familier. Le facteur. « CJ, hurlai-je. » Je me surprends à courir vers lui, à sauter dans ses bras. Mon ami m’avait manqué et je suis d’un naturel expansif. Ma bouche s’écrase sur sa joue rugueuse et je lui souris. « Tu m’as manqué, chat. » Un sourire innocent habite mes lèvres, oubliant mon état pendant les quelques minutes, jouissant de mes retrouvailles avec CJ.

La journée du facteur commençait toujours de la même façon. Tu te rendais en vélo à la poste, une fois dans les vestiaires, tu te changeais pour mettre l'uniforme obligatoire. Après quoi, tu allais chercher la pile de courrier que tu avais à livrer dans un des quartiers de la ville et tu enfourchais ton vélo pour te rendre à la première adresse. Aujourd'hui, tu te trouvais dans le nord de la ville, accrochant ton vélo sur la place, tu commençais par les immeubles sur ta droite. Tenant une lettre dans ta main, tu n'avais pas vu ton amie qui te courait dessus et une fois contre toi, tu laissais s'échapper au sol quelques enveloppes. Tu les ramasserais après, pour le moment, tu t'occupais d'enlacer la jeune femme qui avait maintenant des cheveux roses. Un véritable bonbon celle-là. Ce qui avait le don de te faire esquisser un grand sourire. « Lou ! » Après elle, tu venais lui déposer un baiser sur le joue. Tu ne savais même pas depuis combien de temps elle était revenue, mais tu étais ravie de la voir en ville. « Déjà dans les rues, prête à jouer ? » demandais-tu avec un fin sourire. Elle tenait toujours son violon dans la main et elle avait bien raison. Elle s'était pas mal éloignée de l'endroit où elle s'était postée au début donc si elle l'avait lâchée, elle aurait pu se le faire voler. « Tu m'as manqué aussi ! » Et vos séances de musiques aussi, le violon se mariait très bien avec le piano et vous aviez toujours des milliers de notes en tête. D'ailleurs, en la regardant, tu remarquais que quelque chose d'autre avait changé chez elle, en plus de la couleur de ses cheveux. « Et je voudrais pas te froisser mais t'as pris du ventre dis-donc ! » ajoutais-tu avec un fin sourire. Oui, ce n'était peut-être pas très délicat mais tu disais un peu trop souvent ce que tu pensais et tu n'allais pas commencer à te retenir où à mentir.

J’aimais bien CJ. Hormis son physique de mannequin qui aurait pu faire fantasmer la plus pucelle des nanas, il avait un cerveau. Pas comme les autres débiles qui régissaient dans ma vie. Oui, j’en voulais toujours à Ciàran pour cette grossesse indésirable. Mais maintenant que Flocon était là, je ne pouvais pas faire autrement. Alors prise d’une pulsion affective, je me jette dans les bras de CJ, me foutant qu’il soit en train de travailler. Les gens en Australie sont étranges, ils m’appellent tous Lou tandis qu’à la Nouvelle-Orléans, on me surnommait Belle. « Ouais, toujours. » Je reste dans ses bras, ne voulant pas regagner la Terre ferme pendant un instant. Les yeux dans les yeux, brillants de mille feux. Ça aurait pu être romantique, si romantisme j’avais. Mais non. J’ai autant de romance en moi qu’est subtil un coup de pied dans les parties masculines. Je dodeline de la tête, rougissant malgré moi lorsque CJ dépose une bise salvatrice. « Je sais bien ! Je suis irremplaçaaaaable. » Je retrouve le sol avant de tirer sur ma chemise. La remarque de mon ami m’arrache un sourire, un rire. Alors, j’ôte le vêtement pour le poser au sol. Je ne suis pas nue en-dessous, j’ai un haut de maillot de bain. « Gros ventre et grosse poitrine, je suis enceinte. Tadaaaaam. » Je fais une pseudo-révérence avant d’éclater de rire. « Le père, c’est Ciàran avec qui je n’ai couché qu’une fois eeeeeeeet c’est un garçon. » Je danse d’un pied à un autre avant de reprendre mon vêtement. « T’es un mauvais hibou t’as perdu toutes les lettres pour aller à Poudlard. » Je commence donc à me baisser pour ramasser les lettres, histoire de l’aider un peu dans sa tâche qu’on aille manger un milshake dans un diner semblable à celui présent dans Riverdale.

Lou Belle arbore une casquette, une chemise d'homme ou alors bien trop grande pour elle, même si avec son ventre, elle ne semblait pas être aussi extravagante que tu ne le pensais. Un short et pas de chaussures. « Faudra que tu me réexpliques un jour ce que tu as contre les chaussures aussi ! » Un sourire se dessinait sur ton visage, elle te l'avait déjà expliqué mais ta mémoire n'était pas très fabuleuse et tu avais déjà oublié. Et puis tu étais friand des histoires de la jeune femme, elle avait une façon de raconter qui te captivait à chaque fois. Pas comme pour l'annonce de sa grossesse qu'elle balançait comme un gros "surprise". « Enceinte.. D'un garçon.. » D'un seul coup, tu perdais pied avec la réalité. Lou était enceinte. Lou attendait un petit garçon. Tu pensais immédiatement à Alioth, à ta Lou à toi. Mais Lou Belle n'était pas québécoise, Lou Belle ne maîtrisait pas aussi bien le piano que le violon, Lou Belle n'était pas amoureuse de toi. Elle n'était pas la mère d'Alioth. Il y avait beaucoup de choses qu'elle n'était pas du simple fait qu'elle n'était pas elle. « Wow ! Félicitations, enfin je crois. » Tu fronçais doucement les sourcils, puisqu'elle avait couché une seule fois avec le père, tu ne savais pas si c'était quelque chose de bon ou non. Tu n'avais pas toutes les informations et ça pouvait vite devenir un terrain glissant, sur lequel tu ne tenais pas forcément à t'engager. « Tu as fondu sur moi comme un iceberg et c'est bien connu que les hiboux ne volent pas bien les ailes mouillés. » répondais-tu en rigolant, te baissant à ton tour pour ramasser le reste des lettres. « Tu devrais pas te pencher comme ça, je crois que y a des règles physiologiques à tenir pour la santé de ton bébé. » Tu n'étais pas trop certains de ce que tu avançais. Tu n'avais pas été là pour Lou lorsqu'elle était enceinte et maintenant que Nevaeh ne faisait plus partie de ta vie, tu n'étais pas sûr de retrouver une femme avec qui tu aurais une famille. Tu n'étais pas sûr de devenir un jour papa à part entière. « Tu es revenue depuis combien de temps ? » Tu prenais les lettres qu'elle te tendait pour les ranger bien à l'abri dans ta sacoche avant de plonger ton regard dans le sien.

La remarque de CJ me fait sourire. Qu’est-ce que j’ai contre les chaussures ? « J’aime sentir le contact de la Terre sous mes pieds. Je suis comme ça, je préfère être connectée avec elle quand je suis au sommet de mon art mon chou. » Je minaude un peu comme d’habitude mais je suis comme ça. Un peu fofolle, un peu débile. Je ne comprendrai jamais comment les gens font pour autant m’apprécier. Quoique, je suis juste géniale comme fille, donc c’est tout à fait normal ! « Oui et je vais l’appeler flocon, comme flocon de neige ! » Je sautille en disant ça avant de courir dans tous les sens comme une souris perdu. J’attrape la main de mon ami que je pose sur mon ventre rebondi. Ça dérangerait des femmes enceintes qu’on les touche tout le temps mais pas moi. J’espère dans le fond que je ne serai pas une de ces femmes qu’on cataloguerait dans la catégorie baleine. Bien que j’en sois une désormais. « Félicitations, pff ! Je suis désormais une personne repoussante et obèse enchainée à un homme qui ne m’appréciera jamais à ma juste valeur comme une reine piégée dans une mariage forcé. » Je l’attrape par le col de son tee-shirt, plantant mon regard le plus dramatique dans le sien. « Et puis qui voudrait s’envoyer en l’air avec moi désormais ? oh seigneur me voilà bonne pour le couvent et la chasteté ! » D’un geste théâtral, je mets la main sur mon front avant d’éclater de rire. « Je plaisante même grosse, je reste awesome. » Je lui adresse un clin d’œil avant de ramasser les lettres qui jonchent le sol. « Je ne suis pas un iceberg ! Je suis un papillon aussi délicat qu’un coup de pied dans les parties ! » Mon sourire dévoile toutes mes dents avec mon air mutin avant de lever les yeux au ciel. « Mais oui à d’autres ! Je suis enceinte CJ, je ne suis pas en sucre ! » Comme pour démontrer mes paroles, je grimpe sur le muret où je me jonche en équilibre, les lettres dans la main comme une funambule. « Peu de temps, début septembre pour le conservatoire et j’pensais pas que tu voudrais me revoir après que j’sois partie comme ça. Mais pour ma défense, j’ai une bonne excuse même si je ne peux rien te dire. » Lui parler de mon viol ? De ma fuite ? Plutôt crever.

Sans se presser, elle te faisait une nouvelle fois le même discours au point que tu avais parfois l'impression qu'elle le connaissait sur le bout des doigts, comme si elle s'était entraînée pendant des jours entiers devant son miroir. Tu ne te lassais pas de l'entendre. « Tu es vraiment unique ! » Et c'était un compliment. Tu avais pas mal voyagé, du monde tu en avais un peu rencontré aux quatre coins du globe mais jamais tu n'avais trouvé deux fois la même personne. C'était d'ailleurs pour ça que tu étais retourné vers Lou. Puis vers Nevaeh. Et c'était aussi maintenant pareil pour Lou Belle. « C'est original. » Un grand sourire s'affichait sur ton visage, de ce côté là, tu ne pouvais pas dire grand chose, ton fils avait bien le nom d'une étoile et même si tu n'avais pas pris part à cette décision, tu aurais sûrement eu cette suggestion et Lou l'aurait approuvé. Ce qui prouvait bien que vous étiez sur la même longueur tout au long de votre vie. « Tu es aussi une très bonne comédienne, pour surjouer, il n'y a pas meilleur que toi ! » Un rire franc se fit entendre. Elle était vraiment un sketch à elle toute seule, toujours le mot pour faire rire. Mais même avec le sourire et un ton humoristique, tu pouvais sentir une certaine vérité dans ses propos. « Et les papillons sont quand même des êtres fragiles. » répondais-tu après l'avoir regardé faire son numéro. Elle ne cessait jamais de t'étonner, toujours une idée, un geste ou une parole derrière la tête. Comme si elle avait toujours un coup d'avance sur toi. Et tu ne t'y connaissais pas tellement en insecte, mais tu avais toujours trouvé que celui-là, avec ses longues ailes, si l'une venait à se fragiliser, il serait très mal fortuit. « Je ne t'en veux pas Lou, tu as tes raisons et je ne t'obligerais jamais à m'en parler si tu ne veux pas le faire. Au contraire, je suis vraiment heureux de te retrouver ! » Tu l'aurais bien prise à nouveau dans tes bras, mais elle n'était pas à bonne position, se trouvant toujours debout, fièrement jonché sur son petit muret. Tel un trophée, une victoire de ses propos.

J’ai eu le temps de parcourir pas mal de pays depuis mes dix-sept ans. Il y a cinq ans, j’ai quitté le domicile familial précipitamment pour m’échapper. Echapper à un monstre dont j’ai croisé à nouveau le regard, il y a quelques mois. Alors, oubliant le monstre, je regarde CJ. Et son grand regard triste. Triste ? Pourquoi triste ? « Eh oui, si je n’existai pas il faudrait m’inventer. » Je fais une révérence avant de lui faire part du nom de Flocon. « Je pense que le père voudra donner son avis mais who cares ? » Une pointe de tristesse passe dans mon regard tandis que j’énonce Ciàran, mon meilleur ami dont l’amitié était maintenant révolue. On commence à parler chiffons, ramassage de lettres et il me prend pour une petite chose fragile. Je commence donc à sur jouer un peu, violon sur le dos avant de tournoyer sur moi-même. Comme un arc-en-ciel. Mélange de pluie et de soleil. « Et toi tu es un super public. » Nouvelle révérence comme si j’avais des applaudissements imaginaires. Mon sourire à la fois triste et heureux se joint à celui de mon ami. Sur couver, prendre trop soin d’une personne. J’étais déjà protégée par Ciàran, je ne voulais que CJ m’oublie parce que je porte désormais la vie. « Je ne suis pas fragile, CJ, dis-je d’une voix un peu plus forte que d’habitude. » Un peu en colère. J’ai eu des grands frères, j’ai eu Ciàran. « Un jour, j’aurai ma liberté et je ne me dépendrai plus ni de mes frères, ni de… » Je marque une pause, debout sur mon muret. « Ciàran. » Je sautille un peu sur mon muret avant d’aller vers une boite aux lettres mettre le bon courrier dedans pour aider mon ami. Puis, je m’assois en battant des jambes avant de tendre les bras vers lui. « Et toi, pourquoi ce regard triste mon chat ? J’ai loupé quoi ? » Je lui lance mon sourire le plus angélique ne me doutant pas de la mélancolie de mon ami. Du départ de sa fiancée, de son autre amie, de l’existence d’un enfant. En fait, je ne savais plus rien mais l’ignorance n’est-elle pas la meilleure des protections ?

C'était une chose réelle, si Lou n'existait pas, il aurait vraiment fallu que quelqu'un la conçoive parce que c'était une vraie boule d'énergie qui ne pouvait pas tenir en place une seule seconde et lorsque ça arrivait, tu étais assez bluffé de la performance. « C'est quand même la femme qui le subit pendant quasiment 9 mois, ça devrait vous donner un certain droit non ? » Tu n'étais pas du genre à penser que l'homme avait son mot à dire, après tout, à part engrosser et subir les hormones pendant les longues semaines qui suivaient, vous ne serviez pas à grand chose. Et dans son cas à elle, tu n'étais même pas certain que le père était là à chaque moment de sa vie pour lui venir en aide si jamais elle avait besoin de n'importe quoi. Si jamais ce n'était pas le cas, il fallait qu'elle n'hésite pas à te demander, tu serais prêt à faire beaucoup de choses pour elle. « D'accord. » Comme accepter le fait qu'elle n'était pas aussi fragile que tu pouvais le penser. Elle était enceinte, elle n'avait pas la maladie des os de verres, ce n'était même pas une maladie d'être enceinte. Donc il fallait que tu arrêtes de vouloir la materner et tu allais le faire dès maintenant. « Alors envole-toi ! » Un large sourire s'étirait sur ton visage, elle quittait alors le muret pour poster quelques lettres par-ci, par-là. Tout en légèreté, tout en douceur. Tu la regardais admiratif pendant quelques secondes jusqu'à ce que la réalité revienne. Ton sourire s'effaçait doucement et elle ne mit pas longtemps à le réaliser. « Oh tellement de choses se sont passés.. » Tu avais déjà la gorge nouée à l'idée d'en parler. Tu ne savais pas si elle avait eu le temps de lire les derniers ragots, sans quoi, elle connaîtrait déjà une partie de l'histoire. « J'ai trompé Nevaeh,. Elle est partie, Théia aussi, sans parler de Jordan. J'ai l'impression d'être un étranger dans une ville qui m'a pourtant vu grandir. » Tu soupirais doucement, te laissant tomber sur le muret avec pas mal de force que tu ressentais une pointe de douleur dans le bas des fesses.

Il est tôt et pourtant, je déborde d’énergie. Je sautille limite sur place en regardant CJ. Je suis tellement contente de le retrouver. Il est un peu mon rayon de soleil et j’étais contente qu’il ait trouvé son arc-en-ciel. Parce que c’était une belle personne. Je ris tandis qu’on parle des neuf mois à tirer lorsqu’on est enceinte. « Il m’en reste quatre et je pourrais tenir Flocon dans mes bras. J’ai hâte car même si le papa et moi on ne s’entend pas bien, ça sera mon petit bébé à moi. » Je lui adresse mon sourire le plus lumineux tandis que je juche comme une funambule sur le muret. Les bras tendus, en équilibre. Pour démontrer à mon ami que je n’étais plus une chose fragile. Je me tourne vers lui, parlant de ma métaphore du papillon. Ma mine s’assombrit un peu car ça me fit penser à ses idées noires que j’avais en tête. « Non, je ne peux pas car je ne veux pas t’abandonner, ni Ciàran. Vous êtes mes meilleurs amis et même si vous avez d’autres filles dans vos vies, je tâcherai de prendre le plus de place possible. » Je sautille du muret pour aller distribuer les lettres. Pendant deux minutes, je suis une chouette. Comme Hedwige, aussi gracieuse. Puis, je retourne voir mon ami en m’asseyant sur le muret et le fixant de mes grands yeux. Donc il avait trompé sa copine, une autre était partie –mais c’est qui Théia ?- et encore une autre –C’est qui Jordan ?- Je fronce les sourcils avant de prendre ma moue la plus songeuse. Je me redresse pour me mettre sur ses genoux et le fixer sans rien dire. « Donc si je résume bien toutes les femmes avec qui tu avais un attrait physique sont parties ? » Il savait que je ne croyais pas en l’amour. Pour moi, ce n’était que des futilités. Je pourrais lui parler de Gavi et de ce qu’il m’avait fait. J’en avais envie mais ça n’était ni le lieu, ni le moment, ni l’heure exacte. « Je coucherai avec toi si tu veux. Après tout, t’es plutôt beau garçon et j’ai toujours eu de l’attirance pour toi. » Je prends mon air le plus sérieux avant d’éclater de rire. « Je plaisante. » Je passais mes bras autour de son cou pour le regarder avec une certaine intensité. « Si elles sont parties, c’est qu’elles ne mesuraient pas la chance qu’elles avaient de t’avoir dans leurs vies et grand bien m’en fasse. Y’a plus de place pour moi et tu sais que maintenant je suis genre une baleine. Allez viens, Harry, je vais te servir de chouette pour distribuer le courrier plus vite et on va aller se boire un milkshake. » je dépose un baiser sur sa joue, tout sourire avant de me relever et de lui tendre la main.

Son bébé à elle, ça oui. Cette pensée te faisait avoir un sourire niais. Tu étais perdu dans ton esprit, imaginant ce qu'aurait pu être ta vie si Nevaeh était tombée enceinte, tu te voyais déjà le tenir dans tes bras, fatigué parce qu'il est inconsolable et que tu manques de sommeil mais heureux parce que c'est ton enfant. Tu enviais déjà ce que pourrais vivre Lou-Belle dans les mois à venir. « C'est pour bientôt alors ! » Tu n'avais pas tilté quand elle t'avait parlé de sa grossesse, tu t'étais arrêté à ça. Au fait qu'elle allait être maman, que bientôt elle aurait un petit bébé. Ce qui t'avait renvoyé à ta propre parentalité et à ton envie pressante d'être papa. Tu devais arrêter de partir sur ce chemin-là. « Tu sais que prendre ton envol ne veut pas dire abandonner, tu peux partir si tu le souhaites mais garder le contact, donner des nouvelles, en prendre et rendre visite parfois. » Un sourire se dessinait sur ton visage. Ce n'était pas parce qu'elle était loin que vous deviez vous sentir loin. A votre époque il existait suffisamment d'outils pour communiquer que ça paraissait presque impossible de couper les ponts à moins de le vouloir. « C'est un peu grossier mais esti oui. » Tu avais eu une relation avec Jordan. Et tu avais aussi trompé Nevaeh avec Théia, tombant aussi sous son charme. Mais ce n'était pas toi qui l'intéressait. C'était Woody. Et tu n'étais pas un assez gros con pour ruminer que tu avais fait tout ça pour rien parce que malgré ta culpabilité pour ton geste, tu n'aimerais pas que les choses soient différentes. Comme si tu avais besoin d'en passer par là pour comprendre vraiment la vie et tes sentiments. « Ta gentillesse me réchauffe le cœur. » Tu riais doucement. C'était gentil de penser à ça mais tu n'avais pas besoin de ça. Tu ne voulais pas avoir le moindre rapport intime avec qui que ce soit. Tu voulais juste attendre, laisser passer un peu de temps et évaluer à ce moment là, ta situation. Comme Aino avait pu te dire, peut-être qu'elle avait besoin de temps et qu'elle reviendrait vers toi. En tout cas, tu voulais t'accrocher un peu plus à cet espoir. « Un milkshake, c'est vraiment ce dont j'ai besoin ! » Un peu de sucre, ça te ferait du bien parce que tu commençais à perdre la pêche. Pourtant ton travail était bientôt fini, il ne restait que la rue à t'occuper et tu serais libéré pour la journée. « Et te trompes pas surtout, je suis à 100% de réussite ! » Tu ne savais pas trop si tu plaisantais ou non parce que c'était un record et que c'était la seule chose dans laquelle tu ne foirais pas en ce moment alors peut-être que tu le prenais à coeur mais il ne fallait pas non plus lui mettre une pression qui n'était pas la sienne, sur le dos.

Pour bientôt. Oui pour bientôt. S’il y a bien une personne au monde qui ne méritait pas d’être mère, c’est moi. J’avais encore des difficultés à me nourrir, à voir plus loin que le bout de mon nez. Mais je faisais des efforts. J’essayai. Comme pour approuver mes paroles, le bébé me file un coup. Je pourrais me plier en deux sous le coup de la surprise. Alors j’attrape la main de mon ami que je mets sur mon ventre pas aussi rebondi qu’il n’aurait dû l’être. Flocon donne un nouveau coup comme pour approuver la présence et les retrouvailles avec CJ. « Je crois qu’il aime bien ta voix. » Je lui fais un grand sourire avant de dodeliner de la tête pour monter sur un muret. Je suis souvent le fil de mes pensées sans trop me soucier des conséquences. C’est pour cette raison que je peux paraitre insensée pour bon nombre de personnes. Je vivai ma vie sans la regretter. On n’apprend pas à vivre une fois qu’on est mort. « J’ai parcouru le monde et je pense que je ne me sentirai jamais nulle part chez moi. Et puis, je vais être maman et je vais avoir besoin du papa dans ma vie. Même si je lui dirai jamais. » Ciàran avait été mon ami avant d’être le père de mon enfant. Je savais qu’il pourrait en prendre soin. Je me penche alors pour regarder CJ. Pour une fois que je suis plus grande que lui. « Et puis, tu te sentirais tellement seul sans moi. Je suis indispensable dans ta vie ! » Encore une fois, je théâtralise les choses. Mais je n’avais pas envie de le laisser. Maintenant que je l’avais retrouvé. « il faut dire les choses comme elles sont, Cupidon-Jupiter. » Je ne comprenais pas pourquoi il le diminuait. Il avait un prénom magnifique. Celui de l’ange de l’amour –bien que je n’y croyais pas- et Jupiter, une très belle planète. J’ai toujours été passionnée par les étoiles. Je les trouvais magnifique. « T’es une étoile. La plus belle qui soit et si les filles en sont pas conscientes ce sont des connes. » Pour une fois que je suis grossière. Je ne dis jamais de gros mots mais je ne les connaissais pas. Après, j’avais une vision plutôt étrange du couple. Je comprenais la monogamie, je pense que je pourrais la vivre avec un homme ou une femme. L’infidélité faisait aussi partie du lot. Les hommes vont souvent voir ailleurs guider par leurs pénis. Je ne pense pas être capable d’avoir plusieurs partenaires sexuels en même temps. Ça ne me semblerait pas honnête. « Allons-y pour un milshake alors ! » Je mange jamais devant les gens. Je me contente de jouer avec mon plat. Sans doute y arriverai-je avec CJ ? Il n’a jamais vu que j’étais anorexique et je ne lui ai jamais dit. Fort heureusement. « Bip bip, dis-je pour imiter l’oiseau des cartoons avant de partir en courant dans tous les sens. » Je regarde bien les noms avant de les mettre dans les boites aux lettres. Puis, je reviens en sautillant vers mon ami avec un grand sourire. « Bip bip. » Je reprends mon violon. Au final, je n’aurai pas joué ce matin mais ce n’est pas grave. J’avais retrouvé mon ami. Et il valait cent fois un morceau de musique.

Sans plus attendre, elle attrapait ta main pour la poser sur ton ventre. Tu attendais alors un peu pressé que quelque chose se passe mais ce n'était pas le cas. Alors tu parlais, lui demandant s'il bougeait beaucoup ces temps-ci et à peine avais-tu fini de parler que tu sentais un mouvement. « Il bouge ! » Tu levais ton regard vers Lou-Belle avec un grand sourire sur le visage. Tu aurais adoré connaître ça Lou et Alioth lorsqu'il était dans son ventre. Tu n'avais pas pu le faire et que Lou-Belle te partage ce moment là, c'était génial. Tu ne savais pas quand est-ce que ça pourrait se reproduire alors, tu devais juste profiter du moment présent. « Si tu as besoin d'aide, tu peux aussi me demander un coup de main, je ne sais peut-être pas changé les couches mais je veux bien faire trois magasins pour trouver les paquets si jamais il t'en manque. » Tu serais prêt à soulever des montagnes pour elle et son bébé, tu estimais ça important qu'elle sache qu'elle pouvait compter sur toi. Tu n'avais pas prévu de la laisser tomber. « Je ne sais pas ce que serait ma vie sans toi alors ! » Tu haussais doucement les épaules, essayant d'y penser pendant quelques secondes mais tu ne pouvais tout simplement pas. Elle faisait partie de ta vie depuis un moment maintenant et tu ne pourrais pas la chasser de ton esprit en un revers de la main, même si tu le voulais. « Et toi tu es bien trop gentille. » Un léger sourire sur le visage, tu viens déposer un baiser sur sa joue. Elle était gentille, mais tu n'étais pas une étoile. Elle ne semblait voir que le bon chez toi, mais n'avait-elle pas entendu lorsque tu avais dit que tu avais trompé Nevaeh ? Ce n'était pas quelque chose de bien ça, ça ne faisait pas de toi d'un homme bon. Elle filait alors rapidement, imitant le grand oiseau bleu des Looney Tunes. Tu postais les quelques lettres qui te restaient en main et en en quelques secondes, elle était déjà de retour vers toi, son violon à la main. « Rapide comme l'éclair, plus forte que l'orage et plus délicate que le vent. Y a-t-il une chose que tu n'es pas ? » demandais-tu un fin sourire sur le visage, tandis que vous avanciez, bras dessus, bras dessous, vers le dîner où des délicieux milkshakes vous attendaient.

La main de CJ sur mon ventre, on pourrait presque nous prendre pour un jeune couple. Lui, le père de mon enfant et moi, la jeune mère. Flocon l’appréciait visiblement puisqu’il se mit à bouger alors que le contact de mon ami était maintenu sur mon ventre. « T’as vu, c’est magique ! » Affectueusement, je pose ma main sur celle de mon ami pour la guider plus bas vers mon ventre, en-dessous de la rondeur. Appréciant la caresse, le bébé me donne un coup de pied, ou de bras pour manifester son contentement. « Tu pourrais venir avec moi à la prochaine échographie ? » Je savais Ciàran très occupée et j’entrai dans le sixième mois donc j’allais devoir aller contrôler si ce bébé allait bien. Même si j’étais une mauvaise mère. Il n’était même pas né que j’étais déjà une mère indigne car je n’arrivai pas à me nourrir. Je me savais trop maigre et mes amis étaient trop gentils pour me le faire remarquer. « Je ne veux pas imaginer ce que serait la mienne sans toi à mes côtés. » Je bats doucement des cils avant d’avoir un petit sourire timide. Son baiser sur la joue me fait rougir –une première- et je lui sers mon sourire le plus lumineux. « Je suis réaliste. » Je haussai les épaules à mon tour avant de partir pour déposer le courrier et revenir quelques minutes plus tard. J’éclatai de rire. Qu’est-ce que je n’étais pas ? Mince ? Jolie ? Aimante ? Niaise ? Saine d’esprit ? Je soupire m’accrochant à son bras lorsque je fus pris d’un vertige avant de déglutir. Je m’accrochai un peu plus à mon ami. « Je ne suis pas une bonne mère, murmurai-je alors que mes jambes me lâchèrent brusquement. » La tête me tourne trop vite, la douleur est trop vivace et le bébé affolé se met à bouger un peu trop. Non Flocon, ne me force pas à manger. Par pitié !

Avoir ta main posée sur son ventre et sentir son petit garçon bouger, donner des coups pour te signaler sa présence, c'était quelque chose de dingue. Quelque chose de fou, une sensation que tu n'avais jamais pu connaître avant et qui te plaisait beaucoup. Une nouvelle raison qui te donnait envie d'être papa à ton tour. Mais pour ça, il fallait trouver une femme, une femme avec qui tu aurais une relation stable et durable. Ce qui était la partie la plus compliquée pour toi en ce moment. Tu ne voulais pas penser à tout ça, ce n'était pas à l'ordre du jour. Surtout pas après sa demande. Tu avais envie de dire quelque chose mais tu te retenais. « Je le ferais avec grand plaisir ! » Peut-être qu'elle avait déjà proposé au père et qu'il avait refusé pour on ne sait qu'elle raison et qu'elle ne se sentait pas de l'affronter seule. Puisque tu lui avais dit qu'elle pouvait compter sur toi, tu n'allais pas te défiler maintenant. « Une chose de bien, c'est qu'on a pas à l'imaginer, pas besoin de se torturer l'esprit. » Pas besoin d'essayer de savoir ce qu'était la vie sans elle, puisque tu l'avais connu avant et ça avait été quelque chose de différent. Puis elle était repartie quelque temps mais ce n'était pas pour t'abandonner, elle avait sûrement eu des affaires à régler et elle ne voulait pas parler de tout. C'était son droit, après tout, tu n'avais pas cherché à la contacter pour lui annoncer toutes les mauvaises nouvelles de ta vie. Tu avais juste attendu qu'elle revienne vers toi. « Tu n.. » Tandis que vous avanciez vers le petit dîner, tu sentais Lou s'agripper de plus en plus à toi, comme si elle manquait de tomber à la renverse. « Lou, tout va bien ? » demandais-tu un peu affolé. Sans plus attendre, tu la portais doucement, faisant rapidement les quelques pas qui vous séparez de la porte d'entrée pour rapidement la poser sur une des banquettes rouge fluo. « Tu devrais boire un peu d'eau, peut-être manger quelque chose. » proposais-tu sans savoir qu'elle n'allait pas tarder à refuser ces idées.

Souvent, les femmes enceintes n’aimaient pas qu’on touche leur ventre. Malgré la présence de mes complexes sur mon physique, la main de CJ tout contre mon bébé m’envahit d’une chaleur nouvelle et inconnue. C’était agréable. Et une pensée me vint à l’esprit qui était assez mauvaise. J’aurai aimé qu’il soit le père de mon enfant. Sans doute se serait-il plus impliqué que Ciàran ? Mais malgré le fait que le brun m’ait plu un quart de seconde lorsque nous nous étions rencontrés ; je m’étais résignée. Et j’avais fait quelque chose que je n’avais jamais fait en présence d’un garçon : j’avais été honnête. En omettant des détails de ma vie, comme ma fugue ou encore mon passif d’obèse. Je voulais être pour mon ami tel un sirop, sucré et qu’on apprécie diluer dans l’eau. Je lui souris alors, dévoilant mes dents de devant en le regardant avec mon air de petite fille. Le bébé donne un nouveau coup qui me surprend et me fait presque perdre l’équilibre. « Je crois qu’il t’aime bien ! » J’allais devoir régler la solution des cours de préparation à l’accouchement. Je savais que je ne voudrais de personne dans la salle mais me savoir soutenue, ne serait-ce que par CJ, me fit un bien fou ! « Exact et j’essaierai de faire en sorte que tu n’ais plus besoin de ressentir le manque. Après tout, je reconnais que je suis comme une addiction. Une addiction édulcorée et sucrée. » Avec mes couleurs de cheveux les plus improbables, mes tenues jamais appropriées, mon violon dans ma main. Je passais mon temps à sautiller comme une petite souris. Bien que ma grossesse me causait pas mal de soucis. Mais j’avais conscience de ceux présents dans la vie de mon ami et je ne voulais pas être un poids dans la sienne. Et un poids de taille. Je secoue la tête lorsqu’un vertige similaire à l’autre fois me prit. Celui où j’ai appris que j’étais enceinte. Je m’accroche alors à mon ami, au péril de nos vies (exagération). Il m’attrape alors et je ris doucement. Mais il n’avait plus rien de cristallin, il était juste devenu rauque et douloureux. « Doucement, Superman ! » Lorsqu’il me pose sur la banquette, je passe une main sur mon visage trempée. J’inspire alors posant ma main sur mon ventre, fixant un point devant moi. Avec le départ de Ciàran, je n’arrivai même plus à me souvenir de la dernière fois que j’avais mangé. « D’accord pour un verre d’eau. » Je penche la tête sur le côté en lui souriant, essayant de dissimuler la douleur qui me vrillait les tympans. « Il se pourrait que j’ai un peu minimisé la situation. En fait… » Je sors mon téléphone pour chercher une photo de moi avant. De celle qui était potelée. Une enfant. Je glisse doucement le cliché vers mon ami où l’on me voit accompagné de toute ma famille. Enième rappel que nous n’étions plus désormais. « Je ne mange jamais… enfin pas devant les gens, tentai-je de rattraper, mais je fais très bien la cuisine. Si tu veux, je pourrais te faire des gâteaux… pour m’excuser d’être partie si longtemps et de ne pas avoir été là. » J’attrape délicatement sa main dans la mienne comme si je craignais de la briser sans cesser de sourire, ce dernier s’élargissant un peu plus au fur et à mesure que les minutes passaient.