you're back! (alfie)

"you're back!"

Je ne suis pas le genre de fille qui va sortir en boîte chaque soir. Déjà, j'ai passé l'âge, et même quand j'avais 18 ans, je ne sortais pas. Ou très peu. Mais lorsque je découvre un endroit qui me plait, j'aime bien y retourner. Je suis à Bowen depuis 10 ans et ce n'est qu'il y a un an que j'ai découvert le Hendrix. J'en avais entendu parler par ma coiffeuse, qui m'avait parlé de la bonne ambiance des années soixante. J'étais allé la première fois après une grosse journée de travail (lorsque j'ai commencé à travailler pour Lisandro) et j'avais envie de me changer les idées. J'ai bien sympatisé avec le propriétaire, Alfie. J'y suis revenu quelques fois par mois, et à force de discuter avec Alfie, nous sommes devenus amis. Par moment, je me sens un peu pathétique, comme si j'y allais que pour le voir. Et c'est un peu le cas, en fait. Tellement que j'ai arrêté d'y aller lorsqu'il est parti quelques mois hors du pays.

Ce soir, je suis de retour, et comme je m'y attendais, il y est aussi. Il est derrière le bar, je reconnais son sourire et ses cheveux bruns : "Alfie!" Je me demande s'il se souvient au moins de mon nom. Parce que bon, on ne s'est jamais rencontré ailleurs qu'au Hendrix. Peut-être que pour lui, je ne suis qu'une cliente très régulière et sympa. Rien de plus. Ce ne serait quand même pas la première fois que je m'attache à quelqu'un avec qui ce n'est pas réciproque. Tant pis. Je souris tout de même, en attendant sa réponse.

Voilà déjà plus de trois semaines qu'il est rentré à Bowen. Trois semaines qu'il a quitté son Espagne pour retrouver ces terres qui avaient fini par lui devenir familières, et ces personnes auxquelles il avait fini par s'attacher. Hors le Hendrix, ça ne fait à peine qu'une dizaine de jours qu'il l'a récupérer. Un autre patron ayant pris sa place, il a heureusement eu la chance d'avoir Alek, son jeune barman, à ses cotés afin de parler en sa faveur. Il a gagné ce combat sur quelques jours, a retrouvé son endroit favori de la ville avec ses odeurs de bière, sa musique rock et ses nombreuses plaques accrochées au mur. La soirée vient à peine de commencer lorsqu'une personne faisant partie de son ancienne clientèle franchit la lourde porte en bois. Alfie ne la regarde pas tout de suite, occupé à ranger des bouteilles qu'il vient tout juste d'acheter. Mais lorsqu'une voix féminine prononce son prénom, il interrompt son geste et se tourne vers la salle. De l'autre coté du bar se tient une jolie blonde au visage familier qu'il n'a pas oublié. Autrefois, avant de tenir le Hendrix, Alfie avait cette mauvaise habitude d'effacer chaque rencontre éphémère de sa mémoire. Hors cette fois, il ne met pas longtemps avant de remettre un prénom sur celle qui venait si souvent lui tenir compagnie lorsque le bar n'était pas encore très populaire. « Kaya, » lui répond-il pendant qu'un sourire vient lentement étirer ses lèvres. Il dépose la bouteille de whisky sur le bar face à lui et appuie ses paumes contre le bois. « Ça fait plaisir de te revoir, je craignais de ne plus jamais te voir franchir la porte. » Elle fait partie des habitués, de ces rares personnes avec qui il a fini par sympathiser en s'autorisant un verre ou deux pour les accompagner. « Je te sers quelque chose ? Je t'offre le premier, » ajoute-t-il, son sourire grandissant.