ruby. - allez viens, on est bien.

J’étais contente d’avoir trouvé un logement. Depuis le temps que je voulais quitter cet hôtel. Avec l’arrivée d’un bébé dans ma vie, c’est comme si j’avais eu une sorte de déclic. Moi qui quelques mois auparavant me jetais du haut d’un pont ; je me surprenais à vouloir vivre. A vouloir avoir cet enfant qui n’a pas été conçu dans l’amour, certes. Mais qui sera aimé de sa maman. Vêtue assez sobrement, je n’avais pris que les animaux pour un début. Je voulais voir la familiarisation entre le dénommé Orson et les petites bêtes qui accompagnaient ma vie. Zéro au bout de la laisse, monsieur moustache et le chat dans la cage. J’avais laissé Edmond à l’hotel car le furet n’était pas très sociable, préférant vivre sur un balcon qu’avec ses copains. Je sonnai donc à la porte pour voir que le quartier semblait agréable. Un grand jeune homme, assez mignon dans son genre, vint m’ouvrir. Un sourire se planta sur mon visage tandis que la mention spéciale trotta dans ma tête : gay. Pas de gêne à avoir avec donc. « Exactement, prénom très approprié pour une rousse, tu ne trouves pas ? salut! » Je pose donc un pied dans l’appartement qui n’est pas trop mal. « Merci. Dis donc, c’est un vrai palace chez toi. Alors… » Mon cavalier king charles assorti à mes cheveux était resté sage tandis que les chats me feraient sans doute la tronche quand je les sortirai. « Je te présente Zéro, mon chien, qui me suit absolument partout donc tu n’auras pas trop à t’en faire. » Puis, j’ouvris l’une des caisses d’où sorti un chat noir assez mince qui fila aussi vite que l’éclair. « ça c’était Le chat. Et enfin, le maestro… » Je défie l’ouverture de la dernière caisse pour en sortir un maine coon roux assez imposant qui se laissa faire comme un gros pépère. « Lui, c’est Monsieur Moustache. Tant que tu lui donnes de la bouffe, ça ira. J’ai laissé mon furet à l’hotel pour le moment, il est assez bougon depuis quelques jours. » J’attendis le feu vert de mon nouveau colocataire pour défaire la laisse de Zéro qui nous fixait tour à tour. Déjà le fait que Le chat se soit barré me mettait mal à l’aise.

Le garçon n’avait pas l’air à l’aise. Lui qui semblait plein d’entrain dans les sms. Un peu froid par contre. Lâcher comme ça qu’on est gay, comme si j’allais le draguer. Je suis enceinte de Scout et dans une sorte de relation avec lui. Alors, je savais que j’étais une quiche mais quand même. « Au fait, tu sais, tu m’as précisé que tu étais gay. C’est bien de s’assumer mais je ne comptais pas de draguer. Déjà j’ai un mec et ensuite, je ne coucherai jamais avec mon colocataire. Trop le bordel. » Puis, alors que je tenais toujours Zéro en laisse, je secouai la tête lorsqu’il me dit qu’il aimait bien les chiens et les chats. Pas de chance, le chat avait disparu sans demander son reste. Je finis par me baisser à son bienvenu pour détacher le chien mais garder Monsieur Moustache dans les bras. On voyait clairement du favoritisme dans mes agissements mais je m’en foutais. Je le suivis alors dans ce qui semblait être un palace pour me contenter de hocher la tête en voyant les lieux. J’éclatais de rire à sa franchise devant son bureau. « Je risquerai de faire appel à toi pour m’aider à répéter mes scènes. » Rien de sexuel bien entendu, c’était dans les clauses de mon contrat. Je ne faisais pas de scènes de sexe. Je finis par entrer dans ma chambre avant de poser l’imposant chat sur le lit. Ce dernier se mit à arpenter le lit avant de se coucher. « Adjugé vendu. Dis-moi, il y a un règlement de colocation pour les trucs de vie. Genre si on ramène quelqu’un à la maison, le fonctionnement du frigo ou c’est osef et wala. »

« oh tu sais pour trainer avec pas mal de personnes homosexuelles, je sais que vous n’êtes pas des gros lourds. Pis je bégayerai pas comme une débile comme ça. » Merci timidité. Après lui avoir présenté l’essentiel de la bande, je le suivis dans l’imposant appartement pour regarder les lieux. C’est magnifique et gigantesque. Il avait du goût, c’est certain. J’éclate de rire à sa remarque. « Prends pas la grosse tête, comme ça tu resteras pas coincé dans les portes. » C’est impressionnant comment tout semble naturel avec ce garçon que je ne connais pas. Quelque chose me disait que j’allais me plaire à vivre avec lui et son franc parler. « Je ne suis pas végane. Ce sont des conneries. Je suis juste végétarienne. Mais ouais, allons-y pour faire les courses ensembles. » je lui fais mon sourire le plus lumineux avant de poser mon sac sur le lit et de m’asseoir. Je suis trop fatiguée en ce moment. Je me retiens de faire les gros yeux devant sa franchise et son langage fleuri. J’ai un petit rire gêné avant de passer une main dans ma nuque. « T’inquiètes, je suis pas mal en tournage aussi. D’ailleurs si tu veux que j’te branche avec mes amis, y’a pas de problème. Et si tu veux te débarrasser d’un « plan cul » trop envahissant : je peux jouer le rôle de la compagne trompée. Généralement, ils détalent aussi vite que bip bip avec le coyote. »»

Je hausse un sourcil avant d’éclater de rire. « Pas du tout. Ça ne m’a pas aidé dans la vie. » surtout avec mon métier d’actrice. J’étais une calamité ambulante. Je me tourne vers mon nouveau colocataire pour lui sourire. Je regarde la chambre laissant mon chien prendre ses marques pour me tourner vers Orson, un œil amusé. Il était marrant ce petit gars. Je sens que j’allais m’attacher à lui dès qu’on ouvrirait la première bouteille de rhum. « Je fais très bien la cuisine. Ma mère était bonne pâtissière et elle m’a cédée son art avant de… bref, je fais des bons gâteaux. » pour dire que j’allais sans doute le faire grossir un peu car il allait disparaitre s’il continuait comme ça. « Bah tu le feras avec le mien. Quoique ça risque pas d’arriver. J’ai dit que j’étais avec quelqu’un mais c’est plus de l’ordre « allons sauter Ruby quand on a que ça à foutre » que du love. » il faut dire que toutes mes relations sentimentales ont été des échecs sur toute la ligne. Je me tourne vers lui pour passer une main dans ma lourde tignasse. « Oh j’ai pas grand-chose. Pis j’ai déjà une voiture. » Je l’attrape par la main pour lui montrer l’Audi R8 qui trône fièrement en face. « mais on peut aller faire du shopping. Pour ça, je ne dis jamais non. » Je lui adresse un clin d’œil avant de lui lancer mes clés de voiture. « Tu conduis !

« je ne bégaie pas sur commande. Et puis, il faut que j’ai de l’attirance sexuelle envers la personne. ou de la gêne. Et ce n’est pas mon cas avec toi. » Je lui fais un sourire en coin, consciente que j’étais sans doute trop à l’aise avec un petit gars que je ne connaissais pas. Je lui sers mon sourire le plus radieux avant de rire. « Elle disait toujours que le meilleur chemin vers le cœur d’un homme passait par son estomac. » Je caresse doucement Zéro qui ne bouge pas et fixe Orson avec son air de petit chien malheureux. C’est fou comme les choses semblaient simplifiées avec lui. « J’ai une vie amoureuse encore plus chaotique que le Mordor lui-même. Les mecs ne veulent pas rester avec une godiche rousse qui bégaie. » Je hausse alors les épaules. « Tant pis, je vais me faire nonne et continuer à faire des gâteaux pour évacuer la frustration en faisant des gâteaux. » Mon esprit dériva un instant vers mes échecs sentimentaux depuis que j’étais à Bowen. Cette ville devait me porter malheur en soi car j’avais eu mon lot de décéptions et ma décision de rester seule était permanente. Il était pas né le prince charmant qui débarquerait sur son fier destrier. « J’aime pas ça non plus. Y’a toujours quelqu’un pour me reconnaitre et je te l’ai dit : je bégaie en cas de malaise. » Je sors mon trousseau de clés pour lui tendre. « J’ai trois voitures. Une vraie passion pour les voitures de luxe et tape-à-l’œil. » Je le regarde sauter partout avant d’avoir un fou rire. « faudra me mettre dehors pour que je dégage mais je te préviens : je suis un chat noir. T’attaches pas à moi. »

« Et tu vas faire quoi ? Jouer à « salut je te présente Ruby » ? » J’éclate de rire. Je commence à lui parler de ma mère, chose encore douloureuse. Elle me manquait horriblement et était celle qui m’avait tout appris. Elle m’avait appris à faire la cuisine, à m’occuper d’une maison, elle m’avait offert Zéro. Ça serait la première fois que je ne rentrerai pas chez moi pour les fêtes et j’en souffre beaucoup. Parce que je n’ai plus de maisons. « Eh bah tu seras servie avec moi. » Je me sens bien avec Orson. Je n’ai pas beaucoup d’amis garçons. Je n’ai pas beaucoup d’amis tout court. Mais je sentais qu’avec lui, j’allais peut-être retrouver le sourire. « En fait… » Je cherche un instant mes mots. « Je suis tombée amoureuse d’un garçon. J’avais déjà eu un copain avant –bisexuel mais plus porté vers les mecs- avant mais lui, c’était spécial. Et il a disparu. Comme ça… » Je claque des doigts avant de sentir les larmes me monter aux yeux. « et j’ai pris le père de mon bébé en remplacement donc je ne peux pas lui en vouloir. Car je pense tout le temps à Alfie –car il s’appelait Alfie- et je pense… j’étais peut-être… » Une larme coula le long de ma joue que j’essuyai aussi sec. « pas assez bien pour lui. » car qui voudrait d’une fille comme moi ? Une handicapée sentimentale trop timide pour dire deux mots à un garçon ? J’ai un petit sourire timide à Orson avant d’éclater de rire. « Et toi tu vas devenir le mien. Juste fais moi juste rire et tout ira pour le mieux. » Je me lève alors pour lui lancer mes clés de voiture. Mon cœur se serre car la dernière personne à avoir conduit l’Audi, c’était Alfie. « Tu vas toutes les conduire et plusieurs fois, t’inquiètes ! » Je lui donne un coup d’épaule avant d’attraper mon ombrelle. « Je t’expliquerai un jour. Autour d’une bonne bouteille ce qui m’ait arrivé mais je suis certaine que tu voudras plus de moi. t’as un truc Orson. Je pense que toi et moi, ça va marcher. Me demande pas pourquoi. »

« La dernière fois qu’on a joué à ce jeu, j’ai fini avec un polichinelle dans le tiroir, dis-je à son intention. » Merci Freja. Je pense qu’elle ne se doutait pas que Scout était un parfait connard. Qu’il m’abandonnerait en apprenant sa paternité. « oh oui tu veux un rainbow cake ? Genre licorne et tout ça ? » Après tout, il était bien du genre à aimer les licornes ou les trucs farfelus. Je lui souris, innocemment. Doucement, il en vient à me caresser la joue et je me sens rougir. Malgré le fait qu’il soit gay. « Et les femmes peuvent être des salopes. » j’éclate de rire à sa remarque. Nous allions très bien nous entendre. Heureusement. Sinon la colocation aurait pu être épineuse. « tout est super génial, dis-je en chantonnant l’hymme du film sur les Lego ». Il m’attrape et me fait tourner dans ses bras. Alors, j’en profite pour lui faire un câlin. Un vrai câlin. Le premier d’une longue série. « Yep, ça va marcher. Parce que nous semblons aussi barrés l’un que l’autre. »